Google This is a digital copy of a book thaï was prcscrvod for générations on library shelves before it was carefully scanned by Google as part of a project to make the world's bocks discoverablc online. It has survived long enough for the copyright to expire and the book to enter the public domain. A public domain book is one that was never subject to copyright or whose légal copyright term has expired. Whether a book is in the public domain may vary country to country. Public domain books are our gateways to the past, representing a wealth of history, culture and knowledge that's often difficult to discover. Marks, notations and other maiginalia présent in the original volume will appear in this file - a reminder of this book's long journcy from the publisher to a library and finally to you. Usage guidelines Google is proud to partner with libraries to digitize public domain materials and make them widely accessible. Public domain books belong to the public and we are merely their custodians. Nevertheless, this work is expensive, so in order to keep providing this resource, we hâve taken steps to prcvcnt abuse by commercial parties, including placing technical restrictions on automatcd qucrying. We also ask that you: + Make non-commercial use of the files We designed Google Book Search for use by individuals, and we request that you use thèse files for Personal, non-commercial purposes. + Refrain fivm automated querying Do nol send aulomated queries of any sort to Google's System: If you are conducting research on machine translation, optical character récognition or other areas where access to a laige amount of text is helpful, please contact us. We encourage the use of public domain materials for thèse purposes and may be able to help. + Maintain attributionTht GoogX'S "watermark" you see on each file is essential for informingpcoplcabout this project andhelping them find additional materials through Google Book Search. Please do not remove it. + Keep il légal Whatever your use, remember that you are lesponsible for ensuring that what you are doing is légal. Do not assume that just because we believe a book is in the public domain for users in the United States, that the work is also in the public domain for users in other countries. Whether a book is still in copyright varies from country to country, and we can'l offer guidance on whether any spécifie use of any spécifie book is allowed. Please do not assume that a book's appearance in Google Book Search mcans it can bc used in any manner anywhere in the world. Copyright infringement liabili^ can be quite seveie. About Google Book Search Google's mission is to organize the world's information and to make it universally accessible and useful. Google Book Search helps rcaders discover the world's books while hclping authors and publishers reach new audiences. You can search through the full icxi of ihis book on the web at |http : //books . google . com/| Google A propos de ce livre Ceci est une copie numérique d'un ouvrage conservé depuis des générations dans les rayonnages d'une bibliothèque avant d'être numérisé avec précaution par Google dans le cadre d'un projet visant à permettre aux internautes de découvrir l'ensemble du patrimoine littéraire mondial en ligne. Ce livre étant relativement ancien, il n'est plus protégé par la loi sur les droits d'auteur et appartient à présent au domaine public. L'expression "appartenir au domaine public" signifie que le livre en question n'a jamais été soumis aux droits d'auteur ou que ses droits légaux sont arrivés à expiration. Les conditions requises pour qu'un livre tombe dans le domaine public peuvent varier d'un pays à l'autre. Les livres libres de droit sont autant de liens avec le passé. Ils sont les témoins de la richesse de notre histoire, de notre patrimoine culturel et de la connaissance humaine et sont trop souvent difficilement accessibles au public. Les notes de bas de page et autres annotations en maige du texte présentes dans le volume original sont reprises dans ce fichier, comme un souvenir du long chemin parcouru par l'ouvrage depuis la maison d'édition en passant par la bibliothèque pour finalement se retrouver entre vos mains. Consignes d'utilisation Google est fier de travailler en partenariat avec des bibliothèques à la numérisation des ouvrages apparienani au domaine public cl de les rendre ainsi accessibles à tous. Ces livres sont en effet la propriété de tous et de toutes et nous sommes tout simplement les gardiens de ce patrimoine. Il s'agit toutefois d'un projet coûteux. Par conséquent et en vue de poursuivre la diffusion de ces ressources inépuisables, nous avons pris les dispositions nécessaires afin de prévenir les éventuels abus auxquels pourraient se livrer des sites marchands tiers, notamment en instaurant des contraintes techniques relatives aux requêtes automatisées. Nous vous demandons également de: + Ne pas utiliser les fichiers à des fins commerciales Nous avons conçu le programme Google Recherche de Livres à l'usage des particuliers. Nous vous demandons donc d'utiliser uniquement ces fichiers à des fins personnelles. Ils ne sauraient en effet être employés dans un quelconque but commercial. + Ne pas procéder à des requêtes automatisées N'envoyez aucune requête automatisée quelle qu'elle soit au système Google. Si vous effectuez des recherches concernant les logiciels de traduction, la reconnaissance optique de caractères ou tout autre domaine nécessitant de disposer d'importantes quantités de texte, n'hésitez pas à nous contacter Nous encourageons pour la réalisation de ce type de travaux l'utilisation des ouvrages et documents appartenant au domaine public et serions heureux de vous être utile. + Ne pas supprimer l'attribution Le filigrane Google contenu dans chaque fichier est indispensable pour informer les internautes de notre projet et leur permettre d'accéder à davantage de documents par l'intermédiaire du Programme Google Recherche de Livres. Ne le supprimez en aucun cas. + Rester dans la légalité Quelle que soit l'utilisation que vous comptez faire des fichiers, n'oubliez pas qu'il est de votre responsabilité de veiller à respecter la loi. Si un ouvrage appartient au domaine public américain, n'en déduisez pas pour autant qu'il en va de même dans les autres pays. La durée légale des droits d'auteur d'un livre varie d'un pays à l'autre. Nous ne sommes donc pas en mesure de répertorier les ouvrages dont l'utilisation est autorisée et ceux dont elle ne l'est pas. Ne croyez pas que le simple fait d'afficher un livre sur Google Recherche de Livres signifie que celui-ci peut être utilisé de quelque façon que ce soit dans le monde entier. La condamnation à laquelle vous vous exposeriez en cas de violation des droits d'auteur peut être sévère. A propos du service Google Recherche de Livres En favorisant la recherche et l'accès à un nombre croissant de livres disponibles dans de nombreuses langues, dont le français, Google souhaite contribuer à promouvoir la diversité culturelle grâce à Google Recherche de Livres. En effet, le Programme Google Recherche de Livres permet aux internautes de découvrir le patrimoine littéraire mondial, tout en aidant les auteurs et les éditeurs à élargir leur public. Vous pouvez effectuer des recherches en ligne dans le texte intégral de cet ouvrage à l'adresse fhttp: //books .google. com| I ÏSSS N BIBLIOTHÈQUE SCIENTIFIQUE INTERNATIONALE PUBLIEE SOUS LA. DIRECTION DE M. ÉM. ALGLAVE XLI BIBLIOTHÈQUE SCIENTIFIQUE INTERNATIONALE PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE M. EMILE ALGLAVE Volumes in-8**, reliés en toile anglaise. — Prix ; 6 francs. DERNIERS VOLUMES PARUS James Sully. Les illusions des sens et de l'esprit 6 fr, Charlton Bastian. L^ cerveau comme organe de la pensée chez l*homme et CHEZ LES animaux. 2 vol. avoc 184 figures 12 fr. De Saporta et Marion. L'évolution du règne végétal. Les Cryptogames. 1 vol. avec 85 figures dans le texte 6 fr. O.-N. Rood. Théorie scientifique des couceurs et leurs applications à l'art et à l'industrie. 1 vol. in-8°, avec 130 figures dans le texte et une planche en couleurs 6 fr. De Roberty. La sociologie. 1 vol. in-8" 6 fr. Th.-H. Huxley. L'écrevisse. Introduction à l'étude de la zoologie, avec 82 fig. 1 vol. in-8° 6 fr. Herbert Spencer. Les bases de la- morale évolutionniste. 1 vol. in-8**. 2« édition 6 fr. R. Hartmann. Les peuples de l'Afrique . 1 vol. in-8°, avec 93 figures dans le texte 6 fr. Thurston. Histoire de la machine a vapeur, revue, annotée et augmentée d'une introduction par J. Hirsch. 2 vol., avec 140 figures 'dans le texte, 16 planches tirées à part et nombreux culs-de-lampe 12 fr, A. Bain. La science de l'éducation. 1 vol. in-8% 3" édition 6 fr. N. Joly. L'homme avant les métaux. Avec 150 figures. 3* édition . . 6 fr. Secchi. Les étoiles. 2 vol. in-8°, avec 60 figures dans le texte et 17 planches en noir et en couleurs, tirées hors texte. 2« édition 12 fr. Wurtz. La théorie atomique. 1 volume in-8®, avec une planche hors texte. 3« édition 6 fr. Brucke et Helmholtz. Principes scientifiques des beaux-arts, suivis de L'optique et la peinture. 1 vol. in-8", avec 39 figures. 3* édition . 6 fr. Rosenthal. Les muscles et les nerfs. 1 vol. in-8°, avec 75 figures dans le texte. 2^^ édition 6 fr. VOLUMES SUR LE POINT DE PARAITRE Young. Le soleil. 1 vol. avec nombreuses figures. Alph. de CandoUe. L'origine des plantes cultivées. Semper. Les conditions d'existence des animaux. 2 volumes avec 106 figures et 2 planches hors texte. Cartailhac. La Frange préhistorique d'après les sépultur es. Edm. Perrier. La philosophie zoologique jusqu'à Darwin. De Saporta et Marion. L'évolution du règne végétal. Les Phanérogames, 1 vol., avec nombreuses figures. G. Pouchet. La vie du sang. A. Angot. La météorologie. LE CERVEAU ORGANE DE LA PENSÉE CHEZ L'HOMME ET CHEZ LES ANIMAUX PAR H. CHARLTON BASTIAN Membre de la Société Royale de Londres Professear au Collège de VUniversité de Londres Médecin de l'Hôpital national pour les paralysés et les épileptiques Avec 184 figures dans le texte TOME SECOND L^HOM&IE • • • j .. •'• , • V • •• •• 'm • • « • • •••-*. •«'« •. • • • * * ^ • • • • • • ••- PARIS LIBRAIRIE GERMER BAILLIÈRE ET C'" 108, BOULEVARD SAINT-6E RHAIN, 408 lo coin de la nu lagtefenllle. 1882 Tous droits réservés. ÏÏSS5Î • • • •' • « • . • • • • . ••• • • • LE CERVEAU COMME ORGANE DE LA PENSÉE CHEZ LES ANIMAUX ET CHEZ L*HOMME LIVRE IV LE GERYEAD ET l'iNTELLIGENGE DE L'H0MU£ CHAPITRE XIX DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU HUMAIN PENDANT LA VIE UTÉRINE Dans le grand axe de Vaire germinative claire de Tœuf humain fécondé, apparaît une ligne opaque de tissu jeune, connue sous le nom de corde dorsale. Au-dessus de celle-ci, et tout le long de son étendue, on trouve un sillon primitif, qui est bientôt limité de chaque côté par une lame grandissante de tissu embryonnaire. Ces lames se rapprochent Tune de l'autre, et finissent par se réunir au-dessus du sillon primitif su&-mentionné , de manière à former un tube distinct, fermé à chaque bout. La couche interne de ce tube s'accroît d'épaisseur, de sorte qu'il devient graduellement plus étroit. Elle se différencie bientôt aussi en deux tissus distincts. La plus interne des couches, c'est-à- dire celle qui entoure immédiatement le canal central rétréci, est formée de tissu nerveux embryonnaire ; et c'est d'elle que se déve- loppe l'axe cérébro-spinal. Le diamètre de cet axe nerveux rudimentaire, et creux, n'est point uniforme dans toute son étendue. Même avant que les lames se Chabltom Bastian. — II. 1 3G2228 H - *• -DÉV^I<0ÏÎP12MEWT DU CERVEAU HUMAIIS * . ' " • . '■ • -' * > . • * soient complètement refermées sur le sillon primitifs Textrémitè antérieure du tube embryonnaire se renfle en trois dilatations immédiatement contiguës les unes aux autres ; et c'est du tissu ner- veux de ces renflements, ainsi que de certaines excroissances impor- tantes qui en proviennent, que se développent les diverses parties du cerveau humain. La moelle épinière est formée par la portion du tube qui est située en arrière des trois renflements. Le mode d'origine de ces trois vésicules nerveuses, ainsi que les. premiers changements qui s'y manifestent, sont essentiellement semblables, jusqu'à certaines phases, dans toute la série des Vertébrés. C'est de cette base, commune à tous, que se développent les divers types du Cerveau Vertébré. Notre attention doit donc se borner maintenant à esquisser rapidement la manière dont le Cerveau de l'Homme se développe graduellement, à partir des phases simples qui sont communes à lui et à tous les Vertébrés en général. Pour que l'attention du lecteur puisse se concentrer d'une manière plus effective sur les changements subséquents que subissent ces trois renflements- du tube nerveux primitif, il sera bien d'anticiper un peu, et d'énoncer quelles sont les diverses parties du Cerveau qui se développent gradueUement de cha- cune de ces trois dilatations ou de leurs dérivés. L e renflement postérieur (ou cerveau postérieur) se divise en deux régions^ dont la postérieure se développe subséquemment en formant la moitié posté- rieure du Bulbe; et là, au niveau du quatrième ventricule, la paroi supérieuro du tube s*amincit, jusqu'à ce que toute matière nerveuse disparaisse, et qu'il ne demeure plus qu'une simple membrane (jpie-mère) pour recouvrir l'espace sus-mentionné, qui se continue avec le canal central du tube situé en arrière de lui. La région antérieure de ce renflement correspond à la moitié antérieure du bulbe. De la face dorsale ou des côtés de cette région, naît un segment distinct de l'encéphale futur: le Cervelet (fig. 122, c b). Beaucoup plus tard^ quand les lobes latéraux du Cervelet ont apparu, cette région du Bulbe est croisée en dessous par le Pont de Varole, ou Protubérance annulaire (p). Le renflement moyen (ou cerveau moyen) est la gangue d'où se développent à la partie supérieure les Lobes Optiques ou Tubercules Quadrijumeaux (fig. 122, g), et de la partie inférieure de laquelle se différencient des prolon- gations des colonnes fibreuses de la Moelle et du Bulbe, que l'on connaît sous^ le nom de Pédoncules du Cerveau (r). La cavité dont est creusé ce renflement diminue d'une façon graduelle, jusqu'à ce que, chez l'Homme, il ne persiste plus qu'un étroit passage {b) faisant communiquer les cavités du cerveau pos- térieur et du cerveau antérieur (Quatrième et Troisième Ventricule). On donne à ce passage le nom d'Aqueduc de Sylvius, Le renflement antérieur (ou cerveau antérieur) subit des modifications remarquables, surtout à cause de certaines excroissances extraordinaires aux- quelles il donne naissance. Des côtés de ce renflement se développent d'autres portions des Pédoncules Cérébraux; et aussi les Couches Optiques qui reposent sur eux, et naissent sous forme d'épaississement ganglionnaire de ces parties. La cavité, diminuée, du renflement, persiste pour constituer plus tard le Troi- PENDANT LA VIE UTÉRINE. 3 sîème Ventricule. Son toit 8*amincit graduellement jusqu'à ce qu'il ne reste plus qu'une simple membrane — Vélum IrUerpositum (ou Toile Choroïdienne) ; au bord supérieur et postérieur de ce ventricule apparaît la Glande Pinéale (p l,) tandis que son plancher se prolonge en formant VInfundibulum qui entre plus tard en connexion avec la Glande ou Corps Pituitaire (p t). Mais de très bonne heure, et avant qu'on ne puisse distinguer les parties ci-dessus décrites, une saillie (c r) bourgeonne de chaque côté du renflement antérieur. Ces excroissances, qui sont d'abord dirigées en bas et en avant^ Fia. 122. — Diagrammes montrant les changements progressifs qui ont liea durant les premières phases du développement du Cerveau (Mivart). 1. — Premier état du Cerveau, lorsqu'il consiste en trois vésicules creuses (abc) dont la ca- vité est continue avec la large cavité (d) de la Moelle Épinière primitive (m). 2. — Ici, la première vésicule, ou cerveau antérieur, a développé la Glande Pinéale (pi) en dessus, et le Corps Pituitaire {pt) en dessous. La paroi de l'extrémité antérieure de la première vésicule est la future lame terminale (/) . 3. — Cette figure montre le Cerveau (cr) bourgeonnant de la première vésicule ; sa partie antérieure (o), se prolongeant en Lobe Olfactif; la cavité du Cerveau (le ventricule laté- ral commençant) communiquant avec celle du Lobe Olfactif, en avant et avec celle de la première vésicule cérébrale en arrière (cette dernière persistant comme le troisième ventricule îutMT). Cette dernière communication est établie par le trou de Monro, Les parois des trois vésicules primitives deviennent d'épaisseur inégale ; et la cavité (6) de la vésicule moyenne est relativement diminuée. 4. — Ici le Cerveau a grossi ; et l'inégalité d'épaisseur des parois des vésicules primi- tives est encore accrue. Ceci paraît distinctement par le développement plus grand du Cervelet {cb)y de la Protubérance {p) et des Tubercules Quadrijumeaux (7). 5. — Cette figure montre le Cerveau encore plus grossi, et contenant une cavité tri-radiée {l, 1, 2, 3). La partie destinée à former le Trigone (f) qui, sur le n» 4, était en dessus, regarde maintenant un peu en bas; et des prolongements qui en partent com- mencent à s'étendre vers les tubercules mamillaires (ma), v correspond à la situation de la toile choroïdienne. sont creuses ; et chacune d'elles communique avec le troisième ventricule par une ouverture connue sous le nom de Trou de Monro. Plus tard, ces excrois- 4 DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU HUMAIN sances subissent un développement énorme, et constituent les deux Hémitphè- res Cérébraux; tandis que les cavités qui y sont renfermées persistent sous le nom de Ventricules Latéraux, et que les Corps Striés se développent à leur in- térieur. De chaque hémisphère embryonnaire se développe antérieurement une sorte de bourgeon creux (o), qui constitue le Lobe Olfactif et son pédoncule. Ainsi donc, au point de vue de son histoire embryogénique, Tencéphale entier peut se diviser en trois parties principales : 1^ le cerveau ANTéRiEOR, composé des Lobes Olfactifs, des Hémisphères Cérébraux, et des parties qui en- tourent le Troisième Ventricule ; 2^ le cerveau moyen, composé des Tubercules Quadrijumeaux et des Pédoncules Cérébraux ; 3*> le cerveau postérieur, composé T Mm^ Fio. 123. Esquisses des formes premières des parties de l'axe cérébro-spioal dans l'em- bryon humain (Sharpey, d'après Tiedemann). A, vue latérale à la septième semaine; 1, moelle; », bulbe; 3, cervelet; 4, mésencéphale ; 5, 6, 7, cerveau. B, vue postérieure à la neuvième semaine; 1, bulbe ; 2, cervelet; 3, mésencéphale; 4, 5, couches optiques et hémisphères cérébraux. C et D, vues latérale et postérieure du cerveau de l'embryon humain, tel qu'il paraît à la douzième semaine de la vie intra-utérine; a, cerveau, b, tubercules quadrijumeaux; c, cervelet; d, bulbe; les couches optiques sont maintenant recouvertes par les hémi- sphères agrandis. B, vue postérieure du même cerveau, disséqué pour montrer les parties profondes. 1, bulbe; 2, cervelet; 3, tubercules quadrijumeaux; 4, couches optiques; 5, hémi- sphères, rejetés survies côtés; 6, le corps strié, enfoui dans Thémisphère; 7, commen- cement du corps calleux. F, face interne de la moitié droite du même cerveau, séparée par une coupe médiane ver- ticale^ et montrant la cavité centrale ou ventriculaire ; 1, 2, moelle et bulbe, encore creux; 3, courbure où. se forme la protubérance; 4, cervelet; 5, lame (pédoncules cérébelleux supérieurs) se continuant en dessus avec les tubercules quadrijumeaux ; 6, pédoncules cérébraux ; 7, tubercules quadrijumeaux, encore creux ; 8, troisième ventricule; 9, infundibulum ; 10, couche optique, maintenant solide ; 11, nerf optique; 12, ouverture conduisant dans le ventricule latéral; 13, corps calleux, commençant à paraître. de Cervelet, du Pont de Varole et du Bulbe. Ces parties principales peuvent elles-même se subdiviser : le Cerveau Antérieur en trois segments distincts : PENDANT LA VIE UTÉRINE. 5 (a) Olfactif, (h) des Hémisphères, (c) des Couches optiques ; et le Cerveau Posté- rieur en deux segments (a) Cérébelleux et (b) Bulbaire. Le Cerveau Moyen ne présente pas d'autre division. Cette classification, donnée il y a quelques années par Huxley, a le mérite de la simplicité, si on la compare à d*autres nomenclatures gênantes, aujourd'hui en vogue *. Dans la fig. 122, les commencements de ces six segments principaux de l'encéphale sont très clairement indiqués, par les parties qui portent les let- tres : 0, cr, a, h, c, m. Après cet exposé préliminaire, nous pouvons donner une des- cription plus détaillée des changements subis par le tube nerveux primitif et ses renflements céphaliques, pour donner aji lecteur quelques notions sur Vordre dans lequel apparaissent ces divers changements, et l'époque à laquelle ils se produisent. A une phase très précoce du développement, que Tiedemann Fio. 124. — Coupe verticale du cerveau d'un embryon humain âgé do quatorze semaines, grossi trois fois (Sharpey, d'après Reichert); c, hémisphère cérébral ; c c, corps cal- leux, commençant à passer en arrière ; f, trou de Monro ; p, membrane sur le tros- sième ventricule et glande pinéale; t h, couche optique; 3, troisième ventricule; I, bulbe olfactif; e q, tubercules quadrijumeaux ; e r, pédoncules du cerveau, et au-des- sus d'eux V aqueduc de Sylvius encore large; e', cervelet, et au-dessous de lui le qua- trième ventricule ; p v, pont de Varole ; m, moelle allongée. croyait être vers la septième semaine, Taxe ou tube nerveux primitif subit une série de courbures (fig. 123, A). Le renflement postérieur se recourbe sur lui-même, de façon que ses deux régions (2 3) sont presqu'à angle droit, tandis qu'en avant, à partir de là, les diverses parties décrivent une courbe {li 5 6) dirigée en avant et en bas. Ce tube recourbé subit graduellement des modifications diverses, dues à Tamincissement progressif de ses parois en certains points, et à des épaississements locaux (dus à la production et au déve- loppement de nouvelle matière nerveuse) dans d'autres endroits. Ces dernières régions d'épaississement correspondent aux futurs centres ganglionnaires qui se développent graduellement dans les régions déjà indiquées; en produisant le Cervelet, la Protubérance , les Tubercules Quadrijumeaux, les Pédoncules du Cerveau, les i . Voyez Gegenbaur, Éléments d'Ânatomie comparéCy traduction Vogt. « DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU HUMAIN Couches Optiques, les Hémisphères Cérébraux avec les Corps Striés qu'ils renferment, et diverset commissures. De la T à la9' semaine, le rendement moyen, ou vésicule moyenne ;Mésencépha]e) représentant les futurs Tubercules Ouadrijumeaux, est le segment le plus proéminent de l'encéphale. Le Cervelet, même à cette dernière date, n'est représenté que par une mince lamelle croisant la face dorsale de la partie supérieure (lu Bulbe, tandis que les Hémisphères Cérébraux futurs ne sont encore que des ampoules oblongues fig. 122, 3), se projetant en bas et en avant du rcn- I flement antérieur dont elles tirent leur origine. De la partie inférieure de ce même renflement [Tha- lamencéphale) se projette Vinfundibulum qui, soit à ce moment là, soit plus tard, entre en connexion avec le Corps Pituitaire, organedont la nature réelle et l'origine sont encore enveloppées de beaucoup d'obscurité. A partir également de la 8' semaine environ, le Thalamencéphale est tellement aminci en dessus [fig. 122, v], que ie troisième ventricule n'est plus recouvert que par une membrane, le vélum interposiliim ou loîle ckoroîdienne. Au bord supérieur et postérieur de ce ventricule, apparaît bientôt la C{((TUJ«Ptrt^(ife; ainsi que se&pédtmc^es, qui s'étendent en avant de chaque côté. Vers la 12" semaine de la vie intra-utérine, la configuration del'Encéphaleasubi un changement très marqué; d'abord à raison de l'accroissement Fia. 1Î5. — carveau ^e ïolume du Cervelet (fig. 123 C. c),qui est main- Btinociiod-uD Fœ- tenant plus épais et marqué d'un sillon longitu- iasàe quatre mois, ^jnai médian, bien que d'autre part sa surface (Shatper, d'après ^^^^ lisse; et en second lieu par le développement Koiiiker), A, hémi- encore plus frappant des Hémisphères Cérébraux aphèresciiéhraui; if^ g\ gyj q^j j^jj^ gp,) ^^ arrière au point de drijumeaui; c,cer- recouvFir Complètement le troisième ventrtctue vei.'t; m o, moeUe (fig. 123, F. 8). Sur la surfacc inférieure de chaque «ième^^'entrru'î" hémisphère, un Lobe Olfactif est maintenant très étant rMonïBrt par distinct, BOUS forme d'un bourgeon creux, dont la la cetreiat; i, i, cavltése continueavec celle de l'Hémisphère dont tal enQrâba're"dê " ^ dl^tache. Ja maaiia. Lcs venlricides latéraux eux-mêmes sont en outre continus avec la cavité du Thalamencépkale, ou troisième t'entn'cuic, par une ouverture située de chaque côté de son extrémité antérieure, et connue sous le nom de trou de Monro. Près de cette ouverture, commence à paraître (au-dessus et en avant) PENDANT LA VIE UTÉRINE. T une bande transversale qui relie les deux Hémisphères, et que l'on pense correspondre au rudiment de la grande commissure transver- sale, te corps calleux, et peut-être aussi à la commissure antérieure. A cette période, les parois des Hémisphères Cérébraux sont très minces el en forme de sac ; de sorte que chacun renferme un très grand ventrictUe latéral, dans lequel on peut voir un Corps Strié rudimentaire, sous forme d'un épaissi ssement de sa paroi inférieure et externe. C'est ainsi que ces corps arrivent à occuper leur position bien connue, en avant et un peu en dehors des Couches Optiques, Pendant cette même période, le renflement moyen ou Mésencé- phale ne s'est point du tout accru d'une manière proportionnelle ; de sorte qu'il a maintenant un volume relatif beaucoup moindre (iîg. I2k, c q). On y peut toutefois remarquer l'apparition d'un léger sillon longitudinal; et son bord postérieur touche le Cervelet (c'). (Owen). Vu8 latérale, avec le caiTeau (P) liri eo hant et ea MMt, pi luberculSB quadri jumeaux (o o) et le cervelet bilobd (c c). Ses parois supérieures sont relativement minces; formant le toit d'une cavité proportionnellement grande, située entre le troisième et le quatrième ventricule; bien que cette cavité diminue plus tard, et se réduise à un simple passage entre les deux ventricules. Le Bulbe, relativement gros, conserve sa courbure primitive. Sa moitié supérieure est recouverte par le Cervelet; tandis qu'à la par- tie dorsale de sa moitié inférieure se trouve le qualrièmeventricule, largement ouvert, et dont la partie inférieure se continue avec le canal central de la partie restante du lobe primitif, qui se développe maintenant en Moelle Épinière. Vers LA FIN DU i" mois, les principaux changements additionnels que l'on a notés sont les suivants. Les Hémisphères Cérébraux devien- nent encore plus gros, et tendent de plus en plus à éclipser les autres parties. Ils s'étendent déjà en arrière au-dessus des futurs Tubercules Quadrijumeaux [fig. 126], On peut voir sur leur surface 8 DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU HUMAIN externe une scissure de Sylvius rudJmentaire ; et, de ce sillon large et profond, partent un certain nombre de scissures peu profondes, qui ont été décrites par Gratiolet et d'autres auteurs (et qui corres- pondent avec des proéminences internes sur les parois des ventri- cules latéraux). Quelques observateurs croient ces apparences arti- ficielles; mais qu'elles soient artiflcielles ou naturelles, tout le monde est d'accord qu'elles disparaissent au bout d'un certain temps, lors- que les parois des ventricules laiéraiix deviennent plus épaisses. C'est alors que les scissures et les circonvolutions permanentes commencent à se développer sur la surface externe des Hémi- sphères Cérébraux. Fio, laî. — Surrs A cette période aussi les Corps Striés sont distinctement plus gros; et près de leurs extrémités antérieures, on reconnaît un Corps Calleux court et presque vertical (pas très différent de ce qui existe chez les Marsupiaux). La Commissure Antérieure est grêle, mais dis- tincte. La Commissure Molle ou Moyenne existe sous forme d'une grosse saillie arrondie, partant de la face interne de chacune des Couches Optiques; bien que les deux saillies ne soient pas encore arrivées à se toucher de manière à formerune véritable commissure. PENDANT LA VIE UTÉRINE. 9 La cavité dont sont creusés les Lobes Optiques est encore plus grande qu'auparavant. Les lobes latéraux du Cervelet se sont no- tablement développés; tandis qu'ils sont séparés l'un de l'autre (fig. 126, c) par une dépression médiane, — indiquant l'absence pres- que complète, à cette période, du lobe médian. En examinant là base du Cerveau, on trouve le Bulbe gros. Les pyramides antérieures et les rudiments des olives^ en dehors d'elles, sont très distinctement reconnaissables. Une bande mince, marquée d'un sillon médian, s'étend en travers, entre les lobes latéraux du Cervelet. C'est la première trace du pont de Varole. En avant de lui sont les Pédoncules Cérébraux : entre ces derniers sont le corpus albicans (tubercule mamillaire) et le tuber cinereum;et, en avant de Fio. 129. — Surface supérieure du cerveau fœtal à six mois (Sharpe7,;d'après R.Wagner). Mêmes ÏQdicatioDS que pour la figure 128. ce dernier, la commissure des nerfs optiques. Tous les autres nerfs cérébraux sont distinctement reconnaissables; bien qu'à cette pé- riode ils soient excessivement grêles. Après cette époque, le développement du Cerveau se poursuit, d'après Gratiolet, avec la plus surprenante rapidité. Vers la fin du 5' MOIS, l'accroissement des Hémisphères Cérébraux a été si consi- dérable, qu'ils couvrent complètement, non seulement les Tubercules Quadrijumeaux, mais aussi le Cervelet, maintenant plus gros. La scissure de Sylviu^s est large et ouverte (fig. 128), de manière à laisser à découvert le lobe central ou insula de ReiL Le commencement du sillon de Rolando est parfois reconnaissable à cette période; et l'on peut suivre les rudiments de circonvolutions sur les lobes fron- taux et d'autres parties. Les parois des Hémisphères et des Lobes Optiques ont acquis une épaisseur beaucoup plus grande; etlesprin- 40 DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU HUMAIN cipales commissures sont pour la plupart arrivées à leur condition typique. C'est plus spécialement le cas pour le Corps Calleux et le Trigone, entre lesquels le cinquième ventricule a commencé à paraître. Les deux moitiés de la Commissure Moyenne se sont également réunies. Pendant cette même période, le Cervelet a subi des changements importants. A partir de la fin du quatrième mois, le développement de ses lobes latéraux a lieu avec plus de lenteur; et le lobe médian, absent jusque-là, non seulement commence à paraître, mais présente aussi sur sa surface trois ou quatre plis transversaux. Les lobes laté- raux sont encore parfaitement lisses, — bien que, vers la fin du sixième mois, ils soient également marqués de nombreuses scissures trans- versales. La Protubérance, comme on Ta déjà signalé, subit un •développement corrélatif à celui des lobes latéraux du Cervelet. Dans la dernière et importante période de la vie intra-utérine, DU 6* A LA FIN DU 9* MOis,les changements qui se manifestent dans le Cerveau sont beaucoup plus marqués que ceux qui se produisent dans le Cervelet. Les parois des Hémisphères Cérébraux deviennent plus épaisses; et il y a diminution proportionnée de la capacité des ventricules latéraux, dont les trois cornes deviennent maintenant tout à fait distinctes. Le Corps Calleux prend une direction plus horizontale, et s'accroît à la fois en épaisseur et en longueur. Il s'étend en arrière jusqu'au niveau des Lobes Optiques, qui sont maintenant marqués d'un sillon transversal, et paraissent ainsi comme de vrais tubercules quadri jumeaux. Les lobes occipitaux du cerveau se développent davantage. Le profil général des Hémisphères, vus en dessus, est celui d'un ovale allongé. Pendant le 6' mois, se produit un développement surprenant de scissures et de circonvolutions ; de sorte que, vers les premiers temps du septième mois, on peut suivre distinctement les principales d'entre elles. Celles qui se manifestent les premières sur la surface externe, sont la scissure de Sylvius et le sillon de Rolande. Ce der- nier esta peine distinct jusqu'à la fin du sixième mois; mais, un peu avant cette période, d'après Ecker, deux autres scissures apparais- sent sur la face interne des Hémisphères: la, perpendiculaire interne (fig. 130 P'), marquant la limite antérieure du lobe occipital, et la scissure calcarine qu'elle rencontre en bas. Cette dernière estgénér- ralement regardée comme une extension postérieure de la scissure de V Hippocampe, qui apparaît à peu près à la même époque, et qui €xiste constamment, même chez les Vertébrés inférieurs, sur la face interne du cerveau. Gratiolet croit même que cette dernière scissure est la première qui paraisse sur la face interne des Hémi- sphères. Un peu plus tard, on peut distinguer la scissure parallèle du lobe temporal; et, comme on l'a déjà dit, vers le commencement PENDANT LA VIE UTÉRINE. 11 du T mois, les autres priacipales scissures du cerveau ont fait leur apparition. Ecker a sans doute raison de penser que l'époque prèciseàlaquelle paraissent les principales scissures, est, ainsi que leur ordre d'appa- rition, sujett* à quelques variations chez les différents individus Ainsi qu'Huxley, il estime qu'aucune preuve ne démontre que les scissures du cerveau d'un Chimpanzé ou d'un Orang n'apparaissent point dans le même ordre essentiel que chez l'enfant; malgré l'opi- nion exprimée par Gratiolet qu'il existe sous ce rapport de légères différences. A l'époque de la naissance, le développement des circonvolutions F,H, 130. — VuB ie U tu» interna aa la moitié droite du cerroan foetal, 1 six moii envi- ron [Sharpey, d'iprfti Heioherl). F, lobs frontal ; P, lobe pariétal ; O, bbe occipital i T, lobe lamponl; I, bulbe olfaclif; 11, nerf options droit; fp, sciature callom-nuit- calleui (gyria famicalaë); e e, corps calleui; t, uplmn luridam; f, la letln est pl»- cÉo tntre la commiiiurB moyenno et le liou da Monio i n sst i U partie lupirieui-B du troiiième lentricule. immédiatement an-dasani dn iwfum inlerpoiltam et du trigona. u', dam U partie poBtÉrisnto du troisième ventricule, au-dessous da U glande piniale, et en avant de l'euttéc de l'aqueduc de S;lviut; ti", dans la partie inféTieure du iroiiième ventricule, au-dessus do rintundlbulum ; r, proetaui plmatit. te délachant en artiira de la toile choroldienna; p v pont doVarole; c *, cervelet. est si complet chez l'Enfant, qu'elles ne diffèrent de celles de l'aduhe qu'en ce qu'elles présentent un peu moins de complications pour les détails de moindre importance. Toutefois, tandis que les circonvolutions atteignent ce haut degré de complexité, il se produit quelques changements importants dans le développement relatif des divers lobes du cerveau. Au 7* mois, le lobe pariétal est remarquablement petit', et, apparemment, en con- I. Voyei Gratiolet, Anatomte comparée du Système Nerveux, PI. XXXI, flg.l. 12 DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU HUMAIN séquence de cela, le sillon de Rolando est courbé presqu^à angle droit, exactement comme dans le cerveau de TOrang adulte, et à un degré moindre dans celui du Chimpanzé. A cette même époque, le lobe frontal est gros, ainsi que le lobe temporal; bien que les cir- convolutions de ce dernier ne soient encore que bien imparfaite- ment marquées. La longueur du lobe temporal et l'étendue du pro- longement postérieur de la scissure de Sylvius sont aussi des traits remarquables du cerveau fœtal. Nous avons déjà eu à signaler ces caractères dans le cerveau de beaucoup de Quadrumanes, et nous au- rons encore l'occasion de parler de ces mêmes particularités, comme existant chez les cerveaux humains adultes d'un type peu élevé. A l'époque de la naissance, le 'développement plus complet du lobe pariétal a diminué de beaucoup la courbure du sillon de Rolando. Le contour du cerveau, vu en dessus, est encore un ovale allongé, bien qu'il soit distinctement plus large, dans les régions frontale et pariétale, que chez le fœtus de sept mois représenté par Gratiolet; et ce contour s'accorde presque exactement avec celui du cerveau de la femme Boschimane adulte, qui a été publié par Marshall (fig. 135). D'après S, van der Kolk et Vrolik, il semble que, par leur pro- portion relative, les lobes cérébraux d'un Enfant nouveau-né tiennent juste le milieu entre ceux du Chimpanzé et ceux de l'Homme adulte. Mais, chez l'Orang adulte, il existe la même proportion entre les lobes cérébraux que chez l'Enfant nouveau-né; de sorte que, sous ce rapport comme sous plusieurs autres, le cerveau de l'Orang semble avoir subi une évolution plus parfaite que celui du Chimpanzé. Le Cervelet est relativement petit chez l'Enfant nouveau-né. Son poids proportionnel, comparé à celui du Cerveau à la même époque, est moindre que chez aucun des grands Anthropomorphes. Ceci, toutefois, n'est point dû à une diminution dans le développement du Cervelet ; mais plutôt à ce que, chez THomme, l'accroissement total du volume du Cerveau est beaucoup plus considérable que celui du Cervelet ; et à ce que cet accroissement plus considérable est déjà, à l'époque de la naissance, plus manifeste dans le Cerveau que dans le Cervelet. Ce fait a été également établi par les anato- mistes hollandais, puisqu'ils ont trouvé que le poids du Cerveau chez le nouveau-né est, au poids du Cerveau, chez l'adulte, comme 96 : 157; tandis le poids du Cervelet du nouveau-né est au poids du Cervelet de l'Homme adulte comme 22 : 50. La proportion réelle du poids du Cervelet à celui du Cerveau, chez le nouveau-né, varie d'après Chaussier de 1 : 13 à 1 : 26; et Cruvelhier s'est assuré qu'il est de 1 : 20. D'autre part, d'après Sharpey, le rapport du poids du Cervelet à celui du Cerveau est, chez l'Homme adulte, 1 : 8 J- et chez la Femme adulte 1:8^. PENDANT LA VIE UTÉRINE. 13 On peut voir, d'après ces chiffres, combien le développement du Cervelet est resté en arrière de celui du Cerveau, chez l'Enfant, à l'époque de la naissance. Quant aux caractères microscopiques du Cerveau fœtal, une seule indication brève, mais importante, mérite d'être rapportée ici. D'après Lockhart Clarke* : a Dans le cerveau fœtal des Mammi- fères et de l'Homme, la structure (des circonvolutions cérébrales) consiste au début en un réseau nucléé ininterrompu. A mesure que le développement avance, on peut distinguer des couches séparées. » Mais, même dans ces couches, on ne peut reconnaître « que des noyaux arrondis reliés par un réseau de fibres » ou, dans d'autres parties, des groupes de noyaux plus allongés, au lieu des cellules nerveuses distinctes, mais de formes différentes, réunies entre elles par leurs prolongements, que l'on décrira dans un chapitre ultérieur comme les constituants principaux et caractéristiques des circon- volutions cérébrales, à leur état de développement complet. i. Notes of Researches on the Intimate Structure of the Brain — Proceed. of the Royal Society, 1863, p. 721. CHAPITRE XX VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN Le volume et le poids du Cerveali humain peuvent être estimés de deux manières, dont Tune peut être appelée directe et l'autre indirecte. Nous pouvons assurément mesurer et peser l'organe lorsqu'il est accessible ; et une grande somme de travail a été dépensée dans cette direction, principalement par des observateurs anglais, sur des indi- vidus d'âge, de sexe et de conditions différents. Mais lorsque l'anatomiste ne possède que les crânes des repré- sentants d'anciens peuples, ou de nations étrangères, ou de tribus sauvages, il doit, pour acquérir des notions définies sur le volume et le poids des organes que ces crânes ont renfermés, adopter une méthode uniforme et soigneusement étudiée pour s'assurer de leur capacité exacte. Des chiffres de capacité crânienne ainsi obtenus, on pourra, lorsque certaines autres données seront connues, déduire avec une certaine exactitude le poids probable du Cerveau corres- • pondant. Cette dernière manière indirecte de procéder est justifiable, et capable de donner des résultats dignes de foi ; car, à l'état de santé,, le Cerveau humain remplit invariablement le crâne auquel il appar- tient, sauf l'intervention de quelques enveloppes membraneuses minces, avec des vaisseaux et des espaces sanguins, — dont on peut finalement tenir compte. Il reste encore toutefois beaucoup à faire, avant que l'on puisse déterminer d'une façon exacte à combien s'élève le total des déductions à opérer, et l'étendue dans laquelle il varie avec l'âge, le sexe et la race; et l'on peut en dire autant des diffé- rences de capacité des ventricules latéraux, puisque les variations en plus ou en moins de la capacité normale peuvent parfois intervenir comme cause d'erreur dans une estimation indirecte du poids du Cerveau. Ainsi donc, bien qu'il soit vrai qu'il existe toujours cer- taines relations entre la capacité crânienne et le poids du Cerveau, on ne saurait dire qu'elles aient encore été déterminées autrement que d'une manière préliminaire. D'après la règle générale posée par CAPACITÉ CRANIËNiNE. i& le docteur Baroard Davis, en déduisaot environ 15 p. % de la capa- cité du crine, on obtient le volume du Cerveau; et l'on peut, par le calcul, en déduire son poids'. Les deux méthodes, direcle et indirecte, sont de grande utilité; et les investigateurs expérimentés peuvent avoir recours à l'une ou à l'autre, suivant qu'ils ont à examiner des Crânes ou des Cerveaux. Chaque méthode offre certains avantages ; mais, somme toute, on peut dire que, si les Cerveaux étaient toujours accessibles, on entendrait probablement moins parler des capacités crâniennes. La méthode indirecte semble bien calculée pour donner des moyennes de race. ou poids le plus ordinaire, lorsqu'on mesure avec soin un nombre suffisant de crânes, par une méthode capable de donner des résul- tats uniformes et corrects. II ne faut toutefois jamais oublier que le volume du Crftne, et avec lui le poids du Cerveau, varie dans de certaines limites suivant la stature de l'individu; de manière que l'accroissement de stature est accompagné d'une augmentation de poids du Cerveau, bien que cette augmentation marche d'autant moins vite que la stature s'ac- croît davantage. Ceci est appuyé sur l'autorité de Marshall', qui a aussi calculé, d'après des tables colossales fournies par Boyd (et d'après des notes à lui), que, pour les Anglais, une variation de 7 pouces dans la taille est accompagnéed'une variation de 2 onces 75 dans le poids du Cerveau chez les Hommes; tandis que, chez les Femmes, une variation de 6 pouces dans la taille n'en donne qu'une de 1 once 25 dans le poids du Cerveau. Ainsi donc, lorsqu'on com- 1. Voyeï ! On the Weight of tht Brain in Ike différent racts of Man — Pkitosoph. Trana., 1S6S, p. £06 et 526. 2. Procted. o[ tht Boy. Soc, 1S75, vo!. XXIII, p. 564. 16 VOLUME ET POIDS DU CEflVEAD BGHAIN. pare le poids du Cerveau chez des individus de stature différente, en vue de reconnaître l'influence d'autres conditions sur le poids de cet organe, il faut toujours avoir présent à l'esprit que la différence de stature est elle-même une cause puissaate de différences, avec laquelle i! faut compter tout d'abord. On peut établir ici, en termes générauï, qu'un peu moins de j du poids total d'un Cerveau représentera cbez les Hommes le poids du Cervelet. Pour les Femmes toutefois, le poids relatif du Cervelet est plutôt plus grand (1 : 8 i) ce qui est dû à une réduction proportion- nelle, chez elles, du volume du Cerveau. CAPACITÉS CHANIBNNES On ne peut connaître la capacité crânienne moyenne d'une race qnelconque que par l'examen d'une nombreuse série de Crânes de cette race, assortis d'après le sexe. L'importance de ce dernier point est grande; car, ainsi que le signale Flower, la différence de sexe, dans son Influence sur la capacité du Crâne, est décidément plus grande que la dlfTérence de race. Les manières d'estimer la capacité crânienne ont tellement varié à diverses époques et suivant les différents observateurs, qu'il est par- fols difficile et peu sûr de comparer entre eux les résultats obtenus. Il serait fort important qu'une méthode internationale fût univer- sellement adoptée par les travailleurs des divers pays. Nous pour- rions alors, au bout d'un certain temps, avoir des résultats stricte- ment comparables les uns aux autres*. 1. Voyei Flower, in : Brît. Médit, /tiurn.,12 avril lR79,p.5*0, et un autre mémoire du tatme anteur, Mtthods and Betulta of Mtaturement ofCapacily of Cranta, in Bep. o( Brit. Auoc. pour 1878. CAPACITÉ CRANIENNE. 17 Vogt*, donne une table de capacités crâniennes, fournies par divers observateurs, dont les données les plus intéressantes proviennent des recherches de Broca sur un grand nombre de Crânes provenant de certains cimetières de Paris, dont, pour diverses raisons, on avait à déranger les sépultures. 11 dit : « Broca profita de l'occasion fort rare d'examiner un certain nombre de crânes trouvés à Paris (en posant les fondations du nouveau Tribunal de commerce), dans un caveau situé à trois mètres de profondeur, en un point déjà couvert de maisons à l'époque de Philippe-Auguste. Les crânes doivent donc dater au moins du m® siècle, et beaucoup d'entre eux, peut-être, de la période carlovingienne. Ils appartenaient certainement à des individus de haut rang, puisqu'on les trouva dans des caveaux fermés. » La capacité moyenne de 115 de ces Crânes du xii® siècle fut trouvée de 1425,98 centimètres cubes. Une autre série de Crânes provenait du cimetière de l'Ouest, qui fut affecté à cet usage de 1788 à 1824. De ceux-ci, qu'on peut appeler Crânes du xix« siècle, 125 furent examinés et donnèrent une capacité de 1461,53 centimètres cubes. 11 n'est donc pas sans intérêt de remarquer que, dans le cours de sept siècles de civilisation progressive, la moyenne du Crâne Pari- sien semble avoir distinctement augmenté de capacité. C'est en outre, comme le signale Vogt, un fait remarquable « que la différence entre les sexes au point de vue delà capacité crânienne augmente avec le développement de la race, de sorte que l'Euro- péen est de beaucoup plus au-dessus de l'Européenne que le Nègre ne l'est de la Négresse. » Le Bon a aussi récemment établi* que la différence qui existe entre la capacité moyenne des Crânes d'Homme et de Femme, chez les Parisiens modernes, est près du double de celle qui existe entre les Crânes d'Hommes et de Femmes de l'ancienne Egypte. Ceci doit être regardé comme une autre preuve intéressante que les effets de la civilisation conduisent à un accroissement de déve- loppement du Cerveau ; car, ainsi que le remarque Vogt : « Moins l'état de culture est élevé, plus les occupations des deux sexes sont semblables. Chez les Australiens, les Boschimans et autres races infé- rieures ne possédant pas d'habitations fixes, la femme partage tous les travaux de son époux et a en outre les soins de la famille. La sphère d'occupation est 1. Lectures on Man (Anthrop* Soc.) p. 88. 2. Comptes rendtis, 8 juillet 1878, p. 80. Depuis que ce chapitre est à l'im- pression un mémoire plus long, de Le Bon, a paru dans la Bévue (T Anthropo- logie de janvier 1879. Charlton Bastian. —!■ II. 2 18 VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN. la même pour les deux sexes; tandis que, chez les nations civilisées, il y a di- vi sioQ du travail mental. S'il est vrai que tout organe se fortifie par Texercice et augmente de volume et de poids, il en doit être ainsi pour le cerveau, qui 66 développe davantage par Texercice mental proprement dit. » En outre, Le Bon a montré que l'étendue de variation dans la capacité crânienne^ que Ton rencontre chez différents individus du sexe masculin, semble d'autant plus grande que la position de la race est plus élevée dans l'échelle delà civilisation. «Ainsi les gros et les petits Crânes masculins chez les Nègres, peuvent présenter des diffé- rences de 204 centimètres cubes; chez les anciens Égyptiens, de 353; chez les Parisiens du xri« siècle, de 472; et chez les Parisiens modernes, de 593. » Il estime, en conséquence, que le signe réel de supériorité d'une race sur une autre, pour ce qui est de la capacité crânienne, ne peut être obtenu par des moyennes qui peuvent être, et sont souvent, fort trompeuses; mais plutôt en recherchant com- bien pour cent d'individus de chaque race possèdent des Crânes de volumes donnés. « La race supérieure, d'après Le Bon, contient beaucoup plus de Crânes volumineux que la race inférieure. Sur 100 Crânes Parisiens modernes, il y en aura à peu près 11 dont la capacité atteindra de 1700 à 1900 centimètres cubes ; tandis que, sur le même nombre de Crânes Nègres, on n'en trouvera pas un seul qui possède ces capacités. » Dans son travail plus récent et plus étendu. Le Bo-n donne, à l'appui de ses vues, l'intéressante table que voici : GapaoUé orAnienne chez les différentes raoei humaines. CAPACITÉ PARISIENS PARISIENS ANCIENS DU NÈQRBS. AUSTRA IKN C s A. N I B N N E. UODBRMBS. XII« SIJtCLB. EGYPTIENS. Centimètres cubes. 1200 à 1300. . . 0,0 0,0 0,0 7,4 45,0 1300 à 1400. . . 10,4 7,5 12,1 35,2 25,0 1400 à 1500. . . 14,3 37,3 42,5 33,4 20,0 1500 à 1600. .. 46,7 29,8 36,4 14,7 10,0 1600 à 1700. .. 16,9 20,9 9,0 9,3 0,0 1700 à 1800. . . 6,5 4,5 0,0 0,0 0,0 1809 à 1900. . . 5,2 0,0 0,0 0,0 0,0 Le môme auteur ajoute* : « La capacité crânienne du Gorille atteint souvent 600 centimètres cubes, de sorte qu'il suit de là qu'il 1. Loc, cit,, p. 75. MANIÈRES DK PESER. 19 y a un grand nombre d'hommes qui sont alliés de plus près, par le volume de leur cerveau, aux singes anthropomorphes, qu'ils ne le sont à quelques autres hommes. » POIDS DU CERVEAU La manière de peser le cerveau n'a pas toujours été la même pour les différents observateurs. Quelques-uns avaient coutume de débarrasser l'organe de ses minces enveloppes membraneuses, avant de le mettre dans la balance ; tandis que d'autres les pesaient avec lui. Mais le poids de la pie-mère et de l'arachnoïde est assez exacte- ment connu, et excéderait à peine 21 à 28 grammes. En outre, parmi ceux qui ont suivi la dernière méthode, qui est aussi de beaucoup la plus commune, quelques-uns ont pesé le cerveau dans son état d'in- tégrité, presque aussitôt qu'il était retiré du corps, tandis qu'un observateur au moins, le docteur Thurnam, avait l'habitude de le couper d'abord par tranches pour permettre à la sérosité et au sang de s'écouler pendant une ou deux heures, avant de mettre l'organe dans la balance. Par ce dernier procédé, le poids total peut être diminué, dans certains cas, de 28 à 56 grammes^. Comme ces causes de variations sont presque les seules possibles, lorsque les pesées sont faites avec le soin ordinaire, les poids du cerveau, obtenus par les différents observateurs, sont plus strictement comparables l'un à l'autre que les estimations de capacité crânienne, que les divers observateurs ont obtenues en suivant, comme la plupart l'ont fait, des méthodes très différentes, et dont les indices relatifs de variation n'ont point encore été déterminés. Assurément, la plupart des causes qui affectent la capacité crânienne des individus affectent aussi le poids de leur cerveau, et vice versa. Mais, sauf pour ce qui tient à la comparaison des races anciennes et modernes, ces conditions ont été beaucoup mieux élucidées pour les poids que pour les capacités crâniennes. Nous allons signaler brièvement quelques-unes des principales causes de modification. Age, — Les premiers anatomistes, et même Tiedemann et sir William Hamilton, croyaient que le cerveau humain atteignait son plus grand développement vers la septième année. Nous savons main- tenant que cela n'est pas exact : cependant, d'après des recherches fort étendues du docteur Boyd, qui ont été réduites en tables par 4. Voyez un excellent mémoire du D' Thurnam : On the Wdght of the Human Brain and on the Circumstances affecting it. — Journal of Mental Science, 1866. 20 VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN. • Thurnam (loc. cit. jt&hle ix), il semblerait que, chez les enfants mâles, il atteint réellement les f de son poids définitif à la fin de la septième année ; et, chez les petites filles, environ les ^ dece poids à la même période. En outre, d'après cette table, le poids maximum du cerveau, pour les deux sexes, se rencontra chez des individus qui ne dépassaient pas la vingtième année. Après une considération attentive des résultats précédemment obtenus, Thurnam arrive aux conclusions suivantes : « On peut admettre, en général, que le poids moyen du cerveau subit un Accroissement progressif jusqu'à une époque située entre la vingtième et la quarantième année. D'après toutes les tables que nous avons sous les yeux, et qui se rapportent à des cerveaux sains, le poids moyen le plus considérable est, chez les hommes, celui de la période décennale moyenne, ou de trente à qua- rante ans ; et ceci, comme l'observe M. Broca, s'accorde parfaitement avec ce que nous savons de la continuation de développement de l'intelligence durant toute cette période. Pour les femmes, le poids total moyen du cerveau est peut- être atteint dans la décade précédente, de vingt à trente ans. Mais la différence entre les deux sexes n'est pas grande sous ce rapport. De quarante à cinquante ans, il y a une légère diminution de poids ; et une plus grande de cinquante à soixante. Après soixante ans, la décroissance est encore plus grande ; le proces- sus de dépérissement devient de plus en plus rapide; et ainsi, pendant la hui- tième décade de l'existence, le poids moyen du cerveau est de 80 à 90 gram- mes plus petit que ce qu'il était pendant la quatrième décade. Chez les gens âgés, en moyenne, le poids du cerveau diminue pari passu avec l'intelligence. Il y a beaucoup d'exceptions à cette règle générale; et quelques personnes, sur- tout dans la classe plus cultivée et instruite, conservent jusqu'à l'âge le plus avancé la plénitude et la vigueur de leurs facultés. Le cerveau de ces hommes, comme l'observait feu le professeur Gratiolet, demeure dans un état de jeu- nesse perpétuelle; et ne perd que peu ou point du poids qu'il possédait à la fleur de l'âge. » Sexe.— «Mes propres observations, dit Thurnam, confirment plei- nement celles de précédents auteurs, qui ont déclaré que le poids moyen du cerveau de l'homme adulte est environ de 10 pour 100 supérieur à celui du cerveau de la femme. Comme le dit le profes- seur Vy^elcker : « Le poids du cerveau de l'homme (1390 grammes) est à celui de la femme (1250 grammes) comme 100: 90. »0n observe de légères variations dans les poids du cerveau des deux sexes, donnés par différents observateurs; mais on verra que la différence moyenne est exprimée avec beaucoup d'exactitude par les chiffres ci-des- sus. » La différence entre le poids moyen du cerveau de l'homme et celui de la femme, d'après la supputation de "Welcker, est de 140 grammes; mais, d'après les observations du docteur Peacock sur les Écossais, elle serait de 150 grammes. DIFFÉRENCES SëXUëLLKS. 21 Thurnam dit : « Quelques-uns ont supposé avec Tiedemann que le volume moindre du cerveau de la femme est simplement dû à sa moindre stature. Ceci toutefois n'est point exact ; et M. Parchappe a montré depuis longtemps, bien que d'a- près un nombre trop restreint de pesées, que la différence était plus grande qu'on ne pouvait l'expliquer de cette manière. Je puis confirmer cette opinion, d'après des calculs fondés sur les grandes tables du docteur Boyd pour St- Marylebone. Dans ce but, j'ai examiné et comparé la stature moyenne et le poids du cerveau pour les hommes et les femmes aux périodes décennales de vingt à soixante ans Tandis que le poids du cerveau est de près de 10 pour cent moindre chez la femme, la stature ne l'est que de 8 pour cent. » Poids du corps et statdbk. — La relation du poids du cerveau au poids du corps suit presque exactement les mêmes lois que nous avons observées chez les animaux inférieurs; c'est-à-dire que la proportion diminue avec l'accroissement du poids et de la stature du corps; de sorte que, ainsi que Tiedemann Ta observé, « plus l'homme approche de sa croissance complète, plus le poids de son cerveau est petit relativement à celui de son corps. » 11 varie aussi avec le degré d'obésité : « chez des personnes maigres la proportion est souvent de i : 22 ou 27 ; chez les personnes fortes, de i : 50 ou 100. » Mais, comme le dit Thurnam : « Bien qu'on puisse se demander s'il y a à tirer beaucoup de déductions physiologiques utiles de la proportion du poids du cerveau et du corps chez les deux sexes, la comparaison du poids du cerveau avec la stature peut amener à des conclusions de plus de valeur... Parchappe concluait que, toutes choses égales d'ailleurs, le poids du cerveau chez les deux sexes est relativement plus grand chez les personnes de haute taille que chez celles de petite stature; la dififérence entre les deux pouvant être de cinq pour cent : c'est-à-dire le cerveau d'un homme grand étant représenté par 100, celui d'un homme de petite taille le sera par 95. La diflTérence était un peu moindre chez les femmes. » Ceci s'accorde tout à fait avec les supputations plus récentes de Marshall. Race. — On n'a encore que relativement peu d'observations sur ce sujet si vaste, — la question de la moyenne ou poids ordinaire du cerveau chez les différentes races d'hommes. On a fait un peu plus, en ce sens, pour les variations de capacité crânienne. On a toutefois commencé à déterminer le poids moyen du cerveau pour les Anglais et les Écossais; et, avec moins de précision, pour les Français et les Allemands. Mais les observations faites jusqu'ici ne proviennent que d'étendues de pays trop restreintes; et les personnes sur lesquelles elles portent appartenaient trop au même état social et au même degré d'éducation. 22 VOLUME ET POIDS DO CERVEAU HUMAIN. Thurnam pense que le chiffre de Wclcker (1390 grammes) repré- sente avec beaucoup d'exactitude le poids moyen du cerveau do l'homme européen, chez des personnes de vingt à soixante ans. II donne le tableau suivant, montrant la moyenne du poids pour chaque peuple, par rapport à ce chiffre-là. Relation de poids du cerveau de différents peuples européens t HOMMES. ORAMMB8. PROPORTION. Européens (Welcker) 1390 . 100^ Anglais (Boyd) 1354 97 — {Peacock) 1388 99 Français (Parchappe) 1358 98 AUemands, etc. (Wagner). . . 1371 98,5 Écossais (Peacock) 1417 102 II sera intéressant de placer, à côté de ce tableau, celui donné par Thurnam, et comprenant les résultats moyens des pesées de douze cerveaux nègres. Gomparaîion du poids moyen de cerveaux de Nègres et d'Européens s HOMMES. ORAMMBS. PROPORTIO?;. Européens 1390 100 MgrGs(TiedemannA). . ... 1202 90 — (Peacock 5) 1255 90 — (Barkow 3) 1261 90 * (Moyenne de 12) 1255 90 Ces observations, comme le dit Thurnam, s'accordent « à établir que le poids du cerveau de l'homme nègre est le même que celui de la femme européenne. » Il ajoute : « On saurait à peine mettre en question l'influence décidée de la race sur le poids du cerveau; et il n'y a guère de doutes qu'on s'assurera plus tard, par l'observation directe, du volume plus petit du cerveau chez d'autres races mêla- niques et inférieures. Les cerveaux des Hindous, des Hottentots, des Boschimans et des Australiens pèsent probablement moins, même que celui du nègre ; mais, dans toutes ces comparaisons, il faut considérer la stature*. 1. Il y a quelque raison de croire, qu'à mesure qu'on s'élève vers le Nord, la stature humaine moyenne s'accroît dans une certaine mesure, et avec elle DIFFÉRENCES DE RACE. 23 On n'a pas jusqu'à présent de données sur le poids du cerveau des hommes de ces dernières races ; mais, d'après le poids de celui de trois femmes boschimanes, ainsi que d'après ce que nous savons de la capacité crânienne chez ces races, on peut très rationnelle- ment supposer que le poids de leur cerveau tombera nettement au- dessous de celui du Nègre. a Le cerveau d'une Boschimanes examiné par le professeur Marshall, pesait 31 onces et demie,* tandis que, d'après les calculs du même auteur, le cerveau d'une Anglaise à peu près du même âge et de la même taille ne pèserait pas, en moyenne, moins de 40 onces. Le cerveau d'une autre femme boschimane, ordinairement connue sous le nom de Vénus hottentote, et qui fut examinée par Gratiolet, était, dit-on, un peu plus gros ; bien qu'on ne se soit point assuré de son poids exact. Enfin (quoique le premier par ordre de date) le docteur Quain a donné le poids du cerveau d'une fille boschimane de quatorze ans et de l'",08 de hauteur. Ce poids était de 963 grammes. Ceci, comme le si- gnale le docteur Thurnam, est même au-dessous du poids moyen du cerveau de la petite fille anglaise de deux à quatre ans, chez laquelle^ d'après les tables du docteur Boyd, ce poids est de 991 grammes pour une taille moyenne de 0'",87.« Si Ton considère en outre, comme le montrent aussi les tables du doc- teur Boyd, qu'à la fin de la septième année le cerveau de la petite fille a atteint au moins les 10/11*^' de son poids définitif, le cerveau de cette petite fille boschimane ne doit pas avoir été de beaucoup au-dessous du poids qu'il eût atteint à l'état adulte. » Les Chinois représentent la plus ancienne et la plus persistante, sinon la plus avancée, des civilisations du monde ; et, tout récem- ment le docteur C. Clapham a donné le poids du cerveau de onze hommes et de cinq femmes adultes*. « A l'exception, dit-il, d'un seul individu, ils appartenaient tous au rang le plus inférieur de la société chinoise, aux coolies; cependant le poids de leur cerveau était remarquablement élevé, si l'on considérait que ce n'étaient en rien des hommes choisis, mais simplement des victimes du grand typhon qui sévit à Hong-Kong en septembre 187/i. Il ne faut point toutefois oublier l'influence de la congestion, due au genre de mort, et qui peut avoir élevé légèrement le poids de ces cerveaux. la capacité crânienne moyenne et le poids moyen du cerveau. Cependant les Lapons et les Esquimaux sont de taille extrêmement petite, bien que leur capa- cité crânienne demeure d'une grandeur peu ordinaire. 1. Joum, ofthe Anthropolog, Inst., vol. VII, p. 90. ti VOLUME KT POIDS DU GBHVËAU HUMAIN. Poids du cenreaa de teise GhinoU : NO. 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. H0MMB8. Age probable. • • OV m • • • • XO • • • . . 45. . . . . 40. . . . . 50. . . . . 40. . , . . 25. . . . . 48. . . Poids. . 1410 gr. . 1418 — . 1516 — . 1587 — . 1410 — . 1360 — . 1318 — . 1530 — 9 55 1403 — 10 35. . . ,. . 1467 — 11 30. ... . 1310 — Moyenne. 1430 gr. NO» 1. o «ri • 3. 4. 5. FBMMB8. Age probable. . . 26. . . 30. . . 70. . . 18. Poids. 1289 gr. 1389 — 1247 — 1234 — 1310 — Moyenne. . 1293 — On reviendra ci-après sur la signification de ces chiffres. Pouvoir mental et degré d'éducation. — Sous ce titre, nous allons passer brièvement en revue ce que l'on sait, chez l'homme, de la relation entre l'intelligence et le degré d'éducation, et le volume et le poids du Cerveau. Il y aurait besoin d'un beaucoup plus grand nombre de faits, pour que l'on pût considérer le sujet comme un peu élucidé ; et même quelques-unes des données que nous possé- dons aujourd'hui semblent à première vue légèrement contradic- toires. Cette contradiction est toutefois plus apparente que réelle. On a déjà fait allusion à ce sujet dans ce qui a été dit de la capacité plus grande du crâne, et du poids plus considérable du Cerveau, chez les civilisés que chez les sauvages; et de la capacité crânienne plus considérable chez les Parisiens du xix« siècle que chez ceux du xii« siècle. On peut rapporter maintenant d'autres faits ayant la même signification générale. Par exemple, le docteur Thur- nam s'est assuré que le poids moyen du Cerveau chez les aliénés, hommes, de York-Retreat, qui appartiennent à la classe moyenne et plus instruite, est nettement plus élevé que celui des pauvres qui meurent dans les asiles des comtés de Somerset et de Wilts*. Broca a fait aussi quelques investigations pour comparer les dimensions de la tête chez un certain nombre d'étudiants en médecine et chez un certain nombre de domestiques du grand hôpital de Bicêtre. Le 1. La différence n'était pas aussi nettement marquée entre les poids des cerveaux des femmes de ces deux classes; fait qui s'accorde avec d'autres déjà cités, et d'autres encore que l'on citera plus loin, pour prouver que, chez les femmes, l'étendue de variation sous l'influence de conditions diverses est moins considérable que chez l'homme. hNFLUËNGË DE L^ÉDUGATION. 25 résultat a montré une prépondérance distincte de la part des étudiants. Ceci toutefois n'est point aisé à comprendre; à moins qu'il ne nous faille croire que l'éducation supérieure des étudiants a, pendant leur vie individuelle, donné naissance à un accroissement marqué du cerveau et de la tête. Parmi les ancêtres des étudiants et des domestiques, il est fort possible que, dans beaucoup de cas, le degré relatif d'éducation et d'exercice cérébral habituel ait été complètement renversé. Si Broca pouvait mesurer de nouveau les têtes de ces deux séries de personnes, c'est-à-dire des mêmes indi- vidus, au bout do dix ans, la diflFérence relative entre ces deux mesures des deux classes pourrait donner quelque renseignement intéressant. Mais pourrait-on observer quelques différences, au bout de ce temps, entre ces deux séries de mesures; et, s'il en était ainsi, pourrait-on leur assigner pour cause un exercice cérébral supérieur? Ces questions très douteuses restent encore à résoudre^. On trouvera généralement que toute série considérable de crânes ou de cerveaux renferme des représentants des trois classes artifi- cielles en lesquelles il convient de les diviser. D'abord ceux de capacité ou de poids moyen; puis ceux qui sont plus ou moins décidément gros (mégalocéphales). Pour les poids du Cerveau, Thurnam s'est arrêté aux nombres suivants, comnae aux plus utiles à adopter pour distinguer ces classes. CERVEAUX MICKOCBPHALES. CERVEAUX DE VOLUME MOYEN. a. — Microcéphalie commençante. Hommes — de 1130 à 1062 grammes. Femmes — de 990 à 920 grammes. b. — Microcéphalie décidée. Hommes — au-dessous de 1062 grammes. Femmes — au-dessous de 920 grammes. Hommes de 1130 à 1490 grammes. Femmes — de 990 à 1345 grammes. CERVEAUX MEGALOCâPHALKS. a. — Mégalocéphalie commençante. Hommes — de 1490 à 1560 grammes. Femmes — de 1345 à 1417 grammes. b, — Mégalocéphalie décidée. Hommes — 1560 gram. et au-dessus. Femmes — 1417 gram. et au-dessus. 1. Le Bon a publié aussi un tableau montrant la mesure circonférentielle de la tète (qui varie entre 52 centim. et 62 centim. 5) chez des individus appartenant à différentes classes sociales, actuellement vivant à Paris, et qui, tiO VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN. Ce tableau est utile, car il montre la large étendue des variations que l'on peut rencontrer dans le poids du Cerveau des hommes et des femmes. On peut toutefois y ajouter les conclusions que le docteur Sharpey a déduites d'une soigneuse analyse par tableaux qu'il a faite des poids cérébraux publiés par Sims, Clendinning, Tiedemann et Reid. Ayant rejeté de son tableau tous les cas dans lesquels on supposait qu'il y avait eu maladie cérébrale, le docteur Sharpey dit : « D'après cette table, le poids maximum du Cerveau de l'homme adulte^ dans une série de Î78 cas, était 1,842 grammes; et le poids minimum 963 grammes. Sur une série de 191 cas, le poids maximum du cerveau chez la femme adulte était 1,587 grammes, et le minimum 878 ; la différence entre les poids extrêmes chez les hommes n'était donc pas moindre de 879 grammes, et chez la femme de 709 grammes. Le poids du Cerveau de Thomme adulte paraît donc être sujet à des variations d'une plus grande étendue que celui de la femme. En groupant les cas ensemble par des crochets, de la manière indiquée, on trouve que la plus grande partie des Cerveaux d'homme se tient entre 1,304 grammes et 1,502 grammes, et la plus grande partie des Cerveaux de femme entre 1^62 grammes et 1,332 grammes. On peut donc dire que les poids dominants du Cerveau de l'homme et de la femme adulte sont compris entre ces limites et, en prenant la moyenne ou poids moyen, on en déduit 1,403 grammes pour les hommes et 1,247 grammes pour les femmes — résultats qui correspondent tout à fait à ce que l'on admet généralement.. La supériorité générale en poids absolu du cerveau de l'homme sur celui de la femme existe, comme le montre le tableau 2, à toute époque de la vie. Tiedemann a trouvé que, chez les enfants nouveau-nés, le cerveau pesait de 411 grammes à 446 grammes chez les gar- çons et de 283 à 375 grammes chez les filles. » (A). — Quelques-unes des conditions qui coïncident avec les poids peu élevés du Cerveau : Le poids moyen, chez les personnes qui meurent dans les asiles d'aliénés, a été trouvé nettement inférieur à celui des Cerveaux de personnes de la même classe, mais saines d'es- prit. Une partie de cette diminution, chex les insensés en général, est due sans doute, comme le suggère Thurnam, à une atrophie partielle des circonvolutions; bien qu'une partie puisse aussi être attribuée, chez certains représentants de cette classe, à la petitesse initiale du Cerveau. Mais, comme le remarque le même auteur, « le poids moyen du cerveau de ceux qui meurent dans les asiles, provient de poids qui sont au-dessus de la moyenne des cerveaux sains, et d'autres qui sont manifestement au-dessous ». En général, les der- d'après leurs différents genres de vie, doivent exercer leur intelligence à des degrés différents. Les mesures dominantes montrent une décroissance distincte dans Tordre des quatre classes qu'il désigne sous les noms suivants : 1 . Sa- vants et lettrés, 2. Bourgeois parisiens ; 3. Nobles d'anciennes familles, 4. Do- mestiques parisiens. ALIÉNÉS ET IDIOTS. 27 niers sont de beaucoup prépondérants, et c'est pour cela que la moyenne est basse; mais, parmi les épileptiques qui sont dans les asiles, et parfois parmi les simples déments, il n'est pas rare de trouver des Cerveaux considérablement au-dessus du poids normaU ou poids moyen chez les individus sains. Chez les imbéciles et les idiots de naissance, le poids moyen du Cerveau est encore plus bas que parmi ceux chez lesquels la folie chronique est survenue pendant l'âge adulte. En examinant vingt- deux Cerveaux d'idiots, dont quelques-uns étaient aussi épileptiques, le docteur Thurnam a obtenu un poids moyen (pour quatorze hommes), de 1,190 grammes, et (pour huit femmes) de 1,167 grammes. Il est assez curieux que la moyenne de ces derniers soit presque identique avec ce qu'on voit chez le reste des folles; tandis que, pour les hommes, la moyenne est bien décidément moindre que chez les aliénés ordinaires. L'idiotie n'est donc point nécessairement associée à un très petit volume du Cerveau, bien que ce soit là fréquemment le cas; toutefois, divers défauts dans la structure interne ouïe déve- loppement intime du Cerveau peuvent amener cette même condition de faiblesse mentale. Sur 50 Cerveaux, examinés par le docteur Langdon Down, et ayant appartenu à des idiots de 5 ans à 33 ans, le poids minimum, chez un garçon de 18 ans, était de 425 grammes; le poids maximum, che; un homme de 22 ans, s^élevait jusqu'à 1404 grammes. Ce dernier poids était, suivant toute probabilité, consi- dérablement accru par des altérations morbides des tissus, altérations sur la nature desquelles nous allons revenir. Quand le poids du Cerveau tombe au-dessous d'un certain minimum, il semble impossible que son possesseur ait rien qui ressemble à l'intelligence humaine ordinaire. Gratiolet, sans spéci- fier le sexe, supposait que cette limite inférieure était 900 grammes ; Brôca met un peu plus haut — 907 grammes pour les femmes et 10Zi9 pour les hommes -— cette limite inférieure du poids compatible avec l'intelligence ordinaire. Le poids du Cerveau des idiots peut toutefois tomber, et tombe fréquemment, de beaucoup au-dessous des limites fixées ainsi ; et cela, soit par maladie atrophique survenant après la naissance, soit par défaut congénital. Voici un tableau donné par Thurnam du poids des quinze plus petits Cerveaux d'idiots que l'on ait signalés jus- qu'ici ^ : 1. Loc. cit., p. 29. On renvoie aux descriptions originales de ces Cer- veaux. 28 VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN. Poîdt du oenreaa d'îdioU mSorocéphalet : HOMS iES. Age. ê Poids. N«» FI Observateurs. EMMBS. p Obserrateurs. Age. Poids. 1. Thurnam. . . 29. . 1013 gï'. 1. Bucknill. . . . 37. . 921 gr 2. ... 22. . 1006 — 2. Sims. • . . . . 12. . 765 - 3. Parchappe. . . 45. . 970 3. Parchappe. . . . 25. . 720 - 4. Thurnam . . . 52. . 907 — 4. Tuke . . 70. . 644 — 5. Peacock. . . . H. . 600 5. Tiedemann . . 16. . 563 - 6. Down 18. . 425 — 6. Gore. . . • ( . . 42. . 283 - 7. Owen 22. . 372 — 8. Theile 26. . 300 9. Marshall . . . 12. . 241 — (fî). — Quelques-unes des conditions qui coïncident avec les poids élevés du Cerveau, — Des poids fort peu élevés ne peuvent, comme nous l'avons vu, exister qu'avec la démence ou l'idiotie. Toutefois, des poids fort élevés peuvent se rencontrer, soit (1) avec ces mêmes conditions morbides, ou parmi des aliénés d'autres catégories; soit (2) chez des individus sains, mais ordinaires; soit enfin (3) chez les membres les plus intelligents de la société. Ce dernier cas est assez en harmonie avec les vues qui ont ordinairement cours; bien que l'existence des deux premiers puisse être regardée à première vue comme tout à fait anormale. Mais elle ne l'est pas autant qu'elle peut le paraître. (1) Pour ce qui est du premier cas, Thurnam a trouvé que, chez environ 10 pour 100 des hommes et 7 pour 100 des femmes qui mouraient à l'asile d'aliénés de Wilts County, le poids du Cerveau excédait la limite supérieure des dimensions moyennes, c'est-à-dire ili60 grammes et 13/i6 grammes respectivement ; tandis qu'on ren- contrait 3 ou A pour 100 de poids nettement mégalocéphales, c'est- à-dire au-dessus de 1559 grammes pour les hommes et de l/il7 grammes pour les femmes. Ces faits s'accordent tout à fait avec les observations publiées plus récemment par le docteur C. Clap- ham ^, bien que ce dernier observateur ait trouvé la proportion de poids distinctement mégalocéphales légèrement plus élevée, dans la série plus nombreuse de pesées qu'il fit dans un asile situé plus au nord de l'Angleterre. Ainsi, sur 700 Cerveaux d'hommes, il n'y en avait pas moins de US dont le poids était de 1559 grammes et au-dessus; et, sur ce nombre, U pesaient même jusqu'à 1701 à 1729 grammes*. 1. West Riding Asylum Reports, vol. VI, 1876. 2. Faut-il attribuer la moyenne moins élevée, obtenue par Thurnam, de Cerveaux décidément mégalocéphales à la différence des aires géographiques ALIÉNÉS ET IDIOTS. 2t> Au sujet des poids obtenus à l'asile de Wilts, Thurnam dit : « Les gros cerveaux que Ton vient de passer en revue sont, à peu d'exceptions près, ceux d'ouvriers; et si, chez quelques-uns d'entre eux, il y avait un degré peu ordinaire d'intelligence, la sphère d'exercice de cette intelligence doit avoir été fort limitée. Le Cerveau le plus lourd que j'aie pesé (1,760 grammes) était celui d'un boucher sans éducation, à peine capable de lire, et qui mourut su- bitement d'épilepsie combinée avec de la manie, après un an de maladie en- viron... Le poids le plus lourd rapporté par le docteur Bucknill est celui d'un épileptique de trente-sept ans; et, dans ce cas, le cerveau pesait 1,830 gr., ce qui est exactement le poids présenté par le Cerveau du célèbre Cuvier. Sauf une seule exception, le poids maximum observé par M. Parchappe était aussi celui d'un épileptique âgé de trente et un ans; ce poids était de 1,737 grammes. l^plus lourd Cerveau de femme dont je trouve mention est signalé par le doc- teur Skae. La malade n'était point épileptique, mais avait la manie des gran- deurs, et mourut à l'âge de trente-neuf ans — phtisique. Le Cerveau avait un poids monstrueux pour un cerveau de femme, — 1,743 grammes. Il est possible que ces Cerveaux décidément lourds se rencon- trent en proportion légèrement plus élevée chez les fous que chez les membres sains de n'importe quelle classe sociale; et cela pour les raisons suivantes : D'abord la folie est une condition qui dépend de divers états morbides qui peuvent peut-être se présenter aussi souvent chez les individus à gros qu'à petit Cerveau ; en second lieu, dans quelques cas de folie, associée ou non avec de l'épilepsie, l'or- gane, ou du moins des parties considérables de l'organe, tendent à s'indurer, grâce à un développement disproportionné ou à une hyper- trophie réelle de la partie constituante, fonctionnellement inerte, du Cerveau, — son tissu connectif ou névroglie, — de même que d'autres organes du corps, le foie par exemple, peuvent être diminués fonctionnellement, bien qu'augmentés de volume absolu, par une hypertrophie semblable du tissu connectif. C'est là une condition que l'on rencontre chez des épileptiques confirmés. Enfin, en troi- sième lieu, si l'un de ces patients meurt pendant un accès, une grande distension des vaisseaux sanguins du Cerveau peut être une autre cause tendant à augmenter le poids de l'organe; comme on sait que cela se produit, quelle que soit la cause de la congestion. Wagner a appelé spécialement l'attention sur ceci; et sur ce fait que les poids sont influencés, non seulement par la longueur et la nature de la maladie, mais aussi par le genre de mort^ d'où provenaient les deux séries de patients 7 ou cela ne serai t-11 pas dû, tout autant, au fait que Thurnam' n'opérait ses pesées qu'après avoir coupé le Cer- veau en tranches pour faire écouler le sang et le sérum ? 1. Vorstudien, i^%2, Zweite AbhandL, p. 93-95. 30 VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN. (2) Mais, par contre, des poids cérébraux élevés ont été rencon- trés accidentellement, par beaucoup d'observateurs, en examinant les corps de beaucoup d'individus tout à fait ordinaires, et qui pen- dant leur vie n'avaient montré aucun signe de folie ou d'intelligence extraordinaire. La plus longue série de tableaux où l'on puisse trouver des ren- seignements dignes de foi est peut-être celle du docteur Peacock; et Thurnam dit en en parlant : « Dans les tables du docteur Peacock, sur 157 poids de cerveaux d'Écossais Adultes, et âgés de 20 à 60 ans, il y en a quatre qui vont de 1,728 à 1,778 grammes. Ils appartenaient tous, en apparence, à des artisans ; trois d'entre eux étaient l'un marin, l'autre imprimeur et le dernier tailleur. Les causes de la mort étaient la fièvre, le delirium tremens, et, dans deux cas, des fractures graves compli- quées. Toutes ces affections pouvaient être plus ou moins accompagnées de •congestion cérébrale; et rien ne montre que ces individus se soient distingués de leurs camarades par des facultés supérieures. Le cerveau humain le plus lourd que l'on ait signalé jusqu'ici semble aussi avoir appartenu à une personne de cette classe. Le docteur James Morris^ a publié une courte note à son sujet. L'homme à qui il avait appartenu était un briqueteur, qui mourut de pyhémie, à l'âge de trente-huit ans, à University Collège Hospital, peu après une opération chirurgicale, en 18Zi9. Le docteur Morris dit : — « Le poids du cerveau était, immédiatement au sor- tir du corps, de plus de 1,900 gr. Cette pesée fut faite avec beaucoup de soins, en présence de plusieurs étudiants. Le cerveau était bien proportionné ; les cir- convolutions n'étaient point aplaties. Bien que la surface fût convenablement humide, l'organe ne perdit qu'environ une once de son poids, après la dissection ordinaire et un égouttage de deux heures. La taille de l'homme était 5 pieds 9 pouces; il était solidement charpenté. Il fut difficile d'avoir sur son compte une histoire satisfaisante. — Sa femme et sa propriétaire donnèrent des récits différents. Il semble toutefois acquis qu'il était originaire du Sussex, qu'il avait quitté son village natal , et changé de nom, à cause de quelque histoire de braconnage, qu'il n'était pas très sobre, avait une bonne mémoire et était entiché de politique. Il ne savait ni lire ni écrire. Quelles qu'aient donc pu être ses capacités virtuelles, il est évident qu'il n'avait pas beaucoup d'acquis. i> (3) Il vaut mieux réserver les commentaires que nous aurons à faire sur ce dernier cas, jusqu'à ce que nous ayons donné quelques preuves de l'existence de poids cérébraux élevés chez des hommes de facultés mentales et de connaissances fort étendues; hommes dont quelques-uns ont été, dans diverses sphères de la vie, parmi les représentants les plus éminents de l'Intelligence Humaine. Voici une 1. Brit Med, /oum., 26 cet. 1872, p. 465. J HOMMES DISTINGUES. 31 liste, donnée par Thurnam, a laquelle on a ajouté le poids de huit Cerveaux, ceux de Schiller, Agassiz, professeur Goodsir, sir James Simpson, W. Chauncey Wright, de Morgan, Grote, et docteur Hugues Bennett*. Poids du cerveau d'hommes distingués : Noms. A ge. Poids. 1. Cuvler, naturaliste 63, . . 1830 gr. 2. Abercombie, médecin 64. . . 1785 — 3. Schiller, poé^c. 46. . . 1785 — 4. Goodsir, anatomiste 53. . . 1630 — 5. Spurzheim, médecin 56. . . 1559 — 6. James Simpson, médecin 59. . . 1533 — 7. Birïchlet, mathématicien 54. . . 1520 — 8. DeMorny, homme d'État 50. . . 1520 — 9. Daniel Webster, homme d'État 70. . . 1516 — 10. Campbell, litrd chancelier 80. . . 1516 — 11. Chauncey Wright, physicien 45. . . 1516 — 12. Agassiz, natitraliste 66. . . 1512 . — 13. Chalmers, prédicateur célèbre 67. . . 1502 — 14. FvLchs, pathologiste 52. . . 1499 — 15. De Morgan, mathématicien 73. . . 1496 — 16. Gauss, mathématicien 78. . . 1492 — 17. Dupuytren, chirurgien 58. . . 1456 — 18. Grote, historien 76. . . 1410 — 19. Whewell, philosophe 71. . . 1390 — 20. Hermann, philologue 51. . . 1358 — 21. Hugues Bennett, médecin 63. . . 1332 — 22. Tiedemann, anatomiste 80. . . 1254 — 23. Haussmann, minéralogiste 77. . . 1226 — Il est digne de remarque que, dans cette liste, outre la grande proportion de poids élevés, on trouve quatre cerveaux d'hommes distingués dont le poids est plus ou moins distinctement au-dessous de la moyenne de 1,390 grammes, même après que Ton a tenu compte, chez deux d'entre eux, d'un certain degré d'atrophie provenant de l'âge. 1. On trouvera, dans le mémoire du docteur Thurnam, des indications sur les endroits où ont été pris la plupart des poids qu'il a mis dans ce tableau : Les huit autres poids ont été ajoutés d'après les autorités suivantes : — 1. Schiller et Agassiz — Daniel Wilson, in Canadian Journal, oct. 1876; 2. Goodsir — Anatom, Memoirs, yoh 1, p. 195 (1868); 3. Simpson — Med. Times and Gaz,, 14 mai 1870, p. 532; 4. Chauncey Wright — Thos. Dwight, in Proceed. American Acad. of Arts and Sciences, vol. XHI (1878); 5. de Morgan— Autopsie faite, en 1871, par le docteur Wilson Fox et l'auteur; 6. Grote — Autopsie faite par le professeur Marshall en 1871 ; 7. Docteur Hugues Bennett — Brit. Med, Journ,, 9 oct. 1873. 32 VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN. Les faits établis dans cette table, aussi bien que ceux qu'on a détaillés ci-dessus, doivent leur principal intérêt à ce qu'ils touchent à la question, vivement et longtemps débattue, de l'existence de quelque connexion nécessaire et invariable entre le simple volume ou le poids du Cerveau et V Intelligence, On va faire maintenant quel- ques brèves remarques sur ce sujet. Il semble donc tout d'abord parfaitement clair, d'après les faits rapportés, qu'il n'y a pas de relation nécessaire ou invariable entre le degré d'intelligence des hommes ou des femmes et le simple volume ou le poids de leur cerveau. Nous avons vu que quelques déments peuvent avoir des cerveaux très gros ; et en outre que, chez certains membres fort ordinaires de la société, n'ayant ni maladie ni défaut congénital, le cerveau peut être décidément gros et pesant. D'autre part, des hommes d'une instruction étendue, de facultés mentales reconnues, et même, un ou deux, de renommée européenne, peuvent avoir eu, même à la fleur de leur âge, un cerveau au-dessous ou légèrement au-dessus de la moyenne qui prévaut chez les hommes de races civilisées, soit 1390 grammes. Ce qui montre qu'un cerveau de petite dimension, mais bien constitué, est capable de faire de beau- coup meilleur ouvrage que beaucoup de cerveaux plus gros, dont la constitution interne est défectueuse pour une cause ou pour une autre. Si l'on ne considère simplement, en effet, que le volume et le poids du cerveau, il ne faut jamais oublier que ces éléments peuvent être notablement augmentés par hypertrophie de simples tissus connectifs inertes; ou, même lorsqu'il n'y a pas d'altérations morbides dans les tissus, qu'un organe d'un volume ou d'un poids considérable peut être encore un instrument de perception ou de pensée plus ou moins inférieur, à raison de ce que ses éléments internes sont défectueux et mal accordés pour une action harmo- nique. Il peut encore être un instrument défectueux à raison de particularités plus subtiles, et simplement moléculaires, des éléments dont il est composé ; particularités qui rendent peut-être ces élé- ments moins réceptifs et moins rétentifs de ces impressions senso- rielles qui constituent les matériaux bruts de l'intelligence, et aussi moins capables de prendre part à des opérations mentales plus élevées. Il n'y a donc pas de relation invariable, ou nécessaire, entre le poids absolu du cerveau des individus et leur degré d'intelligence. Mais, si l'on posait la question de savoir s'il est probable que la pro- portion des cerveaux mégalocéphales est plus considérable chez des hommes d'une grande intelligence et d'un savoir étendu que chez des gens sans instruction et sans intelligence, la réponse à cette question devrait immanquablement être affirmative. C'est là, comme POIDS DU CERVEAU. 33* le Bon Ta signalé pour les « capacités crâniennes», la manière réelle d'arriver à prouver des supériorités de races ou de classes. Cette forme modifiée, et plus correcte, d'une ancienne notion, est basée sur divers faits qui lui donnent un appui très évident. Comme on Ta déjà dit, la proportion de cerveaux décidément mégalocéphales a été trouvée de Zi à 6 pour 100, pour des hommes au-dessous de soixante ans, et appartenant aux classes inférieures et les moins instruites de la société; tandis que dans la liste ci-dessus d'Hommes Distingués (qui, observons-le, n'est point du tout une liste choisie, puisqu'elle com- prend tous les poids connus de l'auteur), la proportion des cerveaux qui excèdent 1,559 grammes est de près de 23 pour 100, et aurait pu être de beaucoup plus considérable, n'eût été le grand âge des hommes distingués auxquels ces cerveaux avaient appartenu. Car, nonob- stant un degré marqué d'atrophie sénile chez quelques-uns de ces cerveaux, il n'y en avait pas moins de onze qui pesaient encore de ^ l,Zi88 à 1,559 grammes. Il semble tout à fait possible que ceux de sir James Simpson, paniel Webster, lord Cainpbell, de Morgan el Gauss aient pu dépasser 1,559 grammes, lorsque ces hommes distin- gués étaient, non seulement en bonne santé, mais encore au-dessous de soixante ans. Et, dans ce cas, le nombre de cerveaux décidément mégalocéphales s'élèverait à environ Zi5 pour 100, chez ces vingt- trois hommes distingués. La liste est petite pour en tirer des conclusions ; mais la différence de proportion indiquée semble de beaucoup trop considérable pour pouvoir être attribuée au simple hasard. Sauf l'existence de véritables altérations morbides, le grand poids d*un organe comme le Cerveau donne plus de raisons de croire que son développement interne aura marché de front avec son accrois- sement de volume, et que l'organe sera hautement doué de son genre particulier de vitalité. Et si ces deux dernières conditions sont réali- sées, un accroissement du Cerveau doit être un avantage distinct pour son propriétaire; et, si les conditions générales et spéciales de la vie sont toutes propices, il doit probablement favoriser le déve- loppement de grandes Facultés Mentales, ou l'acquisition d'un vaste savoir. On a déjà signalé dans ce chapitre que les poids cérébraux élevés tendent à se rencontrer en plus grande proportion chez les races civilisées que chez celles qui ne le sont que peu ou point. Ceci, joint à l'autre fait bien établi et très digne de remarque, que ces diffé- rences de poids se trouvent beaucoup plus marquées chez les Hommes que chez les Femmes, lorsqu'on compare les races supérieures aux races inférieures, donne la preuve la plus importante de l'étendue dans laquelle le Cerveau humain, pendant le cours de nombreuses générations, a continué à augmenter de volume, sous l'influence de Charlton-Bastian. — II. 3 If I 34 VOLUME ET POIDS DU CERVEAU HUMAIN. Taccroissement d'usage et d'exercice que peut entraîner une vie passée dans un état de Civilisation. Mais, plus longtemps l'état de Civilisation a existé chez un peuple donné, plus la tendance à hériter d'un Cerveau de dimensions plus grandes doit être généralement répandue chez les individus de ce peuple. Et, à moins que cela ne soit dû à quelques distinctions ethniques, quasi-accidentelles et peu comprises, comment pourrions- nous expliquer autrement la remarquable série de poids de cerveaux Chinois publiés par le docteur C. Clapham? Chez ces seize individus, pris au hasard dans la classe des coolies, les poids sont distincte- ment au-dessus de la moyenne existante chez les Anglais, les Fran- çais et les Allemands du même degré social ; et, bien qu'à un moindre degré, également au-dessus de celle des Lowlanders écossais. Quelle qu'en soit la cause (et il ne faut point oublier leur genre de mort), il serait à peine possible d'indiquer une autre série pareille de chiffres, pour seize individus pris au hasard, à la seule exception des chiffres rapportés dans le tableau des Hommes Distingués. Il n'est point du tout nécessaire de supposer qu'individuellement, ces coolies chinois étaient capables de déployer quelque degré notable d'acquis ou de puissance intellectuelle qui justifie l'existence chez eux de cerveaux aussi volumineux. Le docteur Clapham rap- pelle un fait assez significatif en ce sens, lorsqu'il dit : a Je ne suis point porté à parler aussi légèrement de la capacité pour l'instruc- tion de la classe des coolies chinois ; je suis au contraire convaincu de leur aptitude naturelle en ce sens. » Nous avons peut-être là, exactement, ce que l'on pourrait attendre comme résultat d'une civilisation antérieure, même d'un degré assez bas, mais continuée pendant fort longtemps ; c'est-à-dire l'héritage d'un Cerveau volumi- neux et d'une bonne aptitude ou capacité pour l'instruction^. Le Cerveau est différent de tous les autres organes du corps. C'est souvent une masse de virtualités structurales, plutôt que de tissus nerveux pleinement développés. Quelques-uns de ses éléments, ceux qui ont trait aux Opérations Instinctives les mieux établies, arrivent naturellement jusqu'à leur développement complet, sans l'aide de stimuli extrinsèques; mais d'autres, et de grandes étendues de ceux- ci, semblent n'arriver à de pareils développements que sous l'in- fluence de stimuli appropriés. 11 suit de là que des aptitudes natu- relles et des virtualités de l'ordre le plus subtil peuvent ne jamais se manifester, chez des multitudes de personnes, uniquement par le manque de stimuli appropriés et de pratique capable de perfec- 1. Voyez plus haut quelques faits tendant à montrer que la civilisa tion, agissant pendant de longues périodes, tend à amener un accroissement de volume du Cerveau. LE POIDS CÉRÉBRAL ET L'INTELLIGENCE. 35 tionner le développement et l'activité fonctionnelle des régions du cerveau, dont l'action est inséparablement liée aux phénomènes mentaux en question. Le développement dont il est ici parlé est de la nature la plus intime, et, dans une certaine mesure, il échappe à nos moyens actuels d'investigation. 'Son apparition peut être associée à une augmenta- tion de poids tout à fait insignifiante, et, peut-être, n'être suivie d'aucune augmentation de volume de l'ensemble de l'organe. Cepen- dant un développement de Cellules Nerveuses antérieurement em- bryonnaires, ainsi que l'établissement, entre elles, de nombreuses et nouvelles connexions, au moyen de prolongements intercellulaires et de fibres commissurales, peuvent avoir eu lieu dans de vastes espaces du Cerveau ; et cela dans une étendue qu'il nous est tout à fait im- possible d'apprécier d'une manière exacte*. Que ce ne soit point là une simple imagination, c'est ce qui nous est prouvé en partie par d'autres faits déjà établis : c'est-à-dire que le cerveau de l'homme atteint les f de son poids définitif, et celui de la femme les ~ du sien, à la fin de la septième année ; bien qu'à cette époque, le développement structural intime de l'organe soit encore, dans toutes ses parties supérieures, dans une condition relativement embryonnaire. On peut donc estimer que même de pareilles don- nées montrent, de la manière la plus forte, combien le simple volume, ou le simple poidsdu cerveau, sont peu importants relative- ment au degré d'intelligence de l'individu; si, comme on le fait souvent, on considère ces données indépendamment de la question, beaucoup plus importante, de la quantité relative de substance grise, aussi bien que du degré et de la perfection du développement intime, soit réel, soit possible, de l'organe. 1. Voyez, p. 13, ce qu*a établi Lockhart Clarke sur les éléments nerveux embryonnaires, ou non développés, que Ton rencontre dans les Circonvolutions Cérébrales du foetus. CHAPITRE XXI CONFIGURATION EXTERNE DU CERVEAU HUMAIN Le Cerveau de rHomme appartient au même type que Ton ren- contre chez les Anthropomorphes et chez les Singes ordinaires. Quelle que soit la manière dont on l'interprète, le fait lui-même est trop évident pour admettre le moindre doute. On y voit la même forme générale, les mêmes lobes, les mêmes scissures principales. Il est vrai que Ton y rencontre aussi d'importantes diflFérences. Le volume et le développement relatifs des divers Lobes ne sont point les mêmes. En outre, dans le Cerveau de l'Homme, les scissures et les circonvolutions « secondaires » se présentent en nombre bien supé- rieur et avec une complexité beaucoup plus grande, tandis qu'on trouve, dans le poids, une diflFérence qui éclipse en importance toutes les autres. Les poids maxima, que l'on a rencontrés jusqu'ici chez les grands Anthropomorphes, vont de 3/i0 à 350 grammes; bien que le poids total de ces animaux atteigne, ou même dépasse de beaucoup, celui d'un Homme ordinaire. Si frappante toutefois que soit la différence de poids du Cerveau entre les grands Anthropomorphes et les Hommes ordinaires, 11 ne faut point oublier que l'étendue des variations que l'on rencontre chez les divers individus de notre espèce est plus grande encore. Quelques personnes peuvent montrer nettement des attributs humains et des facultés mentales, bien qu'en possédant un Cerveau dont le poids ne s'élève pas au-dessus de 907 grammes; tandis que, chez d'autres Hommes, le poids de ce même organe peut s'élever à un maximum de 1,815 à 1,900 grammes. De pareils faits, ainsi que d'autres déjà cités, impliquent certainement l'existence, dans le Cerveau de l'Homme, d'une remarquable capacité de croissance et de développement, sous l'influence longtemps continuée, pendant des séries de générations, de ces modes de vie et d'activité cérébrale qui sont presque inséparables de l'existence d'une Communauté plus ou moins Civilisée. KACËS inPÉRttlLKKS. 37 Pour étudier la configuration externe du Cerveau Humain, il sera très avantageux d'examiner tout d'abord les caractères de l'or- gane, tel qu'il existe chez une des races les plus inférieures de l'Hu- manité. Nous pourrons alors comparer avantageusement un de ces types les plus simples avec des formes plus développées des mêmes organes, comme celles qui sont communes chez les représentants des races civilisées supérieures. Le Cerveau de la «Vénus Hottentote» fut soigneusement examiné et figuré parGratiolet. Bien que l'intelligence de cette femme ne fâtpas remarquablement défectueuse, les circonvolutions de son Cerveau a. 183. - CetïOïi X da 11 véDUi < H oUcntote, Tuo lobel^nl«l;P. , lobe Pariétal; 0, loba Occipital Proluhérsnce ; V *, Bulbe: S, sure de Sylilus paraLlÂle; a', rsplii ■upérisun A,cUcoa7ûh atrentaleaacen' tomolulion parié taie aïcendan ;tu centrale pm ,olutioas parié roojens cl inférii lun des circi moyens stiaféria un des ciico. ITOI utiOBs occipital étaient relativement fort peu compliquées. Après avoir commenté ce fait, Gratiolet sy'oute : — a Mais ce qui frappe tout d'abord, c'est la simplicité, l'arrangement régulier des deux circonvolutions qui com- posent l'angle supérieur du lobe frontal. Si l'on compare ceux des deux hémisphères, ces replis, comme nous l'avons déjà signalé, pré- sentent une symétrie presque parfaite, telle qu'on ne la rencontre jamais chez les Cerveaux normaux de la race Caucasique... Cette régularité, cette symétrie, rappellent involontairement la régularité et la symétrie des circonvolutions cérébrales chez les espèces ani- 3S CONFIGURATION EXTERNE DU CERVEAU HUMAIN. maies intérieures. Il y a, sous ce rapport, entre le Cerveau d'un homme blanc et celui de cette Boschimane, une différence i laquelle ou ne saurait se tromper, et qui, si elle est constante, comme il y a tout lieu de le supposer, constitue l'un des faits les plus intéres- .sants que l'on ait notés jusqu'ici. » La description la plus complète que nous possédions aujourd'tiui ilu Cerveau d'un représentant de l'une de ces races inférieures, est toutefois celle qui a été donnée par le professeur Marshall, dans son Mémoire sur le Cerveau d'une Boschimane'. L'organe, chez cette Africaine du Sud, était décidément petit, comme on l'a dit dans le dernier chapitre (p. 23). Voici certaines parties de la description de Marshall reproduites dans ses propres termes. 1. Philoioph. Trans. ISHt, p. .HOI. CERVEAU DE BOSOHIUANE. 30 FOBMB aÉNÉnALE i>D Cbhveac. — « Vu en dessus, le Cerveau de la Boschimane présente, comme son crâne, une forme ovoïde longue et étroite. La ligne de plus grande largeur correspond aux éminences pariétales; elle est placée un pea loin en arrière, aux deux tiers de la longueur totale du Cerveau, à partir de son bord antérieur; de sorte qu'il ne reste plus qu'un tiers de l'organe en arrière de ces éminences. A partir de cette région pariétale proéminente, le Cerveau se rétrécit dans toutes les directions, — très brusquement en arrière et assez brusquement aussi en avant, jusqu'à l'entrée de la scissure F, lobe fiïontal; O, lobe Occipital; P, li de Sylvius où, comme le Cerveau fœtal, il parait remarquablement étranglé : il s'élargit de nouveau un peu, aux angles externes de la région frontale, qui est néanmoins décidément étroite. L'hémisphère gauciie, vu en dessus, est de cinq millimètres et demi plus long que le droit, l'accroissement portant presque entièrement sur l'arrière. La longueur relativement plus grande, en arrière, d'un liémisphère (ordinairement le gauche, pour autant que je l'aie .observée) est fort commune dans les Cerveaux Européens. » lu ^OKFIGUKAÏION EXTEKWK DL CEIIVEAU HUMAIN. • Vue latéralement, la région pariétale est saillante; le vertes est bas et aplati; son point le plus élevé est situé loin en arrière; la région frontale est peu épaisse... Le lobe temporal est étroit, la ligne qui va de sa pointe au bout du lobe postérieur étant fort longue. La courbe formée par le bord inférieur du Cerveau, au-dessus du Cer- velet, est moins forte, et sa direction plus oblique, en haut et en arrière, que dans le Cerveau Européen; ce qui est apparemmentjdd à un manque de développement de la région occipitale, qui est fort peu épaisse... les sommets des lobes temporaux sont pointus et très recourbés vers la ligne médiane... les surfaces orbitaires sont parti- culièrement contractées, mais ont une forme carrée, ou humaine, et non pointue, ou simienne. ■ Considéré dans son ensemble, ce Cerveau de femme Boschimane, comparé avec le Cerveau Européen, manquait surtout de profondeur et de hauteur verticale. Scissures, Lobes et Circonvolutions du Cerveau. — « La scis- sure de Sylvius. dans le Cerveau de la Boschimane, s'étend bien en arrière, mais s'incline plus en haut que dans le Cerveau Européen', et présente, peu après son origine, un espace horizontal particulier.. . Ses bords ne sont pas en contact très intime, surtout vis-i-vls du 1. Ce sont 1 des marques d'uo développement iarèrjear. Dans 1e> cerveaux plus déTsIoppéa, la scissure de Sylviua eit plua courte, et de direction plua ho- rizontale. CEHVEAU DE BOSCHIMANE, 41 bord postérieur du lobe frontal, qui est ici fort défectueux'; la scissure est en effet assez ouverte pour que, sans écarter ses bords, on puisse voir distinctement une portion, petite il est vrai, du lobe central ou insula de Reil (C). Cette disposition rappelle l'état fœtal du Cerveau humain (fig. 128) ; mais elle ne se présente pas, que je sache, dans aucun Cerveau de Quadrumane. La défectuosité du lobe frontal explique la forme resserrée, si remarquable, du Cerveau delà Boschi- mane; forme déjà mentionnée, et que l'on peut peut-être supposer caractéristique du Cerveau Boschiman, puisqu'elle se retrouve aussi Fio. 137. — Hémisphère Cérébral droit d'un Ecossais, face externe (Tumer). Fr, Fr, lobe Frontal, Par, lobe Pariétal; Oc, lobe Occipital; T S, lobe Temporo-sphénoldal ou Temporal ; S, S, scissure de Sylvius ; S', 5', partie ascendante de la scissure de Sylvius {Suints precerUralis d'Ecker) ; R, R, sillon de Rolande ; / P, scissure intra- pariétale, et P, P, scissure parallèle ; 1, 1, 2, 2 et 3, 3, circonvolutions frontales infé- rieure, moyenne et supérieure ; 4, 4, circonvolution ascendante frontale ; 5, 5, cir- convolution ascendante pariétale ; 5', partie externe du lobule postéro-pariétal ; 6, 6, circonvolution angulaire; 7, 7, 8, 8, 8, et 9, 9, 9, circonvolutions temporales supé- rieure, moyenne et inférieure; 10, II et 12, circonvolutions occipitales supérieure, moyenne et inférieure; A, lobule supra-marginal : a, p, y et 8, première, deuxième, troisième et quatrième circonvolutions unissantes. chez la Vénus Hottentote, où elle a été également signalée par Gratiolet comme un caractère fœtal. » Le sillon de Rolando (fig. 136, d, d) commence à environ trente- quatre millimètres en arrière du sommet du lobe temporal. « Il se termine bien au delà du milieu du grand axe du Cerveau, presque aussi loin en arrière que la ligne de plus grande largeur de l'organe : de sorte qu'il s'étend relativement plus loin en arrière que chez la Vénus Hottentote, et surtout que chez l'Européen. » « Les scissures perpendiculaires externes (fig. 135, P) se suivent aussi aisément que chez la Vénus hottentote (fig. 13/i, V); mais elles sont bientôt interrompues par les circonvolutions unissantes 42 CONFIGURATION EXTERNE DU CERVEAU HUMAIN. externes («, P). Sur les côtés, ces scissures sont certainement plus faciles à suivre que chez l'Européen, — ce qui donne un caractère d'infériorité à cette partie du Cerveau Boschiman ; mais, en même temps, elles sont beaucoup plus interrompues que chez le Chimpanzé ou rOrang-Outang. Ces courtes scissures perpendiculaires externes se joignent, comme d'ordinaire, aux sommets des scissures perpendi- culaires internes; et, avec les sillons de Rolande, divisent la surface supérieure du Cerveau en trois régions. » Si l'on mesure ces trois régions sur le vertex, dans le sens longi- Pïa. 138. — Vue supérieure du Cerveaii d'un Écossais (d'après Turner). Fr, lobe Frontal ; R, sillon de Rolando ; I P, soissure intra-pariétale, et P 0, scissure pariéto-occipitale ; S, branche horizontale, et iS^ branche ascendante de la scissure de Sylyius; A, lobule supra-marginal; 1,1,2,2 et 3, 3, circonvolutions frontales inférieure moyenne et supérieure; 4, 4, circonvolution ascendante frontale, et 5, 5, circonvolu- tion ascendante pariétale ; 5' partie externe, et 5'', partie interne du lobule postéro- pariétal; 6, 6, circonvolution angulaire; 10, circonvolution occipitale supérieure; a, a, première, et ^, seconde circonvolutions unissantes. tudinal, on voit que c'est la région pariétale qui est surtout défec- tueuse dans le Cerveau Boschiman ; puisqu'au lieu d'égaler ou de dépasser un peu la longueur de la région occipitale, elle est très nettement plus courte que cette dernière région. La scissure parallèle (136, f, f), sur la surface externe du lobe temporal, est « plus tortueuse du côté gauche que chez la Vénus Hot- tentote; bien qu'elle le soit moins que sur les Cerveaux Européens ordinaires. » CERVEAU DE BOSCHIHANE. » « La scisiure perpendiculaire interne (fig. 139, P, 0) est plus verticale que chez l'Européen, mais beaucoup moiua que chez le Chimpanzé,— l'angle formé par cette scissure et une ligne basilalre passant à travers le corps calleux étant, chez l'Européen, de 123"; chez la Boschîmane de 115°, et chez le Chimpanzé de 93'. Toutefois, comme dans le Cerveau Européen, cette scissure rejoint eu dessous celle de l'hippocampe (flg. 139), au lieu que, chez les Quadrumanes, elle s'arrête avant d'atteindre cette scissure. » Nous ne pouvons suivre le professeur Marshall dans son examen intéressant et détaillé des diverses circonvolutions du Cerveau de la Boschîmane, ni dans son estimation de leur degré de développement. ha. IXI.— Uéœiaplière Cérêbrul Gauche ; f^icc inicnie et eurface qui lepote sut la Tenta du Cervelet (d'après Tntnerj. '■(■, lobe FronUl; Par, lobs Pariétal ; Oe, lobe Occipital; TS, lobe Temporal; PO.iàt- snre perpendiculaire interne, on paiiélo-occïpïtale ; I, j, f, sciaure calloio-maiglaale; l, ', scissure calcarina; m, m, acissure dentée; n, n, iciiinre coUaléralB ; 17. 17, H. circanvotntton marEinale; 18. 18, circonvolution du corpa calleui; 18'. lobuls carrl; IB. 10, circonvolution uncinée.dLint IS' est le cmcliet, ou parUe recourbée; 25, coneua. relativement à celles de la Vénus Hottentote ou du Cerveau Euro- péen ordinaire; nous ne pouvons reproduire que quelques-unes de ses conclusions générales les plus intéressantes. 'T^Toutea les circonvolution a primaires qui devraient exister dans le cerveau humain * existent daaa celui de la Boachimane ; mais, ai dd les compare aux mêmes parties du cerveau Européen ordîtiaira, on lea trouve plua petites; et, dans tous les as, tellement moins compliquées, qu'on les dialingue bien plua tacilement les unes des autres. Ctttc simplicité relative du cerveau Boschi- nian indique sans doute une inrériorité de structure, et fait de cet organe uu moyen utile pour faciliter l'étude de la forme européenne, pitis compleie. En comparant les diverses régioni du cerveau, les circonvolutions priroairea des régions frontale supérieure, et pariétale eilerne, sont, dans l'ensemble, les mieux développées ; celles des régions frontales, moyenne et inférieure, de la région temporale, des lobes centraux, et de la face interne, viennent après; 44 CONFIGURATION EXTBRNK DU CERVEAU HUMAIN. tandis que celles de la surbce orbitaire et du lobe occipital sont les moins développées. ■ Quant aux Girconvolatious Unissantes, ces replis siimportantset sisigaifl- eatifa, les eitemes wnt, par compa- raison avec celtes du cerveau Euro- péen, encore plus remarquablement défectueuses que les circonvolution s primaires. Elles sont toutes les quatre présentes ; maie, touUs, sont d'une brièveté caractéristique, étroites et simples, au lieu d'être eompieies et d'eccuper un grand espace; aussi, bien que 1» scissure perpendiculaire externe soit bientôt comblée, les lobes pariétal et occipital aont plus Tacites à distinguer l'un de l'autre que sur le cerveau Européen... Les nombreuses scissures et circonvolu- tions qui compliquent tellement les pluslongues sur le cerveau Européen, sont, partout, décidément moins développées sur celui de la Boschi- gions occipitales et orl)itaires,suT la circonvolution recourbée et sur la circonvolution unissante externe. Ceci est un signe de plus de l'infé- riorité de structure, s Fjo. 140.— Vue du Lobule Orbitaire et ds l'Ioiula de Reii, d'après Tumar. Comparé à cclui de la Vénus La pliM grande partie du Lobe Tempo»! s été IlOttentOtC, IC CôrvCau de la f-f!'l*y'°""™'"iri''T^^'i''°'r°'' t r" Boschimane est • presque 4ans citconvolutionspoilérieuio, interna al anemé tOUS les caS OÙ la COmparaisoQ do Lobule Orbitaire; Clninla de Bail, a«c est possible, Ull peU, qUOÎque Méril^Tl^lJZi'^ftrfruTetérteu'rarr ^'^^ P^"' P'"* ""^"^^ ®' P'"^ convolotion fronULe , 4, surface inférieute de Complexe dans le développe- l'eilrémité infètieura de la circonvolution ment de SCS CirCOnvOlutlons : L"n"«i^a1«™dant"" u %fÔa°ZuZ '^ ^"'« eJtcepUon porte sur le marginale. ' ' volume des clrcODvolutions oc- cipitales et unissantes externes, qui est moindre chez la Boscbimane.i Mais la ressemblance entre les circonvolutions des deux Cerveaux est fort intime; tandis que la simplicité de leur arrangement n'a rien de comparable, ou même d'approchant, dans les Cerveaux Européens normaux. Il reste maintenant à signaler, un peu plus complètement, la nature des principales différeneea que présentent les Cerveaux Euro- BACttS CIVILISÉES. 45 péens, lorsqu'on les compare à ceux des types humains inférieurs dont nous avons parte jusqu'ici. C'est toutefois une tâche assez diffi- cile, à cause des grandes différences individuelles, relatives à un grand nombre de détails de structure, que l'on rencontre dans cet organe chez les différents Européens. On rencontre en effet, chez quelques-uns d'entre eui,"un Cerveau qui se rapproche de fort près, par son volume, le développement relatif de ses lobes et la com- TU en desiui (Shicpa;, d'aptèi K. 'Wagner). /, I, Sciuura longitudinale; a, a', a", ciiconrolutioas fTonUlsa, BUpârUwe. moyenoa et inf^euia; r,r, sillon de RoUndo; B, B, ciiconTolution pariétale asceadanle ; A, 6, lobule pariétal; b", lobule supra-niatglnal; c, c', ptemière (ou sopérîenrei circomolu- tion lempoiala ; /, scissiue pecpandiculai» (ou pariéto-occipitale) ; d, d', d", ciTi:oii- TOlutions occipitales, SDpéiieure, moyenne M intirieurs. plexité de ses circonvolutions, du type inférieur qui nous est offert par le Cerveau de la Boschimane. Chez d'autres, la majorité des caractères est décidément plus élevée; bien que, dans certaines parties, dans certains endroits, ils puissent présenter tantôt un trait, tantôt un autre, du type inférieur. On rencontre fréquemment, 46 CONFIGURATION EXTERNE DU CERVEAU HUMAIN. en efiTet, toutes sortes de degrés et de transitions ; de sorte que les remarques faites sur cette partie de notre sujet seront plutôt géné- rales que précises et particulières. Lorsqu'on le regarde en dessus, la forme, ou contour, du Cerveau Européen varie considérablement. Les lobes antérieurs, rétrécis et comme comprimés chez la Boschimane, aussi bien que la forme amincie et étroite des lobes occipitaux, sont des caractères éminem- ment fœtaux. En règle générale, cet état contracté des lobes anté- rieurs ne se rencontre pas dans le Cerveau de l'Européen; et, sur quelques spécimens, l'ovale est si large que le contour devient presque circulaire, comme chez l'Écossais représenté par Turner (fig. 138.) Le cerveau d'un naturaliste célèbre, figuré par Rudolph Wagner *, a à peu près le même contour presque circulaire, lorsqu'on le regarde en dessus ; et chez lui, comme chez TÉcossais dont on a parlé, Textrémité postérieure con- stitue le côté large de Tovale. D'autre part, le cerveau du grand astronome et mathématicien Gauss (fig. 141) a, lorsqu'on le regarde en dessus, un contour nettement elliptique, — la partie antérieure de la courbe étant presque exacte- ment égale à la postérieure, et le plus grand diamètre transversal se trouvant à égale distance des deux extrémités. On peut voir un contour supérieur sem- blable sur le cerveau de l'artisan Krebs <, dont les circonvolutions sont beau- coup moins compliquées ; bien que la vue latérale de ce même cerveau, com- parée à la figure représentant celui de Gauss, montre qu'il manque beaucoup d'épaisseur, soit dans la région frontale, soit dans la pariétale. Le contour supé- rieur du cerveau du philologue Hermann, également représenté par Wagner, est aussi presque elliptique, l'extrémité postérieure étant légèrement plus étroite que l'antérieure. Son plus grand diamètre transversal est en outre situé à moitié distance entre ses deux extrémités : bien que cette région corresponde au lobule supra-marginal plutôt qu'à l'extrémité inférieure de la circonvolu- tion pariétale ascendante, comme dans le cerveau de Gauss et dans celui de l'artisan Krebs. En se reportant à la figure 135, on verra que le cerveau de la Boschimane est aussi plus large au niveau des lobules supra marginaux, fort proéminents, bien que ceux-ci soient distinctement en arrière de l'axe médian. Le cerveau de l'éminent mathématicien Dirichlet est plus long, et plus large, qu'aucun des autres cerveaux figurés par Wagner. Son extrémité postérieure est plus étroite que l'antérieure, et même notablement pointue. Sa plus grande largeur n'est que légèrement en arrière de l'axe médian, et correspond à la partie postérieure de la circonvolution pariétale ascendante. On rencontre donc de notables variations dans la forme du Cer- veau, lorsqu'on regarde l'organe par sa face supérieure; et l'on 1. Vorsttuiien, tab. IL 2. Loc. cit., tab. II, fig. 4. CËHVEAU DE GAUSS. 4T pouvait du r^te s'y attendre, en considérant les dirersea formes du Cr&ne humain cbez des races et des individus difTérents. Nous voyons des têtes extrêmement longues, et d'autres extrêmement rondes, parmi des multitudes d'autres individus dont les diamètres crâniens sont plus égaux. Somme toute, on trouve peut-être plus Tréquemment, que la plus grande largeur du Cerveau est en arrière de son axe transversal médian; et que son extrémité postérieure est plus obtu- sément arrondie que l'antérieure. Vu de côté, le Cerveau présente certaines différences évidentes, lorsque l'on compare des formes simples commes celles de la Vénus Uottentote et de la Boschimane, ou même celle de l'artisan Krebs, à Fia. 14£. — Ceivenu de GauM, vneUténle (Vogi, d'après R. Wagnec). ', lobe Fnnlat; P, lob« PBriilïl ; 0,lDbe Occipilil; T. lobe Temponi ; C,CerteM; Po, Prolubérasce; VU, Bulbe; S, sciunre de Sj-lriiu; A, lilloD da SaUndo; a', a\ - rieur (loba moysn) donl -. YiiUimilé atérie uiea été «pomi séa e m arrièr e, pour mon- Irer les TubetculMQua drijummui; 3. , (onérieut el inrériour et ils la Isn ta médiane di 3, grande mre périphérique; 4. di.i« cetlQ lïco jsui eei imeoK vt\a- 3e de ani; 6, 6, 1, «gai osi da cinq ■y' ■>Sma Dmpos. Td rbé., •• mblable. -Q prtrédanl : chacdu ds ces «Bpneii SI difTérenta, >, 8t lëpatâe les sci i«uces is ptoto .ndeur i coupa dOB PédoDcules Cdrébraui ; 1 f. coram iesure poitéTieui re du Carvea u; 9, Tober- Les Lobes Occipitaux reposent sur elle en dessus, tandis que la sur- face supérieure du Cervelet est en contact avec sa face inférieure. On a déjà parlé de la relation de poids entre le Cervelet et le Cerveau, ainsi que du grand développement progressif des • lobes latéraux » de ce premier organe chez les Quadrumanes, et encore plus cbe£ l'Homme, relativement au Lobe Médian, — qui devient, cbez ce dernier, proportionnellement fort petit Nous ne nous arrêterons pas ici en détail sur le développement relatif des diverses parties du Cervelet, quoique le lecteur puisse apprendre le nom de ces parties, en étudiant avec soin les figure» 60 CONFIGURATION EXTERNE DU CERVKAD UUHAIN. 169 et 150 et leurs légendes. L'étude comparative des diverses parties du Cervelet n'a point, eu effet, attiré l'atteotion des travail- leurs en général, autant que celle du Cerveau; et même, s'il eu eût été autrement, l'importance tout à fait subordonnée de cet organe, par rapport à la Pensée, nous autoriser^tà nous arrêter beaucoup moins sur son anatomie extérieure '. Toute la surface externe du Cervelet est marquée d'un très grand nombre de « scissures n, dont quelques-unes sont beaucoup plus profondes que d'autres. Ces scissures profondes sont en nombre Fio. 150.— Paca Infirieure du Cenalel (Sappei, d'sptèi HirschfoW). 1, 1, Veraii» iuft- Tieiu; 3, S, feata midians du Cenetel; 3, 3, S, luboa et lobules des tidmisphiTei ciri- bellaui; 4, amygdale; 5, lobule du pneuino-gailrïquB ; 8, protubéranns; 7, Bon ullon médian ; S, pédoncale moyen An ceirolet; S, surface coupée du bulbe; 10. eitiémité anténeure de la grands «eisaura pÉriphétiqua; 11, botd anlétiout de la surlica eupé- neaie du cervelet; 1«, lacioe moliino du trijumeau; 1S, sa racine >enlilita; 14,ocula- moleuT eilerae; 15, facial; IS, oeif de Whsbecg; 17, nerf auditif; 18, glorao-pha- lyngien; 19, pnaumogaitnque ; aO, spinal; ai, hjpoglossa. relativement petit, et constituent les limites des divers lobes et lobales de l'organe. Entre elles, il s'en trouve d'autres, arrangées d'une manière plus ou moins concentrique, et qui varient beaucoup en longueur et en profondeur. On a estimé à six ou huit cents le nombre de ces scissures de second ordre. Elles divisent la surface du Cervelet en une multitude de lames, dont on appréciera mieux la nature et l'arrangement en examinant les figures 156, 162 et 166. D'après Marshall, le Cervelet de la Boscbimane était proéminent sur les cOtés, et proportionnellement plus large et plus long que CERVELET. 6t chez TEuropéen ; bien que son contour ne fût ni aussi plein ni aussi arrondi, et que sa masse réelle fût moindre. Le résultat de ces laborieuses recherches comparatives est que « le nombre des lames du Cervelet de la Boschimane s'accorde tout à fait avec ce qui existe chez TEuropéen ; les différences n'étant probablement que celles que Ton pourrait rencontrer entre des individus de môme race. » Leur nombre relatif dans les diverses parties fut toutefois trouvé différent pour quelques-uns des plus petits lobes ; et beaucoup de lames étaient aussi plus petites et plus minces. Le léger défaut de poids du Cervelet de la Boschimane « dépend essentiellement, d'après Marshall, non de Tabsence de certaines parties ou de cer> taines lames, mais de Tétroitesse de ces dernières; car elles sont évidemment beaucoup plus minces que chez l'Européen». Somme toute, il considère que « le Cervelet de la Boschimane est très bien développé ; et que, en tant qu'organe, il est beaucoup plus parfait que son Cerveau. » SIGNIFICATION DU GRAND DEVELOPPEMENT DES CIRCONVOLUTIONS SUR LES HEMISPHERES CEREBRAUX DE l'homme. Après la description précédente de la configuration extérieure du Cerveau Humain, et maintenant que l'on a exposé en détail les différences qui existent entre lui et celui des Singes supérieurs, il peut se présenter naturellement à l'esprit du lecteur des questions de ce genre : — Quelle est la signification précise de ce développement plus complexe des Circonvolutions du Cerveau de l'Homme? — Quelle signification faut-il attribuer au manque de symétrie dans le dévelop- pement des Circonvolutions correspondantes des deux Hémisphères? On a déjà signalé précédemment qu'il y a trois types principaux d'arrangement des circonvolutions : (1) celui des Herbivores, (2) celui des Carnivores et des Cétacés, (3) celui des Quadrumanes et de l'Homme . Nous avons vu également que, dans chacun de ces grands groupes, le développement des Circonvolutions, particulier à une espèce donnée, a jusqu'ici semblé dépendre principalement du volume ordinairement atteint par les animaux * ; — que ceux qui sont petits peuvent n'en point avoir, tandis que des animaux pro- ches alliés, mais d'une plus grande taille, peuvent en avoir de plus ou moins développées. Voici ce que Vogt dit sur la raison de ce plus grand dévelop- pement chez des animaux de taille plus forte' : 1. Voy. vol. P', p. 213. 2. Lectures on Man, p. 105. <52 CONFIGURATION EXTERNE DU CERVEAU HUMAIN. « Heureusement les mathématiques viendront ici à notre secours. Si Ton compare deux corps de forme semblable, mais de volume différent, leurs volu- mes respectifs varient comme le cube de leurs diamètres, tandis que leurs sur- faces ne varient que proportionnellement aux carrés de ces diamètres ; en d'autres termes, le volume d*un corps s'accroît plus rapidement que sa surface, et celle-ci plus rapidement que le diamètre. Tout artilleur sait bien qu'un boulet de douze, bien que trois fois aussi lourd qu^in boulet de quatre, est loin d'avoir un diamètre trois fois plus grand... En appliquant ce principe à la tète, et spécialement au crâne des animaux, on verra que, dans chaque groupe naturel ou ordre de mammifères, la tète, et en particulier la capacité crânienne, est avec le corps dans une relation à peu près constante chez les diverses espèces... ; que la surface intérieure de la boite crânienne est relati- vement moindre chez les gros animaux, et, par conséquent, que pour avoir une surface semblable de substance grise, le cerveau doit présenter des cir- convolutions chez les gros animaux, tandis qu'il peut demeurer lisse chez les petits. » Si donc nous envisageons à un point de vue large et général le problème du degré d'importance à attacher à la grande complexité des Circonvolutions cérébrales chez l'Homme, il pourra sembler, à première vue, que c'est là un apanage, une suite nécessaire du volume du corps de l'Homme, relativement à celui des Singes ordi- naires et des Anthropomorphes. Sous le rapport du développement de ses Circonvolutions, l'Homme semble tenir, de beaucoup, la tête du type Quadrumane, comme l'Éléphant tient celle du type Her- bivore et les gros Cétacés celle du type Carnivore. De plus, le Cer- veau de l'Éléphant et celui des Cétacés montrent (comme celui de l'Homme) un manque de symétrie fort net, sous le rapport de la disposition précise et de la forme des Circonvolutions correspon- dantes des deux Hémisphères. Il semble donc tout d'abord que l'on soit autorisé à penser que le manque de symétrie peut accompa- gner, comme une sorte d'accident mécanique, la grande complexité des Circonvolutions; et que ce dernier caractère, si l'on compare des animaux de groupes alliés, est principalement en relation avec le volume de leur corps et la capacité de leur Crâne. Mais il ne faut point oublier d'autres considérations importantes. Ainsi, comme le dit Vogt, il faut avoir présent à l'esprit que la capa- cité crânienne de l'Homme est, proportionnellement au volume de l'individu, énormément plus grande que chez aucun des Anthro- pomorphes; et que, malgré ce très grand accroissement de capacité de la chambre cérébrale, l'augmentation de surface, ainsi obtenue pour la substance grise superficielle du Cerveau, est loin d'être suf- fisante pour les besoins de la vie intellectuelle et morale de THomme; il faut encore que cette surface soit accrue par d'autres replis secondaires des Circonvolutions Cérébrales. CAUSES DU DÉVELOPPEMENT DES CIRCONVOLUTIONS. 63 Une preuve frappante de ces considérations de première impor- tance se trouvera dans ce fait, que le développement des Circonvo- lutions du Gorille est beaucoup plus simple que celui de FHomme, bien que la capacité crânienne des types les plus inférieurs de rhumanité soit de beaucoup supérieure à celle du Gorille; et cela, quoique le volume du corps de ce grand Singe dépasse' souvent celui de THomme. Ainsi donc, nous avons un accroissement de com- plexité des Circonvolutions, se montrant dans le Cerveau de THomme sous des conditions générales doublement contraires, qui rendent cet accroissement encore plus significatif de Ténorme progrès qui s'est accompli dans le développement du Cerveau. Si Ton considère, en outre, que l'accroissement de complexité des Circonvolutions, en passant des Races Humaines inférieures aux Races supérieures, est également associé à un énorme accroissement de la « capacité crânienne » et du poids du Cerveau, — bien que la stature du corps demeure pratiquement la même, — on trouve là une preuve de plus du vaste développement des Hémisphères, qui s'est produit durant la longue suite de siècles où les ancêtres des races civilisées actuelles sont sortis graduellement de l'état de bar- barie primitive. Le grand développement des Circonvolutions du Cerveau de l'Homme a donc une signification incomparablement plus grande que celui que l'on trouve chez l'Éléphant ou les Cétacés ; car, chez lui, ce n'est clairement pas, comme cela est dans une grande mesure chez ces animaux, une simple conséquence de l'augmentation de volume du corps. Il est cependant fort possible que la relation entre la grande complexité des Circonvolutions du Cerveau Humain et les acquisi- tions intellectuelles et morales, soit plutôt générale que spéciale et invariable. Cette relation peut être fort semblable à celle qu'on a montré exister, chez les Hommes, entre les Poids cérébraux élevés et les Acquisitions et Facultés Mentales supérieures. Ces coïncidences tendent décidément à prévaloir; et cependant, comme nous l'avons vu, on peut y rencontrer, de temps à autre, de notables exceptions. On verra plus loin qu'il existe une inégalité fonctionnelle entre les deux Hémisphères Cérébraux ; de sorte que le développement asymétrique de leurs Circonvolutions, autrement correspondantes, peut être, en partie du moins, dû à ce fait. CHAPITRE XXII DE l'intelligence ANIMALE A l'iNTELLIGENCE HUMAINE « L^omme, comme être doué de Raisonnement, dépend de la forme de Langage qu'il emploie, à un degré que Ton ne saurait guère estimer trop haut. C'est, en grande partie, en vertu du Lan- gage qu'il arrive à poursuivre, avec tant d'habileté et de perfection, des processus mentaux compliqués; et si, en essayant de jeter un pont sur le vaste abîme intellectuel et moral qui sépare l'Homme des animaux inférieurs les plus élevés, nous disons que lui seul possède la faculté de parler et de se servir du Langage Articulé, nous touchons probablement là à la faculté qui, infiniment plus que toutes les autres, a eu affaire avec le progrès graduel qui semble s'être produit pendant les âges écoulés, — progrès qui a permis à cer- taines races humaines de parcourir la multitude des degrés de civi- lisation qui séparent ceux qui vivaient à l'état sauvage de ceux qui constituent aujourd'hui la fleur de la civ ilisation Européenne. Si donc la possession du Langage Articulé et les nouveaux talents qui en proviennent de transmettre la pensée au moyen de signes écrits ou imprimés, ont eu une influence aussi surprenante, en aidant cer- taines races à s'élever d'une condition de barbarie complète, il semble encore plus certain que la Pensée, dans tous ses modes supé- rieurs, ne saurait point s'exercer sans Taide d'un Langage d'une nature quelconque. » Ce passage, qui formait l'introduction d'un article sur la Physiologie de la Pensée, paru il y a quelques années déjà *, peut être pris pour texte du présent chapitre. Des vues très semblables à celles-ci avaient déjà été appuyées par Herbert Spencer, Huxley et autres; et, depuis lors, elles ont beaucoup gagné dans le public, grâce surtout à la manière habile dont elles ont été défendues par quelqu'un dont nous avons aujour- d'hui à déplorer la perte. Bien que les doctrines formulées par G.-H. Lewes ne fussent peut-être pas aussi neuves que son lan- 1. The Physiology of Thinking. — Fortnightly Review. Janvier 1869. ANALYSE DD LANGAGE. 65 gage semble l'impliquer, il leur a cependant prêté une nouvelle force, et les a développées d'une manière plus complète et plus précise que cela n'avait été fait par d'autres écrivains. L'usage le plus évident du Langage, c'est assurément de servir èf, faire communiquer, d'une manière déterminée, l'Homme avec l'Homme. Dans sesLot^ de la Pensée {Laivs ofThought^ pages 37-39 et /|7), Thomson dit : « Nous pourrions, pour certains usages, nous dis- penser du langage articulé ; les gestes et les changements de conte- nance, qui sont le langage de l'action, en tiendraient lieu. Mais les actes et les jeux de physionomie, bien qu'ils puissent servir à exprimer l'amour ou la haine pour quelque objet présent, le besoin de nourriture ou de repos, la joie ou la tristesse, ne sau- raient exprimer qu'une série fort restreinte de pensées, si nous voulions indiquer nos sentiments envers une personne absente, notre désir de quelque chose d'éloigné, ou diriger l'attention sur quelque état ou sentiment intérieur... 11 est donc nécessaire d'ap- pliquer à chaque objet un signal toujours utile, que tous les hommes, par une convention tacite, acceptent comme remplaçant l'objet, et qui, par conséquent, toutes les fois qu'il est employé, rappelle l'objet à l'imagination ; ce signal est un substantif ou nom. Toutefois, les noms représentent des choses, et les différents états des choses doivent aussi trouver une expression ; de là, le besoin d'adjectifs et de verbes. Le verbe a le pouvoir d'assigner à la chose, à un temps donné, la condition d'être, de faire, ou de subir quelque chose... Lorsque deux ou plusieurs noms sont employés ensemble, il est souvent nécessaire d'exprimer leurs relations mutuelles; une chose peut être à, de, par, dans, près de, au-dessus, ou au-dessous d'une autre ; et l'on introduit des prépositions pour le déterminer. Il y a donc quatre parties principales du langage : les substantifs, ou noms, pour exprimer les substances; les adjectifs, pour indiquer les attributs; les prépositions, pour marquer les relations; et un seul verbe, pour assigner attributs ou relations aux substantifs, à un temps déterminé... « Les différentes parties du langage ont tiré leur origine du sub- stantif et du verbe, ou peut-être du substantif seul. On peut trouver beaucoup d'adverbes et de prépositions qui sont nettement sub- stantives, et de conjonctions qui ne sont que des parties de verbes. En outre, la connexion intime entre le substantif et le verbe est indiquée par le nombre de mots qui, dans notre propre langue, sont à la fois verbes et substantifs, et ne se distinguent que par la pro- nonciation... « Il est impossible de suivre, avec certitude, la croissance du langage; mais ce qui est le plus 'probable, c'est qu'un grand nombre des racines de la langue primitive ne furent originairement que des Charlton-Bastian. — II. 5 66 INTELLIGENCE ANIMALE ET INTELLIGENCE HUMAINE. imitations de sons variés, émis par les choses du monde naturel. Un oiseau ou un animal reçut peut-être un nom dérivé de son cri par- ticulier, et plus ou moins semblable à ce cri. Le cri, ou Texclamation, que THomme émettait instinctivement sous la pression de quelque sentiment violent, aura été reproduit d'une manière consciente pour représenter ou rappeler ce sentiment dans une autre occasion: et sera devenu un mot ou signe secondaire. Lorsque les sons naturels ont fait défaut, Tanalogie aura pris la place de l'imitation ; les mots durs et difficiles à prononcer auront été employés pour désigner des objets déplaisants, de préférence à des mots d'un caractère plus facile et plus doux, que l'on aura appliqués à des choses et à des conceptions agréables. Puis, il a suffi de l'accord entre ceux qui se servaient du langage, pour désigner un son vocal comme le nom •d'un certain objet, alors que l'imitation et l'analogie n'en suggéraient aucun. Mais ces racines originelles, formes les plus simples des substantifs, seront graduellement devenues de moins en moins faciles à reconnaître, à mesure que la langue devenait plus riche et plus compliquée. Chaque fois que Ton pratique des arts nouveaux, nous pouvons aisément trouver l'occasion d'épier la naissance de aiouveaux noms pour des instruments et des procédés nouveaux ; naissance réglée toujours par ces trois principes: imitation, analogie, •et simple convention... a Ce ne sont là que des indications sommaires, dit l'auteur (aujourd'hui archevêque d'York), de la direction dans laquelle on a fait des recherches profondes et pénétrantes. Et je ne pense pas que Kie pareilles tentatives de dissection et d'analyse du langage, pour- suivies avec la prudence convenable, tendent en rien à abaisser i>iènie Tan PinéalB -, f, f, TubetCMlas Quadr: ijumenui ;o,î, Pédoncules Cérébelleu (ft) une partie de li mh«lt d, ' Vinuinu, l'étendant eut quatrième TBntriculB (4). description spéciale de sa topographie intérieure. 11 suffira d'étudier les figures 151-153 et leurs explications. Le lecteur fera bien de les étudier avec soin et de les comparer avec les figures des mêmes parties chez quelques-uns des animaux inférieurs (fig, S6, S7, 115). Ou trouvera, en outre, dans le paragraphe suivant, quelques détails sur la structure des Corps Striés et des Couches Optiques. 80 STRUCTURE INTERNE DU CERVEAU HUMAIN. II. — DISTRIBUTION DES FIBRES QUI COMPOSANT LES PEDONCULES CÉRÉBRAUX. On a fait, pendant ces dernières années, des tentatives sérieuses pour démêler la course précise des différentes bandes de fibres qui passent de la Moelle Épinière au Cerveau, et vice versa. Si impor- tantes qu'elles soient, on ne s'arrêtera que fort peu ici sur les labo- rieuses investigations de Stilling, Lockhart Clarke, Meynert, et autres, sur la structure intime du Bulbe; car les détails qu'elles ont révélés sont infiniment trop complexes et techniques pour être exposés maintenant ; et aussi, parce que nous n'avons réellement besoin, pour le but que nous poursuivons actuellement, que d'exposer l'arrangement général des principales parties. La structure intime et le mode de distribution des fibres dans les parties supérieures du Cerveau est une étude d'une difficulté non moins considérable, et dont se sont surtout occupés, dans ces dernières années, Meynert, Luys et Broadbent. Sur nombre de points, ces observateurs sont loin d'être d'accord. Les vues de Meynert, sur ce sujet difficile, ont été dernièrement réarrangées et exposées plus clairement, ce dont elles avaient grand besoin, par le professeur Huguenin, de Zurich ; et la valeur de cet ouvrage est encore accrue, dans la traduction française, par l'incorporation de matériaux nouveaux, fournis par les éditeurs,MM. Duval et Keller*. Ce traité récompensera l'étude attentive qu'en feront ceux que ne rebuteront pas ses détails techniques, et qui seront capables de les comprendre. Il semble, toutefois, plus que douteux que Meynert ait raison dans son point de vue général, quant à la représentation séparée de canaux sensitifs et moteurs pour les mouvements auto- matiques et les mouvements volontaires respectivement. Luys, outre l'occasion que lui a fournie son grand ouvrage systématique*, a encore établi ses vues dans un des volumes de cette série ». Si l'on fait, dans ce chapitre, peu d'allusions à ses vues, c'est en partie pour cela, en partie parce que les investigations de Broadbent ont, jusqu'ici, été plus spécialement dirigées sur quelques-uns des points que nous pouvons le plus avantageusement discuter ici ; et surtout, parce que les observations de ce dernier semblent avoir été conduites avec beaucoup de soin et avoir été interprétées d'un point de vue gé- néral correct. Aussi, bien que les investigations de Broadbent n'aient 1. Anatomie des Centres Nerveux, par Huguenin. Paris, 1879. 2. Sur le Système Nerveux Cérébro-Spinal, 1865. 3. Le Cerveau et ses Fonctions, 1876. PËDONCULES CÉRÉBRAUX. SI encore été publiées qu'en abrégé', ce sont elles que l'on citera de préférence dans ce paragraphe et le suivant. Un des faits les plus fondamentaux touchant les relations struc- turales des Hémisphères Cérébraux et de leurs Pédoncules, est que la moitié gauche du Cerveau est spécialement en connexion avec le côté droit du corps, et la moitié droite avec le cOté gauche. Cet arrangement, qui existe non seulement chez l'Homme mais chez les Vertébrés en général [bien qu'à des degrés variables), est dû au fait que les fibres « centripètes n qui se rendent à chaque Hémi- sphère cérébral, viennent de la moitié opposée du corps, et que les libres a centrifuges » se rendent aussi à cette même moitié. Pour parler eu termes généranx, on peut dire que les libres i cen- Venlricula Lslétal et ses liois ConieB (Sippey, d'aprèt HiHchfoldl. 1, ï, ponioni intt»- «1 eilia-tenlTiculaires du Corps Stiii, lépacées pir(8) usa coucbs de fbres blaachei; petit Hippocampa; 7, corne descendante od moyenne; S, grand Hippocampe, CODvPrt pti t9| lo pleins chotolda; 10, coupa du oorpa calleui; 11, commiisure anlérisuro! 15, ËciMure de Srlvius. tripètes ■ qui entrent dans la Moelle et le Bulbe, de chaque câté, dans toute leur longueur, passent bientôt, comme l'a montré Brown- Sequard, du cOté opposé de ces centres; et qu'à partir de là, elles suivent une direction ascendante vers l'Hémisphère Cérébral du même côté, — bien qu'elles ne parviennent pas toutes jusque-là. De même, une partie importante au moins des fibres - centrifuges > ou motrices, c'est-à-dire celles qui font partie des Pyramides Anté- rieures, s'entrecroisent dans le Bulbe avec leurs homologues, de manière à se rendre à la Colonne Latérale du cAté opposé de la Moelle. Ainsi, même en admettant que quelques-uns des Nerfs 1. The Structure of Ihe Cérébral Bemiaphere. — Journal of Mental Science, 1870; et aussi The Construction ofa Nervoui Syttem. — Britiih'Medical Jour- nal, mars et svrit 1876. CBui[,Ton-BaaT[jui. — i:. 6 82 STRUCTURB INTERNE DU CERVEAU HUMAIN. Moteurs Crâniens s'entrecroisent plus haut dans la substance du ( pont de Varole ■ (fig. Ibà], les endroits où se fait Ja décussation des conducteurs moteurs sont tous compris dans une aire fort réduite, si on les compare & ce qui a Heu pour les conducteurs sensitifs. Les fibres longitudinales de la Moelle ■ - -^ sont en grande partie divisibles [si nous en excluons celles qui sont en relation , spéciale avec le Cervelet) en trois caté- gories : l" les fibres qui transmettent vers le Cerveau les courants cenlripéles; 'î' les fibres qui transmettent les cou- rants cwiiri/upeg; et 3° tes fibres d'ordre commissuralj qui servent à relier des ■ centres, ou groupes séparés de cellules, dans difi'ërentes parties de la Moelle elle-même oudans la Moelle et leBultac. La Moelle étant en outre un organe symétrique bibtéralement, les groupes de cellules en question sont semblable- ment représentés dans cbacune de ses moitiés (fig. 19), et les régions simi- laires. Motrices et Sensitives de ces deux moitiés de la Moelle et du Bulbe sont, dans une étendue considérable, mises en relation structurale les unes avec les autres, au moyen de nom- Fio. IS4. — Dûgramme maotniii le breuses flbres commistuTales trana- Imu et la mode de dimuatiOK du verses FibmUotricetdaulBBBlbeatli , ' , ,, , . , „. Protobérance (Bromdbent). B, B', ï-^s deux premières sérIes de fibres deux i«Tieg de ogyaui dn piemi longitudinales dont on a parlé, passent htichial, non «u*»^ p»^' ■J^'^om- de chaque c6tÉ, en colonnes compactes. B norani ocoto-maieon ^ travers le Bulbe et ce prolongement . du Bulbe qui est croisé par les pédon- cules moyens du Cervelet (ou pont de fibre* motricH teauit du Coipi Varole). Au delà de ce point, les deux strié. séries de fibres d'un cûté s'écartent de celles du cAté opposé (fig. 15^), de manière à former ce qui est connu sous le nom de Pédoncules: cérébraux. On voit ces parties sur la face Inférieure du Cerveau, surtout lorsque, les sommets des Lobes Temporaux sont écartéa ou enlevés [fig. '155, r c). Chaque Pédoncule disparait bientôt dans l'Hémisphère Cérébral correspondant; et le reste de sa course, ou de celle des fibres qui le constituent, ne peut plus être découvert que par de minutlenses dissections. 11 s'élargit rapidement en s'éten- PÉDONCULES ^CÉRÉBRAUX. 83 dant en éventail {corona radiata), les bords de l'éventail étant diri- gés, comme le dit Broadbent, ■ en avant et en arrière, et les sur- faces en dedans et en dehors, mais Inclinées en dehors, de manière qne la surface externe regarde en bas et soit concave, et que la surface Interne, convexe, regarde en haut». En coupant transversalement un des Pédoncules en avant de la Protubérance, on volt qu'il se compose de deux couches de fibres séparées par une bande noire grisâtre de tissu ganglionnaire connue Vm. lïS. — On Toit, i droiM, no pUn de GbiM iltoéu >t pBTSciellei.lurUraca inférieur du LobaTamporal.sl fonnmiitls pUncher de la Corna ■ammsl dn lobe ux Corpa Stii6 eiua-Teotiiculaire. Du cdté gauche, la diatscilon a été pogisés plus loin, «1 la Bandelclte Optiques éM onlOTée;r r,P4doncul« du Ceiisau; re, Crnita; r I, fibres du Toginentuni (et fibiei Tenant de la Couche Optique) cootoot- nant le boid aDtérisar dt la Cruata ; I A, queue de b Couche Optique, contouroaDt le bord poslitiear de la Cnista, rormietla f Col da Pédoncule i,et distribuaDt des fibre* an bord Syhien du Lobe Temporal; I A et t x', fibiei allant de la Couche Optique, fltdu Coipi 8Ihé eitra-Tentriculaire reapeclirement, i l'eilrémité Occipitale de l'Hé- miipbère. Lai fibrei longitudioalei non iodiquéet par des letlra* apputiennent prin- dpalement au iptAnie du G\fna Vsdtitttm (Broadbool). SOUS le nom de locus niger '. En regardant parla face inférieure, la couche la plus superficielle (c'est-à-dire la couche inférieure et antérieure, dans la position naturelle du Cerveau) est connue sous le nom de Cru«la,et se compose de fibres blanches. Elle est sans doute 1. Sa couleur est due à rshondance des granules pigm«itsireB conteaiu dBDS les groMea cellules nerveuses de cette régioD. 81 STBDCTCRE IHTEBNE DD CRBVEAO HUMAIN, constituée par la masse des fibres centrifuges qui se réunissent plus bas pour former les pyramides antérieures du Bulbe, ainsi que par d'autres fibres qui se terminent dans des groupes de cellules motrices à l'intérieur de la Protubérance et du Bulbe. Mêlées à celles-ci se trouvent, suivant toute probabilité, des fibres qui suffisent à relier lia. 156.— Guigliont conlraui du Cervaau, avec le Cerrelet et H> PédoomlM Supècienn (Sippey.tfspiit Hitscbfelil]. 1, Tubercules Quadrljumeiui; a, ValTule de Vieuison»; 8, Pédoncule! CérébeUeui lupérieur»; 4, partie lupâTieuie de> Pédoncule» Cérêbelleui majensi 5, partie lupéiieuie des Pédouciiles Cér6braui ; a, iillon latécal de l'isUuDe: moyens; 13, centia blanc du Cecielet; 14, noyau giit ihomboTdat du Cervelet; 15, < coDDiiBture poatâiieure i du Cerveau; 16, pédoncule! de la Glande Pinéale; 17, Glande Pinésle, remenès en aiaat pooi laisMT voir ces deui demièret paMies; 18. tuberculoi pustérïeurB de> Couchei Optique); 19, tuberculei antéiisun > La Couche Optique se compose d'un mélange de fibres et de substance grise, et a une couleur blanchâtre à la surface, — qui contraste avec la teinte plus grise du Corps Strié. La partie de beaucoup la plus considérable de la Couche Optique semble * se projeter dans le « ventricule latéral » ; car « elle repose sur le tegmentum du pédoncule cérébral, d'où elle peut être soulevée d?arrière en avant et en haut; les fibres divergentes de cette partie du pédoncule paraissant se poursuivre en avant, en passant au-dessous du ganglion, sans se terminer à son intérieur». Mais, comme Broadbent le remarque plus loin : « il est possible qu'il existe, au moyen de prolongements cellulaires, une communication entre les fibres rayonnantes et le ganglion susjacent, qui les mette dans une relation équivalente à la terminaison directe de fibres et de cellules ». La portion de la Couche Optique qui semble réellement placée en dehors du ventricule consiste « seulement en un prolongement du corps du ganglion, qui contourne le bord postérieur du pédoncule et se replie en avant dans le toit de la corne descendante du ven- tricule latéral, en devenant pointue antérieurement. » 1. Voyez vol. P', p. 208, 209 note; et aussi fig. 122. sa STROCTDRB INTERNE DD CEBVEAO HUMAIN. Le Corps Strié est divisé en deux parties distinctes par les fibres rayonnantes du Pédoncule qui le traversent. « La portion Intra- ventriculaire consiste en un dépOt ou lit de substance grise, molle, non mêlée de fibres distinctes visibles à l'œil nu, plus épais et plus large en avant dans la corne antérieure du ventricule, — et se rétré- cissant en pointe en arrière, 11 repose sur les fibres rayonnantes du tegmentum et de la couche optique, qui passent au-dessous de lui pour se rendre en avant, dans rilémispliÈrB proprement dit. » Entre les faisceaux des fibres rayonnantes, celte portion antérieure et supérieure se continue avec la portion extra-veturiculaire, infé- ENS Fia. 1S7. — Coupe Irutrenale da Cerieau, immidUleinSDt eo uritis ds l'infundibu- lum. tjV, Cocps etii« Intn-Tentticulïire; S X, CoTps SUié Bilra-veolriculalia ; TU, njODpand de fibm blonchei (comna rsdista) ; r c, r I et R. forment eniembla ce que l'on a appelé la capmlt liUenu du NoyaD LealicuUite ; C X, capiuli aterm, com- preoanl 1« Claiiltriuo ; C, Corp» Calleui ; F S, Scisiure de Sylviui; L U O, Circoniolu- tion UarglDale Loogiludmala ; S U Q, S UO', Ciccoavolutioa Usrginale S^lvienns; indiqua dot ligne» dedimationde fibre» duCorpiSlrié; ..... flbrea de diitribution de la Caucbe Optique (Broadbeut). rieurs et externe, du Corps Strié, qui est plus volumineuse que la partie déjà décrite, bien qu'elle soit, comme celle-ci, plus grosse en avant qu'en arrière. Cest une masse un peu pyriforme, de substance grise, molle, limitée en dessus et en dedans par les fibres rayonnantes du Pédoncule (capsule interne), et en dehors [flg. 157, C. x) par une couche mince de fibres (capsule externe), partant de son inté- rieur pour se distribuer aux diverses régions de l'Hémisphère; bien que formant, dans la première partie de leur trajet vers les circon- volutions (ainsi que quelques autres fibres du fasciculus uncinatni qu'on décrira ci-après), une paroi externe qui sert & séparer cette CORPS STRIÉS. 87 portion inférieure du Corps Strié des circonvolutions immédia- tement adjacentes de 1* « insula de Reil », ^ dont la situation a été déjà déterminée. (Voir vol. !•', page 234 ; vol. II, p. 9 et 40.) 6. Relations des fibres qui composent les Pédoncules Cérébratix, uinsi que des fibres partant des Ganglions centraux, ou y arrivant, avec différentes Circonvolutions des Hémisphères Cérébraux. — 11 est, d'après Broadbent,facile à démontrer t que les fibres du pédon- cule passent en grand nombre, sans s'interrompre, à travers les Gan- glions Centraux, ou par eux, en se rendant aux Circonvolutions ». Et il ajoute : « Pour ce qui est des fibres du bord postérieur du Pédoncule, il ne saurait guère y avoir erreur; car elles n'entrent point du tout en relation avec la substance grise qui se trouve sur leur route*. » D'autres fibres, provenant les unes du « tegmentum », les autres de la « crusta », semblent se terminer, ou prendre leur origine, dans la substance grise du Corps Strié, bien que Broabdent incline à croire qu* «aucune fibre de l'une ou de l'autre division ne se termine dans la Couche Optique* ». Il semble toutefois sortir de la Couche Optique, comme du Corps Strié, un grand nombre de fibres indépendantes qui servent à relier ces ganglions avec des Circonvolutions situées dans diverses parties des Hémisphères 3. Ces deux séries de fibres ne s'en vont pas sépa- rément à la substance grise des Circonvolutions ; mais elles sont, pour la plupart, inextricablement mêlées avec celles des fibres du Pédoncule (dont on a déjà parlé) qui passent sans s'interrompre à travers les Ganglions Centraux. En outre, en dehors de ces corps, ces trois séries de fibres se mêlent encore à celles de la grande com- missure transversale qui réunit les Hémisphères, — c'est-à-dire du Corps Calleux. Mais il faut décrire un peu plus longuement la course de ces trois séries de fibres — répondant au projection System de Meynert. — Leur mode de distribution est forcément de grande 1. Quelques-unes de ces fibres qui passent simplement à travers les Gan- glions Centraux, ou par eux, peuvent, comme certains anatomistes le supposent, servir à relier TÉcorce Cérébrale avec le Cervelet, par Tintermédiaire des « pé- doncules moyens » de ce dernier. 2. Ceci semble une proposition fort douteuse. Les relations anatomiques des Couches Optiques sont toutefois, jusqu'ici, aussi incertaines que leurs fonctions. 3. Broadbent dit {Journal of Mental Science, Avril 1870, p. 9) : — « En comparant la surface de section des fibres que Ton voit ainsi sortir des Gan- glions Centraux avec la surface de section du Pédoncule lorsqu'il émerge de la Protubérance, on verra que les fibres ascendantes ont été grandement renfor- cées par des additions venant des Ganglions. » 88 STRUCTURE INTERNE DU CERVEAU HUMAIN. importance, si Ton veut avoir quelques notions cohérentes, même des modes les plus simples d'activité cérébrale. Le lecteur doit donc étudier avec soin les particularités signalées ci-dessous, en se reportant fréquemment aux figures où Ton peut voir la position relative des Circonvolutions auxquelles il est fait allusion. Voici, en substance, la description donnée par Broadbent ^ : Les fibres du Pédoncule, de la Couche Optique et du Corps Strié courent toujours plus ou moins de compagnie vers les mêmes parties. Pour plus de brièveté, on peut les désigner sous le nom de fibres radiantes. (Mais, partout où vont les fibres radiantes vont aussi les fibres du Corps Calleux, — bien que pas nécessairement dans la même proportion. Ainsi il arrive que les Circonvolutions où des fibres « radiantes » commencent ou viennent se terminer, sont aussi associées d'une manière bilatérale parle Corps Calleux, et rendues ainsi aptes à une activité associée). Ces fibres o radiantes » et « calleuses » ne se distribuent pas également à toutes les Circonvolutions. Un grand nombre de celles-ci ne reçoivent pas une seule fibi:e du Pédoncule, de la Couche Optique, du Corps Strié, ou du Corps Calleux, et ne communiquent qu*indirectement avec les ganglions centraux ou la grande commissure, au moyen de fibres en anses qui leur viennent de Circon- volutions directement reliées à des fibres radiantes ou calleuses» Ce qu*a sommairement établi Broadbent*, sur la distribution exacte des fibres radiantes et calleuses et sur les Circonvolutions où elles ne se rendent pas, contient, comme on le verra, des parti- cularités importantes. . « Les circonvolutions où se rendent les fibres radiantes et calleuses sont principalement celles qui sont situées le long des bords de THémisphère : le bord de la grande fente longitudinale, d'une part, et de l'autre les bords supé- rieur et inférieur de la scissure de Sylvius, qui se continuent par les circon- volutions frontale inférieure, en avant, et occipitale inférieure en arrière, jusqu'aux extrémités frontale et occipitale de l'Hémisphère, qui en sont abon- damment pourvues ; enfin le bord libre formé par le grand Hippocampe. Il faut ajouter à celles-ci les circonvolutions ascendantes de chaque côtédusiUon de Rolande (circonvolutions ascendantes frontale et pariétale, ou ascendantes pariétales antérieure et. postérieure), et peut-être la seconde circonvolution frontale. Les fibres calleuses se rendent en plus grande abondance au bord de la fente longitudinale, et les fibres radiantes au bord Sylviea de., l'hémi- sphère. » Au contraire, les Circonvolutions qui ne reçoivent pas de fibres radiantes ni calleuses sont « toutes celles de la surface interne plate de l'hémisphère, celles de la face inférieure du lobe temporo-sphénoïdal et du lobule orbitaire, les circonvolutions de l'insula de Reil, et celles situées sur la convexité des lobes pariétal et occipital, loin des bords, jusqu'à la circonvolution ascendante 1. Brit, Med. Journal, avril 8, 1876, p. 433. 2. Ibid,, p. 433. DISTRIBUTION DES FIBRES RADIANTES ET CALLEUSES. 89 située en arrière du sillon de Rolande ». Broadbent ajoute : « Il peut sembler moins étrange qu*il y ait des circonvolutions sans fibres centrales ou calleuses, si Ton réfléchit que nulle part ces fibres ne se rendent à la substance grise des sillons, mais seulement aux crêtes des iÀrconvolutions ', de sorte qiue la partie de beaucoup la plus grande de la région corticale n^en reçoit pas. » Le même investigateur dit aussi : « L'affirma^on que les fibres du Pédoncule, de la Gouclie Optique, du Corps Strié et du Corps Calleux vont toujours ensemble aux mêmes circonvolutions semblera peut- être aller au delà de ce que Ton pourrait démontrer, si Ton consi- dère qu'elles sont mêlées de façon à ne pouvoir être suivies isolé- ment ; et ce n'est pas tout à fait là ce qu'on aurait pu attendre. » En certains points toutefois, comme le signale Broadbent, on reconnaît aisément que les fibres sont fournies suivant un mode triple, sinon quadruple ; et, comme exemple, il cite les faits suivants ^ : Les fibres qui se rendent au sommet du Lobe Occipital en venant de trois de ces sources, c'est-à-dire Corps Strié, Couche Optique et Corps Calleux, for- ment des masses distinctes à leur point de départ, et ne se mêlent les unes avec les. autres que près de leur terminaison dans les Circonvolutions. Il existe une communication également indépendante avec certaines Circon- volutions, situées de manière que, pour les atteindre, les fibres provensmt de Tune ou de l'autre des trois sources en question isont obligées de suivre une direction extraordinaire. Ainsi les Circonvolutions de l'extrémité antérieure et du bord supérieur du Lobe Temporal sont reliées directement avec (1) le Corps Strié adjacent, par des fibres qui croisent la scissure de Sylvius ; (2) les fibres de la Couche Optique, qui se rendent aux mêmes circonvolutions, sont émises par la partie de ce ganglion qui se recourbe dans le toit de la corne descen- dante du ventricule, d'où ces fibres afi'érentes se dispersent de manière à at- teindre les circonvolutions des régions spécifiées ; tandis que (3) les fibres « commissurales » allant à ces mêmes parties sont principalement représentées par celles de la Commissure Antérieure, — qui, au point de vue fonctionnel, doit être regardée comme une portion détachée de la grande commissure transversale ou Corps Calleux. Les fibres « commissurales » sont toutefois aussi représentées par certaines fibres antérieures du Corps Calleux lui-même, qui, près de l'espace perforé antérieur, croisent pour se rendre au sommet du Lobe Temporal. Plus extraordinaire encore est la direction séparée que prennent celles des fibres des trois séries en question qui entrent en relation avec le Grand Hippo- campe. Cette partie, dit Broadbent, « est en communication avec le Corps Strié, à son extrémité uncinée ; avec son homologue de l'autre hémisphère par la partie réfléchie du splénium du corps calleux, que j'ai appelée la commissure des Hippocampes ^ ; mais sa situation sur le côté externe de la grande fente transversale du cerveau semble le séparer de la Couche Optique. La connexion 1. Brit. Med. Journal, avril 8, 1876, p. 433. 2. Correspondant aux fibres psaltériales dont on a déjà parlé, p. 211, 21 2> vol. P'. 90 STRtlCTtlRB INTERNE DU CERVEAU HUMAIN. «'effectue toutefois pu- tes flbre« de la Voûte qui, ainsi qu'on le sait bien, parlent de la Couche Optique, décrivent un liuit de chiffre dani Ibb tubercules muaillairea, suivent alors la direction ea haut puis eu arrière qu'affecte ce corps (le Trigoue), et se rendent h l'Hippocaiape dans le ténia, a Od a déjà établi que les Circonvolutloas diffèrent beaucoup, pour ce qui regarde leurs relations entre elles, avec les Ganglions Cen- traux et avec les fibres du Pédoncule. Cependant, toutes les Circonvolutions présentent certains carac- tères commuas. Lorsqu'on mène une coupe k travers l'une quel- conque d'entre elles, dans une direction transversale à son grand «xe, on voit une branche ou projection de substance blanche conti- nue avec la «substance blaachesdernémispbère.En dehors de cette substance blanche, existe une couche superBcielle de Substance Crise, ayant une épaisseur moy enae d'environ sept millimètres, qui se «ontinue sur toute la surface externe de l'Hémisphère, — puisqu'elle COUCHE GRISE DES CIRCONVOLUTIONS. 9\ revêt les ce scissures » aussi bien que les Circonvolutions (fig. 158). Cette couche de Substance Grise corticale a une épaisseur plus grande sur les circonvolutions frontales et pariétales que sur les occipitales. £n outre, sa pesanteur spécifique varie en ces divers points, étant souvent plus élevée dans la région occipitale que dans la frontale (1032 : 1028);— tandis que, sur les circonvolutions parié- tales, la densité est plus ou moins intermédiaire. Dans la substance grise du Lobe Occipital, surtout celle des Cir- convolutions de sa face inférieure et interne, une lamination dis- tincte est généralement fort apparente, soit à Toeil nu, soit à Taide d'une simple lentille. Ces circonvolutions furent examinées et décrites d'abord par Lockhart Clarke, en 1863 ^. Il observa la divergence de faisceaux de fibres, en manière d'éventail, à partir de Taxe central de substance blanche, et leur passage entre de longs groupes verticaux de cellules nerveuses situés dans les couches grises profondes (fig. 159). Quelques-unes des fibres, croyait-il, se continuaient avec les prolongements des cellules ; tandis que d'autres se repliaient et suivaient une direction horizontale (soit dans le sens transversal, soit dans le sens longitudi- nal). Les faisceaux de fibres se réduisent ainsi de volume, et en même temps, leursfibres composantes deviennent plus fines à mesure qu'elles approchent de la surface, — par suite apparemment des branches qu'elles envoient sur leur trajet à des cellules nerveuses contiguës. Lorsqu'elles arrivent à la troisième couche à partir de la surface, elles sont « réduites aux dimensions les plus fines, et forment un réseau serré en connexion avec les noyaux et les cellules ». Les deux couches qui sont au-dessus de celle-ci sont de couleur plus pâle et composées, pour la plus grande partie, d'un réticulum extrê- mement délicat de fibres (probablement fort semblables à la « névroglie »); et celles qui composent la couche la plus externe sont en continuité directe avec la membrane mince et très-vase ulaire (pie-mère) qui recouvre toute la surface du Cerveau et plonge dans ses scissures. Les fibres de l'axe central blanc lui-môme sont croisées, trans- versalement et obliquement, par un nombre variable d'autres fibres, généralement fort nombreuses près de sa base où, d'après Lockhart Clarke, elles se croisent dans toutes les directions. Celles-ci, pense-t-il, consistent, pour la plupart, en fibres commissurales, comme on les décrira plus loin. D'autres investigateurs ont, depuis, examiné la structure de la Substance Grise dans diverses Circonvolutions situées en différentes parties de l'Hémisphère. Bien qu'il existe des différences de détail, 1. Proceed, of Royal Society, vol. XII, p. 716. STRUCTUar. INTERNE DD CERVBAO HUMAIN. - r^ r 'r '' VHODims (gTosa. 65 diam,)- (Ferrier, d'iprèi Ueynstt}. 1, concbe dapetitt coipus- culei ipaig, appartenant ptiudpalemenl k la nivreglie; £, coucha de pelitai cellolea pyramidale) uppTOcbéaai 3, loncbe de gioiHa celliUet pyraœidalaa; 4, coucha de politt corpnsoulB» irréguliara al rapprochés [catla lame sat, dan» quelquoa régions, occupée par des cellnlea ptonJet); 5, coucha de corpuscules tusiforme»; m, lame blanche ou médullaire. a Celli stancB Griia Corticala - cellutt géante [Chatcot). a, corps de la en un prolongement pyramidal ramifié ; bj aon proloDgemant relation avec (e) lea Bbiaa blancbea de la Citconirolnlioa (forte- HISTOLOGIE DE LA SUBSTANCE GRISE. 93 il y a toutefois une grande uniformité dans le type de structure. Sur un grand nombre de Circonvolutions des Lobes Frontaux et Pariétaux, Meynert décrit la Substance Grise comme divisible, non pas tant par la vue ordinaire que par les caractères microscopiques de ses parties constituantes, en ciuq couches ou lames. Il donne une figure de Tarrangement des éléments constituant ces couches, comme on le voit dans une coupe menée à travers la « troisième circonvolution frontale » (fig. 159). Tout récemment, en outre, Bevan Lewis et H. Clarke ont décrit un arrangement fort semblable des éléments nerveux dans la circonvolution ascendante frontale et d^autres cir- convolutions adjacentes. Leur mémoire est accompagné d'excel- lentes figures *. « Ils donnent la description suivante des cinq couches de la frontale ascen- dantCf — en commençant par les plus superficielles. La preiiière est une couche délicate, friable, ne contenant pas de véritables éléments nerveux. Elle est formée du réseau ordinaire de névroglie, avec une gangue finement granulaire, dans laquelle sont répandus en grand nombre de petits noyaux et des cellules branchues de tissu connectif. La seconde couche a à peu près la même épais- seur que la première : à Toeil nu, elle parait comme une bande gris rougeàtre, nettement séparée de la couche p&le située au-dessous d'elle. A Texamen mi- croscopique, on voit qu'elle consiste en a une série de petites cellules pyrami- dales et ovales, intimement rapprochées, et dont les prolongements apicaux sont arrangés suivant la direction des rayons de courbure de la surface de récorce. D'autres prolongements nombreux partent des angles basilaires de la cellule, et rayonnent en dehors et en bas, en se distribuant dans une aire éten- due.» Chacune de ces cellules contient un gros noyau de forme ronde ou pyrami- dale. La TROISIÈME couche est à peu près trois fois aussi large que la seconde, et contient des éléments nerveux précisément de même nature, sauf qu'ils sont plus gros et moins serrés. Les cellules semblent s'accroître uniformément de volume de haut en bas ; et, dans la partie inférieure de cette couche, elles sont deux ou trois fois plus grosses que celles de la seconde couche. H faut toute- fois remarquer qu'il existe quelques cellules plus petites, dispersées parmi les grosses. La quatrième couche né diffère point radicalement de la troisième. Elle n'a qu'environ un tiers de son épaisseur, et diffère en outre par le grand accroissement de taille de ses cellules, — qui sont du reste d'un type similaire. En conséquence de leur volume considérablement supérieur, ces cellules paraissent plus intimement agglomérées. Elles sont, en moyenne, trois fois plus longues et plus larges que celles de la troisième couche. Dispersées entre elles, se voient en grand nombre de petites cellules angulaires*, et, dans certaines por- tions de cette circonvolution frontale, les petites cellules représentent seules la quatrième couche, — les grosses cellules qu'on vient de décrire, ou « cellules géantes », faisant absolument défaut en ces points-là. La cinquième couche est de nouveau beaucoup plus épaisse que la quatrième. Elle contient des cellules irrégulièrement fusiformes, d'un volume plus petit et assez uniforme, souvent 1. Proceed. of Royal Society, 1878, p. 38. 04 STRUCTURE INTERNE DU CERVEAU HUMAIN. arrangées en colonnes irrégulières^gràceà Tinterposition des faisceaux de fibres médullaires qui montent de la substance blanche sous-jacente. Des observations encore plus récentes ^ ont montré : (1) que dans beau- coup d'autres portions des Hémisphères Cérébraux, la région corticale a plutôt six que cinq lames, — la couche additionnelle étant alors produite par Tinter- position, entre les troisième et quatrième couches, d'une autre lame contenant de petites a cellules pyramidales et anguleuses » ', (2) que le type cortical à cinq lames est surtout distinct dans les parties des circonvolutions frontales et pariétales qui constituent les aires excitables, ou motrices, de Ferrier (voyez page 101), bien que, dans la partie de beaucoup la plus considérable des Hémisphères, les circonvolutions aient le type six; (3) que dans les régions à cinq lames les cellules géantes de la quatrième lame sont généralement arran- gées en groupes, dus à ce que ces corps existent en agrégats irréguliers {nids de Betz) ; la principale exception étant dans le fait qu'au fond des scis- sures (là où la couche grise a aussi moins d'épaisseur qu'au sommet et sur les côtés des Circonvolutions), même dans ces régions, ces grosses cellules sont disposées régulièrement, mais isolément, de sorte que, sur des coupes verticales, elles paraissent être en séries linéaires ; (4) que, dans les espaces beaucoup plus étendus où la région corticale esta sixlames, outre l'existence de la couche sup- plémentaire Bus-mentionnée de petits éléments nerveux p3a*amidaux et anguleux, on trouve un autre caractère distinctif dans le fait que les grosses cellules ont, dans toutes les parties des circonvolutions, cet arrangement ,en lame ou solitaire qui^ dans les aires motrices, n'existe qu'au fond des sillons^; (5) que des régions ou circonvolutions de U'ansition existent, là où l'arrangement à six lames semble faire place à l'arrangement à cinq ; et que des transitions préci- sément semblables se voient, même dans les régions à cinq lames, en passant du fond des « sillons » aux côtés des Circonvolutions. Bien qu^ils diffèrent si grandement de volume, les éléments nerveux proprement dits des seconde, troisième et quatrième couches sont de forme essentiellement semblable ; et il n'y a, en réalité, aucune bonne raison de séparer ces couches les unes des autres. Cela peut être justifiable comme simple artifice pour faciliter la description, mais ne le serait point si Ton regardait cette division comme indi- quant une difi'érence de nature entre ces éléments pyramidaux, bien qu'ils diffèrent si fortement de volume dans les divers endroits. Parler des plus grosses de ces cellules seulement (c'est-à-dire de celles de 1. Voyez : Bevan Lewis, On the Comparative Stnicture of the Cortex Cere- bri, Proceed, of Royal Society, juin 1879, p. 234. 2. Le fait que ces deux couches (la 4" et la 5* des parties à 6 lames) sont, comme le signale Bevan Lewis, toujours développées en proportion inverse; et le fait que, là où la première est nominalement absente (c'estrà-dire dans les parties à cinq lames), il existe toujours de petites cellules anguleiÀses, mêlées aux cellules géantes, rendent possible que nous ayons là les deux couches réunies en une seule, grâce au développement extrême de quelques-uns des éléments nerveux existant d'aiUeurs comme petites cellules pjrramidales. SUBSTANCE GRISE DE L'HIPPOCAMPE. 05 la quatrième couche) comme de celluiet ganglionnaires, et appeler cette lame en particulier la couche ganglionnaire. Implique une Idée erronée. Même les plus grosses des cellules groupées ne diffé- rent que par le degré des cellules de même forme qu'on trouve dans la couche au-dessus, et aussi dans la couche même, en ces points de récoree qui ne contiennent pas ces cellules en nids ou groupes. — :-^^ -, La conclusion la plus rationnelle à tirer de ces faits, pour ceux qui adoptent les vues de Ferrier, serait de dire que toutes les circonvo- lutions contiennent des «cellules motrices*, — et cela, même dans plus d'une couche — & moins que le simple fait du «groupements en nids d'un certain nombre de cellules, en cer- taines situations, ne doive être considéré comme une Indication que ces cellules ont assumé des f fonctions motrices i, et doivent pour cela être désignées sous le nom de gan- glionnaires. Toutefois, l'une ou l'autre de ces _ ^ ^_. assertions ne paraîtrait point sans doute au lecteur non prévenu être basée sur rien qui ressemble à des considérations raisonnables. II est digne de remarque que dans la couche grise repliée du Grand Hippocampe, la struc- ture de la substance corticale est, comme le remarque Heynert', extrêmement simplifiée; puisque les éléments nerveux de cette région sont représentés par une seule couche de cel- lules pyramidales, qui ne diffèrent aussi que par leur volume des « cellules géantes n des Circonvolutions pariétales ou (futaies. Il n'y a en réalité, dans l'opinion de l'au- teur, aucune raison valable pour supposer, comme beaucoup le font, que ces cellules géantes diffèrent en rien, par leur nature, des coucha, autres cellules, de volume de plus en plus petit, avec lesquelles elles sont mêlées, ou qui existent seules dan» la couche cocrespondante, sur un si grand nombre de Circonvolu- tions Cérébrales. On trouve, dans les Circonvolutions des Slogea, de» éléments cellulaires de même nature qne ceui des Circonvolutions de l'Homme, et semblableinent tiitngéi. 1. Stricker. Buman and Comparative Bistology, vol. II, p. 395. 10. 181. - CoDpe de U Conchs Repli*. dBl-Hip- poo«inpe drconTolnttona da U Facs Interna; as, Circonyolution Pottéiieura de la Face Intams. tiolet, ces fibres aufitsaient & mettre le Pédoncule d'un cOté en relation avecl'ilémispliëredu câté opposé. Les investigations de Meyuert, ainsi que cell^ de Broadbent, les ont toutefois conduits à penser que la première de ces opinions est tout à fait erronée, et que la seconde, si elle est vraie, ne l'est du moins que très partiell ornent; puisque les flbreà du Corps Calleux servent principalement k unir les Circonvo- lutions similaires dans les deux Hémisphères '. Ces fibres ne se i. Joum. o( Ment. Science, «vril 1870, p. 18. CbtKLTOM-BAITlUI, — U. 7 os STRUCTURE INTERNE DU CERVEAU HOMAIPi. distribuent point touterois partout de même, mais à quelques-unes seulement des Circonvolutions, Et, comme on t'a déjà établi, celles qui sont ainsi mises en relations dans les deux Hémisphères, sont précisément celles où se rendent aussi les « fibres radiantes > Pis. 168. — Conpe horiiantile msnto i triTen le Ciftae et 1«> deui Hémiiphèret, juats su-d«iQ8 du niTeaii îa Corpi Cslleni, et moDtrsBt le ctnlraia avale de Viengiens (Sappef, d'apièa Vicq d'Aijr). 1, 1, nllon médUo de la tace lupéilauio du Corps CdllBUf ; 2f S, tkiacB&ai lon^tudinaox de cette face (narfs de LAnciii); S, ^acoanx traniveisas de loa corpi prïacipal ; 8', «action de la aaitttance mMoUaiie au nïieaa du botd du Corpi Calleiii ; 4. 4, coticha griie de< CiTconTolutloiu, tontumt un feston irrégnliar autour du centra ovale da -Vieuiaen» ; 5, partie antirioura de la grande fente longitudinale da Cetvean ; fl, partie postérieuie de cette fente longitudinale ; 1, 7, coupa des paroia du Cràna. des Pédoncules. On a déjà donné plus haut les noms de ces Circon- volutions (p. 90). La Commissure Antériewe est une bande distincte de fibres blanches, qui traverse la partie antérieure du a troisième ventricule», et pénètre de chaque cOté dans la substance du Corps Strié [fig. 164> ■], Ce n'est point toutefois, comme il le semblerait, une Com- missure unissant ces deux corps. Une dissection soigneuse suffit à montrer que ces fibres traversent simplement le Corps Strié de chaque cété (où elles sont placées dans un sillon ou canal distinct); qu'elles émergent de la surface inférieure et externe de ces corps, et qu'elles vont de là se distribuer aux circonvolutions formant le COHHISSDRES ANTÉRIEURE KT HOVENNi^. 0» sommet et la surraee Interne ou inférieure du Lobe Temporal. Cest, comme le dit Broadbent et comme d'autres anatomistes l'avaient déjà reconnu, une sorte de Corps Calleux accessoire, reliant les parties des deux Lobes Temporaux, qui ne pourraient autrement être mises en relations entre elles. Chez quelques-uns des animaux inférieurs qui ont de gros Lobes Fio. IB], — Coupe horiiODtale du Caneau à ua niieaa inférieur, montruit la Tcaitième Ventricule et ■« Commisaate). et Isi lelatioas de clucuDdea CoipaSIriéa irec riitula de Reil correspondante (Seppajr), l, TrijOEie, rejeté en arriéra avec la Toile Chorol- dienoe pour montrer la TroiiièTOe Ventricule ; S, Veinaa de Oalien ; 3, eitrémilé anté- rieure de la Olande pjiiéale;4, )o> pédoncules loptiieun; 5, CommiiBure Cérébrale Postérieure; B, CoœmiMure Antérieure; 1, coupe de> piliers antérieurs duTtigone; B, Troisième Ventricule, ou V. mojcn; B, Commisiurs Grisa, ou Moyenne; 10, Corpi Strié, dont on a coupé les couches supérieures et erteraes ; 11, Coacho Optique j lî, Tteoia Sanu-circularis ; 18, 14, 15, coupe des Circonvolutions de l'insula de Reil| 1B, coupe du noyau iotra-venlriculaire du Corps Strié; 17, coupa de la Substance Blaurhe de l'Hémisphâre, Ku puiat où elle asl comprise entre l'ietnla de Beil ai la partie supérieure du Corps Strié. et a tractus l Olfactifs, ceux-ci sont directement reliësTun à l'autre au moyen de fibres faisant partie de cette Commissure Antérieure. La Commissure Moyenne est un pont de substance grise molle qui traverse le « troisième ventricule », d'une Couche Optique i l'autre (fig. 164, s; et 157 th.), et peut en conséquence servir i mettre certaines parties de ces corps en relation fonctionnelle. La Commissure Postérieure est une petite bande blanche qui s'étend en travers de la paroi postérieure et supérieure du « troi- 100 STRUCTURE INTERNE DU CERVEAU HUMAIN. sième ventricule » (fig. 164, s), et se recourbe en bas à travers la Couche Optique de chaque côté, de façon à se terminer dans la substance ganglionnaire du Tegmentum. L'existence de ces connexions commissurales entre les Couches Optiques est particulièrement digne de remarque, lorsque nous voyons les deux Corps Striés n'être réunis par des Commissures d'aucune sorte. Il est toutefois important de remarquer que les divers centres en relation avec les impressions centripètes doivent être en relation fonctionnelle les uns avec les autres; tandis qu'il n'y a pas un besoin semblable de Commissures entre les gros gan- glions moteurs supérieurs, — puisque chaque Corps Strié, trans- met et règle seulement les incitations motrices qui proviennent de son propre Hémisphère. b. Commissures réunissant des parties dissimilaires dans le m,ême Hémisphère, — La plus connue de celles-ci, et de beaucoup, est le Trigone Cérébral. On en parle généralement comme d'une commis- sure longitudinale, mais le terme peut tromper, bien que ses fibres affectent pour la plupart une direction longitudinale. Elles servent à mettre en relation la face interne de la Couche Optique et le Grand Hippocampe du même Hémisphère, — ces parties étant situées à peu près dans le même plan vertical transversal . On a déjà indiqué le trajet et les usages fonctionnels de ces fibres (p. 211, vol. P'). Deux groupes accessoires de fibres entrent en relation avec les piliers antérieurs du Trigone : (1) une bande étroite de fibres (de chaque côté) connue sous le nom detœnta semi-drcularis ^(\mj après s'être séparée du «pilier anté- rieur » du même côté, passe en arrière dans le sillon situé entre le Corps Strié 6t la Couche Optique, et disparaît dans la substance de cette dernière, après avoir tourné vers le toit de la corne descendante*; et (2) les pédoncules de la Glande Pinéale, qui se dirigent en avant le long des Couches Optiques, sur les limites supérieures du a troisième ventricule », en diminuant graduellement de volume, et finissant en apparence par s'entremêler avec les « piliers anté- rieurs » de la Voûte, près de Textrémité antérieure de chaque Couche Optique *. Il existe, de chaque côté, un grand nombre d'autres groupes de « fibres commissurales», dont l'office est aussi de mettre en relation entre elles différentes Circonvolutions, plus ou moins distantes, du 1. EUe semblerait donc contenir des fibres servant à unir entre elles deux portions distantes de la même Couche Optique. % Comme ces « Pédoncules » de la Glande pinéale se continuent entre eux postérieurement, ils peuvent former une sorte de « commissure transversale » pour les régions de chaque Couche Optique d*où partent les « piliers anté- rieurs » de la Voûte. TRIGONE CÉRÉBAi^L: ' : . .' :* "• *•*•'- >10t même Hémisphère. Quelques-unes des principales de ces Com- missures sont dirigées dans le sens longitudinal et disposées de la manière suivante * : 1. Un grand système cusial longitttdinal traverse les portions supérieares des Hémisphères. Il contient des fibres allant des Lobes Occipital et Temporal au sommet du Lobe Frontal, recevant ou donnant des fibres lé long de ce trajet à on grand nombre de circonvolutions sus-jacentes. 2. Le système longitudinal du faisceau unciné est un faisceau de fibres situées à un niveau inférieur au premier système, bien qu'elles réunissent les mêmes divisions principales de l'Hémisphère. La portion moyenne du faisceau formant une bande dont il prend le nom, peut se voir sur la face latérale de l'Hémisphère, croisant le fond de la scissure de Sylvius, en passant du Lobe Frontal au Lobe Temporal. En avant, ces fibres passent sous le Corps Strié, d'où quelques-unes se rendent à la troisième circonvolution frontale; d'autres s'étalent sous les circonvolutions orbitaires, pour atteindre l'extrémité anté- rieure du Corps Calleux et les circonvolutions du bord adjacent de la région orbitaire : bien que la grande majorité des fibres se poursuive au-dessous des circonvolutions orbitaires, pour se terminer le long du bord antérieur de PHémisphère. En arrière, les fibres du faisceau unciné se rendent au sommet du Lobe Occipital et aux circonvolutions situées le long du bord inférieur et externe des Hémisphères; tandis qu'un groupe considérable d'entre elles se rend aussi au sommet du Lobe Temporal. 3. D'autres fibres longitudinales inférieures et plus superficielles partent du sommet du Lobe Temporal et se dirigent en arrière, en divergeant, dans le plancher de la a corne descendante » et dans celui de la corne postérieiire, où elles se mêlent avec des fibres du Corps Calleux. 4. Les Circonvolutions de la surface interne plate de l'Hémisphère, et surtout celles du Corps Calleux (gyrus fornicatus), contiennent des fibres longitudinales. On dit que ces dernières partent de 1' a espace perforé antérieur », en avant (Corps Strié), se dirigent en arrière au-dessus du Corps Calleux, contournent son extrémité postérieure, et de là reviennent, d'après Foville, jusqu'au sommet du Lobe Temporal. 5. Certaines fibres longitudinales (nerfs de Lancisi) sont situées sur la face supérieure du Corps Calleux en deux séries, une de chaque côté (flg. 163). On dit aussi qu'en avant, elles entrent en relation avec l'espace perforé antérieur, tandis qu'en arrière leur destination est douteuse. D'après Foville, elles se joignent aux tubercules quadrijumeaux ■, sous laquelle lia passent. En ce point, H y a décussalion; et les fibres de chaque faisceau se rendent alors à un gros noyau de substance gaDglionnaire, situé dans la portion supérieure, ou sensi- tive, du Pédoncule Cérébral, et désigné d'ordinaire sous le nom de Noyau rouge. A partir de là, le cours de ces fibres, ou de celles qui sont en relatiou avec elles, demeure Incertain; mais on croit communément aujourd'hui qu'elles passent sous l'extrémité posté- B. 19S. — PédonculeiSQpérlaiirs d uCetvcle .1. Quai, ■ièiuB Ventricule, et (Sappey.d'sprt. Hirachfeldl. 1, 1, sillon médian sur le plancher dn c culei B, fibr» blMchts pat lee .quelles s laU naïf auditif : 3, belleai lofirleur; 4, colonne mé. iiinepos térieure ;5,PMonculeCétéb rieure de la Couche Optique, et vont de là aux diverses réglons de l'Écorce Cérébrale, — bien qu'on ne les ait pas, en réalité, suivies au delà de diverses parties de la « couronne rayonnante ». On ne sait donc rien sur les Circonvolutions avec lesquelles le Cervelet est mis en relation particulière au moyen de ces fibres des Pédoncules Cérébelleux Supérieurs. On pense toutefois que, du côté du Cervelet, ces fibres sont en partie en relation immédiate avec les portions inférieures des Lobes Moyens (fig. 165); tandis que d'autres, de chaque côté, sont en communlcatloo avec le noyau gris en forme de bourse (fig. 156), ou y pénètrent, avant de se rendre aux diverses portions de l'Écorce du Cervelet. PÉDONCULES DU CERVELET. 105 Entre ces Pédoncules Supérieurs convergents se trouve une lame mince de substance nerveuse, connue sous le nom de f valvule de Yieussens », et qui unît le Lobe Moyen du Cervelet aux Tuber- cules Quadrijumeaux. Cette partie est proportionnellement plus développée chez les Vertébrés inférieurs, comme les Poissons, et sert à mettre leurs gros « lobes optiques » en relation de structure avec la seule portion du Cervelet dont ils soient pourvus, c^est-à- dire le Lobe Moyen. Cette lame forme le toit de la moitié supé- rieure ou antérieure du « quatrième ventricule » (fig. 152), ainsi que de la première partie du passage qui réunit cette cavité au « troi- sième ventricule ». Les Pédoncules Inférieurs^ ou oc Corps restiformes », comme on les appelle aussi, unissent le Cervelet avec le Bulbe et la Moelle (fig. 165). A l'intérieur du Cervelet, les fibres de ces Pédoncules n'entrent pas, dit-on, en relation avec les noyaux gris centraux, en forme de bourse, mais se rendent immédiatement aux différentes régions de la substance grise corticale. La portion interne de chaque Pédoncule Inférieur semble être composée des prolongements centripètes du Nerf Auditif, dont on peut suivre les fibres depuis son propre noyau externe jusqu'au noyau du toit de Stilling, du même côté et du côté opposé. Mais, d'après ce que dit Meynert, la portion externe du Pédoncule est dérivée de la colonne postérieure opposée de la Moelle* de la manière suivante. Les fibres de la colonne médiane postérieure {funiculus cuneatus et gracilis] entrent ou viennent en relation avec les cellules ganglionnaires du corps olivaire correspondant. De là, elles croisent la ligne médiane du Bulbe, en arrière des py- ramides antérieures^ pour contourner l'Olive opposée, avant d'é- merger, sous forme de fibres arciformes, de la région postérieure et latérale du Bulbe. Elles se jettent de là dans le Pédoncule Inférieur, et remontent en en faisant partie. Ainsi, les fibres de chaque « co- lonne postérieure » s'enfoncent au-dessous de la surface de la Moelle, et, après avoir passé à travers VOlive correspondante, croisé la ligne médiane du Bulbe et contourné l'Olive opposée, elles émergent comme parties constituantes du corps restiforme, ou Pédoncule Cé- rébelleux Inférieur. Cet arrangement ne doit point être regardé comme absolument hors de doute : il est en effet nié par Luys. Les Pédoncules Moyens forment ensemble la Protubérance ou Pont de Varole. Les fibres de chacun d'eux (fig. 166) émergent de différentes parties de la substance corticale du « lobe latéral » corres- pondant du Cervelet; et, tandis que quelques-unes de ces fibres sont, à ce que Ton croit, de nature « commissurale »,et croisent simple- ment d'un lobe latéral à l'autre, il y a décussation sur la ligne médiane de la majorité des fibres des deux Pédoncules Moyens. 106 STROCTDBK INTEKHS DC CERVEAU HUMAIN. Par le moyen de ces Pédoncules, chaque moitié du Cervelet est mise en relation avec les fibres motrices descendant du Corps Strié opposé (dans le Pédoncule Cérébral correspondant), ou bien avec quelques-unes des cellules du Corps Strié lui-même, graee à ce que quelques fibres des Pédoncules Cérébelleux se recourbent en baut, à partir de la a protubérance s, pour se terminer dans ces gan- glions, — exactement comme d'autres, suivant un trajet semblable, 12, IS, pédoBCiilssCârébellaiii Moyens, rorméi par l'uiuaii de ces Unis séries de fibrea; le pédoncule gmcbe eal coupé prii de (On origine, le droit est en partie diatéqaé ; 13. UoeUe; 14, sillon médian du Bulbe) 15, 15, décussation des P]T»niideB (16); n, OliYs; 18, fibteiArcilormeB. traversent, à ce que l'on suppose, ces ganglions pour se rendre aux Circonvolutions Cérébrales. Tout ce quel'on sait positivement, c'est quechaquea lobe latéral » du Cervelet est principalement en relations par son Pédoncule Moyen avec le Iractus moteur de l'Hémisphère Cérébral opposé. Et ce fait est par lui-même de quelque Importance, puisque, au milieu de tous les doutes que nous conservons sur le Cervelet, Il semble- rait Impliquer que la masse des fibres de ces Pédoncules est i cen- trifuge > DU motrice, — conclusion d'accord avec d'autres preuves. HISTOLOGIE DO CERVELET, 107 Qu'il y ait toutefois des points de jonction avec des fibres motrices cérébrales du côté opposé dans la a protubérance » elle-même, ou dans son voisinage, comme le pense Luys; ou que des fibres cérébel- leuses de cette nature remontent réellement jusqu'aux cellules des Corps Striés, — ou même au delà, jusqu'à certaines parties de l'Écorce des Hémisphères Cérébraux, — ce sont là des détails qui ne sauraient être décidés à présent. 8. — STRUCTURE INTIME DE LA SUBSTANCE GRISE DU CERVELET. La Substance Grise corticale est en apparence uniforme sur tous les innombrables plis de la surface du Cervelet. A Toeil nu, elle est divisible en deux couches (fig. 167) : une extérieure, gris clair; et une interne, plus mince, rouge grisâtre. En dedans de la couche grise de chaque repli se trouve un axe de substance blanche. Dans la partie la plus profonde de la couche externe se trouve un simple rang de grosses cellules ganglionnaires de 0™™,027, à 0™"*,033 de diamètre, dont les grands prolongements branchus se réunissent dans toute cette couche, en devenant plus minces à me- sure qu'ils approchent de la surface ("fig. 167, bb). Les ramifications ultimes de ces prolongements nerveux s'unisssent avec une sorte de tissu connectif pour former une gangue fibreuse fort délicate, où sont dispersés un certain nombre de petits corpuscules. Ceux-ci sont de simples corps nucléiformes, ou de petites cellules anguleuses; et, de même que pour les corpuscules similaires de la substance grise du Cerveau, il est impossible de dire ceux que Ton doit regar- der comme appartenant au tissu connectif et ceux qui ont droit au titre d'éléments nerveux. Beaucoup d'entre eux, comme s'en est assuré W.-H.-O. Sankey, sont en continuité directe avec les rami- fications des cellules ganglionnaires. Courant le long de la partie interne de cette couche, en croisant la direction des grosses branches des cellules ganglionnaires, se voit un certain nombre de fibres nerveuses fines. Les grosses cellules ganglionnaires empiètent sur la face ex- terne de la couche suivante, qui porte le nom de couche granu- leuse. Là, sont massées des multitudes de corpuscules de 0"°»,007 à Omm^OlO de diamètre, fort semblables à ceux qui sont épars, en moins grand nombre, dans la couche externe. Le prolongement interne de chacune des grosses cellules ganglionnaires est, dit-on, unique et non divisé ; mais, comme il est trèsfin,on le perd bientôt de vue dans la « couche granuleuse », dense, dans laquelle il s'enfonce. Le mode de connexion de l'axe central de fibres blanches avec la couche granu- leuse et les éléments situés en dehors d'elle, est, pour le moment, ±m STRDCTORE INTERNE DO CERVEAD HUMAIN. fort Incertain. Des granules, ou corpuscules de même nature, sont aussi, quoique en moins grand nombre, disséminés dans cette sub- stance blanche. U semble tout à fait probable que quelques-unes des fibres de Pio. 1S7. — SubiUnce Uiùa du Ceivelat. Coupe, grottie à environ 400 diamëtres (Sharper, d'Bprti Sankey). a, pi«-mère du Cerrelel; b, b, cooche externe grise; e, gnHtes cellule) gaDgIlonnairat; d, coucha ïnteTne, louge gris9tie, on coucbe granultutt; t, axe de £b»ï blnochaa. chaque axe de substance blanche sont afférentes; et que les autres conduisent des Impressions ou impulsions e/férenles. Les premières fibres peuvent se diviser dans la « couche granuleuse », de manière à CONNEXIONS DES NERFS CRANIENS. 109 entrer en relation avec deux ou plusieurs cellules ganglionnaires; et les sUmtUi centrifuges peuvent partir de ces groupes de cellules, passer dans la couche externe par leurs branches ramifiées, et de là, par des radicules contiguês de fibres « efférentes » qui se réunis- sent entre elles à mesure qu* elles vont, passer à travers la a couche granuleuse », et sortir par Taxe de substance blanche. Ce dernier arrangement est hypothétique, mais il semble à Tauteur être le mieux en accord avec la structure réelle de la substance grise du Cervelet. 7. — Connexions centrales des Pédoncules olfactifs ET optiques, ainsi QUE d'AUTRES NERFS CRANIENS. Les Pédoncules, ou « bandelettes » Olfactives, et les Pédoncules, ou <( bandelettes » Optiques, sont généralement regardés comme quelque chose de différent des nerfs ordinaires. On les considère comme des excroissances spéciales, ou prolongements du Cerveau. Une dis- tinction de ce genre est sans doute légitime pour ce qui regarde beaucoup d'animaux inférieurs. Il en est ainsi, par exemple, chez les Poissons, aussi bien que chez quelques Reptiles et Mammifères, chez lesquels les Centres Olfactifs sont extrêmement bien développés; et chez les Insectes et les Céphalopodes, où les yeux et les Centres Optiques sont fort gros. Mais, chez THomme, où ni le sens de la Vue ni celui de TOdorat ne sont développés d'une manière aussi extraordinaire, et chez lequel les Centres primaires correspondants sont relativement petits, toute distinction de ce genre est moins évidente. Chez lui, en réalité, il n'y a aucune bonne raison pour la maintenir pour les bandelettes optiques, puisque ces par- ties diffèrent peu en apparence des nerfs ordinaires. Une distinction de cette nature est toutefois mieux justifiée pour les bandelettes olfactives; puisque, même chez l'Homme, c'est en dehors du Cer- veau que sont situés les Ganglions Olfactifs, d'où partent des Nerfs Olfactifs très petits, qui descendent dans le nez. Il faut exposer brièvement le trajet et les connexions centrales de ces parties. La « bandelette » Olfactive est reliée avec la région postérieure delà surface orbi taire de THémisphère par trois racines: Texterneva en dehors, vers l'extrémité inférieure du Lobe Temporal du même côté, comme on peut le reconnaître aisément chez les Mammifères où les Lobes Olfactifs sont gros, bien qu'on ne puisse Tapercevoir chez l'Homme qu'avec quelque difficulté. La racine interne entre dans l'Hémisphère près de son bord interne, et un peu en avant de la Commissure Optique. On reviendra plus loin sur les relations des fibres des Bandelettes Olfactives, et sur ce fait qu'elles entrent en 110 STRUCTORE INTERNE DU CERVEAD HDHAIN. relation, de chaque cAté, avec des Clrconrolutions de l'Hémisphère correspondaot, et non de l'Héintspbère opposé {voy. p- 119, ISA)- Les > bandelettes » Optiques sont la continuation des Nerfs Opti- ques en arrière de la Commissure Optique. Chaque a bandelette » est en contact avec le bord externe du Pédoncule Cérébral, et le con- tourne en s'aplatissantàmesurequ'eiles'avance. Arrivées là,cliacune luué lut le c6U droit NecfOlbclif, coupi;II. Nert Optiqua e, Tnbsr cinoreumel infandibulnm; a, an da Taberoule» numillaire» ; P, PMont Cii«bnl; ni, V, U gioi«8 racine du einquiSme nerf (TTyum igsnglionileGM VI, Ocolo-motBur aileniB; Vllo, Facial ; VII 6, Auditif; VILl Pnenmo-gvtlîiina. i Vague; Vin a, Olowo-phurfnKien; Vlll A. gpi i laqnaUi da Chiuma ; IV, Buidelatta Optique ■pi PilniliiTa! PV, Piûtutiénnoei du Trijiuneau ; is antérlaora, at et, colonsa latérale de la Uoelle. :, HTpoglotis; fl, flaeeul\A> da Coipi RMliforme: d, feule mAdiaaa drcuualïon du P^ramidei; des deux entre en relation avec deux petits nodules ganglionnaires (connus respectivement sous lea noms de corps genouiilés Internes et externes), situés & l'extrémité postérieure de la Couche Optique (fig. 168, Cj t; 156, •) en conti^ïté avec le segment antérieur adjai- CONNEXIONS DES NERFS CRANIENS. 111 cent des Tubercules Quadrijumeaux, avec lesquels (ainsi qu^avec la Couche Optique elle-même) un grand nombre de ces fibres, sinon toutes, entrent en relation, avant de se continuer jusqu'à certaines régions de la partie corticale de rHémisphère Cérébral corres- pondant. Bien que le sujet ne soit point sans incertitude et sans quelque doute, les preuves semblent maintenant tout à fait en faveur de Topinion que la décussation, qui a lieu dans la Commissure Optique, est aussi complète chez THomme qu'on la connaît chez les Ver- tébrés inférieurs*. On reviendra de nouveau là-dessus, dans un chapitre subséquent, au sujet de la question de savoir quelles sont les parties de TÉcorce des Hémisphères qui sont le plus immédiatement affectées par les Impressions Visuelles. Il semblerait donc que les Conducteurs Olfactifs ne se croisent pas du tout, et que les conducteurs Optiques subissent une décus- sation complète. Cependant Tentrecroisement de ces derniers conducteurs a lieu en dehors de la substance cérébrale; de sorte que, sous ce rapport, leur arrangement diffère de ce qui existe pour les deux Nerfs Crâniens sensitifs suivants : le Trijumeau et TAuditif. La position du Tr^umeau et sa connexion superficielle avec la face latérale de la « protubérance » peuvent être vues sur la fig. 168, v. Ses fibres sensitives, après avoir traversé le ganglion de Casser, se réunissent pour former la grosse racine dont les fibres, comme celles des racines postérieures des Nerfs Spinaux, croisent bientôt vers le côté opposé, et vont faire partie du tractus sensitif, ou tegmentum, du Pédoncule Cérébral opposé. (Voyez p. 117.) Le Nerf Auditif entre dans le côté du Bulbe, Immédiatement au- dessous de la « protubérance », en relation intime avec la racine du Nerf Facial. Nous avons encore beaucoup à apprendre sur la marche subséquente, fort compliquée, de ses fibres. Une grande partie, du moins, d'entre elles, semble entrer dans le Cervelet; et la manière dont l'Hémisphère Cérébral opposé est mis en relation avec ses fibres et ses noyaux d'origine demeure tout à fait obscure. Meynert dit même* : « Nous pouvons regarder comme certain qu'il n'existe pas de connexion immédiate, étendue, entre le nerf auditif et les Lobes Cérébraux; mais qu'une relation de ce genre, dont on peut regarder l'existence comme une vérité physiologique nécessaire, ne peut être qu'indirectement établie par le Cervelet. » On ne saurait déterminer à présent jusqu'où cette opinion de Meynert est absolument correcte. Nous savons, toutefois, d'après les 1. Voy. Ferrier, Functions of Brain, p. 70 et 166. 2. Stricker : Histology, vol. II, p. 500. STRDCTURB INTERNE DD CBRVBAD HOUAIN. 1, Faemna-gutHqag; a, anulomoiaa dn Pneiuno-guttJqDO avec l'Hypogloue; S, tes BDDStamoiei stoc onebtaiictas du Spinal; 4, braoche Pharyngisniio; 5, aatt I-acrngâ •upérlani; H, Lxrjugé eiteCDS; 7, pleius Lsi^agien; 3, neir CaidiaquB aupérieui; 0, Cardiaque moyan; 10, 10, narf Lairna* récurront; 11, ganglion Pulmonaira ; 12, laa asaitomom kiec la grand Sympatliique ; 13, plein) Pulmonaiia poitériani; 14, pleuit Œtopluglen', 15, anutamoaat du PsenmD-gailriqaw droit et gmcba; CONNEXIONS DU SYSTÈME NERVEUX VISCÉRAL. 113 preuves dont on parlera plus loin au sujet de THémianesthésieCp. 123), qu'il y a réellement décussation des conducteurs auditifs; et que ces conducteurs s'incorporent finalement avec d'autres fibres des Pédon- cules Cérébraux, comprises dans le tiers postérieur de ce que Ton désigne sous le nom de capsule interne. Il ne faut point oublier, en outre, que d'après Cyon (voyez vol. I»', p. 169), ce qui est nommé par lui Nerf de l'Espace (Raumnerv) est aussi lié au nerf Auditif, et fait partie du tronc communément connu sous ce nom. Si cette opinion est correcte, il resterait à déterminer et à différencier le trajet interne des portions appar- tenant à chacun de ces nerfs. Il se peut que ce soient les fibres du nerf de l'Espace qui entrent plus spécialement en relations immé- diates avec le Cervelet. (Voyez p. 137.) On parlera, dans la section suivante, des deux autres nerfs sen- sitifs du Bulbe, le Glosso-pharyngien et le Pneumo-gastrique. La situa- tion des nerfs « moteurs » se verra en examinant la figure 168 ; bien qu'il n'y ait pas besoin de s'y arrêter davantage ici. 8. — CONNEXIONS DU SYSTEME NERVEUX VISCÉRAL AVEC LE CERVEAU. Les relations des Nerfs Systémiques avec le Cerveau ne diffèrent point essentiellement, chez l'Homme, de ce qui existe chez la grande majorité des autres Vertébrés supérieurs. Chez tous, le Système Nerveux Viscéral est divisible en deux parties, dont les connexions avec le Cerveau sont en partie directes, en partie indirectes. 1* Nerfs Systémiques Cérébraux. — Le segment le plus inférieur de l'Encéphale — le Bulbe — est mis en relation immédiate avec le plus grand nombre des viscères du corps par le Glosso-pharyngien et le Pneumo-gastrique, comme nerfs « afférents » . Us le relient avec toute l'étendue du canal alimentaire au-dessous de la cavité buc- cale, avec les organes respiratoires, avec le cœur et quelques-uns des grands vaisseaux; avec le foie, la rate, les reins, et peut-être aussi avec les organes internes de la génération. De la même région de l'Encéphale (le Bulbe) partent aussi des fibres « efférentes » qui se rendent à quelques-uns des viscères ci- 10, branches de l'extrémité Cardiaque de l'Estomac; 17, branches de ia petite cour- bure; 18, branches de la face antérieure; 19, branches Hépatiques ; 20, Giosso-phar^m- gien ; 21, Spinal ; 22, sa branche interne s'anastomosant ayec le Pneumogastrique ; 23, sa branche externe se rendant au Trapèze, et s'anastomosant avec (24) le quatrième nerf Cervical; 25, ganglion Cervical supérieur; 26, ganglion Cervical moyen; 27, ganglion Cervical inférieur, uni au premier Dorsal; 28, 29, 32 ganglions Dorsaux; 30, grand nerf Splanchnique ; 31, origine du nerf Phrénique. Dans cette figure le Cœur a été enlevé, le Poumon gauche tiré en avant, et sa racine en partie disséquée ; le Foie a été écarté de l'Estomac. Chablton-Bastian. — II. 8 114 STRUCTURE INTERNE DU CERVEAU HUMAIN. dessus mentionnés. Ces fibres efférentes ou motrices ne sont point réunies en troncs séparés ; elles sont principalement renfermées dans le Glosso-pharyngien et le Spinal accessoire, dont elles sont parties constituantes. Lesviscères qui ne reçoivent pas de fibres a efférentes » de cette source en reçoivent de la Moelle et de Tappareil nerveux, que nous allons mentionner à présent. 2^ Le Grand Sympathique est un système compliqué et étendu des nerfs, et se compose des parties suivantes : — (a) un cordon ganglion-- naire, situé de chaque côté de la colonne vertébrale, et relié avec les 5®, 6% 7®, 8® et 9® paires de Nerfs Crâniens, et aussi avec les branches antérieures des divers Nerfs Spinaux, tout le long de la Moelle. Ces dernières communications sont principalement établies, de chaque côté, par des paires de filaments (dont les fibres sont en partie « afférentes » et en partie « efférentes ») qui passent des divers nerfs spinaux antérieurs aux ganglions correspondants du Sympathique, situés un peu en avant des nerfs spinaux (fig. 170). On trouve, en outre, d'autres Ganglions, à la jonction de quelques-uns des Nerfs Crâniens sus-mentionnés avec les cordons latéraux du Sympathique. {h) Du cordon ganglionnaire, de chaque côté, partent de nom- breuses branches internes, qui s'unissent entre elles, avec celles du côté opposé et avec des filaments des Nerfs Vagues, de manière à former, soit de grands Plexus, soit des Ganglions, soit à la fois des plexus et des ganglions, d'où partent, et où reviennent, des branches en connexion avec les différents Viscères. On trouve souvent des gan- glions plus petits sur le trajet de ces dernières branches. Les principaux Plexus systémiques sont situés vers le cœur et la racine des organes respiratoires, dans le voisinage de l'estomac (plexus solaire), et dans le voisinage de la vessie et des organes géni- taux internes. Les nerfs en connexion avec les Plexus qui donnent ou reçoivent des branches viscérales, se distribuent principalement en suivant le trajet des vaisseaux sanguins. Quelques-unes des fibres de ce sys- tème se distribuent spécialement aux parois des Vaisseaux, et sont, d'après la nature de leurs fonctions, appelées nerfs vaso-moteurs, \}nç^ partie d'entre eux doit avoir des fonctions « afférentes i, tandis que d'autres transmettent des impulsions « efférentes », déterminant la contraction des vaisseaux : de sorte qu'au moyen de ces nerfs, la quantité de sang qui passe dans les diverses régions du système vasculaire peut être aisément réglée. Les nerfs a vaso-moteurs » sont en connexion avec de petits ganglions distribués sur les vaisseaux. Des excitations motrices émanent de ceux-ci, bien que l'ensemble du système « Vaso-moteur » du corps tout entier semble soumis à Tin- fluence d'un « centre régulateur », situé dans le Bulbe, et d'autres centres subordonnés, situés dans la Moelle. SïSTËHE NERVEDK SYMPATHIQUE. 115 Bien que le Système Sympathique renferme probablement aes propres nerfs afférents et efférents intrinsèques, il semble aussi envoyer (par les rameaux de communi- cation Bus-m en tiennes) des nerfs affé- rents à la substance grise de la Moelle, et en recevoir certaines fibres efféren- tea, motrices et autres. Ce Système ner- veux grand Sympathique est, dans une certaine mesure, un système développé d'une manière indépendante; bien qu'il ait aussi, avec la Moelle, des relations présentant des ressemblances fort inti- mes avec ce qui existe entre les deux îterfi systémigues cérébraux et le Bulbe. Les arrangements qu'on vient de décrire non seulement facilitent l'ac- tivité coordonnée des Viscères en rela- tion, mais assurent l'activité simultanée des Centres Nerveux Viscéraux et Céré- bro-spinaux, lorsque cette activité asso- ciée est requise, — comme dans les processus respiratoires, l'ovulation et la parturition, ou l'expulsion des excré- tions. En outre, k raison de la con- nexion directe ou indirecte existant f,o. no, —un dos Ganglions s^m- entre les Viscères et le Cerveau, les pathiquss du cordon Laiérai droit états organiques des divers organes du Lapia (Owen, d-après Koiiikat^ L. „ » . . r P, Cordon Laléial du Sïinpa- sont capables a affecter le caractère ou tbiquo; flc, ii c, dom braneiias état mental de l'individu, soit incon- communiquante»; SfJ.aerfSpUn- sciemment, soit d'une manière con- sciente. Des états viscéraux peuvent, indépendamment de leur réalisation consciente, pousser à des Actes automatiques ou Instinctifs, ou peuvent s'imprimer sur la Vie Consciente de l'individu, et conduire plus ou moins indirectement à une série d'Actions Volontaires. G, ceUulBsganglionn, CHAPITRE XXIV RELATIONS FONCTIONNELLES DES PRINGIPAL'eS PARTIES DE l'encéphale Nous passons maintenant de Texamen des détails de structure à la question de leur signification ; et nous tâcherons que le lecteur puisse acquérir quelques notions — si faibles qu'elles puissent être — de la manière dont agit le Cerveau dans Taccomplissement de ses fonctions les plus simples. Nous devrons nous guider dans cette tentative sur trois séries de faits et de déductions : (1) ce qui nous vient de l'étude Anatomique du Système Nerveux de l'Homme et des animaux inférieurs ; (2) ce qui vient d'Expériences sur les animaux inférieurs, où les Nerfs, ou d'autres portions du Système Nerveux, ont été excités ou détruits ; (3) enfin sur ce que rapportent les médecins qui ont voué une attention spéciale aux symptômes provenant des Maladies ou des Lésions qui irritent ou détruisent diverses portions du Cerveau de l'Homme. Dans chacune de ces directions, nos connaissances ont fait, pen- dant ces dernières années, un pas très appréciable, et continuent à progresser. Dans ce chapitre préliminaire sur le mode d'action du Cerveau, l'attention du lecteur sera appelée sur ce que l'on connaît touchant trois séries de relations structurales d'Importance fondamentale. 4. — relation CROISEE EXISTANT ENTRE LES HÉMISPHÈRES CEREBRAUX ET LES MOITIES LATERALES DU CORPS. Les corps de la grande majorité des Invertébrés, aussi bien que des Animaux Vertébrés, présentent la symétrie bilatérale, — du moins pour ce qui regarde tous les organes extérieurs et toutes les parties du Système Nerveux. De sorte que, si Ton divisait un de ces animaux par un plan vertical, médian et longitudinal, chacune des moitiés RELATION CROISÉE DU CERVEAU ET DU CORPS. 117 du corps se trouverait semblable à l'autre sous tous les rapport?, extérieurement du moins, et renfermerait aussi la moitié d'un Système Nerveux semblable à ce qui existerait dans son homologue. Toutefois, d'après ce que nous savons aujourd'hui, le double Système Nerveux des Invertébrés est, avec leur double corps, dans une relation absolument différente de celle qui existe entre les mêmes parties chez les Vertébrés. Chez les premiers, la moitié du Cerveau contenue dans chaque moitié du corps est en connexion immédiate avec les organes des sens et les surfaces sensibles, aussi bien qu'avec les nerfs moteurs et les muscles du même côté du corps. Chez les Vertébrés, au contraire, il n'en est point ainsi. Il existe, à un certain degré chez les membres inférieurs de la série, et à un degré plus parfait chez les formes supérieures (y compris les Qua- drumanes et l'Homme), une relation croisée entre le Cerveau et le corps ; de manière que chaque moitié du Cerveau est reliée aux organes des sens et aux surfaces sensibles, ainsi qu'aux muscles de l'autre moitié du corps, La première relation est établie par les con- ducteurs sensiiifs qui se croisent à la base du Cerveau et le long de la Moelle; et la seconde est due au fait que les conducteurs nerveux pour les stimuli centrifuges, ou moteurs, passent, de chacune des moitiés du Cerveau, au côté opposé du Corps, en subissant une dé- cussatîon dans le Bulbe. On n'a encore hasardé qu'un fort petit nombre d'explications sur ie mode d'origine de cette relation croisée entre le Cerveau et le corps. Le sujet est généralement passé sous silence; et, quoique notre connaissance des relations anatomiques exactes qui existent chez les animaux inférieurs ne soit point encore assez parfaite pour nous donner une réponse tout à fait satisfaisante, on peut présenter ici quelques suggestions qui, si elles ne démontrent rien de plus, serviront peut-être à attirer davantage l'attention sur cette question fort intéressante, et indiqueront en même temps les directions où l'on a besoin d'informations plus précises. La nature essentielle du problème apparaîtra fort distinctement, si le lecteur essaye de se figurer chez les Vertébrés l'existence d'un Système Nerveux semblable, sous tous les rapports, à ce qu'il est en réalité, sauf que les conducteurs sensitifs et moteurs ne s'entre- croiseraient pas. Avec les deux moitiés du Cerveau et de la Moelle aussi librement réunies par des commissures transversales qu'elles le sont en réalité, une relation directe de ce genre semblerait l'arrange- ment le plus naturel; il n'est donc point du tout expliqué pourquoi le même plan n'existe et ne fonctionne pas aussi bien chez les Vertébrés que chez les Invertébrés, La question à laquelle il faut répondre est donc : Quelles conditions se sont présentées chez les Vertébrés pour commencer, et finalement parfaire, cette relation croisée entre 118 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. le Cerveau et le corps, telle que nous la trouvons chez THomme et les Mammifères supérieurs en général? Les considérations suivantes paraissent à Tauteur jeter quelque lumière sur ce sujet. 1. Les mouvements ont lieu en réponse à des impressions sensitives de diverses natures ; et (pour notre objet présent) on peut les diviser en deux classes : — (a) ceux dans lesquels les muscles en relation des deux côtés du corps sont mis simultanément en activité •— comme les muscles du tronc, servant à la locomotion chez les Poissons et un grand nombre de Reptiles sans membres; et (&) ceux dans lesquels les muscles d*un côté, et spécialement d'un membre, sont seuls mis en activité, ^- soit par un réflexe ordinaire, soit d*une manière volitionnelle. 2. Le plus grand nombre des mouvements des Poissons et des Reptiles Ophidiens appartiendrait à la première catégorie; et, comme Broadbenti Ta signalé le premier chez l'Homme, nous avons la preuve que des mouvements de cet ordre peuvent être aussi bien évoqués par un stimulus passant d'un côté ou de l'autre du Cerveau à Tune des moitiés de leurs Centres Spinaux, doubles mais intimement combinés. Gela étant, ce serait peut-être une affaire relative- ment peu importante pour ces animaux, que quelques-uns de leurs organes sensoriels principaux, comme les yeux par exemple, fussent en relation structu- rale, par leurs nerfs optiques, avec la moitié du cerveau située du même côté, ou avec celle du côté opposé. 3. Les Poissons sont les premiers animaux chez lesquels nous trouvions un arrangement croisé de certains conducteurs sensitifs importants. Leurs Nerfs Optiques subissent une décussation très complète*. Nous ne savons pas toutefois, d'une manière certaine, si quelqu'un de leurs autres conducteurs sensoriels est semblablement disposé; il n'y a non plus aucune preuve que les fibres consti- tuant leurs conducteurs moteurs subissent une décussation. 4. Ainsi donc, chez les Poissons, nous avons affaire à ce qui peut être et n'est probablement qu'un simple commencement partiel de la relation croisée entre le Cerveau et le corps; et l'on peut concevoir qu'une relation de ce genre puisse avoir été déterminée, ou du moins favorisée, chez quelqu'un des Poissons primitifs, par deux ou trois particularités physiques de ces êtres. L'élongation de la tête d'un Poisson — conformation sans doute en relation intime avec la vie de l'animal et ses mouvements dans un milieu aquatique — ainsi que la position latérale des yeux, peuvent avoir été pour quelque chose dans la pro- duction d'une décussation des bandelettes optiques, à l'époque de leur bour- geonnement, chez quelques formes primitives des Poissons s. 1. BHt. and For. Med. Chir. Review. 1866. 2. Bien que, d'après Siebold, il y ait exception à cette règle chez le Bdel-' lostoma, appartenant à la classe des Myxinoîdes, la plus inférieure des Poissons. 3. Marshall (OtUlines of Physiology, vol. I«', p. 602) s'efforce d'expliquer cette décussation primaire, en supposant qu'elle dépend de la réversioD latérale des images optiques, occasionnée par la forme concave de la rétine chez les. Poissons. Mais ses raisons ne semblent pas satisfaisantes; car, avec une rétine CAUSES DE LA RELATION CROISÉE. 119 5. Mais lorsqae des membres distincts apparaissent chez les Reptiles supé- rieurs, et lorsque, chez les Oiseaux et les llammifères, les mouvements de membres plus ou moins semblables deviennent de plus en plus volitionnels et indépendants les uns des autres, on pouvait s'attendre à ce que deux résultats additionnels suivissent la décussation primaire des Nerfs Optiques (de quelque manière que celle^i ait été déterminée) : — (a)f ceux des conducteurs « sensitifs » dont les impressions sont les plus importantes pour Tinstigation des mouve- ments des membres, tendraient aussi à se croiser; car il serait fort essentiel que des Impressions Tactiles et Auditives, plus ou moins unilatérales, soient mises en relation dans les centres avec des Impressions Visuelles venant du même c6té du corps ; (6) coïncidant avec l'établissement d'une décussation des conducteurs sensitifs, — et spécialement de ceux du Sens Tactile et de la sensi- bilité commune, — chez des animaux habitués à accomplir des mouvements volontaires unilatéraux, nous pourrions nous attendre à trouver une tendance à rétablissement d'une relation croisée correspondante entre les conducteurs moteurs du Système Cérébro-Spinal. Ainsi la moitié du Cerveau qui a d'abord reçu les impressions sensorielles instigatrices, serait mise à même d'envoyer les excitations motrices, — soit pour les mouvements réflexes, soit pour les mouve- ments volitionnels des membres d'un seul côté du corps. Et, s'il ne doit pas y avoir de décussation séparée pour les conducteurs des incitations motrices réflexes etdesvolitionnelles,les croisements des conducteurs moteurs, tels que nous les trouvons dans le Bulbe de THomme et de beaucoup d'autres vertébrés (décussation des Pyramides), sembleraietft être le seul arrangement naturel. 6. Cet arrangement croisé, plus complet, semble n'ôtre aussi parfait que chez les Mammifères supérieurs et l'Homme. 7. Un arrangement croisé des conducteurs sensoriels semblerait moins essentiel, dans le cas du Goût et de l'Odorat, que pour aucune des autres sortes d'impressions centripètes : d'abord, parce que les organes de ces sens sont situés, plus qu'aucun des autres, sur la ligne médiane du corps ; et en second lieu parce que les impressions du Goût et de l'Odorat provoquent peut-être moins immédiatement que celles des autres sens des mouvements unilatéraux des membres. Les nerfs du Goût étant toutefois liés à deux nerfs de sensibilité commune (le Trijumeau et le Glosso-pharyngien) ou en faisant partie, suivent pour ainsi dire les troncs nerveux auxquels ils appartiennent, et se croisent avec eux. Mais, pour les conducteurs Olfactifs, c'est là un fait remarquable, ils sont les seuls où l'on n'ait pas constaté de décussation^ ni chez les animaux infé- de même forme, il n'existe pas de relation croisée chez les Seiches ; et parce que rien ne prouve que les conducteurs « moteurs » subissent une décussation analogue (ce que suppose son hypothèse) cheï les vertébrés inférieurs privés de membres, où commence la décussation des bandelettes optiques; enfin, parce que l'expérience de ceux qui travaillent au microscope tend à montrer la faci- lité avec laquelle les mouvements des mains s'habituent à un renversement de l'image optique — comprenant même un renversement des parties supé* rieures et inférieures, aussi bien que des parties latérales. Cette dernière raison aide à montrer qu'il n'était pas besoin, comme semble le supposer Marshall, de changements anatomiques importants pour obvier à un simple renversement des images optiques. 120 RELATIONS DES PARTIES DE L*ENCÉPHALB. rieurs ni chez THomme. Les Centres Olfactifs des deux Hémisphères sont toutefois très largement réunis au moyen de fibres commissurales, — princi- palement réunies dans la commissure antérieure^ dont elles constituent la plus grande partie. Voici donc, brièvement, l'opinion de l'auteur : La relation croisée entre les moitiés du Cerveau et du corps peut avoir commencé, chez quelques Pois- sons, d'une manière quasi-accidentelle; et, dans la première phase de son existence, elle n'était et n*est encore représentée que par la décussation des Bandelettes Optiques; chez les animaux supérieurs, pourvus démembres bien formés, les mouvements réflexes et volitionnels, de ceux d'un seul côté, sont très souvent évoqués en réponse à des excitations sensitives unilatérales ; de sorte que, chez ces animaux, il y aurait avantage marqué si d'autres conducteurs sensitifs étaient, par décussation, mis en relation, à leur extrémité centrale, avec ceux du Sens Visuel ; finalement, les mêmes influences, quelles qu'elles puissent être, qui déterminent cette décussation additionnelle des conducteurs sensitifs, doivent amener, comme conséquence également nécessaire, celle des conducteurs moteurs destinés aux membres. L'arrangement croisé des nerfs sensitifs et moteurs que l'on rencontre chez l'Homme et les Mammifères supérieurs, doit donc être regardé comme une suite presque nécessaire, au point de vue de la théorie de l'évolution, d'une décussation primaire, et peut-être presque acci- dentelle, des Bandelettes Optiques des Poissons. 2. ^RELATIONS FONCTIONNELLES DES HÉMISPHÈRES CÉRÉBRAUX. — DUALITÉ DU CORPS ET UNITÉ DE l'ESPRIT. On admet généralement aujourd'hui que les deux Hémisphères Cérébraux contiennent les prolongements ultimes des nerfs « centri- pètes » ou nerfs Sensitifs, et sont constitués par le groupement des centres organiques (largement réunis entre eux par des fibres « com- missurales ») de tous ces processus mentaux supérieurs que nous avons vus dériver de Texercice de la Sensibilité consciente, c'est-à- dire des processus spécialement automatiques de Perception, Idéation, Émotion, Conception, Raisonnement, et des processus plus volitionnels d'Attention, Souvenir, Imagination et Induction. Les Hémisphères Cérébraux contiennent toutefois , outre les Centres Sensitifs et ceux des processus dérivés sus-indiqués, des multitudes de fibres et quelques Centres servant à conduire et à grouper conve- nablement les courants « centrifuges ». Parmi les diverses commissures transversales déjà décrites, une, plus importante que les autres, mérite maintenant un moment d'at- tention. C'est la grande commissure transversale, ou Corps Calleux, qui, se montrant d'abord chez les Mammifères inférieurs, s'accroît de volume chez les membres supérieurs de la série, et atteint chez THomme son maximum de développement. Comme on l'a établi dans le dernier chapitre, les fibres du Corps Calleux traversent d'un RELATIONS DES HÉMISPHÈRES ENTRE EUX. 121 Hémisphère à Tautre, de manière à mettre en relation des aires correspondantes de la Substance Grise des circonvolutions. Elles ne réunissent pas également toutes les circonvolutions, mais spécia- lement celles qui sont aussi en relation avec les gros ganglions basi- laires (Broadbent). La Commissure Antérieure, bien que partie mor- phologiquement distincte, semble avoir une fonction essentiellement parallèle, puisque ses fibres servent aussi à relier des circonvolutions similaires des deux côtés et quelques-unes de celles qui sont situées dans les Lobes Temporaux. Une fonction semblable doit aussi être assignée aux fibres psaltériales, qui constituent en partie la portion postérieure, recourbée, du Corps Calleux lui-même (p. 89, note 2). Ces fibres « commissurales » transversales sont d'un grand intérêt : car il y a des raisons de croire qu'elles sont, à un degré considé- rable, en relation avec cette unification de la Conscience qui existe indiscutablement (comme chacun peut l'affirmer), en dépit du fait que les organes de l'Activité Sensorielle sont partout doubles. Ces Commissures sont aussi, suivant toutes probabilités, fort essentielles à l'exercice des processus mentaux supérieurs. Dans des cas rap- portés par le docteur Langdon-Down et autres, le non-développe- ment de cette partie du Cerveau, chez THomme, a été associé à une Idiotie plus ou moins marquée ; mais toutefois, l'arrêt de dévelop- pement n'avait point, dans la plupart des cas, été strictement limité au Corps Calleux. La Commissure Moyenne, le Trigone, ou quelques régions des circonvolutions, étaient souvent défec- tueux en même temps. Dans quelques-uns des cas rapportés, où le Corps Calleux ne faisait que partiellement défaut, il y avait moins de dégradation des Facultés Intellectuelles que l'on n'aurait pu s'y attendre. Dans certains de ces derniers cas, toutefois, les personnes sont mortes si jeunes, ou les conditions morbides ont été si compli- quées, que les observations ont relativement peu de valeur, pour établir la question de l'importance réelle du Corps Calleux pour l'exercice des processus mentaux ^. D'après les données anatomiques fournies par Broadbent^, ce sont les Régions Sensorielles des deux Hémisphères (ou les Sensorielles et ce que quelques-uns regardent comme les Volitionnelles) qui sont mises en relations au moyen du Corps Calleux. Mais, même si cet arrangement supposé était le seul existant en réalité, cela n'indi- querait nullement que les sièges organiques des processus dérivatifs plus complexes ne sont point aussi médiatement mis en rapport les uns avec les autres. Ainsi, les Régions Émotionnelles, Intellec- 1. Voy. : Knox, in Glasgow Médical Journal, avril 1875, où il y a quinze cas rapportés. 2. Voy. p. 83, 122 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. tuelles et Volitîonnelles plus spécialisées de chaque Hémisphère, où qu'elles puissent être et de quelque manière qu'elles soient reliées entre elles, sont nécessairement, au moyen des fibres du système d'association, mises en communion intime avec les Régions Senso- rielles de diverse nature qui leur correspondent. C'est donc de cette manière indirecte que les régions fonctionnellement les plus élevées des deux Hémisphères peuvent être mises en relation les unes avec les autres, au moyen des fibres du Corps Calleux. Il y a manifestement unité dans notre Conscience Émotionnelle, Intellec- tuelle et Volitionnelle, — aussi bien que dans notre Conscience Sen- sorielle, — c'est-à-dire dans les processus mentaux « dérivés », aussi bien que dans les a primaires »• Il ne saurait guère y avoir de doute que ce soient cette Activité Sensorielle et Taction des portions du Cerveau qui y sont directement intéressées, qui fournissent la base primaire, ou essentielle, de la Conscience. Nous sommes le plus complètement conscients lorsque nous recevons le plus d'impressions extérieures; et nous tombons dans un état d'inconscience complète ou partielle, lorsque l'arrivée de ces impressions est pour un temps empêchée, ou lorsque nous sommes absorbés profondément dans quelque série de pensées (Conscience Idéale ou Réflective), — c'est-à-dire lorsque l'activité d'autres portions des Hémisphères Cérébraux diminue de quelque manière, ou éclipse celle des régions sensorielles proprement dites. Un admirable exemple de la première vérité a été récemment donné par le docteur Striimpell^; il est tellement instructif qu'il mérite d'être cité tout au long : « Pendant l'automne de Tan dernier^ on reçut à la clinique médicale de Leipzig un jeune homme âgé de seize ans, chez lequel divers phénomènes d'anesthésie s'étaient graduellement développés, à un degré que Ton a observé bien rarement. La peau de la surface entière du corps était complètement insensible, et cela à toute sorte de sensation. Le courant électrique le plus puissant ou une bougie allumée, tenue contre la peau, n'étaient capables de pro- duire aucune douleur ni môme aucune sensation de toucher. Presque toutes les surfaces muqueuses- accessibles montraient la même insensibilité à la douleur. Toutes les sensations que Ton réunit sous le nom de sens musculaire faisaient absolument défaut. Lorsque ses yeux étaient fermés, on pouvait porter le patient tout autour de la chambre, placer ses membres dans les positions les moins commodes, sans qu'il en eût en rien conscience. Même le sentiment de fatigue musculaire n'existait plus. Il survint en outre une perte absolue du goût et de Podorat, une amaurose de l'œil gauche et de la surdité de l'oreille droite. Bref, cet individu ne communiquait plus avec le monde extérieur que par deux portes sensorielles : l'œil droit et l'oreille gauche. En outre, comme ces 1. PflUger's Àrchiv,, vol. XV, p. 573; traduit dans Nature, 13 déc. 1877. COMMENT NAIT LA CONSCIENCE. 12J deux portes pouvaient, à n^importe quel moment, être aisément fermées, il était possible de rechercher les conséquences d'un isolement complet du cerveau de toute stimulation extérieure provenant des sens. J'ai fréquemment répété l'expé- rience suivante, et je l'ai montrée à d'autres personnes : Si l'on bandait l'œil demeuré bon, et si l'on bouchait en même temps l'oreille du patient, après quelques minutes (ordinairement deux ou trois), l'expression de surprise et les mouvements pénibles, qui s'étaient montrés d'abord, cessaient complètement ; la respiration devenait calme et régulière; le malade étak, en réalité, profon- dément endormi. On réalisait donc ici la possibilité d'amener artificiellement le sommeil, à nUmporte quel moment, en empêchant toute excitation du cerveau par les sens. Le réveil du patient n'était pas moins intéressant. On pouvait réveiller par une excitation auditive, en appelant dans son oreille, ou par une stimulation visuelle, en faisant tomber de la lumière sur son œil ; mais il était impossible de réveiller en le poussant ou le secouant. Si on l'abandonnait à lui-même, il finissait par se réveiller tout seul, dans le courant de la journée, après que le sommeil avait duré plusieurs heures; le réveil était dû peut-être à des stimuli ilitrinsèques partis du cerveau, ou peut-être à de légers stimuli extérieurs, inévitables, agissant par les deux sens encore en action, et se faisant sentir à cause de l'accroissement de sensibilité qu'avait acquis le cerveau durant le repos du sommeil. » Rien ne pourrait montrer plus distinctement qu'un pareil cas, rimportance de l'activité des Régions Sensorielles des Hémisphères dans la production de ce que nous connaissons sous le nom de Conscience. Il semble clair, en eflTet, que si la Conscience n'est point, de quelque manière, un apanage immédiat de l'activité de ces régions mêmes des Hémisphères, celle-ci est, en tout cas, un avant-coureur essentiel de celle de quelques autres régions, dont l'activité est immédiatement associée à la Conscience. D'autre part, il est également évident que les impressions sen- sorielles stimulantes sont doubles, arrivant à chaque Hémisphère du Cerveau des moitiés opposées du corps ; et que leurs accompa- gnements subjectifs sont confondus en . une seule Conscience, de telle ou telle nature. La preuve finale de cette proposition se trouve dans les effets de blessures de certaines parties du Cerveau, d'un seul côté seulement, chez quelques-uns des animaux inférieurs; et dans les effets des maladies unilatérales de régions correspondantes du Cerveau de l'Homme. Ainsi, là où nous avons affaire à une bles- sure ou à une maladie du tiers postérieur de la capsule interne, — c'est-à-dire de cette partie de l'expansion du Pédoncule Cérébral qui est située entre la partie postérieure du Corps Strié et la Couche Optique, — nous observons une perte complète de la sensibilité de la moitié opposée du corps (Hémianesthésie). Aucune sensation tactile n'est éprouvée, et les autres voies sensorielles de ce côté sont éga- lement closes; ce côté de la bouche et de la langue sont insensibles 124 RELATIONS DES PARTIES DE L*ENCÉPHALE. aux saveurs, l'oreille est sourde, l'œil aveugle, et la narine corres- pondante également insensible à toutes sortes d'odeurs^. Mais, dans l'Hémianesthésie, bien que les avenues sensorielles soient fermées d'un côté, la Conscience générale de l'individu ne semble point affectée, et son Activité Mentale peut être à peine atteinte. Cette condition mentale, relativement inaltérée malgré l'absence de stimulation sensorielle directe d'un Hémisphère, n'est probablement possible que grâce à l'activité du Corps Calleux, — puisqu'au moyen de ses fibres les excitations qui parviennent à un côté du Cerveau peuvent se propager à l'autre. Les deux Hémisphères peuvent ainsi être mis en relation avec les divers stimuli sensoriels qui émanent d'un seul côté du corps ; et, de cette manière, il est possible à la Conscience générale de l'individu de demeurer intacte, même en l'absence de stimuli sensoriels d'une moitié du corps. Il est de la plus haute importance de se rappeler que les résultats ci-dessus décrits suivent des lésions du tiers postérieur du Pédon-; cule Cérébral, immédiatement avant que ses fibres entrent en rela- tion avec la Couche Optique. Les effets sont fort différents lorsque des lésions existent au-dessus ou en dehors des gros ganglions basir- laxres (voyez p. 128), même lorsque ces lésions comprennent une destruction fort étendue de l'un des Hémisphères. Ce n'est toutefois que dans la sphère des trois sens supérieurs que les accompagnements subjectifs d'impressions provenant des deux côtés du corps se mêlent de manière à produire des Perceptions 1. L'explication de la perte du sens de l'Odorat dans la narine correspon- dante présente quelques difficultés. Elle semble, à première vue, être en con- tradiction complète avec les faits anatomiques, puisque les relations des organes de l'odorat avec les hémisphères sont exceptionnelles, comme on l'a déjà signalé (page 109). Elles sont certainement directes plutôt que croisées; et cela ten- drait à contredire les connaissances anatomiques actuelles si des fibres des Ganglions Olfactifs, se rendant à leurs « centres de perception », se trouvaient quelque part dans le voisinage de la partie postérieure de la « couronne rayon- nante ». Mais une explication très plausible de la perte du sens de l'Odorat dans ces cas d'Hémianesthésie se trouve, comme l'a signalé Ferrier (Functions of the Brain, p. 191) dans les expériences bien connues de Magendie sur les fonc- tions de la cinquième paire. Il s'est assuré que l'Odorat était perdu, lorsque la sensibilité de la narine était abolie — par exemple, après la section du triju- n^eau : non point que le trijumeau soit à proprement parler le nerf de l'Odorat, mais parce que « son intégrité est nécessaire à l'activité fonctionnelle normale du nerf olfactif. » Si la perte unilatérale de l'Odorat, dans ces cas d'Hémi- anesthésie, n'est réellement due qu'à la perte de la sensibilité générale dans la narine correspondante, cette même perte de l'Odorat doit se présenter chez l'Homme, lorsqu'il existe des lésions de la Protubérance entraînant la perte de la sensibilité générale de tout un côté du corps \ l'expérience de l'auteur l'a conduit à croire qu'il en est ainsi HËMIANESTHËSIB. 13& simples. Un objet odorant^est perçu simple; un corps que l'on voit est reconnu simple ; et de même un son, bien que stimulant à la fois les deux organes aaditifs, est reconnu unique. Et, bien que nous puissions localiser les impressions gustatives de l'un ou l'autre côté de la bouche, lorsque notre attention est dirigée là-dessus, nous ne sommes point accoutumés & agir ainsi; et il serait peu utile de faire des distinctions de cette sorte. Le cas est toutefois absolument dif- férent pour le sens du Toucher ou la sensibilité commune. Au moyen de l'Odorat, de la Vue et de l'Ouïe, nous sommes mis en relation anMthétie (Chaicot, d'aptes Durel). o, o, Couchei Optique) réDDiei sure Uoyeiine, ou Uolle ; P, P, lien poitériaur du Pédoaciile Célébrai ( Du eOt* droit, ce» fibres sout reptisentées coopéei, en x; S, noyau laiie, el X, noyau eitia-ieuIticuUiTe du Corps Strié. avec des phénomènes éloignés; mais, dans l'exercice du Toucher et du GoLlt, il y a contaiît réel avec différentes portions de la surface de notre corps; il doit donc y avoir, comme il y a en réalité, sur- tout dans le premier cas, une faculté absolument indépendante d'apprécier les Impressions qui proviennent de chaque côté de notre corps, et de les localiser fort exactement. Cette unité de résultat, accompagnant l'action d'une grande partie des Régions Sensorielles des deuxHémisphères, aussi bien que de celles qui servent à l'Activité Émotionnelle et Intellectuelle, est fort remarquable et difficile & comprendre; surtout si nous avons présent à l'esprit ce fait, qu'il n'y a pas une symétrie parfaite, même & l'œil nu, dans la conformation de beaucoup de Circonvolutions homologues des deux côtés (pour ne rien dire de leur structure microscopique); que leur alimentation vasculaire est indépen- dante, et sujette, par suite, & des variations qui peuvent n'affecter qu'un seul côté; et qu'une inégalité dans le pouvoir de travail des 126 RELATIONS DES PARTIES DE L*ENCÉPHALE. deux Hémisphères pourrait aisément aussi être amenée par quelques différences inhérentes, ou acquises, dans l'activité moléculaire (ou fonctionnelle) des éléments nerveux correspondants des deux côtés du Cerveau. Malgré la difficulté que nous éprouvons à comprendre comment un double mécanisme de cette nature peut fonctionner comme il le fait, de manière à amener une Conscience simple, ou à nous per- mettre de poursuivre les processus d'une personnalité Pensante et Voulante unique, les faits de notre propre Conscience peuvent assurer à chacun de nous qu'il en est ainsi. Cependant, bien que la règle puisse être que les deux Hémi- sphères soient mis en activité simultanée et harmonique dans la Perception, l'Émotion, la Pensée et la Volition, il ne manque point absolument de preuves pour montrer qu'ils sont capables de tra- vailler d'une manière plus ou moins, indépendante, — soit (a) lorsque les deux Hémisphères existent, et que Ton suppose un manque d'har- monie avec double Conscience comme résultat ; soit (6) dans les cas, plus positifs et plus définis, dans lesquels on n'a remarqué aucun affaiblissement des Sens ou de l'Intellect, bien que la plus grande portion de l'un des Hémisphères Cérébraux puisse avoir été détruite. On peut dire quelques mots sur chacun de ces sujets. (a) La preuve en faveur de la possibilité d'une activité séparée et dissemblable, bien que simultanée, des deux Hémisphères du Cer- veau est d'une nature très douteuse, bien que des faits assez connus des médecins semblent confirmer cette notion. Par exemple, Sir Henry HoUard^ souleva, en 1840, la question de savoir « Si quelques aberrations d'esprit, comprises sous le nom d*insanité, ne sont point dues à Faction déréglée de ce double organe (les deux hémi- sphères) qui conserve, & l'état de santé, une parfaite unité d'action? » Il ajoute : « Le sujet est fort obscur et toute preuve difficile; mais je crois plus probable qu'une inégalité de cette sorte puisse ôtre cause de quelques- unes des nombreuses formes de dérangement d'esprit... C'est une remarque souvent faite que, dans certains états de dérangement mental, aussi bien que dans quelques cas d'hystérie qui y confinent do fort près, il semble y avoir comme deux esprits, dont l'un tend à corriger, par des perceptions, des senti- ments et des voli tiens plus justes, les aberrations de Pautre; et que la puissance relative des deux influences varie à des moments différents... Il est remar- quable qu'on puisse avoir parfois, des malades eux-mêmes, une expression aussi distincte de ce phénomène. J'ai vu récemment un cas où les traits le plus carac- térisés étaient de fréquentes et subites explosions de colère, sur des sujets en partie réels, en partie imaginaires, mais généralement sans raison évidente ou suffisante au moment donné ; ces excès étaient accompagnés de cris furieux et 1. Médical Note$ and Reflexions, 2« éd. 1840, p. 172. DOUBLE CONSCIENCE. 127 d*acteB de violence, le malade frappant ou brisant tout ce qui était à sa portée* Il me décrivit lui-même le genre de conscience séparée qu'il éprouvait pendant ces violents accès, son désir de leur résister, mais le sentiment de son impuis- sance à le faire ; et sa satisfaction lorsqu'il les sentait se dissiper. C'était une peinture, péniblement exagérée, de la lutte entre le bien et le mal ». On ne pourrait rien dire de beaucoup mieux défini sur le sujet ; et notre savoir n'a pas, depuis lors, avancé sur ce point d'une manière sensible^. Il est assurément possible que deux états d'Esprit, en apparence simultanés, ne coïncident jamais strictement en temps; de sorte que, dans les cas dont on vient de parler, il peut y avoir eu simplement une action rapidement alternante de l'en- semble de l'organe, plutôt qu'une action indépendante et simultanée des deux Hémisphères Cérébraux. Quelques-uns des phénomènes du rêve présentent exactement la même difficulté, — la preuve en faveur d'une double Conscience est même plus frappante ici, puisque la plupart d'entre nous peuvent ajouter leur expérience personnelle au témoignage des autres. Nous faisons plus spécialement allusion aux cas où le rêveur semble tenir une longue conversation avec quelque autre personne ; où deux courants distincts de pensée se développent, et où quelquefois on peut avoir des preuves que le rêve tout entier s'est produit si rapidement que les phénomènes sont plus faciles à expliquer, en supposant une action simultanée et indépendante des deux Hémisphères , qu'une action alternati- vement différente de l'ensemble du Cerveau*. (6) Si nous examinons, d'autre part, la question de savoir quel degré de Puissance Intellectuelle reste possible, lorsqu'un des Hémi- sphères Cérébraux a été fort endommagé ou atrophié, il ne saurait guère y avoir de doute que, dans la règle, les facultés psychiques soient fort oblitérées ou paralysées. Ceci toutefois est loin d'être toujours vrai : car on rapporte des cas où, malgré une atrophie ou une maladie fort étendue de l'un des Hémisphères, les facultés intel- lectuelles paraissaient être dans leur condition normale. Il est toutefois très rare que des Facultés Mentales notables soient conservées, lorsqu'une lésion importante de l'un des Hémi- sphères survient un peu tard dans la vie. Il y a beaucoup plus 1. L*ouvrage du D' Wîgan sur The Duality of the Mind (1844) est une contribution à Tétude du même sujet ; mais il est diffus et fort mal arrangé. 2. La conscience de celui qui rêve peut être distinguée, sous le nom de Conscience Idéationnelle, de la conscience ordinaire qui existe à l'état de veille. Dans chacun de ces cas, les régions sensorielles des hémisphères sembleraient être les points centraux, ou initiaux, dont l'activité est excitée, — dans un cas» par des impressions sensorielles réelles, dans l'autre, par des impressions de ce genre, ravivées. 128 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. de chance d'en rencontrer lorsque la maladie ou la lésion a débuté ou est survenue dans la première enfance, c'est-à-dire à une période où la croissance et le développement structural du Cer- veau sont encore capables de subir des modifications considérables, qui puissent adapter Torgane à une activité plus ou moins isolée d'un seul Hémisphère, — ce qui, dans les cas supposés, est à peu près tout ce qui est possible. Ce début précoce de la maladie a été, en effet, remarqué par l'auteur comme existant dans un grand nombre des cas les plus authentiques appartenant à cette catégorie ^. Le plus remarquable peut-être de tous les cas de cette nature est celui qui fut observé et rapporté par Andral. Ua homme, qui mourut dans sa vingt-hui- tième année, avait fait à Tàge de trois ans une chute à la suite de laquelle il demeura paralysé du côté gauche. L'Hémisphère droit fut trouvé si complète- ment atrophié, qu'une grande partie de la « pie-mère » du côté droit formait un kyste dans lequel il ne restait plus trace de matière cérébrale. Cette mem- brane constituait la paroi supérieure d'une vaste cavité dont le plancher seul était formé par la Couche Optique, le Corps Strié et toutes les autres parties situées sur le même niveau que ces deux corps. Il n'existait donc pas de sub- stance nerveuse au-dessus du niveau des gros ganglions du côté droit; — et cependant Andral dit : « Cet individu avait reçu de l'éducation et en avait pro- fité; il avait une bonne mémoire; sa parole était libre et facile; son intelligence était celle du commun des hommes. » Des cas de nature semblable ont été rapportés par Cruveilhier et autres ; et c'est un fait remarquable qu'il y ait eu non seulement conservation d'assez de Puissance Intellectuelle pour qu'il n'y eût, au moins en apparence, aucune perte dans cette direction, mais pour que les modes spéciaux de Sensibilité (comme la Vue et l'Ouïe) n'aient été abolis d'aucun côté. 11 n'y eut ni Cécité, ni Surdité unilatérale, même alors que la plus grande partie de l'Hémisphère opposé avait été détruite. L'auteur a déjà essayé ailleurs d'expliquer la conser- vation des sens spéciaux dans des cas de cette nature, en étendant l'hypothèse de hroadbent, sur l'activité unique ou double des centres moteurs^ au problème qui touche aux conditions réglant l'activité unique ou combinée des centres sensitifs *. Ces cas déjà signalés de maladie de la plus grande partie d'un Hémisphère, avec conservation des Sens spéciaux des deux côtés, contrastent notablement avec les cas, plus récemment publiés, de lésions du tiers postérieur de la capsule interne, dans lesquels il y a eu Hémianesthésie (voy. page 125 et fig. 171) Dans cette dernière classe de faits, il y a une lésion limitée dans la région « sen- 1. Atrophy ofthe Left Hémisphère. — New Sydenham. Soc. yoL XI, p. 153. Plusieurs cas sont rapportés par S. Van der Kolk, y compris celui qu'a publié Andral 2. Paraîysis from Brain Disease, 1875, p. 106. . DOUBLE CONSCIENCE. 129 sitive » du Pédoncule Cérébral, immédiatement avant qu'il entre en relation avec la Couche Optique; tandis que, dans les cas où les Sens, soit d'un côté soit de l'autre, n'ont été que peu ou point atteints, la lésion avait principale- ment porté sur les régions frontale et pariétale de l'Hémisphère, au-dessus du niveau de la Couche Optique et du Corps Strié ; et peut-être, par conséquent, sans impliquer beaucoup les circonvolutions du Lobe Temporal qui, ainsi qu'on le montrera dans le chapitre prochain, semblent contenir des centres, ou régions d'importance spéciale pour la perception sensorielle. Ces derniers cas sont d'un grand intérêt ; mais il y aurait besoin d'informations plus exactes pour que nous puissions arriver, en sécurité, à nous former une opinion bien nette sur leur compte. Les anciennes observations n'étaient point faites, ou du moins n'étaient pas rapportées de cette manière rigoureusement précise que l'importance du sujet, au point de vue où nous l'envisageons aujourd'hui, demande clai- rement. Mais, tandis que notre « Volonté » est, comme notre Intellect, unique (bien que le produit ou raccompagnemeot de l'activité d'un organe double), nous sommes, à l'occasion de son exercice, amenés au point où les phénomènes mentaux font graduellement place aux phénomènes nonr-mentaux. Le résultat d'un grand nombre de Volitions se trouve dans des contractions ou des relâchements musculaires ; et le simple passage de courî^nts centrifuges n'est accompagné de conscience d'aucune nature*. Après le Désir accompagné d'une sensation d'efforts (qui semblent constituer ensemble ce que nous connaissons individuelle- ment d'une Volition, pour autant du moins qu'elle se révèle à nous comme phase de Conscience), nous avons affaire à des courants moléculaires, passant peut-être à travers plusieurs séries de fibres et de cellules, mais n'ayant aucun côté conscient, et situés, en appa- rence, autant en dehors de la sphère de l'Esprit, que les change- ments moléculaires évoqués dans le muscle par les courants cen- trifuges. Ce fut pour ces raisons que, dans un précédent chapitre, l'auteur fut amené à limiter la sphère de l'Esprit, et à ne regarder comme ses organes que la partie du Système Nerveux qui a affaire à la récep- tion, à la transmission et aux coordinations si multipliées des coit- rants centripètes dans les centres nerveux de toute nature. Nous avons, au contraire, été amenés à regarder les phénomènes des cour- rants centrifuges comme non-mentaux, et les régions du système nerveux qui ont affaire avec eux, comme ne faisant pas, à propre- ment parler, partie de Vorgane de l'Esprit, Il est certain que, dès que nous quittons le côté purement mental, ou les points de départ d'une Volition, nous trouvons deux 1. Sur ce sujet, voyez ce que dit Sir W"* Hamilton dans ses Lectures ^ vol. II, p. 391, 392; et dans ses Dissertations on Reid, p. 866, 867. Charlton-Bastian. — n. 9 130 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. routes principales par où ses stimuli associés (sous forme de mou- vements moléculaires) peuvent se rendre, dePécorce des hémisphères cérébraux, aux muscles de chaque côté du corps. Les muscles des membres, droits ou gauches, ou les groupes mus- culaires d'autres parties qui sont ordinairement mises en action in- dépendamment de leurs homologues du côté opposé, ne reçoivent, ainsi que nous l'avons établi, leurs stimuli volitionnels que par l'Hé- misphère Cérébral du côté opposé. Mais les muscles situés de chaque côté et agissant ordinairement ensemble peuvent être indifférem- ment excités par l'un ou l'autre des Hémisphères (Broadbent), grâce à l'existence de connexions commissurales intimes, reliant ensemble les Centres Spinaux doubles, en relation avec ces muscles d'une manière assez intime pour que chaque paire ne forme plus qu'un Centre. 11 semble exister, toutefois, une exception fort importante à cette dernière règle, dans le cas des muscles (agissant ordinairement d'une manière bilatérale) qui servent à l'Articulation des Mots, c'est-à-dire à la parole ordinaire. Ordinairement, le stimulus qui vient de l'Écorce cérébrale pour exciter ces actions musculaires ne part que d'un seul Hémisphère ; et, dans la grande majorité des cas, l'Hémi- sphère Gauche est la source de ces excitations. On donnera, dans les chapitres suivants, la preuve de ces assertions et d'autres particula- rités sur les routes que suivent les stimuli centrifuges en général. 3. —RELATIONS FONCTIONNELLES DU CERVELET AVEC LES HÉMISPHÈRES CÉRÉBRAUX ET LA MOELLE. Nous passons maintenant à un autre sujet d'intérêt majeur, mais enveloppé d'une grande obscurité. Quelles sont les fonctions du Cervelet? Voilà une question qui semble fort simple, qui cependant a laissé les physiologistes perplexes pendant plus de deux siècles, et qui peut encore être considérée comme un problème entière- ment à résoudre. Les divers physiologistes ont eu sur ce sujet les opinions les plus variées. WiUis et autres ont regardé le Cervelet comme le centre régulateur prin- cipal des mouvements involontaires, ainsi que des fonctions de la vie végétative. Foville et autres en faisaient un sensorium commune, ou centre principal des impressions centripètes conscientes; Gall et quelques-uns de ses partisans le regardaient comme un organe principalement en relation avec Tinstinct de propagation, ou appétit sexuel. Flourens, Longet et autres ont enseigné que le Cervelet est le siège d'une faculté coordinatrice des mouvements musculaires, volontaires ou non. Lussana, s*efforçant d'expliquer la manière dont il coor- donne les mouvements musculaires, en fait le siège du sens musculaire. Reil, Rolando et quelques auteurs modernes comme Luys, Weir-Mitchell et autres, OPINIONS SUR LES FONCTIONS DD CERVELET. 131 ont regardé le Cervelet comme un organe engendrant et distribuant la force nerveuse nécessaire à Tinstigation de toute sorte de mouvements, et même à Texcitation d'autres centres nerveux non moteurs. Cette ènumération est loin d'épuiser la liste des opinions que Ton s'est faites, à des époques diverses, des fonctions du Cervelet. On signalera en effet, dans les pages suivantes, d'autres notions sur cet organe. Comment choisir, au milieu de ces théories étonnamment diverses? Vulpiam, après avoir passé soigneusement en revue, en 1866, tout l'ensemble du sujet, ne put se décider à en accepter aucune. Il se contenta principalement de tirer certaines conclusions négatives. « Le Cervelet, dit-il, ne prend aucune part aux fonctions cérébrales proprement dites. Il semble n'avoir abolument rien à faire avec les manifestations de l'Instinct, de l'Intelligence ou de la Volonté. » Qu'elle soit correcte ou non, c'est là une idée communément acceptée. D'autre part, Vulpian a été forcé d'admettre que certains désordres ataxiques des mouvements sont causés par des lésions du Cervelet; bien quMl rejetât l'hypothèse, ordinairement admise, de Flourens, que c'est « un centré par où s'effectue la coordination des mouvements, volontaires ou non. » La grande incertitude où Ton est toujours demeuré sur les fonc- tions du Cervelet est due à des causes diverses. Elle est en partie attribuable à la complexité des connexions de cet organe avec d'autres régions du Système Nerveux central, aussi bien qu'à l'ob- scurité qui règne sur les diverses sources de ses fibres afférentes et la destination de ses fibres efférentes; car, supposer avec Luys que les pédoncules du Cervelet ne sont composés que de fibres efférentes, semble à l'auteur aussi opposé aux faits, que cela le serait au plan des centres nerveux en général. Mais l'incertitude qui règne sur les fonc- tions réelles de cet organe est due aussi à la variété et à l'obscurité des symptômes qui résultent des blessures qu'on lui fait, chez les divers animaux inférieurs, et à une variété semblable de' relation entre les symptômes et les lésions qui se révèlent à ceux qui étu- dient les effets des maladies du Cervelet chez l'Homme. Ces dernières variations sont en partie attribuables à la connexion intime du Cervelet et d'autres portions importantes de l'Encéphale. Cela rend difficile d'expérimenter sur l'organe^ chez les animaux inférieurs, sans courir grand risque d'irriter ou de blesser tantôt l'une, tantôt l'autre de ces parties adja^ centes. — Il est, d'autre part^fort difficile, pour la même raison, d'avoir affaire à des maladies non compliquées du Cervelet, — des maladies limitées à cet organe, et non associées à des symptômes résultant de la compression ou de l'irritation d'autres parties importantes, comme la Protubérance ou le Bulbe. Mais les effets de ces causes d'incertitude sont probablement accrus par 1. Physiologie du Système Nerveux^jp. 601-641. 132 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. t cette considération, que nous trouvons bien fondée, que le Cervelet, quelle que puisse être la nature précise de ses fonctions, n'agit point ordinairement seul, mais, à un degré très considérable, en conjonction avec le Cerveau, dans Taccomplissement de certaines fonctions communes à tous les deux. Ainsi donc il ne semble pas du tout improbable que, dans les cas de blessure ou de maladie du Cervelet, il puisse y avoir quelque action compensatrice de la part du Cerveau^ — surtout quand la maladie a duré longtemps ou a commencé de bonne heure; comme dans le cas d'atrophie de cet organe chez la petite fille examinée par Combette, et dont Tobseryation est rapportée par Cruveilhier. Une dernière cause de difficulté, tendant à compliquer Tinterprétation des résultats des maladies du Cervelet, peut venir de ce que, dans le cas de lésions unilatérales, la moitié saine de l'organe peut être capable d'assumer et d'ac- complir, peut-être avec une simple difiérence de degré, les fonctions de la partie hors d'usage. (Voy. p. 139, note.) En face de toutes ces difficultés d'interprétation, il est peut-être bon de revenir en arrière, et d'examiner le problème des fonctions du Cervelet à la lumière des principes généraux, aidés de ce que nous pourrons obtenir de nos connaissances actuelles sur les con- nexions anatomiques précises de l'organe avec diflférentes parties du cerveau et avec différentes régions de la Moelle Épinière. Le Système Cérébro-Spinal des Vertébrés contient, dans toute la longueur de la Moelle et du Bulbe, une série de centres sensitifs et moteurs dont chacun, capable de remplir des fonctions indépendantes, est aussi en relation subor- donnée avec d'autres Centres Nerveux supérieurs. Quelque chose de semblable existe chez les Vers et les Arthropodes. Mais le Cerveau, chez tous les Vertébrés, diffère de celui des Invertébrés par ce fait, qu'il possède deux parties doubles, morphologiquement distinctes, qui ne sont point représentées chez ces derniers, ou du moins pas par des parties semblablement séparables. Ce sont les Lobes Cérébraux et le Cervelet. Faisant leur apparition sous forme de segments, relativement petits, chez les Poissons, leur volume et leur développement relatif s'accroissent chez les Ver- tébrés supérieurs, jusqu'à ce qu'ils rejettent enfin dans l'ombre toutes les divisions de l'encéphale. Il y a donc, chez les Vertébrés, quelques spécialisations fondamentales de fonctions qui sont, suivant toute probabilité, portées beaucoup plus loin que chez aucun des animaux inférieurs, et dont l'existence semble marquée par le développement de parties aussi distinctes, morphologiquement, que les Lobes Cérébraux et le Cervelet. Mais il faut regarder comme un des faits physiologiques les mieux établis que les Lobes ou Hémisphères Cérébraux sont les principaux organes de rintelligence Consciente, — en comprenant sous ce terme la Sensation et la Perception, l'Idéation et le Raisonnement, ainsi que les phénomènes primaires de l'Émotion et de la Volition. Les deux Hémisphères ensemble constituent donc l'organe suprême, le dernier terme de la série de centres dans lesquels les impressions « centripètes » sont mises en relation les unes avec les autres. Mais deux choses sont également certaines popr ce qui regai*de le Cervelet; FONCTIONS DU CERVELET. . . 133 d*ab<»*d il ii*a pas de part appréciable, comme organe indépendant, dans l'exer- cice d'aucun de ces processus qui sont compris ensemble sous le nom d'Intelli- gence Consciente; et, en second lieu, son activité est indubitablement mêlée, de quelque manière, au pouvoir qu'a l'animal d'accomplir des Mouvements i. De quelle manière précise et à quels Mouvements est-elle liée, ce sont là des problèmes à résoudre : et nous devons maintenant diriger notre attention sur ces sujets. Si nous faisons donc attention à ce fait que, dans tout le Système Nerveux des animaux inférieurs, les centres nerveux « sensitifs » et les centres « moteurs » existent en paires associées ; si nous remarquons l'apparition simultanée des Lobes Cérébraux et du Cervelet dans la série animale ; si nous considérons que les Lobes ou Hémisphères Cérébraux sont démontrés être les centres suprêmes des impressions a centripètes », et que l'on a également bien prouvé que le Cer- velet est un centre « moteur « important d'une nature quelconque : il semble qu'on puisse légitimement déduire des faits précédents que le Cervelet est le centre moteur suprême associé au Cerveau, et qu'ils forment le couple final M moteur » et « sensitif », organisé ou accordé, à un certain degré, comme les couples inférieurs, pour une activité conjointe. On pourrait toutefois reconnaître tout d'abord que la relation entre ces centres suprêmes afférents et efférents, chez l'Homme et les animaux supé- rieurs, doit être nécessairement fort différente et beaucoup plus complexe que celle qui existe entre les couples inférieurs, chez les mêmes animaux, ou entre les couples supérieurs d'animaux comme un Centipède, un Gastéropode (fig. 27) ou tout autre Invertébré. Les relations entre les impressions centripètes et les actions qui y répondent par l'intervention de l'activité des centres nerveux inférieurs, chez l'Homme, ou des centres supérieurs d'un animal inférieur, sont relativement simples et directes ; mais, chez les animaux supérieurs, à mesure que l'organe de l'Intel- ligence Consciente s'accroît en volume et en complexité intérieure, s'accroissent aussi les chances d'intervention de processus nerveux compliqués, entre la réception de certaines impressions sensorielles et les actions qui peuvent finalement en résulter. Les actes qui suivent en ce cas, comme résultat d'une dé^i&éra^to», peuvent être d'un ordre nouveau et inaccoutumé, — conçus et excités d'une manière consciente. A mesure que la Conscience Sensorielle, et l'Intelligence qui s'accroît par son exercice, augmentent d'intensité et de complexité, ce côté de la vie devient plus absorbant ; et la Conscience de l'Ani- mal (ou son Attention) est proportionellement détournée des Sensa- tions et des Mouvements Viscéraux, ainsi que de la majeure partie des innombrables mouvements automatiques ou secondairement auto- matiques liés à sa vie extérieure, ou Vie de Relation, La sphère de la Conscience est limitée dans une direction et agrandie dans une 1. Voy. Owen, Anat» of Vertebrates, vol. I«', p. 487-488. L'hypothèse de Gall que le Cervelet est le siège de Vinstinct sexuel ne saurait être appuyée que sur peu de chose, ou même sur rien qui ne se puisse mieux expliquer autre- ment. (Voy. Ferrier, Functions ofthe Brain^ p. 122.) 131 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. autre; et de nouvelles acquisitions ne se feraient jamais dans la sphère des Sens, de Tlntelligence, ou du Mouvement Volontaire, si des Impressions habituelles et se représentant sans cesse ne pouvaient point évoquer par elles-mêmes (sans engager notre Conscience) des Mouvements correspondants : c'est-à-dire si ces derniers ne pou- vaient être exécutés et réglés sous le contrôle de quelqu'un des grands centres, en réponse à de simples Impressions non senties. Il devient donc évident qu'il serait fort avantageux, sinon absolument nécessaire, à des animaux dont Tlntelligence Consciente atteint un haut développement, que leur principal centre moteur, le Cervelet (nous supposons pour le moment que c'est là sa nature), fût en rela- tion avec les divers nerfs « afférents » du corps et avec leurs centres nerveux correspondants, des plus inférieurs aux plus élevés, — ou du moins, de quelques-uns des inférieurs aux plus élevés. Par ses connexions avec les centres sensitifs les plus élevés, c'est-à-dire ceux de la substance grise corticale du Cerveau, le Cervelet serait mis à même (a) de prendre part aux Mouvements, Volontaires ou non, qui suivent (immédiatement ou d'une manière éloignée) l'instigation d'Impressions Conscientes ; et, par ses con- nexions avec les centres inférieurs de divers degrés, il serait capable, (6) à l'instigation d'Impressions non-senties, de prendre une part beaucoup plus large dans la production et l'entretien des Mou- vements « automatiques » et «secondairement automatiques » com - plexes, en général ; — une part exactement semblable, en réalité, à celle que les centres moteurs spinaux inférieurs prennent à l'exé- cution des Mouvements « réflexes » spinaux *. On reviendra plus loin sur le mécanisme des Mouvements Volon- taires. Il faut seulement signaler ici que la « Volition » proprement dite est inséparable de l'Activité Sensorielle, de l'Intelligence et de la Raison ; de sorte que les points de départ des « stimuli » Volitionnels doivent être situés quelque part dans l'organe de l'intelligence Con- sciente, c'est-à-dire dans le Cerveau. C'est VActuation, ou mise en jeu d'une Volition destinée à produire un Mouvement, qui est dévolue aux Centres Moteurs; et il y a des raisons de croire que le Cervelet coopère avec les Corps Striés dans la réalisation de cette partie ou 1. Chez un animal comme la Grenouille, où le Cervelet est très petit et mal développé, môme les mouvements de locomotion peuvent être exécutés sous la direction de la Moelle Épinière seule. Il est fort surprenant de voir qu'une Grenouille, dont on a détrait le Cerveau et le Cervelet, peut encore se tenir sur ses pattes et même sauter. C'est-à-dire que cela est surprenant si nous le considérons au point de vue de ce qui se produirait chez un animal supé- rieur dans les mômes conditions ; mais beaucoup moins, si nous considérons le degré et la nature des facultés locomotrices que conserveraient un grand nombre d'Insectes semblablement mutilés. FONCTIONS DU CERVELET. 133 phase secondaire d*un Acte Volitionnel ordinaire et de ses consé- quences. Deux questions principales se présentent donc, comme résultats de ce qu'on a dit jusqu'ici sur les fonctions probables du Cervelet. (1) Quelle preuve y a-t-il que le Cervelet prend une large part à la pro- duction de mouvements « automatiques » et « secondairement auto- matiques », en réponse à des Impressions « non senties? » (2) Quelle preuve y a-t-il que le Cervelet prend part à l'exécution de Mouve- ments Volontaires? Les réponses à ces questions, pour autant qu'on peut les donner, — et cela par voie de suggestions plutôt que d'afffirmations positives, — seront mieux exposées en môme temps que ce que l'on connaît de la composition des divers Pédoncules du Cervelet. Il y a lieu de croire que c'est principalement par l'intervention des Pédoncules Supérieurs et Inférieurs que le Cervelet reçoit les impressions d'un ordre inconscient, qui le mettent à même de prendre part à la production de certains Mouvements « automa- tiques » et « secondairement automatiques » qui y répondent. Les raisons en faveur de cette opinion sont, d'abord, que les Pédoncules Supérieurs et Inférieurs contiennent un grand nombre de sortes différentes de fibres «centripètes nubien que Ton ait surabondamment prouvé que le Cervelet n*est en aucun sens un organe d'Intelligence Consciente; en second lieu, elle est appuyée par le fait que, chez les Poissons et les Reptiles, ces Pédoncules existent seuls, — les Pédoncules Moyens, et avec eux a le pont de Varole », faisant, comme on le sait, défaut. Car il est raisonnable de supposer que les fonctions simplement automatiques, ou sensori-motrices, du Cervelet s'établiraient plus tôt que celles qui ont trait aux Actions Volontaires, dans des animaux chez les- quels les Mouvements de la première classe sont beaucoup plus fréquents et plus nombreux que ceux de la seconde. En supposant que les fibres afférentes (ou a sensitives ») du Cervelet ne font que porter à cet organe des excitations, qui font que certains éléments ganglion- naires de sa Substance Grise corticale se déchargent le long des fibres efférentes en corrélation définie (de manière à exciter divers Centres Moteurs inférieurs dans des modes particuliers de combinaison), nous sommes à môme de nous rendre compte des relations sensitives des Pédoncules Cérébelleux Supérieurs et Inférieurs, sans avoir à regarder le Cervelet lui-même comme une sorte de senso- rium commune^ — ainsi que Foville et autres le faisaient à tort ^. S'il a à régler l'exécution de Mouvements automatiques excités par toutes sortes d'Impressions 1. Ou sans avoir recours à une hypothèse comme celle d'Herbert Spencer (Principles of Psychology, vol. P*^, p. 61), qui veut que « le Cervelet soit un organe de coordination doublement complexe dans Vespace, » ayant rapport à la coordination d'Actes et d'Impressions coexistantes, de même que « le Cerveau est un organe de coordination doublement complexe dans le temps » ayant trait, par conséquent, à des Impressions et à des Actes successifs. 136 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. « afiférentes, » il est évident qu'il doit être mis en relation avec celles-ci (princi- palement peut-être au moyen de fibres internonciales), bien quMl ne soit point nécessaire que l'arrivée au Cervelet d'Impressions de cette nature soit accom- pagnée d'aucune phase Consciente. Des centres moteurs inférieurs situés dans la moelle sont en relation immé- diate, au moyen de fibres internoncialesy avec des centres sensitifs correspon- dants. Le Cervelet semblerait être également en relation avec une multitude de fibres de ce type, qui lui parviennent de centres « sensitifs » de diverse nature, plus ou moins éloignés. Il n'y a toutefois pas plus de raison d'attribuer^ en conséquence de cette relation, des fonctions sensitives au Cervelet, qu'il n'y en aurait pour attribuer des fonctions semblables à la substance grise de& cornes antérieures de la Moelle. Des relations de ce genre avec les noyaux ou centres « sensitifs » sont indispensables pour un Centre Moteur, que sa situa- tion soit basse ou élevée : seulement, plus il est élevée plus il y a de chances pour que ses connexions soient nombreuses. «x Bien que quelques-uns des faits qui ont rapport aux connexions du Cervelet avec les nerfs afférents aient été mieux démontrés dans l'Encéphale des Verté- brés inférieurs que dans celui de l'Homme, ils ont à peine moins de valeur pour cela, puisque les fonctions du Cervelet, comme sa structure intime, sont probablement uniformes dans toute là classe des Vertébrés. Il y a de bonnes raisons pour croire que les Lobes Optiques des Poissons sont mis en relation immédiate avec leur Cervelet rudimentaire, au moyen des Pédon- cules Supérieurs. Les fibres constituant ces pédoncules se rendent du septum situé entre les Lobes Optiques, à la portion médiane du Cervelet. Chez l'Homme, ces mêmes pédoncules, partant des noyaux rouges situés dans la partie sensi- tive des pédoncules cérébraux, subissent une décussation au-def»sous des Tuber- cules Quadrijumeaux, et se rendent de là, en suivant une direction légèrement divergente, à la partie antérieure du Cervelet. Il est donc fort probable que, chez l'Homme aussi, ces Pédoncules Supérieurs servent en partie à mettre les Centres Optiques en relations avec le Cervelet. En outre, d'après Me3niert^, une portion de la grosse racine du cinquième nerf, ou Trijumeau, repose sur le bord supérieur et externe de ce Pédoncule Supérieur ; et une portion de la racine du nerf Auditif est disposée de même. Chez quelques Poissons, le ganglion situé à la racine du Trijumeau est, d'après Owen, directement relié avec le Cervelet, au moyen de quelques fibres ver- ticales. Ainsi, bien qu'on ne sache presque rien sur les relations du Lobe Olfactif avec le Cervelet, il semble certain que les trois nerfs crâniens sensitifs sui- vants (Optique, Trijumeau et Auditif) entrent en relations avec le Cervelet au moyen de ses Pédoncules Supérieurs. Mais il semble possible que les divers « Centres Perceptifs » de la région corticale des Hémisphères Cérébraux soient aussi mis en relations avec le Cer- velet par des fibres intemonciales passant par le a noyau rouge» du Tegmentum et les Pédoncules Cérébelleux Supérieurs. En ce cas, ces fibres pourraient amener des stimuli « afférents » en relation avec des mouvements Idéo-Moteurs et Volontaires; tandis que ceux qui arrivent à l'organe par les Nerfs Sensitifs ou leurs Ganglions, peuvent amener des stimuli « afférents » capables d'évoquer 1. Stricker : Histology, vol. II, p. 460. PÉDONCULES DU CERVELET. 137 des mouvements devenus « automatiques, » ou de Tordre a secondairement automatique. » D'autres fibres toutefois, dont on parlera tout à Pheure, sem- blent aussi appartenir à cette dernière catégorie. Nous n'avons aucun moyen de décider, à présent, si les Pédoncules Supérieurs ne contiennent que des fibres afférentes. Chaque Pédoncule Inférieur du Cervelet est, chez les Poissons, en relation intime avec deux nerfs sensitifs viscéraux : le nerf Vague et le Glosso-pharyn- gien; et aussi avec les grands « nerfs latéraux», ordinairement tributaires de la seconde racine du nerfVague. La totalité de cette dernière racine entre dans le Pédoncule Inférieur, immédiatement au-dessous ou sur le côté du Cervelet. Cette relation n'est pas aussi distincte chez quelques autres Vertébrés ; bien que, chez tous, les racines du Pneumogastrique soient en relation intime avec les Pédoncules Inférieurs (ou « corps restiformes »). Il y a en outre de bonnes raisons pour croire que la grande majorité des fibres de ces Pédoncules se compose de fibres afiérentes, qui viennent (peut-être en subissant une double décussation dans la Moelle et le Bulbe) des Viscères, des Muscles et de la Peau du même côté du corps, — au lieu d*y pénétrer directement comme les grands « nerfs latéraux » ou le Pneumogastrique lui-même. Mais, outre les nerfs sensitifs provenant des parties internes et externes du corps en général, les Pédoncules Inférieurs du Cervelet transmettent aussi à cet organe de nombreuses fibres du nerf Auditif. Cet arrangement existe chez l'Homme aussi bien que chez les Vertébrés inférieurs. Eu égard aux vues de Cyon (voy. p. 169, vol. I*'), qu'il y a deux nerfs distincts dans ce que l'on désigne ordinairement sous le nom de nerf Auditif, il n'est point sans intérêt de trouver que quelques-unes de ses fibres se rendent au Cervelet par le Pédoncule Supérieur et d'autres par l'Inférieur. Les con- nexions étendues que ce double nerf possède avec le Cervelet sont aussi d'un intérêt considérable, eu égard aux relations de nerfs analogues, chez la majo- rité des Mollusques (et chez les Insectes où on en connaît), avec leurs princi- paux centres moteurs. Il paraît tout à fait certain que chaque Pédoncule Inférieur du Cervelet contient aussi quelques fibres eff'érentes ou centrifuges, et que celles-ci (bien qu'existant probablement aussi dans d'autres parties) sont réunies en un petit faisceau (décrit d'abord par SoUy) qui passe au-dessus du bord externe du pédoncule correspondant, et de là va contourner l'extrémité inférieure de r « olive », pour s'unir à la colonne antérieure de la Moelle, immédiatement au-dessus de la « décussation » des Pyramides. Il y a lieu de croire que c'est par rintermédiaire des Pédoncules Moyens que le Cervelet coopère principalement avec le Cerveau pour Texécution des Mouvements Volontaires ; — bien que les incita- tions à prendre part à ces mouvements puissent aussi venir, comme nous Pavons déjà suggéré, des centres perceptifs situés dans les Hémisphères Cérébraux, en passant par les noyaux rouges et les pé- doncules Supérieurs. Le fait que le Cervelet coopère bien réellement avec le Cerveau, d'une manière quelconque, est évident, puisqu'il a été prouvé que 138 RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. l'atrophie d'un Hémisphère Cérébral entraîne l'atrophie de la moitié opposée du Cervelet*. Et, que le Cervelet réponde auxstimuli venant du Cerveau, plutôt que vice versa, c'est ce qui semble prouvé par le fait que l'atrophie d'une moitié du Cervelet n'a, au contraire, aucune tendance à déterminer celle de l'Hémisphère Cérébral du côté opposé. L'idée que les Pédoncules Moyens sont les parties par lesquelles la rela- tion entre le Cerveau et le Cervelet s'établit principalement, dans l'Action Voli- tionnelle^ est fortement appuyée par deux séries de faits : d*abord le déve- loppement plus tardif de ces Pédoncules Moyens et .des lobes latéraux avec lesquels ils sont principalement reliés, dans toute la série animale; ainsi que leur accroissement progressif chez des animaux de plus en plus élevés, et leur maximum de développement chez l'Homme^; en second lieu, cette opinion est également appuyée par ce que nous savons de leurs relations anatomiqucs. Les descriptions de Broadbent et de Meynert donnent quelque raison de croire que les fibres vont de chaque Pédoncule Moyen du Cervelet à la moitié opposée de la Protubérance, et de là (par le Pédoncule Cérébral), se dirigent en partie vers PÉcorce de FHémisphère, et en partie seulement vers le Corps Strié'. D'autres de ces fibres peuvent peut-être descendre aux centres moteurs de la Protubérance elle-même ou à des centres semblables situés dans le Bulbe. Comme ces fibres « eflérentes » du Cervelet s'avancent vers les tractus mo- teurs opposés du Cerveau, — au-dessus du siège de leur « décussation » dans le Bulbe, — la moitié du Cervelet dont ils sortent serait (à raison de cette « décussation m inférieure des Pyramides Antérieures) mise en relation avec les membres du côté correspondant du corps. Cette relation, directe plutôt que croisée, est également indiquée par des observations expérimentales sur les animaux inférieurs et par les phénomènes morbides observables chez l'Homme. En réunissant tous ces faits, il semble que le Cervelet puisse être regardé comme un centre moteur suprême, énormément déve- 1. C'est-à-dire lorsque le processus atrophique de THémisphère comprend des parties de nature telle, qu'il s'ensuive une Hémiplégie, — ou paralysie du côté opposé du corps. (Voy. p. 50.) 2. Meynert (Stricker : Histology, II, p. 456) appelle l'attention sur le fait que,à mesure que s'accroissent les Hémisphères Cérébraux, les divisions motrices des Pédoncules s'accroissent également, ainsi que les Pédoncules Moyens et les « lobes latéraux » du Cervelet (Voy. vol. P', p. 214, quelques remarques sur ce genre de corrélation). 3. Des cellules du Corps Strié il descend, d'après Meyneit, « deux faisceaux qui divergent ensuite, l'un se rendant à la Moelle et l'autre au Cervelet ». Ce dernier remonte, sous forme de faisceau épais, dans le Pédoncule Moyen {loc. cit., p. 375) et peut contenir des fibres cérébelleuses ascendantes (afférentes) aussi bien que des fibres descendantes (eflférentes), si les conclusions de Mey- nert sont correctes ; bien que l'auteur pense que quelques-unes au moins des fibres Cérébrales a afférentes » arrivent au Cervelet par les « pédoncules supé- rieurs. » LE CERVELET EST UN CENTRE MOTEUR. 139 loppé, dont les Lobes Latéraux coopèrent, en relation croisée, avec ceux du Cerveau, à Texécution de Mouvements Volontaires; bien qu'il soit aussi un organe habitué à agir —peut-être à un degré beau- coup plus étendu et d'une façon plus continuelle — dans l'exécution de Mouvements Automatiques compliqués, répondant à des impres- sions « non-senties », qui lui arrivent (principalement au moyen de fibres înternonciales) de « noyaux sensitifs » de toute nature. Bien que les Pédoncules Supérieurs et Inférieurs puissent sembler les principaux conducteurs par lesquels ces dernières impressions afférentes atteignent le Cervelet, il peut ne passer le long des Pédon- cules Inférieurs qu*une partie des stimuli efférents qui y répondent ; d'autres peuvent, chez les animaux supérieurs, traverser les Pédon- cules Moyens. Quoi qu'il en soit, il semblerait que toutes les impressions Cérébelleuses afférentes qui sont destinées à exciter des Mouvements Automatiques et qui viennent à émaner d'une moitié du corps, se rendent à la moitié correspondante du Cervelet; soit qu'elles y aillent directement (comme cela paraît être le cas pour les fibres du Trijumeau, de l'Auditif et autres nerfs crâniens), soit qu'elles n'y arrivent qu'après deux décussations (comme il semble que cela se passe pour les fibres des Nerfs Optiques et des Nerfs Sensitifs ordinaires du corps). Ainsi donc, dans les relations du Cerveau avec le Cervelet pour l'exécution de Mouvements Volontaires, il existe des connexions croisées analogues à celles qu'il y a entre les Hémisphères Cérébraux et les moitiés opposées de la Moelle ; tandis que, dans le rôle qu'il joue comme centre moteur suprême en connexion avec les genres les plus élevés de Mouvements Automatiques, le Cervelet est encore mis en jeu exactement comme s'il était un segment très-spécialisé de la Moelle elle-même*. Si nous essayons d'énumérer brièvement ses fonctions, nous pouvons dire que le Cervelet est un Centre Moteur suprême, pour ren- forcer et aider à régulariser la distribution qualitative et quantita- tive des courants centrifuges, dans les Actes Volontaires et Automa- tiques respectivement; ou, encore plus brièvement , que c'est cn ORGANE SUPRÊME POUR RENFORCER ET RÉGULARISER LA DISTRIBUTION DES COURANTS CENTRIFUGES. Après ce qu'on a déjà dit, et en face de toutes les difficultés pré- 1. Voy. p. 132. Beaucoup de ces Mouvements sênsori-moteurs ou Automa- tiques seraient toutefois d*un type bilatéral ; et ces Mouvements pourraient probablement être excités par l'une ou l'autre moitié du Cervelet (comme cela a lieu pour le Cerveau). Nous avons donc une autre raison pour que les maladies unilatérales du Cervelet soient souvent associées à des troubles moteurs obscurs et mal définis. liO RELATIONS DES PARTIES DE L'ENCÉPHALE. . cédemment énumérées, il est aisé d'imaginer que le Cervelet peut paraître à quelques personnes un organe ayant des rapports impor- tants avec la coordination des mouvements, •'qu'il puisse être regardé par d'autres comme le siège d'un sens musculaire; et, par d'autres encore, comme ayant à fournir ou à msiire en liberté la force néces- saire pour les mouvements en gétiéral. D'autre part, qu'il doive sembler n'avoir rien à faire avec l'Instinct, l'Intelligence ou la Sen- sibilité Consciente, malgré le fait qu'il est le récepteur de fibres pro- venant de noyaux a sensitifs» de toute nature, c'est ce qui est d'accord avec la raison, autant qu'avec l'expérience, — eu égard aux fonctions réflexes qui lui ont été assignées. Et si la fonction du Cervelet est uniquement de décharger ou d'émettre de l'énergie moléculaire pour déterminer des Mouvements Musculaires en réponse, soit à des Incitations Volitionnelles nettement localisées, lui venant des hémi- sphères Cérébraux, soit à des Impressions également bien localisées, quoiqu' « inconscientes », venant des noyaux « sensitifs » les plus va- riés situés à la base du Cerveau et dans la Moelle, nous pouvons nous attendre à ce que sa structure microscopique soit pratiquement la même dans toutes les parties de sa Substance Grise superficielle si étendue et si repliée: — et c'est là ce que nous trouvons en réalité. Nous pouvons nous attendre aussi à ce que, pour autant qu'il est en rapport avec les Hémisphères Cérébraux, le Cervelet ne doive agir qu'en réponse à leurs excitations, — ce qui semble aussi être le cas. L'opinion avancée ici paraît donc en harmonie avec un grand nombre de faits reconnus, et également capable d'embrasser un certain nombre des opinions, sur les fonctions de cet organe, qui ont été énoncées de temps à autre, et qui n'ont peut-être péché que par leur nature plus ou moins étroite et exclusive. CHAPITRE XXV LÀ PHRENOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE Nous ne sommes arrivés que d'une manière très graduelle à ce que nous savons sur la Structure et les Fonctions du Cerveau. Ce n'est, en réalité, que dans le dernier siècle que la grande masse de nos connaissances présentes a graduellement pris forme, au milieu des nuages d'erreurs dont les opinions des anciens et les idées purement spéculatives d'un grand nombre d'anatomistes des siècles précédents avaient enveloppé le sujet. On peut donner ici, sur ces notions premières, quelques détails, choisis et résumés, pour la plupart, des ouvrages de Prochaska*. D'après Aristote, le cœur était le siège de Vâme raisontuible ; et de là par- taient les nerfs (dont il nignorait pas les relations avec la sensation et le mou- vement). Le Cerveau était décrit par lui comme un viscère inerte, froid et exsangue, et à peine énuméré parmi les autres organes du corps^-* étant donné qu'il n'avait d'autre usage que de refroidir le cœur. Érasistrate, petit-fils d'Aristote, renonça aux vues qui avaient été ensei- gnées par le grand maître. Lui et Hérophile (environ 300 ans av. J.-C.) furent probablement les premiers à disséquer le Cerveau Humain. Il commença par dire que les nerfs sensitifs partaient des méninges ou membranes du cerveau, et les nerfs moteurs du cerveau lui-même; mais, à un âge beaucoup plus avancé, il modifia cette doctrine, et déclara que les deux classes de nerfs par- taient de la substance médullaire du cerveau; que les esprits animaux venaient du cerveau, et les esprits vitaux du cœur. Il reconnut que c'était dans le Cer- veau de l'Homme que les Circonvolutions étaient le plus développées, et leur attacha de l'importance relativement à son Intelligence supérieure. GaUen (environ 150 ans après J.-C.) s'appliqua à réfuter la doctrine d'Aris- tote. U montra que le cerveau des animaux était chaud, et non pas froid, et recevait beaucoup de sang. Il maintint en outre que sa structure compliquée n'était point en faveur de l'idée d'Aristote, qui n'y voyait qu'un simple réfri- gérant ; puisque pour cela une « éponge grossière et informe » aurait suffi. Il fit remarquer que le cerveau était de la môme substance que les nerfs, mais plus mou, « comme cela devait nécessairement être, puisqu'il reçoit toutes les 1. Dissertation on the Functions of the Nervom System, — Traduction de la Sydenham Society, 1851. 142 PHRÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. seD gâtions, perçoit toutes les imiginations, et a encore à embrasser tous les objets de l'entendement : car ce qui est mon est plus aisément changé que ce qui est dur ». Puisque de doubles nerfs sont nécessaires, les mous pour la sensation, les durs pour le mouvement, le cerveau de m6me est double : l'an- térieur étant plus mou et le postérieur plus dur. Les ventricules supérieurs ou latéraux étaient, d'après Galien, doués des plus hautes fonctions. Ils recevaient de Pair par les narines (par l'intermédiaire de Tethmoîde et des tubercules mamillaires), mêlaient cet air avec les esprits vitaux amenés du cœur aux ven- tricules par les artères, et en élaboraient les esprits ar^imauo;, qui, de là, étaient transmis par le cerveau aux nerfs, pour déterminer le mouvement et la sen- sation, n estimait aussi que les ventricules latéraux recevaient, par la môme voie, des objets sensibles et des particules odorantes. Galien enseignait également que le cerveau avait un double mouvement: l'un diastoUque, pour recevoir l'air et les esprits vitaux ; et l'autre systolique, par lequel les ventricules distri- buaient aux nerfs les esprits animaux. Plus tard, il estima que les esprits animaux n'étaient pas contenus dans les ventricules seulement, mais répandus dans toute la substance du cerveau et du cervelet. « L'usage du trigone, auquel appartient aussi le corps calleux, est le mémo, dit-il, que celui des arcades des bâtiments ; c'est-à-dire de supporter commodément et sûrement toute la partie sus-jacente du cerveau. » Les tubercules quadrijumeaux remplissent les fonctions de portier, puisqu'ils servent à ouvrir ou à fermer le passage par où les esprits animaux sont transmis des ventricules antérieurs au ventricule postérieur, à travers l'aqueduc de Sylvius. Quelques siècles plus tard, d'après Prochaska, a les Arabes répartissaient les fonctions animales dans les ventricules du cerveau; de sorte quMls faisaient de l'un des ventricules latéraux le siège de la sensation générale ; de l'autre, celui de la faculté Imaginative ; lo troisième étant le siège de l'entendement, et lé quatrième de la mémoire. » Cette doctrine fut également soutenue par Duns Scot, Thomas d'Aquin et autres théologiens. Et, même dans la première moitié du xvu** siècle, « Descartes soutenait que les esprits animaux étaient sécrétés du cerveau à travers des pores qui s'ouvraient dans les ventricules ; et que, s'ac- cumulant dans^ces cavités, leur plus léger désordre excitait l'àme, située dans la glande pinéale ; et, contrairement, que les esprits animaux des ventricules étaient mus par la volonté, agissant par l'intermédiaire de la glande pinéale, et distribués de là, au moyen des nerfs, dans toutes les parties du corps ^. » Mais, vers la fin duxvi** siècle et le commencement du xvii*, GasperBauhin, Varole, Spigel et autres anatomîstes, s'étaient efforcés de montrer, contraire- ment à Galien, que les ventricules du cerveau ne sont point les fabriques et les magasins des esprits animaux; et qu'on doit plutôt les regarder comme des « organes accidentels qui n'ont souvent pas d'autre usage que de recevoir les excrétions et les résidus formés durant la nutrition du cerveau et la produc- tion des esprits animaux, et de les emmener, par l'infundibulum, jusque dans la gorge. » Lorsqu'on fut complètement d'accord que les esprits animaux n'étaient point engendrés dans les ventricules du cerveau, ni produits dans la substance 1. Même vers la fin du siècle dernier, un célèbre anatomiste, Sommering, annonça quUl regardait le fluide des ventricules du cerveau comme le sensœ- rium commune réel, et l'organe propre de l'Esprit. IDÉES DE WILLIS. 143 cérébrale pour se réunir dans les ventricules, on pensait encore généralement que ces cavités étaient des réceptacles pour des substances usées qui se déchar- geaient principalement dans les narines, à travers Tethmoîde et certains canaux imaginaires, indiqués par Galien et beaucoup plus tard par Vésale, comme allant de la glande pituitaire jusqu'au gosier, à travers le sphénoïde. Cette opi- nion devait toutefois être renversée à son tour; et C.-V. Schneider (1655) fit beaucoup pour cela. Lower, Willis et autres, finirent aussi par se convaincre que rien ne pouvait passer des ventricules aux narines par le chemin indiqué ; ils pensaient toutefois « que le sérum des ventricules passait par Tinfundibulum à la glande pituitaire, et de là, par des conduits particuliers, aux veines jugu- laires où il se mêlait avec le sang». Haller admettait que Tinfundibulum était creux, mais niait l'existence des derniers canaux mentionnés, et maintenait que les ventricules n'avaient pas besoin d'issue spéciale pour l'évacuation du sérum. Eu égard au mode de génération des esprits animaux, Malpighi, Willis (1664) et autres, se contentaient de penser quils étaient sécrétés dans la substance corticale du cerveau, et, de là, reçus dans la substance blanche, ou médullaire, d'où ils étaient distribués, par les nerfs, au corps tout entier. « Les facultés de l'esprit, comme la perception, l'imagination, l'entendement et la mémoire^ étaient bannies des ventricules en même temps que les esprits animaux ; quelques-uns les plaçaient dans la masse solide du cerveau, tandis que d'autres affirmaient que c'étaient seulement des propriétés de l'&me immatérielle et raisonnable, et qu'elles ne dépendaient en rien du corps. » Malpighi regardait la substance corticale du cerveau comme de nature véritablement glandulaire Willis a été appelé le « père de la phrénologie » à cause de l'étendue dans laquelle il assigna à chaque partie particulière du cerveau une influence spéciale sur l'esprit. Il maintenait « que le cerveau sert aux fonctions animales et aux mouvements volontaires, le cervelet aux mouvements involontaires ; qu'une perception de toutes les sensations a lieu dans les fibres ascendantes des corps striés, et que les mouvements volontaires sont excités par les fibres descendantes ; que l'entendement siège dans le corps calleux, et la mémoire dans les circonvolutions, qui sont des magasins ; que les esprits animaux sont engendrés dans l'écorce du cerveau et du cervelet par le sang artériel ; qu'ils se réunissent dans le bulbe, sont distribués et arrangés de façons diverses pour exciter les actions diverses de l'animal, et distillent à travers le trigone comme à travers un « pélican » ^; qne les esprits animaux sécrétés dans le cervelet s'écoulent sans cesse, d'une manière égale et continue, dans les nerfs qui règlent les mouvements involontaires; mais que ceux du cerveau s'échappent tumul* tueusement et irrégulièrement, suivant que les actions de Panimal sont accom- plies violemment ou sont au contraire à l'état de repos. Pour exciter des sensations, les esprits s'écoulent le long des nerfs jusqu'au cerveau... Quant aux anses nerveuses dont les artères sont parfois entourées, il établit que leur usage est de relâcher ou de fermer les artères, et d'admettre ainsi, pendant les diverses émotions de l'esprit, le sang, en quantité plus ou moins grande, à certaines parties. Il décida que la glande pinéale n'était point le siège de l'âmc^ mais une glande lymphatique. » Les successeurs de Willis adoptèrent quelques-unes de ses doctrines, mais en réfutèrent d'autres. Beaucoup de discussions stériles furent soutenues, par 1. Ancienne forme d'alambic. 144 PURÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE, Boerhave et d'autres, sur la nature essentielle des esprits animaux; et, dans la première partie du xviii' siècle, voici quelles étaient les vues exprimées sur les usages de certaines parties du cerveau. Vieussens plaçait le siège de Tima- gination dans le centre ovale ; Lancisi et Peyronie maintenaient que toute sen- sation est éprouvée, et tout mouvement excité, par le corps calleux. Meyer plaçait le siège de la mémoire dans la substance corticale, la sensation à Torigine des nerfs, et les idées abstraites dans le cervelet. Beaucoup, toutefois, reconnaissaient qu*ll n'était pas possible de déterminer avec quelque certitude le siège des facultés mentales ; bien que, sans doute, la nature u*ait pas formé sans but les divisions si nombreuses et si variées du cerveau et du cervelet. Alors survint une autre crise dans Thisoire des opinions sur le cerveau et ses fonctions. Dans les temps antérieurs, la notion de l'existence d'esprits animaux était admise sans discussion. On avait beaucoup disputé sur leur mode d'origine, sur leur siège principal, sur leur nature essentielle; mais ces problèmes furent enfin laissés de côté pour un qui aurait dû les précéder. Quelle preuve évidente avait-on de leur existence même? La supposition que ce qu'on avait appelé esprits animaux existât en réalité, parut maintenant à beaucoup une hypothèse gratuite. Après beaucoup de discussions entre les partisans de Stahl et leurs adversaires, nous trouvons Boerhave, Ualler (1766) et Tissot, demeurés les derniers champions de la doctrine, et s'efforçant de la faire accepter comme vérité. « Malgré Fautorité de ces grands noms, dit Pro- chaska, Tamour de la vérité excita des hommes distingués, qui avancèrent des doutes sur l'hypothèse des esprits animaux, et qui montrèrent que les argu- ments allégués en leur faveur ne prouvaient rien, lorsqu'on les analysait soi- gneusement; enfin, que l'hypothèse entière était absolument dénuée de vérité.» Écrivant donc en 1784, Prochaska dit : « Nous appellerons la cause latente dans la pulpe des nerfs, qui produit ses effets et qu'on n'a point encore reconnue, vis nervosa; nous voulons arranger ses effets observés, qui sont les fonctions du système nerveux, et découvrir ses lois. » Le même écrivain considérait qu'il n'était « point improbable que chaque division de l'intellect eût son organe particulier dans le cerveau » ; bien qu'il admit franchement lui-même que l'on ûe pouvait, à son époque, rien dire de précis sur le sujet. « Il n'a point été possible jusqu'ici, ajoute-t-il, de déter- miner quelles portions du cerveau ou du cervelet servent plus spécialement à telle ou telle faculté de l'esprit. Les conjectures par lesquelles des hommes éminents ont tenté de les déterminer sont extrêmement improbables; et ce département de la physiologie est aussi obscur aujourd'hui qu'il l'a jamais été. » Il ne faut point oublier toutefois que ce fut Prochaska lui-même qui, le premier, décrivit complètement la nature des mouvements réflexes. « Le senso' rium commune, dit-il {hc. cit,, p. 446), réfléchit les impressions sensorielles en impressions motrices, suivant des lois définies qui lui sont particulières, et indépendamment de la conscience. » Prochaska reconnut en outre que le même genre de processus pouvait se passer dans les ganglions systémiques , puisqu'il dit (p. 438) : « Il semble donc probable qu'outre le sensorium com' mune que nous pouvons supposer dans la moelle allongée, la moelle épinière, le pont de Varok, et les pédoncules du cerveau et du cervelet, il y a des sensoria spéciaux dans les ganglions et les plexus nerveux, où se réfléchissent les impressions extérieures, remontant le long des nerfs, qui n'ont pas besoin de remonter jusqu'au sensorium commune pour être réfléchies de là. » THÉORIES DE GALL ET SPURZHEIM. 145 L'espace dont nous disposons dans cet ouvrage ne nous permet pas de tenter même une esquisse des pas successifs par lesquels, durant les derniers siècles, nous avons lentement tendu à acquérir une notion plus exacte (quoique absolument insuffisante encore) des Fonctions des diverses partiesr du Cerveau. On pourra trouver quelque chose de ce genre dans Touvrage de V ulpian ^ et dans quelques autres travaux. Ce qui a déjà été dit indiquera combien il y a encore à faire ; et ce que Ton va dire à présent donnera une faible idée de la disette actuelle de connaissances positives, et du besoin que nous avons que la lumière se fasse beaucoup plus vive dans un grand nombre de directions. Après avoir considéré les relations que les Hémisphères Céré- braux ont entre eux, avec le Cervelet et les deux moitiés du corps, il faut maintenant que le lecteur limite son attention aux Hémi- sphères eux-mêmes, afin de pouvoir apprendre, dans ce chapitre et ie suivant, une partie des connaissances acquises sur les parties de ces importants organes qui semblent plus immédiatement intéressées dans les Perceptions, les Yolitions et autres Processus Mentaux. Nous avons encore à nous appuyer sur les trois mêmes classes de faits qui ont servi de bases à nos conclusions dans le chapitre précédent ; bien que nous n'ayons pas à y faire appel dans les mômes proportions relatives*. La notion que le Cerveau est l'organe principal de l'Esprit, et quMl y a une localisation de fonction dans ses diverses parties, était, comme nous Pavons vu, une proposition fondamentale pleinement réalisée par Prochaska et autres, longtemps avant que Gall et Spurz- heim (1805-1826) commençassent à étudier avec zèle Panatomie de l'organe et à promulguer un Système Physiono?nique en connexion avec elle, système qui attira bientôt une grande attention sous le nom de Phrénologie. Les auteurs étaient des enthousiastes qui essayaient de systématiser prématurément un sujet extrêmement complexe, alors que les connaissances sur ce sujet étaient encore absolument dans l'enfance, — et cela, sans prétendre avoir une capa- cité ou des connaissances bien spéciales pour mener à bien au moins la moitié du travail embrassé par une pareille entreprise. Gall et Spurzheim étaient au niveau des connaissances de leur temps, eu égard à l'anatomie du Cerveau, et peut-être même en avant; toutefois, à l'époque où ils élaboraient leur doctrine, ils ne savaient rien, pas plus que leurs prédécesseurs, sur la distinction 1. Leçons sur la Physiologie du Système Nerveux^ 1868, 2. Voy. p. 116. Charlton-Bâstian. — II. 10 140 PHÉRNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. physiologique réelle qui existe entre la substance a grise » et la sub- stance a blanche » du Cerveau. Ainsi que leurs devanciers, ils regar- daient la substance blanche des hémisphères comme la matière nerveuse essentielle, tandis que la substance grise était considérée comme « la matrice des fibres nerveuses», — matière formative,en réalité, qui, partout où on la trouvait, ne servait que de noyau pour produire une quantité suffisante de fibres nerveuses^. Par consé- quent, la Substance Grise des Circonvolutions, — celle que nous croyons aujourd'hui si largement intéressée dans les fonctions les plus délicates et les plus subtiles du Cerveau, — était considérée par les fondateurs de la Phrénologie comme n'ayant aucune fonction nerveuse proprement dite. On ne fit assurément aucune tentative pour tenir compte de plus de la moitié de cette substance. Les auteurs supposaient avoir com- plètement analysé l'Esprit Humain. Ils avaient assigné aux diverses Facultés, Émotions et Propensions, leur siège respectif, correspon- dant extérieurement aux parties supérieures et externes du crâne. Mais les Circonvolutions de la base du Cerveau, celles qui reposent sur la « tente du Cervelet » et celles des faces internes contiguês des Hémisphères, étaient censées ne prendre aucune|part aux fonctions mentales. L'usage de cette Substance Grise des circonvolutions étant estimé par les Phrénologistes d'une manière absolument diffé- rente de ce qu'il est aujourd'hui, ils inventèrent leur «Système »et définirent leur organologie, sans y faire d'allusion spéciale. Si incroyable que cela puisse sembler aujourd'hui à beaucoup de per- sonnes, cela est pourtant strictement vrai. On peut apprendre des paroles de Spurzheim lui-même combien leurs soi-disant organes furent constitués et délimités au hasard. «Les organes, dit-iP, ne sont point confinés à la surface du cerveau : ils s'étendent de la surface au gros renflement du trou occipital (le bulbe), et com- prennent probablement même les commissures; car la masse entière du cerveau constitue les organes. » Il est à peine besoin de dire aujourd'hui qu'aucune des divisions ainsi indiquées dans le Cerveau, soit à l'intérieur, soit à l'extérieur, ne possède une existence réelle. Et, si la surface plissée de Torgane lui-même ne présente pas de divisions semblables à celles que l'on voit sur un moule phrénologique pour séparer l'un de l'autre les divers organes supposés, il n'est pas besoin de grandes connais- sances anatomiques pour imaginer combien il est encore plus impossible de deviner ces limites à travers le crâne et les tégu- ments. Si nous prenons, par exemple, l'organe de philoprogéniture, i. Spurzheim. Anatomy ofthe Brain, p. 7. 2. The Physiognomical System,, 1815, p. 239. THÉORIES DE GALL ET SPURZHEIM. 147 dont on peut voir sur tout buste phrénologique la place désignée à Tarrière de la tête, nous voyons que cette place correspond à une proéminence osseuse qui varie grandement d*épaisseur chez les divers individus, tandis qu'à Tintérieur elle répond au point d'union de quatre grands sinus veineux; et, en dedans de ceux-ci, autant aux sommets des lobes occipitaux qu'au bord supérieur et postérieur du cervelet '. La division de l'Esprit humain en facultés distinctes, à la façon des phrénologistes, est toutefois une erreur par elle-même, indépen- damment de la nature peu satisfaisante de leur analyse particulière. « Chaque forme d'intelligence étant par essence, comme le dit Herbert Spencer', une adaptation des relations internes aux relations externes, il suit de là que, les relations extérieures s'accroissant à mesure que se poursuit cette adaptation, en nombre, en complexité, en hétérogénéité^ par des gradations impossibles à marquer, il ne saurait y avoir de démarcations valables entre les phases successives de l'intelligence... Considérée fondamentalement, l'intelligence n'a pas de degrés distincts et n'est point constituée de facultés réelle- ment indépendantes... ses phénomènes les plus élevés sont les effets d'une complication qui s'est produite par des degrés insensibles, à partir des éléments les plus simples. » Cette vue philosophique d'Herbert Spencer est tout à fait en har- monie avec ce que nous savons du développement progressif du Cerveau dans la série animale. Mais la grossièreté de l'analyse psychologique des Phrénologistes est dignement couronnée par la simplicité de la manière dont ils procédaient pour déterminer le siège des divers organes. Spurzheim dit : « Deux personnes étaient connues à Vienne pour leur extrême irrésolution ; aussi un jour, sur une place publique, Gall s'arrêta derrière elles et observa leur tête. 11 trouva qu'elles avaient les parties postérieures et supérieures des deux côtés de la tête extrê- mement grosses ; et cette observation lui donna la première idée de cet organe». Telle était la nature de la méthode, complètement au hasard, par laquelle, après de nombreuses observations, recueillies il est vrai sur des personnes de toute sorte, de tout âge et de toute situation sociale, les détails de leur Système furent finalement établis. Le Système Phrénologique de Gall et Spurzheim était donc falla- cieux sous presque tous les rapports. Il était absolument défectueux dans son analyse psychologique, excessivement peu satisfaisant dans ses localisations ; bref, ses méthodes étaient aussi peu sûres que ses i. Voy. ftg. 147, 148. ^ 2. Principles ofPsychology, 1" éd., p. 486. 1(8 PURÊNOLOGIË ANCIENNE ET NOUVELLE. résultats peu concluants. Il aurait été assurément presque inutile de s'arrêter aussi longtemps sur ce sujet, n'était qu'il y a probable- ment encore, dans 16 grand public, beaucoup de personnes qui, si elles ne croient pas réellement à la Phrénologie de Gall et Spurzheim, seraient bien aises de savoir les raisons positives qui doivent faire rejeter le système. Nous faut-il toutefois courir à l'extrême opposé et souscrire à des doctrines comme celles émises par Flourens (iSZiO)? Cetéminent physiologiste, que l'on peut presque dire nous avoir initiés aux recherches expérimentales dirigées sur la détermination des fonc- tions du cerveau, se crut autorisé à tirer de ses propres investiga- tions, bien connues, les conclusions suivantes, tout à fait opposées à toute localisation en détail des fonctions, — c'est-à-dire à la localisa- tion de fonctions spéciales dans des régions spéciales des Hémi- sphères Cérébraux. Voici ses conclusions {Recherches expérimen- tales, p. 99) : tt Ainsi, 1*^ on peut retrancher, soit par devant, soit par derrière, soit par en haut, soit par côté, une portion assez étendue des lobes cérébraux, sans que leurs fonctions soient perdues. Une portion assez restreinte de ces lobes suffit donc à lexercice de leurs fonctions, 2° A mesure que ce retranchement s'opère, toutes les fonctions s'affai- blissent et s'éteignent graduellement; et, passé certaines limites, elles sont tout à fait éteintes. Les lobes cérébraux concourent donc, par tout leur ensemble, à l*exercice plein et entier de leurs fonctions. 3*^ Enfin, dès qu'une perception est perdue, toutes le sont; dès qu'une faculté disparait, toutes disparaissent. // n'y a donc point de sièges divers, ni pour les diverses facultés ni pour les diverses perceptions. La faculté de per- cevoir, déjuger, de vouloir une chose, réside dans le môme lieu que celle d'en percevoir, d'en juger, d'en vouloir une autre; et conséquemment cette faculté, essentiellement une, réside essentiellement dans un seul organe. » Mais, bien que ces premières et difficiles investigations expéri- mentales parussent, à ce que pensait Flourens, l'autoriser à tirer des conclusions de cette nature, ses vues ne furent point acceptées avec empressement. S'il nous faut regarder le Cerveau comme le principal organe de l'Esprit et considérer chaque opération mentale comme une des manifestations de son activité fonctionnelle, toute analogie, et même toute probabilité, nous amènera à conclure qu'un ordre défini doit être observé, et que des opérations mentales iden- tiques seront toujours associées à l'activité fonctionnelle de régions identiques des fibres et cellules nerveuses du Cerveau et de ses dépendances. Nous savons que les Nerfs Olfactifs, Optiques et Audi- tifs vont chacun à des parties différentes du Cerveau; de sorte que les processus primaires en relation avec l'exercice des Sens corres- pondants sont distincts les uns des autres. Pouvons-nous croire que. LOCALISATIONS CÉRÉBRALES. 149 dans leurs phases postérieures ou plus élevées les régions affectées à ces impressions deviennent moins distinctes? En outre, je touche avec mon index la table sur laquelle j'écris en ce moment : l'impres- sion ainsi produite voyage, au moyen de fibres nerveuses, le long d'une route parfaitement définie depuis le point touché jusqu'à ma Moelle Épinière. Puis-je douter que la route par laquelle elle atteint le Cerveau soit aussi définie (quoique moins bien connue), et qu'une impression semblable suive toujours la même route, aussi longtemps que les conducteurs nerveux demeureront à l'état d'intégrité? Prise dans ce sens, cette « localisation » semblerait être une simple nécessité a priori. Mais si ce raisonnement s'applique aux Opérations Sen- sorielles, il est également bon pour les Opérations et les Émotions Intellectuelles. L'ordre et la régularité ne sauraient guère faire défaut dans l'accomplissement des fonctions de ces parties du Cerveau où, d'après la nature subtile et la multiplicité des actions moléculaires comprises dans des myriades de cellules et de fibres, ces caractéristiques particulières des actions cérébrales inférieures sembleraient encore tellement dIus nécessaires. La question fondamentale de l'existence ou de la non existence de localisations réelles de fonctions (de quelque manière que ce soit) dans le Cerveau, doit être complètement isolée d'une autre question secondaire qui, bien que l'on n'y prête ordinairement pas autant d'attention, n'en est pas moins réellement digne d'être considérée à part. La voici : « Si la localisation est une réalité, les diverses Opé- rations ou Facultés Mentales dépendent-elles Caj de régions séparées de la substance cérébrale; ou si {b) la localisation n'est caractérisée que par l'arrangement d'une manière distincte de cellules et de fibres, qui toutefois, pour ce qui est de leur position, peuvent être entremêlées avec d'autres ayant des fonctions différentes, avons-nous en réalité affaire à des aires topographiquement séparées du tissu ce* rébral, ou simplement à des mécanismes distincts de cellules et de fibres ^existants d'une manière phis ou moins diffuse et entremêlée?» Ce dernier mode d'arrangement semble, 4 tout prendre, même plus probable que le premier, et peut se recommander à beaucoup de personnes. L'existence d'un arrangement de cette nature nous aiderait à jeter quelque lumière sur les résultats obtenus par FIou- rens, ainsi que sur les doctrines aujourd'hui défendues par Brown- Sequard. Elle permet d'y reconnaître une certaine dose de vérité, sans nécessiter pour cela une négation du principe fondamental de localisation, en tant qu'appliqué aux cellules et aux fibres. Brovv^n-Sequard s'est en effet lui-même exprimé dernièrement ^ de 1. Archives de Physiologie Normale et Pathologique, 2*' série^UlV,^, 412. 150 PHIIÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. ]à manière la plus positive, en faveur de l'arrangement diffus et entremêlé. Il pense pouvoir mettre hors de doute qu' — « il n'existe pas de centres, moteurs ou autres, comme on les conçoit ordinaire- ment; c'est-à-dire d'agglomérations de cellules ayant une seule et même fonction, et formant une masse plus ou moins nettement délimitée ». L'existence de ce mode d'arrangement exigerait, ainsi que l'autre, que l'on admît que les cellules ayant le même genre d'activité fonctionnelle sont en communication les unes avec les autres au moyen de prolongements. Et, comme il le soutient, l'activité fonctionnelle de cellules semblables pourrait, dans les deux cas, s'exercer conjointement et également bien, grâce à l'intervention de prolongements intercellulaires. Cela ferait, en réalité, comparativement peu de différences, que ces cellules sem- blables fussent étroitement groupées ensemble ou dispersées au contraire dans des espaces relativement étendues de l'Écorce Céré- brale. Jusqu'ici, du moins, l'auteur se trouve tout à fait d'accord avec Brown^Sequard. Ainsi, tandis qu'une localisation topographiquement séparée de «facultés » indépendantes semble à l'auteur tout à fait improbable^, il est pleinement convaincu que certaines portions des Hémisphères Cérébraux, — les Lobes Antérieurs, par exemple, — sont toujours intéressées dans l'accomplissement d'Opérations Intellectuelles et Volitionnelles de nature pratiquement semblable, bien qu'à des degrés différents de complexité chez les divers individus. C'est à peine si l'on peut dire toutefois qu'ils accomplissent, mais bien plutôt qu'ils assistent et aident à accomplir certaines Opérations Intellectuelles et Volitionnelles; car il semble improbable que, même une portion aussi grosse de l'Hémisphère Cérébral que le Lobe Antérieur, ait une série distincte de fonctions qui lui soient particulières. La division en « lobes » est, pour la plus grande partie, une division entièrement artificielle; et la substance grise de la région antérieure est, comme nous l'avons vu, en relation intime avec la substance grise des parties moyennes et postérieures des Hémisphères; de sorte que, de même que notre nature psychique se compose d'un grand réseau com- pliqué mais continu, dans lequel sont compris à la fois les Sensa- tions, les Perceptions, les Jugements, les Émotions et les Volitions ; de même, l'organe physique qui y correspond est aussi représenté par le réseau le plus compliqué et le plus inextricable de cellules et de fibres nerveuses, réciproquement liées et mises en relations fonc- tionnelles les unes avec les autres. Ainsi donc, tandis qu'on peut dire avec vérité que les Lobes Antérieurs prennent toujours part à l'accomplissement d'Opérations Intellectuelles et Volitionnelles de 1. Voy. Journal of Mental Science, Janv. 1869. LOCALISATIONS CÉRÉBRALES. 151 même na^are, ils peuvent être les instruments principaux de cer- taines fonctions et prendre part à un moindre degré à Inexécution de quelques autres Opérations Mentales, dépendant plus spécialement de Tactivité fonctionnelle de parties différentes, — les Lobes Pariétaux, Temporaux, ou Occipitaux, isolés ou combinés. Perception, Intellect, Émotion et Yolition sont si intimement associés dans nos processus mentaux ordinaires que, si nous voulions essayer de dresser une carte définie de leurs territoires, de manière à assigner une province séparée des Hémisphères Cérébraux à chacune de ces grandes divisions de TEsprit, nous tomberions pro- bablement dans une erreur grave. Précisément dans les mêmes par- ties des Hémisphères Cérébraux qui sont les plus intéressées lorsque nous regardons une belle peinture ou un beau morceau de statuaire, nous pouvons imaginer les émotions d'admiration auxquelles la vue de ces objets d'art a donné naissance, — quelle que soit Tactivité avec laquelle d'autres centres peuvent coopérer; et, de même que la vue d'un fruit mûr sur un arbre peut exciter un désir de le posséder, suivi d'un Stimulus Yolitionnel dans le but d'obtenir l'objet désiré, de même, dans ce cas, les parties intéressées dans la manifestation du désir, et celles dans lesquelles le Stimulus Yolitionnel prend son origine, sont probablement situées dans quelques portiçns de la même aire de subtance grise circonvolutionnelle, qui était intéressée dans l'Acte Perceptif lui-même. D'autre part, comme l'auteur l'a dit ailleurs* : « Pour autant que nous avons certaines avenues distinctes de savoir (par les Organes des Sens et leurs ganglions nerveux voisins) et que les Hémisphères Cérébraux sont les parties intéressées dans l'élaboration des impres- sions ainsi obtenues, nous pouvons bien comprendre que les impres- sions, entrant par une porte ou avenue sensorielle, peuvent passer à travers la substance et vers la périphérie de ces Hémisphères Céré- braux, dans certaines directions définies et suivant des routes habi- tuelles. Alors, les impressions qui entrent par une autre porte de savoir, ou avenue sensorielle, peuvent suivre, et suivent probable- ment, une direction différente à travers sa substance; de manière qu'à la périphérie, les fibres et les cellules intéressées dans le processus de direction et d'élaboration de ces impressions peuvent exister en quantité maximum en différentes portions de la surface des Hémi- sphères; —bien que, en partie, elles puissent occuper conjointement la même étendue et être entremêlées avec les fibres et les cellules intéressées dans l'élaboration de la série d'impressions précédem- ment mentionnée. Et ainsi de suite pour les divers organes des sens et leurs expansions ultimes, formant ce que j'appellerais Centres 1. JoumcU of Mental Science. Janv. 1869. lf)2 PHRÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. Perceptifs, dans les Hémisphères Cérébraux. Ainsi, bien qu'il puisse y avoir un enchevêtrement compliqué d'aires, et bien que l'aire appartenant aux impressions d'un sens quelconque, dans les Hémi- sphères Cérébraux, puisse être fort étendue (pour ne pas parler de la complication ultérieure amenée par la communication établie entre les cellules nerveuses de l'aire d'un sens et celles d'autres aires du même Hémisphère Cérébral, et de Tunion probable, établie au moyen de fibres commissurales, entre les parties analogues des deux Hémi- sphères), il se peut toutefois fort bien que certaines portions de la surface des Hémisphères Cérébraux correspondent plus spécialement au chiffre maximum de cellules et de fibres nerveuses appartenant à quelqu'un des divers sens De même que certains de nos sens con- tribuent d'une manière prépondérante à édifier nos impressions men- tales et les résultats volitionnels correspondants (par exemple, ceux de la Vue, deTOuïe et du Toucher), de même nous pouvons imaginer que ces organes sensoriels seraient intérieurement reliés avec une aire comparativement étendue de la substance corticale de chacun des Hémisphères^ On serait donc en droit de regarder comme pro- bable que les Centres Perceptifs pour les impressions visuelles, et ceux pour les impressions auditives, ont un siège relativement vaste dans les Hémisphères Cérébraux; tandis que ceux appartenant aux sens gustatif et olfactif ont une distribution plus limitée. » Sauf quelques changements dans les termes, les vues établies ci-dessus furent mises en avant par l'auteur dans des mémoires écrits en 1865 et 1869. Et, si simple que puisse paraître aujourd'hui la notion que nous avons le droit de chercher, dans la substance corticale des Hémisphères, des Centres Perceptifs distincts, qui seraient en relation structurale directe avec leurs nerfs sensoriels respectifs et leurs ganglions inférieurs (ou noyaux) situés dans le Bulbe ou près du Bulbe, — aucune mention de ce genre de localisation ne se rencontre, jusqu'à cette période, dans les ouvrages de médecine ou de physiologie ' ; bien que, ainsi que Fauteur essaya le premier de le démontrer, ces notions jettent beaucoup de lumière sur la Physiologie Cérébrale et sur certains défauts de la Parole résultant de maladies du Cerveau 3. Les vues de l'auteur furent, peu après^ 1. Une idée de ce genre a aussi été soutenue dernièrement par le prof. Croom Robertson dans le journal Mindy 1877, p. 97. 2. On ne pouvait déduire de pareilles conclusions des vues sur la Physio- logie Cérébrale mises généralement en avant en Angleterre. Il y a en effet une opposition philosophique entre elles et les doctrines largement promulguées par le D' Carpenter (Voy. l'article ; Sensation and Perception, — Nature, décembre 23, 1869, et jany. 20, 1870, p. 309. 3. Voy. Physiology of Thinking {Fortnightly Review. J&uy, 1869) et Defects of Speech in Brain Disease {Brit» and For. Chir.Bev,) Janv. et avril 1869. CENTRES PERCEPTIFS. 153 adoptées et étendues par le docteur Broadbent, dans un Important mémoire sur le Mécanisme Cérébral de la Parole et de la Pensées Bientôt, en outre, des physiologistes commencèrent à rechercher avec ardeur des Centres Perceptifs de cette nature dans la sub- stance griâe corticale. Le premier à agir ainsi fut le docteur Ferrier, bien qu'il ne fasse aucune allusion aux vues de Tauteur. Il entreprit cette recherche peut-être d'une manière indépendante, en tout cas d'une façon tout à fait systématique; et les résultats qu'il obtint méritent d'être étudiés avec la plus grande attention >. La notion qu'il doit y avoir des Centres Perceptifs de cette nature se recom- mandait évidemment à Ferrier; et, avec une énergie caractéristique, il chercha à jeter de la lumière sur leurs localisations, comme il avait précédemment — poussé par les vues de Hughlings Jackson — cherché à établir l'existence de Centres Moteurs distincts dans l'écorce des Hémisphères Cérébraux. Jusqu'à ces tout derniers temps, il y a eu dans la littérature médicale une remarquable disette de faits pouvant servir à prouver l'existence et la localisation de pareils « Centres Perceptifs», soit chez l'Homme, soit chez les Animaux. Nous avons, comme on l'a déjà expliqué, de bonnes raisons pour croire que les fibres sensitives, ou centripètes, venant de tout le corps en généra], se rendent aux Hémisphères Cérébraux en passant dans les couches supérieures et postérieures des Pédoncules du Cerveau; et que, au point où chacun de ces pédoncules s'étale dans l'Hémisphère correspondant, en for- mant la couronne rayonnante^ ces fibres afférentes correspondent au tiers postérieur de cette expansion en éventail, et sont rejointes en ce point par des fibres venant des ganglions inférieurs, ou noyaux, en relation avec les organes de la Vue, de TOuïe et du Goût. On observe que la destruction de cette portion des fibres pédonculaires arrête toute impression sensitive — spéciale ou générale — provenant de la moitié opposée du corps (fig. 171). Mais, tandis que notre savoir est bon jusque-là, nous demeurons dans l'obscurité quant aux relations de ces fibres sensitives avec la Couche Optique (et même quant aux fonctions précises de ce corps, en général), aussi bien que sur ce qui concerne la distribution ultime des diverses séries de fibres à des régions particulières de l'écorce cérébrale, — dans lesquelles 1. Cérébral Mechanism of Speech and Thought (Med. Chir. Trans. 1872, p. 180). Écrivant en effet dans le Journal of Mental Science (avril 1870, p. 23), Broadbent dit : « Ainsi, ces circonvolutions qui reçoivent les fibres centrales et sont bilatéralement associées par le Corps Calleux, constitueront les centres perceptifs du D' Bastian. » 2. Sa première communication sur ce sujet fut présentée à la Société Royale, en avril 1875, et se trouve dans le tome II des PhiL Transact. de cette année, p. 4i5. 151 PHRÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. seules leurs impressions respectives semblent culminer et s'associer à des phénomènes subjectifs ou États de Conscience. Cette absence de preuves, quant à la situation des « Centres Perceptifs » du THomme, semble d*abord très-surprenante, puisqu'on pourrait imaginer que l*étude des nombreuses observations de maladies locales, intéressant la surface du Cerveau, que Ton trouve dans les ouvrages de médecine, devrait bientôt résoudre le problème. Il est toutefois loin d'en être ainsi : et cela pour beaucoup de raisons que nous n'avons pas à détailler maintenant. Qu'il suffise de dire que des lésions locales, n'intéressant que i'écorce d'un seul Hémisphère Cérébral, n'ont jamais paru jusqu'ici, chez l'Homme, nettement associées à la perte de l'Odorat, de la Vue, ou de l'Ouïe de l'un ou de l'autre côté du corps ^ . Cette circonstance particulière semble spécialement liée, comme l'auteur l'a signalé en 18742, à la nature double du Cerveau et à la connexion de chacun de ses Hémisphères avec les ganglions inférieurs, ou noyaux, doubles et intimement unis, de chacun des Sens Spéciaux. En conséquence d'un tel arrangement anatomique, un seul Hémisphère parait souvent, fort peu de temps après que son homologue a subi une blessure ou est devenu malade, capable d'être mis en relation avec les impressions sensitives des deux côtés du corps, de manière que, bien que les « centres perceptifs » de la Vue, de l'Odorat ou de l'Ouïe puissent être détruits dans les circonvolutions d^un hémisphère, il ne se produit, suivant les cas, ni cécité de l'œil opposé ni perte unilatérale de l'ouïe ou de l'odorat. Il est tout à fait possible qu'il y ait d'abord quelque perte ou faiblesse unilatérale de l'an ou l'autre des sens spéciaux, lorsqu'un de ces centres est endommagé dans les circonvolutions ; bien que ceci puisse aisément passer inaperçu dans les pre- miers jours d'une maladie. Le défaut d'observation, sur des points comme ceux-ci, se présente très-communément au début d'une maladie aiguë du Cerveau, soit de la part du malade, soit de celle du médecin. Ainsi que Ferrier l'a récemment soutenu avec assez de justesse, on ne pourrait guère remarquer ces troubles, ou s'en assurer, à moins de les rechercher d'une manière spéciale. Toutefois, l'extrême rareté de troubles unilatéraux de TOdorat, de la Vue ou de l'Ouïe, comme efiets immédiats associés aux maladies ou aux blessures d'un seul des hémisphères du Cerveau, est un fait très remarquable, sur lequel tous les meilleurs observateurs sont unanimes. Si donc on veut jeter promptement la lumière sur cette fort intéressante question, il faut avoir recours à des expériences sur quelques animaux. De ceux-ci, les Singes sont évidemment ceux qui conviennent le mieux, à cause de la ressemblance générale qui existe entre le Cerveau de ces animaux et celui de l'Homme. Des expériences de ce genre ont été faites, avec beaucoup d'habileté et 1. On est cependant arrivé, pour l'odorat, à une connaissance approximative. Pour se reporter aux cas, yoyez Ferrier, FuncHons ofthe Brain, p. 101. 2. Lancety 25 juillet 1874, p. 111. EXPÉIIIKNCËS DE FEBRIEJI. 1S5 déjugeaient, par le docteur Ferrler*, aux écrits duquel 11 faut ren- voyer le lecteur, pour des détails complets sur ses nombreuses observations et la valeur des épreuves adoptées. 11 n'y a place Ici que pour un bref énoncé des résuJtata et des conclusions auxquelles il est arrivé. Ces expériences de Ferrier sont supposées par lui appuyer la notion que des Centres Perceptifs, d'aire limitée, et topographique- ment distincts les uns des autres, existent dans l'écorce des Hémi- sphères Cérébraux. Les faits qu'il cite n'entratneot cependant pas 'lo. m. — Hoffliaphère gaucho du CsrvBau d-un Sinoe (.l/iwotMJ). A, KiMOie âa Sjl- lius; B, silEon d< RolïDdo; C, iciisure pariAto-occipitsIe ou petpeodïculaiTB : PL, loba AonU1;PL, lobe paiiélal; OL, lobe ocdpiUl; TSL, lobe temporal; F. ciieonvolutiOD fiODUle HipiHeare; F^, id., maTenne, P>, Id., inKrieure; if, lillon (routai luptrienc ; tf, eillon fiontal inrérïeoi; . ïciuora colUWrale; GF. gyroi foroi- du corpj callBui) ; CM, circonToUlioo margiosla ; GU, cireon.o- Inlion uncinés; S, ci ■achet ou suiicalum de la come d'Ammon; Q, lobule quadriU- l; FO, iobula orbitaire (fertiar). régions d'où les fibres sensitives se répandent dans dilTérentes direc- tions, peuvent n'avoir aucun titre réel à être considérées comme centres; et cependant leur destruction ou leur excitation peut amener le même genre de résultats que si c'étaient des centres réels*. Et, vu la diffusion subséquente des différentes sortes de fibres, il n'est pas vraisemblable que les recherches expérimentales révèlent d'autres régions ayant des droits semblables à être regar- dées comme Centres Sensitifs. Croom Robertson dit, avec raison, que les sensations elles-mêmes « ne peuvent ni être supposées 1. C. Roberlaon remarque avec justesse : « La lésion corLicale peut absolu- meat empÈcher lei impresaions périphériques d'arriver à la conscience; mais Il ne s'eDsnit pas qne le dernier acte du processus nerveui compris dans une sensation consciente du toucher soit naturel lemenl accompli là, et nulle part ailleurs dans le cerveau; ou que, dans toute cette région, il n'y ait de travail accompli que ce que nous appelons (objectivement) toncher. ■ EXPÉRIENCES DB FERRIER : CENTRE VISUEL. 157 consommées à leur première station corticale ni être suivies ou supposées possibles à suivre plus loin, par aucun des procédés expé- rimentaux employés jusqu'ici. » Bien que la détermination, par Ferrier, des points qui sont de la plus grande importance pour chaque Sens demande à être un peu plus confirmée par d'autres travailleurs qu'elle ne l'a été jusqu'ici, avant qu'elle puisse être finalement acceptée comme correcte, le discernement et l'habileté avec lesquels ses expériences ont été conduites devraient leur assurer l'épreuve soigneuse et complète que mérite leur importance. Des expériences bien conduites sur les animaux sont particulier Fio. 174. — Cerycau de Singe, montrant ombrée l'aire correspondante au centre visuel de récorce de l'Hémisphère Gauche (Ferrier). rement nécessaires, et propres à jeter la lumière sur cet obscur problème de la localisation possible de Centres Perceptifs dans les Hémisphères : car, lorsque de nombreux essais sur les effets de la stimulation locale ou la destruction de différentes régions de l'Hémi- sphère peuvent avoir amené l'expérimentateur à fixer quelque por- tion de récorce comme siège principal de l'un de ces centres, il est désormais en son pouvoir de produire à volonté des conditions qui n'existent presque jamais dans le cas de maladies du sujet hu- main, — c'est-à-dire qu'il peut produire des destructions symétriques dans des régions correspondantes des deux Hémisphères; et, sachant que ces lésions existent seules, il peut ensuite éprouver, avec le plus grand soin, dans quelles conditions se trouve l'animal, sous le rapport de la faculté sensorielle que l'on suppose avoir contrariée. Si nous prenons en premier lieu le sens de la Vue, nous voyons Ferrier localiser son Centre Perceptif dans la circonvolution angu- laire et une partie du lobule supra-marginal (fig. i7/i). La destruc- 158 PHRÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. tion de ces parties sur un seul côté, chez un animal rendu insen- sible par le chloroforme, parut amener la cécité de l'œil opposé pendant un jour ou deux; — on observait, en bandant pendant un certain temps l'autre œil, puis enlevant le bandage, de manière à voir les différences qui se présentaient dans le maintien de l'animal dans ces diverses conditions. Après un jour ou deux, l'animal en expérience paraissait voir de nouveau avec ses deux yeux. Mais si ces réglons de l'écorce avaient été détruites dans les deux Hémi- sphères, ranimai devenait aveugle des deux yeux et ne recouvrait plus la faculté de voir. Au lieu d'un trouble temporaire du côté opposé à la lésion unilatérale, la vue de Tanimal était maintenant perdue des deux côtés, et d'une façon permanente*. Fia. 175. — Cerveau de Singe, montrant une aire ombrée, correspondant au centre auditif, dans l'écorce de l'Hémisphère Cérébral Droit (Perrier). Après des observations comparatives sur les efffets de lésions destructives, unilatérales et doubles, Ferrier localisa le Centre Per- ceptif du sens de VOuïe dans la moitié supérieure de la circonvolvr- lion temporale supérieure (fig. 175). Ici également la destruction de cette région dans un seul Hémisphère n'amenait qu'une surdité tout à fait temporaire de l'oreille opposée, tandis que la destruction de cette même région sur les deux Hémisphères amenait une surdité 1. Voyez p. 49, où Ton a signalé que, dans le cerveau du professeur de Morgan il n'y avait pas de différence appréciable dans l'apparence de la circonvolution angulaire et du lobule supra-marginal des deux côtés du cerveau ; bien que ce célèbre mathématicien eût perdu la vue, d'un seul côtéy presque depuis sa naissance. En outre, dans l'examen du cerveau d'une femme sourde et muette^ Broadbent [Journal of Anatomy and Physiologyy vol. IV, p. 218) n'a ni signalé ni figuré aucune atrophie spéciale dans les circonvolutions temporales supérieures. EXPÉRIENCES DE FERRIER : CENTRE AUDITIF, 159 totale et durable des deux côtés. Ferrier dit, en parlant d'un des animaux sur lequel il étudia ces effets* : « La circonvolution angulaire venait d'être cautérisée sur le côté gauche, amenant la cécité de Tœil droit seulement, et sans affecter aucunement Touie ou les autres sens. La circonvolution temporo-sphénoidale fut alors découverte et cautérisée sur les deux Hémisphères ; la lésion, comme on s*en assura à Tautopsie, était strictement limitée à cette région. Après que Tanimal se fut complètement remis, on éprouva à plusieurs reprises les divers sens et les facultés motrices. Le toucher, le goût et Todorat étaient parfaits ; et la vue, comme l'indiquaient la parfaite liberté de mouvements de Tanimal et son aptitude à trouver sa nourriture et sa boisson, était pratiquement sans alté- ration^ vingt-quatre heures après Topération. Pour ce qui regarde Touïe, il était difficile d'imaginer une épreuve satisfaisante, à cause de la vivacité de ranimai et de l'attention qu'il prêtait à tout ce qui l'entourait. Un bruit fort, produit tout à côté, occasionna un tressaillement, qui toutefois ne pouvait être pris comme une preuve de perception auditive, en tant que distincte d'actions réflexes'... Pour éviter d'attirer son attention par la vue, je me retirai derrière une porte, et j'observai l'animal par une fente, pendant qu'il était confortable- ment assis devant le feu. Lorsque tout fut tranquille, j'appelai à haute voix, je sifflai, je frappai, etc., sans attirer l'attention de l'animal sur la source du bruit, bien qu'il fût parfaitement éveillé et regardât tout autour de lui. Lorsque je m'approchais de lui avec précaution, il ne se rendait pas compte de mon voi- sinage, jusqu'à ce que j'arrivasse dans le champ de la vision ; ce qui le faisait subitement tressaillir et grimacer de frayeur. En répétant ces observations lorsque le singe était tranquillement assis avec un compagnon de son espèce dont les facultés auditives étaient indiscutables, le compagnon tressaillait à chaque son et regardait curieusement pour s'assurer de son origine, tandis que l'autre demeurait tout à fait tranquille. » Pour ce qui est du siège du Centre Perceptif dn sens de VOdorat, nous avons des indications anatomiques de grande valeur. La con- nexion de la « bandelette olfactive » avec le sommet du lobe temporal (ou la continuité véritable qui existe entre ces parties chez beau- coup d'animaux) pourrait, comme le dit Ferrier, « être regardée en elle-même comme donnant des bases sérieuses à une connexion physiologique entre cette région et le sens de Todorat. » Il ajoute : « Chez le Singe et chez THomme, la connexion directe entre la racine externe de la bandelette olfactive, relativement petite, et le subi- 1. Fonctions of the Brain, p. 174. 2. Ces tressaillements, déterminés par des bruits rapprochés, doivent, comme le remarque très Justement Ferrier, « être regardés comme des phénomènes réflexes, de même nature que ceux observés par Flourens chez des pigeons privés de leurs hémisphères, lorsqu'on tirait un coup de pistolet tout à côté de leur tête. » 160 PURÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. culum* n'est point aussi évidente; bien que, chez le Singe, elle soit plus apparente que chez THomme. L'origine, dans le subiculum, de cette soi-disant racine est toutefois absolument établie par Texamen microscopique. » On observa qu'une lésion d'un seul subiculum diminue ou abolit l'odorat d'un seul côté (celui de la lésion), confirmant ainsi la rela- tion directe indiquée plus haut. Car, ainsi que Ferrier le signale * : « Ni les racines internes, qui se confondent avec la circonvolution du corps calleux de chaque côté, ni les racines externes, qui sont réunies avec les subicula et de là, par les piliers postérieurs de la voûte, avec les couches optiques, ne subissent de décussation; il n'y a, par suite, aucune base anatomique à une connexion croisée entre les bulbes olfactifs et leurs centres cérébraux ». On a observé que la destruction de ces deux régions amenait la perte définitive de l'Odorat des deux côtés*. Grâce à la position protégée du sommet du lobe temporal, on vit qu'une limitation exacte des lésions de cette région est presque impossible. Aussi, bien que Ferrier croie le centre du Goût immédia- tement contigu à celui de l'Odorat, c'est-à-dire situé dans la partie inférieure de la circonvolution temporo-sphénoïdale moyenne, au sommet du Lobe Temporal, il est incapable de parler avec autant de certitude au sujet de cette localisation. « L'abolition du goût, dit-il, coïncidait toujours avec la destruction de régions situées en relation intime avec le subiculum »; tandis que, en faveur de la partie ci-dessus désignée comme étant le centre du Goût, il remarque que l'irritation de cette portion de la circonvolution temporale moyenne amène des mouvements des lèvres, de la langue et des joues, qu'il regarde comme « des mouvements réflexes suivant l'excitation de la sensation gustatiye ». La destruction de cette région, sur un seul côté, produisit une perte temporaire ou un trouble du Goût du côté opposé de la langue ; tandis que la perte de ce sens devint 1. On donne ce nom à la partie interne du sommet du lobe temporal, ou plus précisément au sommet de la circonvolution uncinée (corne d*Ammon). 2. Loc, cit., p. 185. 3. On a hasardé (p. 120) une tentative d'explication de ce manque de décussation des conducteurs olfactifs. Le sens de TOdorat (dont les organes sont situés de chaque côté de la ligne médiane du corps) est précisément le mode de sensibilité qui n'établit aucune distinction entre les impressions venant d'un côté ou de l'autre. Il ne semble donc pas vraisemblable qu'un embarras, ou un trouble d'aucune nature^ puisse se produire par suite du fait que les impressions olfactives de la narine droite seraient mises en relation, «dans l'hémisphère correspondant, avec les impressions gustatives, visuelles, xiuditives et tactiles, provenant de la moitié gauche du corps^ et vice versa. EXPÉRIENCES DE FERRIER : CENTRE DE L*ODORAT. 161 complète, double et permanente, lorsque la même partie fut détruite des deux côtés*. La destruction de tout le sommet de Tun des lobes temporaux produisît une perte temporaire de TOdorat, du même côté, et du Goût, du côté opposé. Pour ce qui est du siège du centre de Sensibilité Tactile et Générale^ on éprouva d'abord quelques difficultés à s'arrêter sur un point qui parut spécialement lié aux impressions de cette nature. Ferrier dit : « Après de nombreuses expériences, dans les- quelles la surface externe presque toute entière de l'hémisphère avait été successivement détruite sans amener la perte du sens du Pio. 176. — Cerveau de Singe, montrant ombrée, dans le lobe temporal. Taire dont la destraction entraîna la perte de TOdorat, du môme côté, et du Ooût, du côté opposé (Ferrier). toucher, il me semblait étrange qu'un sens aussi important au point de vue intellectuel n'eût point, comme les autres, un centre spécial dans l'hémisphère. Mon attention fut donc dirigée sur le côté interne du lobe temporo-sphénoïdal et sur le moyen d'atteindre et de détruire cette région ». Ferrier réussit bientôt à atteindre cette région par l'arrière; et ses expériences subséquentes l'amenèrent à regarder spécialement le grand hippocampe et la circonvolution un- cinée sus-jacente comme centres des Impressions Tactiles (fig. 177). La destruction de cette région amène une perte complète de la sensi- bilité de la moitié opposée du corps ; et cette perte est d'un caractère plus durable que la diminution qui se présente dans les autres modes de sensibilité après la destruction unilatérale de leurs centres dans 1. Ferrier dit: « Avec rabolition du goût, la sensibilité cutanée de la langue fut aussi abolie, — fait qui prouve Tassociation dans rhèmisphère des centres de sensation tactile et de sensation spéciale de la langue ». (Loccit.y p. 189.) Charlton-Eastian. — II. 11 162 PURÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. les circonvolutions,— résultat qui est jusque-là parfaitement d'accord avec ce que Ton peut fréquemment reconnaître chez THomme, comme effet de maladies cérébrales^. Quant à la manière de prouver l'existence ou l'absence de la Sen- sibilité Tactile chez l'animal en observation, on rencontre le même genre de difficulté que pour les autres sens, grâce à l'incertitude qui entoure la distinction à établir entre une simple réaction réflexe à une excitation, et celle qui résulte d'une perception consciente. Ferrier « s'efforça donc d'employer des moyens qui lui permissent de distinguer clairement entre les deux cas; comptant plus sur les preuves fournies par l'activité spontanée de l'animal que sur de simples réponses à des excitations cutanées». 11 opéra sur un Singe qui était surtout gaucher, c'est-à-dire Fia. 177. — Face interne de l'Hémisphère droit du Cerveau d'un Singe, montrant une aire fortement ombrée correspondant au centre tactile^ et des lignes pointillées, indiquant la direction dans laquelle un instrument fut enfoncé pour détruire cette partie (Ferrier). qui prenait de préférence de la main gauche les objets qu'on lui offrait. « Pour cette raison, on détruisit la région de l'hippocampe droit, en vue d'affecter le sens du toucher dans le membre que l'animal employait ordinairement ». Voici comment Ferrier décrit les résultats obtenus* : « Après que Tanimal fut revenu de Topération et de la stupeur narcotique^ on trouva que la vue et Touïe n'étaient pas troublées et que rintelligence était aussi vive et aussi active qu'auparavant. Mais Texcitation cutanée^ produite par les piqûres^ les pincements ou une chaleur cuisante, suffisante pour causer des manifestations fort vives de sensibilité lorsqu'on les appliquait sur le côté droit du corps, n'amenaient en général aucune réaction du côté gauche de la face ou des membres de ce côté. Parfois seulement, lorsque l'excitation était intense ou longtemps continuée, il s'ensuivait une réaction. Cette absence tout à fait remarquable de réponse d'aucun genre rendait l'annihilation de la i. Paralysis from Brain Disease. 1875, p. 109-121. 2. LfOC, cit,, p. 179. . EXPÉRIENCES DE FERRIER : CENTRE TACTILE. 163 sensibilité tactile presqae complètement sûre, sans qù*il fût besoin d'autre preuve. » Il existait aussi une altération dans le caractère des Mouvements que pouvaient exécuter les membres gauches, altération que Ferrier croit « due. à la perte de la sensation tactile par laquelle les mouve- ments sont guidés ». Toutefois, en présence de beaucoup de preuves récentes, il semble plus que douteux que Vataxie du Mouvementsoit nécessairement, ou mêq[ie jamais, occasionnée par une simple perte de la sensibilité cutanée (Voy. p. 196 et 286). Mais il devient ici nécessaire de faire une digression, à cause de la nature complexe des Sensibilités Tactile et Générale et de leurs relations avec ce qu'on nomme le sixième sens, ou Sens Musculaire, 11 serait fort important d'arriver, si possible, à des notions définies sur ce qui touche à cette dernière faculté, afin que nous puissions apprendre jusqu'où est vraie l'existence de quelque chose digne de ce nom, à part des divers modes de Sensibilité Tactile et Générale, — et aussi, incidemment, quel est le mode de sensibilité qui guide sur- tout les Mouvements. Sous le titre de Sensibilité Tactile et Commune il faut com- prendre un grand nombre de sortes d'Impressions plus ou moins distinctes les unes des autres. On peut les arranger ainsi en forme de tableau : )1. Impressions tactiles proprement dites. 2. Impressions de contact et de pression. branes muqueuses, i 3. Impressions de température. f 4. Impressions de douleur. b. Des Muscles. \ ^' '^pressions (mal définies) d'effort ou de tension. I 2. Impressions de douleurs (rares). c. Des Aponévroses , Ten- 1 1 . Impressions (mal définies) d'effort ou de pression. dons et Os, j 2. Impressions de douleur (rares). V A J 1. Impressions de contact ou de pression (rares). * *^ ^^' \ 2. Impressions de douleur (plus communes). On trouve que les différents modes de sensibilité de la Peau et des Membranes Muqueuses varient d'acuité dans certaines maladies de la Moelle ou du Cerveau, sans garder aucune relation entre eux. Ainsi la faculté de discerner entre le chaud et le froid, ou la sensi- bilité aux impressions douloureuses, peuvent être abolies, soit sépa- rément, soit ensemble, dans des parties qui demeurent sensibles aux impressions de contact (sensibilité tactile ou toucher propre- ment dit), ou vice versa. Aussi quelques physiologistes distingués croient que ces diflTérentes sortes d'Impressions sont conduites par des fibres nerveuses séparées; tandis que d'autres, qui appuient leur 164 PHRÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. opinion d^autant de preuves, considèrent que les mêmes fibres nerveuses sont capables d'être impressionnées de manière différente, de façon à conduire diverses sortes de vibrations moléculaires, — et à donner ainsi naissance à des impressions dont les phases subjec- tives diffèrent au point qu'on a dit plus haut. En laissant là les considérations de cette nature, il nous faut envisager la série des questions beaucoup plus importantes, mais qui cependant s'y rapportent, concernant l'existence, la nature et l'o- rigine d'une faculté séparée, désignée ordinairement sous le nom de Sens Musculaire, Ces questions ont beaucoup occupé l'attention des physiologistes, pathologistes et psychologues — surtout de ceux-ci — pendant ces dernières années. Les psychologues, en effet, attachent une telle importance aux impressions du Sens Musculaire, qu'il devient par-dessus tout nécessaire d'avoir des notions claires et compréhensives sur la nature véritable d'une faculté de ce genre. Le professeur Bain, par exemple, soutient qu'à moins que l'on n'adopte certaines opinions sur le sens musculaire, — à moins qu'on ne le considère comme un mode actif j ainsi qu'il l'appelle, de sensi- bilité, dépendant directement des nerfs moteurs et des centres moteurs, — « la distinction la plus essentielle qui existe dans la sphère de l'esprit est dénuée de toute base physiologique ^. » Ceci peut être ou ne pas être vrai ; mais, en tous cas, cela montre l'im- portance qu'il y a à arriver à des notions correctes sur une faculté de la nature de laquelle on fait dépendre tant de doctrines philoso- phiques. Croom Robertson a aussi parlé dernièrement * du sujet, comme a de première importance pour la psychologie d'aujour- d'hui. » (Voyez l'appendice à la fin du volume, p. 278.) Les opinions exprimées, à différentes époques sur le Sens Muscu^ taire et les moyens par lesquels nous apprécions la résistance, ont été si variées et si contradictoires qu'il est presque impossible de donner à celui qui étudie cette question quelques notions exactes des problèmes réels qui demandent une solution, sans donner en même temps quelques notes historiques, exposant les diverses opinions que l'on a émises sur ce sujet. Quelques-unes de ces notes, de date plus ancienne, ont été originairement fournies par Sir William Hamilton ; mais, comme on a récemment jeté beaucoup de lumière sur ces sujets par l'observation de cas d'Héinianesthésie chez l'homme, il convient, et même il est nécessaire, sous tous les rapports, de reprendre la question entière. Ceci a été fait; mais, comme la discussion de la question constitue une digression trop longue pour trouver place dans ce chapitre, et qu'elle est évi- 1. Sensés and Intellect, 3* éd., p. 77. 2. Mind, 1877, p. 98. SENS MOSCULAIRE. 165 demment d'une nature technique, j'ai pensé qu'il valait mieux la reléguer dans un Appendice et ne présenter ici que Topinion qui semble la mieux appuyée par les preuves que Ton y produit, ainsi que quelques suggestions qui arriveront peut-être à éviter la con- fusion dans Tavenir. La conclusion à laquelle on est arrivé est qu'il faut abolir le terme de Sens Musculaire^ comme induisant en erreur* sous divers rapports, lorsqu'on l'applique (comme on le fait souvent) avec des significations totalement distinctes, se rapportant en partie à quel- ques-unes et en partie à toutes les impressions qui nous viennent de nos membres en mouvement ou des Mouvements en général. Nous pouvons, avec beaucoup plus de raison et de commodité, en face de tous les désaccords relatifs au sens musculaire S parler d'un Sens de Mouvement comme d'une faculté séparée, de nature complexe, par laquelle nous sommes informés de la position et des mouvements de nos membres, par laquelle nous pouvons juger du poids et de la résistance, et par laquelle le Cerveau est en grande partie guidé, d'une manière inconsciente, dans l'accomplissement des Mouvements en général, mais surtout de ceux du type automa- tique. Des Impressions de diverses sortes se combinent pour parfaire ce «sens de mouvement»; et son siège cérébral, ou aire, coïncide en partie avec celle du sens du Toucher. Il comprend, comme compo- santes, des impressions cutanées et des impressions qui viennent des muscles et d'autres tissus profonds des membres (aponévrose?, tendons et surfaces articulaires) qui, tous, donnent naissance à des Impressions Conscientes, plus ou moins définies; et il semble y avoir en outre une série fort importante d'Impressions non senties, qui guident l'activité motrice du Cerveau, en le mettant automati-. quement en rapport avec les différents degrés de contraction de tous les Muscles qui peuvent être en état d'action. Des impressions de ce genre, ainsi groupées, diffèrent de celles de toutes les autres Facultés Sensorielles en ce qu'elles sont, tout d'abord résultats, plutôt que causes de Mouvement; et ne sont ensuite employées que comme guides pour provoquer la continua- tion des Mouvements déjà commencés (vol. I«', p. 54). Mais, dans d'autres cas, la résurrection en idée de quelques impressions de cette nature coopérera 'avec certains stimuli sensoriels ou volitionnels, pour renouveler des mouvements déjà exécutés à quelque époque antérieure. Ferrier estime que ses expériences montrent que les sensibilités 1. Ou en un seul mot Kinaesthesis (de xivêm, mouvoir, et aldOridi;, sensa- tion). Parler d'un centre Kinesthétique sera à coup sûr bien plus commode que de parler d'un centre du sens de mouvement. i66 PHHÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. appartenant aux Muscles, aux Aponévroses, aux Tendons et aux Articulations, dépendent d'Impressions qui se répandent dans la même aire corticale qui est en rapport avec les Impressions Cutanées plus superficielles^ et en repartent. Il croit que tous ces modes de Sensibilité Tactile et Commune ont été troublés ou abolis ensemble par certaines lésions corticales, ainsi que par celles de la partie postérieure de la capsule interne. Il est cependant tout à fait possible de trouver, dans certaines maladies de la Moelle, la sensibilité de la Peau altérée ou perdue, tandis que celle des Muscles et d'autres tissus profonds est conser- vée ; dans d'autres cas, la sensibilité de la Peau peut être conservée, tandis que celle des Muscles est perdue * ; dans d'autres cas encore, la sensibilité ordinaire superficielle et profonde peut être conservée, tandisque le passage des impressions inconsciences, venant des Muscles, et dont nous avons déjà parlé, peut être plus ou moins gêné; de sorte que, dans ce cas, bien qu'il n'y ait paralysie ni motrice ni sensitive, il peut y avoir une inaptitude à coordonner les Mou- vements sans l'aide de la vue *. Pour ce qui est des Impressions Viscérales, le lecteur doit bien savoir qu'il n'est pas habituellement reçu de sensations provenant des organes internes, et que l'on n'éprouve que des impressions vagues, se présentant par intervalles, aussi longtemps que ces organes demeurent à l'état de santé. On peut toutefois bien prouver, d'une manière indirecte, que des impressions se rendent ordinairement de quelques-uns des viscères au Cerveau, bien qu'elles demeurent inconscientes. Des impressions systémiques sont, de cette manière, capables d'exercer une influence importante sur le courant général de nos pensées et de nos émotions, et peuvent aussi modifier, à un degré marqué, Tactivité du Cerveau dans les sphères d'un ou plu- sieurs Sens Spéciaux. Ainsi, bien qu'elles ne soient point elles-mêmes accompagnées de conscience, il est indiscutablement vrai que diverses impressions viscérales modifient puissamment la Vie Con- sciente des animaux inférieurs, aussi bien que celle de l'Homme. Il est donc plus que probable que ces Impressions Systémiques passent par des routes définies à travers le Bulbe et les parties infé- rieures du Cerveau ; et, de là, montent à quelque région définie de l'Écorce Cérébrale, d'où elles rayonnent peut-être dans diverses directions. Le fait que les impressions sont d'un type inconscient ne doit pas faire douter qu'elles n'atteignent l'Écorce Cérébrale. Les probabilités sont au contraire grandement en faveur de cette supposition. 1. Jaccoud, Les Paraplégies et VAtaxie, 1864. 2. Landry, Traité des Paralysies f 1859. IMPRESSIONS VISCÉRALES. 167 On ignore toutefois, pour le moment, quelles sont les parties de rÉcorce où se rendent surtout ces impressions. Ferrier incline à croire qu'elles vont aux Lobes Occipitaux, mais la preuve qu'il invoque semble à Tauteur incapable d'appuyer une pareille conclusion; et Ferrier lui-même n'insiste pas beaucoup sur ce pointa A part toute- fois la nature douteuse de la preuve spéciale sur laquelle Ferrier base son opinion sur la localisation cérébrale des Impressions Vis- cérales, cette conclusion ne se recommande point très fortement, si on la juge d'après l'évidence générale accessible à tous. Il ne semble guère, en eflFet, que l'on ait des motifs suffisants pour croire que des impressions aussi primordiales que le sont les impressions systé- miques, dans toute la Série des Vertébrés (et qui semblent dimi- nuer plutôt que croître en importance chez les membres supérieurs de la série], doivent avoir surtout affaire à une des portions déve- loppées en dernier lieu et des plus spécialisées du Cerveau. Assuré- ment, cette évidence générale, comme l'auteur l'a déjà signalé ailleurs, tend plutôt à attribuer la complication proportionnelle- ment plus grande des Lobes Occipitaux à la plus grande Activité Intellectuelle dont l'animal est capable *. Cette dernière idée a été également appuyée par le D' Hughlings Jackson et autres, à cause de la manière dont elle s'accorde avec un grand nombre de faits présentés par des personnes atteintes de maladies du Cerveau. Il ne s'ensuit aucunement que les Impressions Viscérales prove- nant des deux côtés du corps doivent, comme la majorité des impressions sensitives, s'entrecroiser en quelque point de leur course vers les Hémisphères Cérébraux. Il ne résulterait point un avantage semblable de la décussation de ces impressions. D'abord on ne rencontre point, dans les Viscères, une symétrie bilatérale uni- forme; et, en second lieu, si l'entrecroisement des autres con- ducteurs sensitifs a été amené de la manière que nous avons tenté d'indiquer (p. 116), il n'y aurait aucun but à une décussation sem- blable des Impressions Viscérales. Ceci est évident lorsque nous con- sidérons que les impressions viscérales n'entraînent aucune tendance ou aucun besoin d'évoquer l'activité d'un seul côté du corps. Pour autant qu'elles passent au Cerveau et excitent l'action des organes de relation, elles sembleraient n'agir que par l'intermédiaire d'im- pressions provenant des Sens Spéciaux, dont les centres ont été éveillés, et rendus plus réceptifs par leur mise en relation avec des Impressions Viscérales distinctes, bien (\\1l inconscientes . 1. FuTictions of the Brain, p. 192. 2. The Human Brain. Macmillan's Magazine, nov. 1865. Il paraît que la même opinion a été mise en avant par le D' Carpenter, dans : Brit. and For. Med. Chir. Review. Oct. 1846. 168 PHRÉNOLOGIE ANCIENNE ET NOUVELLE. 11 semblerait en effet, diaprés quelques observations qui ont déjà été faites, que, dans beaucoup de cas d*Hémianesthésîe, les viscères demeurent au moins aussi sensibles que jamais à une forte pression exercée sur les deux côtés du corps; et ceci indiquerait naturelle- ment que les conducteurs cérébraux de ces impressions ne s'entre- mêlent pas, dans la région de la capsule interne, avec ceux des autres modes de sensibilité. Et, bien que leurs Centres puissent aussi être situés en des lieux différents, il est à peu près certain que les Impressions Viscérales peuvent, soit rayonner dans quelques parties de la province de chacun des Sens Spéciaux, soit être mis en connexion intime avec elles, puisqu'elles agissent si fréquemment les unes sur les autres de la manière indiquée. Cette action réciproque n'a pas lieu toute- fois que dans une seule direction. Il y a, de la part de VAppétit Sexuel^ comme le remarque le professeur Bain, « une susceptibilité de s'enflammer par un grand nombre de côtés, par tous les sens, par des séries de pensées et par des émotions qui ne sont point des sensations. » A un degré moindre, une inflammahilité semblable par les impressions sensorielles existe aussi à l'égard de V Appétit pour la Nourriture. CHAPITRE XXVI VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. « Nous trouvons en nous-mêmes, dit Locke (1690), un Pouvoir de commencer ou de différer, de continuer ou de cesser diverses Actions de notre Esprit, ou divers Mouvements de notre Corps, par une simple Pensée ou un simple choix de notre Esprit. » Le champ de cette aptitude, qui porte le nom de « Volonté » ou Racmas ADlèrïaureBdes Ner^ Spi- naux, comiDS on le« voit dans ans coupa transvarule da l'une dei Cornai AnUiieum de la Uoelle d'un UoulQn (Flint, d'aprâs Dean). A. point où les racine] antéiieun» «meigent de> cornes de la eubslance glisc ; b, b, b, cellules celides les unes aui autres par des processus ( intercellulaires > langt et grUes, al oniet égalemeDl aux fibres dot racines anlérieutai. On voit dos faisceani de fibres se croisant dans presque tout«Siles réalité où l'actioD Mmbiaée des unités nerveuses des deux cités se 'présente communément (fig. 154, o o'). 178 VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. Un grand nombre de groupes de cellules motrices situés à différents niveaux dans la moelle, sont aussi reliés les uns aux autres, en combinaisons simples ou multiples, par des fibres commissurales longitudinales, dont la lon- gueur varie avec la distance qui sépare les groupes cellulaires dont l'activité est ainsi associée. Ces fibres unissantes longitudinales, de longueur différence, en passant d'un groupe cellulaire à un autre, traversent, en partie du moins, ainsi qu'on s'en est assuré (par les preuves clinico-pathologiques fournies par les personnes souffrant de maladies de la moelle), les « colonnes postérieures » de la Moelle Épinière. On conçoit que des groupes bilatéraux de ces cellules, existant à divers niveaux dans les deux « cornes antérieures », bien que différant beaucoup l'un de l'autre par le nombre des unités qu'ils renferment et retendue de lei^r aire de distribution, soient les Mécanismes Nerveux Spinaux et Bulbaires nécessaires à l'exécution d'un nombre immense de mouvements Réflexes, ou Automatiques Primaires, présentant également tous les degrés de complexité. C'est probable- ment parce que ces divers mécanismes (fibres et cellules) sont an*angés d'une manière si parfaite, que chacun des Mouvements en question peut être évoqué avec une régularité machinale, en réponse aux stimuli appropriés qui les atteignent et les traversent 4. Les « mécanismes » pour la production d'un grand nombre de Mouvements de ce genre peuvent avoir été développés à une époque très reculée de l'histoire ient de parler en dernier lieu étant quelques-uns des Mouvements Automatiques secondaires les plus typiques de Hartley, les considérations ci-dessus suffiront à montrer qu'un grand nombre de ceux placés jusqu'ici dans cette ^catégorie ne sont que des Mouvements primaires, dont la faculté d'exécution a été un peu différée. Précédemment, beaucoup de personnes ont supposé que l'influence dirigeante de la Volition agissait principalement en permettant à l'enfant de les exécuter; tandis que l'on soutient ici que leur acquisition par l'individu dépend beaucoup plus du développement graduel de Mécanismes Nerveux hérités, — dus à l'éducatioo successive d'un grand nombre de générations précédentes. Ce ne sont évi- demment pas des Mouvements nouveaux, acquis de nouveau parchaque individu, comme ce serait ,1e cas, par exemple, pour les personnes qui apprennent à nager, à danser, ou à jouer de quelque instrument de musique. Dans un groupe de cas, les Efforts Volitionneis sont rencontrés à moitié chemin par les tendances héréditaires au développement ; tandis que, dans l'autre, et dans le cas de tous les Mouvements Volitionneis nouveaux acquis par l'adulte, les Influences Volitionnelles ne sont aidées que par ces tendances organiques natu- relles au développement de mécanismes nerveux nouveaux, qui ont originaire- ment conduit (sous l'influence de stimuli appropriés) à la genèse primaire des Tissus Nerveux ; et que l'on peut, en toute sécurité, regarder comme agissant encore chez tous les animaux, supérieurs ou inférieurs. CLASSIFICATION DES MOUVEMENTS. 18! Mouvements Acquit CLASSIFICATION DBS ICOUVBMBNTS Movxwnenis HéHtés par l'Individu, __ par l'Individu. I. — VOLITIOIWBLS, n. — Automatiques SsCONDAIilBS. (Hartley). a Où les MoaTemoQts eux-mdmes sont familiers et aisés. 6. Où les Mourements eux-mêmes sont peu familiers et difficiles. / a. M OQTements appris par chaque individu pour Ini-môme; et qui, par la suite, après une longue pratique, deviennent familiers et d'exécution facile. b. Mouvements qui ne • m. — Automatiques PaiMAiRBS. Les actes Volltionnels ne sont donc que des actes Automatiques en voie de formation^ d'abord pour Tlndividu, et peut-€tre, d'une manière subséquente, pour la Race. Là où ces Mouvements ont été acquis ou appris pour la Race^àmoins que les Mécanismes Nerveux hérités qui y sont corrélatifs ne soient développés au moment de la naissance, des Volitîons peuvent intervenir de nouveau chez chaque Individu, et agir comme stimuli pendant le temps que ces Mécanismes héréditaires mettent à subir leur degré normal de développement. Admettant que les Mécanismes Moteurs Spinaux et Bulbaires sont, soit développés, soit en voie de développement, nous pouvons maintenant employer notre attention, d'une manière plus particu- lière, à considérer les parties d'où viennent les Incitations Céré- brales, et les conducteurs par lesquels elles passent ( en descendant de la substance grise corticale) dans les Mouvements Émotionnels, Idéo-moteurs et Volitionhels. On a assez clairement reconnu une partie de la route : et c'est de celle-là que nous allons parler tout d* abord. D'après les preuves qui nous sont fournies par les maladies sur le sujet humain, d'après les expériences sur quelques animaux et d'autres sources d'informations, on s'est assuré que les Corps Striés sont de gros ganglions moteurs, intéressés de quelque manière dans l'exécution des Mouvements Volontaires, Émotionnels et Idéo- moteurs. Xes stimuli moteurs, — c'est-à-dire les stimuli qui doivent évo- IBS VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLOPITAIHES. quer des mouTements, — descendent, donc de certaines parties de l'Écorce Cérébrale aux Corps Striés correspondants. CeE corps sont mis en activité d'une manière qui ne peut être définie, bien que d'eux les stimuli moteurs semblent se continuer et se rediriger vers les mécanismes moteurs dont nous avons précédem- mentparlé, et qui sont situés dans le Bulbe et la Moelle. Les ctiemlns que suivent ces derniers stimuli sont assez bien connus. Ils par- tent de chaque Corps Strié, passant i traversles couches inférieuresdu Pédoncule Cé- rébral et le Pont de Varole, en se maintenant du même côté; tandis que, au-dessous de ce pont, ils se réunissent dans la pyramide antérieure du Bulbe qui, après une course d'un peu plus d'un pouce,s'entrecrolseavecson homologue, — de manière qu'un grand nombre de» fibres de chacune des py- ramides passe dans la co- lonne latérale opposée de ' breuMs. aVi'ûnB'dVs cora« AntéSure» d™a la Moelle', tandis que d'au- MoaUBÉpinièreriarHonim«(MsiSchuitiB).a,pro- très Continuent à descendre longement ceUulaire non tsiniflé, se poursuiYMt, ^^ [^ coionne antérieure fibrês"de"™iM °on/^n!^7T"aiiUesT">lon- ^'^ ™^™^ "^^^^ ^^^ ^^^^ gemenis «ont ramifiés; b, agrégat de granules motrices qui suhissent la pigmemures sut un eût* du gros Qopu nucléole, d^cussation et descendent (X ISO d.am.i ^^^^ j^^ colonnes latérales de la Moelle, entrent dans les cornes antérieures de la Substance 1, Il semblerait, d'après tes phénomènes commonément otcaaionnés pw •** maladies des grands Centres Nerveux de l'Homnie, que les conducteurs céré- braux par lesquels les mouiemcnts, au moins des membres, sont mis en uti- vitè, dussent subir une décuisation de ce genre. MÉCANISMES UOTEUHS. 1S3 Grise dans les régions cervicale, dorsale ou lombaire, suivant la situation des groupes de cellules iutéressés dans les Mouvements que les stimull cérébraux particuliers, qui traversent ces conduc- teurs, sont destinés à évoquer. Le passage des Incitations Cérébrales, ou stimult, à travers l'un ou l'autre de ces Mécanismes Spinaux est suivi d'un épanchement de Mouvements Moléculaires gradués, le long de certaines des fibres des racines antérieures avec lesquelles ces Mécanismes sont continus : et ceux-ci, traversant les Nerfs Moteurs avec une vitesse d'environ 111 pieds par seconde, excitent rapidement des groupes o. 180. -Coupai Optique, montrj ml 11 paMia antérieure de 1> captui ou rautte cOW. produit VHémipléaù, (C.rvilLe et D » itriél; L, nojau eitra-Ycntrioul (capwl« interne; de la capaiili in musculaires déSnis, suivant des modes définis, de manière à pro- duire les Mouvements désirés. La manière dont les médecins et les pathologistes ont acquis ces connaissances sur la route que suivent les stimuli cérébraux, en descendant des Corps Striés aux Muscles, est trop compliquée et. trop technique pour être discutée ici. Nous devons nous contenter, pour le moment, du simple énoncé que nous venons de faire des- faits et des brèves explications que voici : Les effets qui suivent, chei l'Homaie, les maladies des Corps Striés, soil RainoUiSBemeiit, soit Hémorrhagie, démontrent l'importance de ces corps rela* tlvement aui Mouvements Volontaires, et prouvent qu'ils ont aObire h la 184 VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. transmission et à la distribution convenable des incitations « volitionnellesn.La destruction ou la lésion sérieuse de l'un des Corps Striés par une maladie produit) entre autres résultats, une perte complète de la puissance volontaire sur les Membres du côté opposé du corps (Hémiplégie) ; bien que les muscles du tronc , qui sont mis eu activité simultanée, ne partagent point cette paralysie, pour les raisons, que Broadbent a été le premier à donner (p. 118). Chaque Corps Strié transmet donc les incitations volitionnelles pour les mouve- ments des Membres de la moitié opposée du corps ; tandis qu*il semblerait que chacun d'eux puisse transmettre les incitations capables de mettre en action les groupes doubles et intimement unis de Cellules Nerveuses Spinales qui gou- vernent les mouvements bilatéraux du tronc. On s^arrètera spécialement, dans un autre chapitre, sur les mouvements bilatéraux en rapport avec la Parole. On ne peut conjecturer que vaguement la manière précise dont agit le Corps Strié. Nul n^a mieux ou plus explicitement exprimé que Broadbent ne Ta fait dans le passage suivant, l'opinion admise par beaucoup d'auteurs ^ a Le Corps Strié est le ganglion moteur de la moitié opposée du corps tout entière. Il traduit les volitlons en actions, ou met à exécution les commande- ments de l'Intellect ; c*est-à-dire qu'il choisit pour ainsi dire les noyaux ner- veux moteurs (du bulbe et de la moelle) propres à accomplir l'action désirée, et leur envoie les impulsions qui les mettent en jeu. Ces impulsions sont transmises par des fibres, et les fibres doivent partir de prolongements cellu- laires du corps strié. Un mouvement donné doit donc être représenté dans le Corps Strié par un ou plusieurs groupes de cellules, émettant des prolongements descendants, qui deviennent des fibres de la partie motrice de la moelle. Lorsque le mouvement est simple, ou lorsque la coordination peut être effectuée par la moelle, comme dans la marche, le groupe cellulaire sera petit et les fibres descendantes peu nombreuses. Lorsque le mouvement est complexe et délicat, et guidé par la vision ou par Tattention consciente, comme dans l'écriture et le dessin, les groupes cellulaires seront gros et définis, et les fibres descen- dantes nombreuses. Il n'y aura pas un groupe séparé de cellules pour chaque mouvement; mais les mémos cellules peuvent être combinées de manière différente : de même que le carbone, l'hydrogène, l'oxygène et l'azote forment la base de toutes les substances organiques. Les mots, qui exigent pour leur prononciation la coopération simultanée des muscles de la poitrine, du larynx, de la langue, des lèvres, etc., et l'ajustement exquis et rapide de leurs mouve- ments intéressés dans la phonation et l'articulation, doivent être représentés dans le Corps Strié par des groupes très considérables de cellules ; et cela pas. d'un côté seulement, mais des deux. » * Cette opinion sur les fonctions des Corps Striés, relativement aux Mouvements Volontaires, peut être complétée par Tidée qu'a émise le même auteur sur les fonctions du Cervelet Mans la production de ces Mouvements. On verra ainsi les parts respectives qu'il incline à assigner à chacun de ces organes. Il dit : 1. Brit, Médical Journal !•' avril 1876. CENTRES MOTEURS. 185 « Le Cervelet coordonne les tnouvetnents guidés par la vision, ou conibine les mouvements généraux du corps, qtii sont rendus nécessaires par des actions spé- ciales ordonnées par la Volition, Par exemple, poar démontrer cette dernière fonc- tion Je désire frapper un coup. Je n'ai conscience que du désir d'atteindre l'objet et de l'atteindre avec force : c'est là la seule action réalisée dans la conscience. Mais, pour exécuter ce dessein, non seulement le poing doit être serré et le bras étendu brusquement, mais encore les pieds doivent être solidement plantés, les jambes rendues rigides, le corps rejeté en avant, la poitrine fixée, et c'est ce que le Cervelet fait pour moi Nous pouvons voir qu*il n'y a pas entre les impressions visuelles de relations semblables à celles qui existent entre celles-ci et les impressions tactiles ; et que tout mécanisme analogue à celoii qui sert aux réponses réflexes de ces dernières est impossible pour la vision... Comment le Cervelet est actionné par le Cerveau ou les ganglions sensori- moteurs, et agit à son tour sur la moelle, c'est ce que nous ne savons pas encore. » Les notions exposées ci-dessus par Broadbent sur ce qui touche aux fonctions du Cervelet ne sont, en partie, pas très différentes de celles qui ont été exprimées dans le chapitre xxiv. Il y a, en réa- lité, des raisons sérieuses pour croire que le Cervelet agit, de quel- que manière, à l'instigation du Cerveau, dans la production des Mouvements Volontaires (voy. p. 137) ; et, dans ce cas, comme on Ta déjà expliqué, les mouvements sont principalement guidés par la Vision. D'autre part, il semble évident que le Cervelet prend aussi part à raccomplissement de Mouvements « automatiques » de Tordre le plus élevé ou le plus général, tels qu'on peut bien concevoir qu'il en est dévolu à un gros Ganglion Moteur, situé à la tête de tous les autres centres moteurs subordonnés de la Moelle et du Bulbe, mais en relation intime avec eux. Étant donc intéressé, comme il Test, à la fois aux actions nouvelles et aux anciennes, il a une fonction essentiellement double; et ce que nous savons jusqu'ici de ses rela- tions anatomiques est assez en harmonie avec cette opinion. De quelle manière précise le Cervelet agit-il dans raccomplisse- ment de ces fonctions, et plus spécialement de celles dans lesquelles il coopère avec les Corps Striés pour l'exécution des Mouvements Volontaires? c'est ce qui demeure, jusqu'à présent, absolument in- connu. Nous sommes également réduits aux conjectures, lorsque nous essayons d'élucider la manière dont les Corps Striés eux-mêmes réa- gissent, sous l'influence des Incitations Intellectuelles, sur les noyaux moteurs du Bulbe et de la Moelle. Gomment se fait-il que l'Idée com- mençante, le Désir d'un but qui s'y rapporte, et la double Conception des Mouvements nécessaires, comme stimuli coopérants, soient mis à même d'influencer les Corps Striés, de manière à évoquer les Mouvements en question? L'obscurité qui enveloppe ce problème ne saurait être, à présent, dissipée. Nous ne possédons aucune con- 186 VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. naissance réelle sur ce sujet; et nous supposons seulement que l'In- tellect, lorsqu'il passe en action, — c'est-à-dire au changement de direction, ou coude du courant, — en même temps qu'il semble engendrer un fantôme psychologique, nommé Volonté, opère en transmettant des excitations convenables aux Corps Striés; et que là, en outre, peut-être sous la stimulation conjointe du Cervelet, de quelque manière complètement inconnue, d'autres actions molé- culaires sont excitées en conséquence, d'où résultent des incitations qui sont envoyées aux noyaux nerveux moteurs du Bulbe et de la Moelle, et à travers ces jaoyaux appropriés à l'accomplissement des Mouvements désirés. Mais il reste maintenant à considérer un autre groupe final de questions relatives à l'exécution des Mouvements Volontaires. Nous avons montré la route que suivent les incitations cérébrales en descendant des Corps Striés par les Pédoncules Cérébraux, le Bulbe et la Moelle, et, de là, par les racines antérieures des Nerfs Spinaux, aux groupes musculaires requis. Il demeure toutefois à spécifier la partie supérieure de la route. Il nous faut considérer si c'est de parties spéciales de la surface des Hémisphères Cérébraux — et, dans ce cas, de quelles parties — que les Incitations Intellectuelles sus-mentionnées (qui, dans leur incorporation subjective, sont gé- néralement connues sous le nom de «Volonté» ou «Volition»), des- cendent aux gros Ganglions Moteurs, — les Corps Striés. Avant les expériences de Fritsch et Hitzig (1870) et de Ferrier (1873), on croyait généralement que les irritations physiques des surfaces des Hémisphères Cérébraux étaient incapables d'évoquer aucun Mouvement défini. Ces investigateurs ont toutefois trouvé que quelques Mouvements définis pouvaient être produits par l'irri- tation électrique; et que, bien que les Mouvements varient de carac- tère, ils étaient plus ou moins semblables lorsque les mêmes régions limitées de la Substance Grise superficielle étaient, en dif- férentes occasions, excitées à un degré semblable. Fritsch et Hitzig obtinrent d'abord des résultats de ce genre en faisant usage de courants voltaïques faibles; tandis que les observations postérieures, bien que plus étendues, de Ferrier furent faites à l'aide de courants induits faibles. On trouva que les Mouvements ainsi produits par la stimulation de certaines parties étaient, au contraire, abolis, lorsque ces mêmes parties de l'Écorce Cérébrale étaient détruites; c'est-à-dire que ces Mouvements ne pouvaient plus être accomplis par l'animal, ni de sa propre volonté ni comme suite d'une excitation extérieure. Quelques-uns des principaux faits qui portent sur cette question de l'excitation ou de l'abolition de Mouvements définis, comme con- EXPERIENCES DE FERKIEIt i AlBE HOTBICE. 187 séquence de la stlmulatloa ou delà destruction deportiona définies de l'écorce du Cerveau chez les Singes', seront peut-être plus brièvement exposés en citant le récit, Tait par Ferrier, de quelques observations portant sur un animal dont certaines parties du cer- veau avaieut été précédemment soumises k rexcitation électrique; et chez lequel les changements Jrritatifs Inltiatix furent prompte- meat suivis de processus morbides destructeurs, atteignant les mêmes parties de l'Écorce Cérébrale. Ferrier dit (Funclioni of the Brain, p. 200) : « La première ejpériCDC« qne l'ai à rapporter est instructive, en ce qu'elle montre les elTeta respeetirs Fio. 181, — Vdb latérale du CensuD d'an Siaga, monlrut lai limitn ia Vaire motrice de l'Hémiiphère Cécébiil droit (Farriai). e, bIIou de KaloudOi d, lobule pmriAtal; t, citcoOTolution ucsndanta fronlalc. de rirriUlioQ et de la destruction des circonvolutions qui limitent le sillon de Rol&ndo. L'bémispbère droit d'un singe avait été découvert et soumis k l'eipé- rimenlation p&r l'in-ilation électrique. La partie découverte comprenait lea circonvolutions &Bcendajites pariéta.le et frontale et lea extrémités postérieures des circonvolutions fronlalea. On Uissa l'animal se remettre, pour pouvoir étu- dier les effets de celle eiposilion du Cerveau. Le Jour d'après, on trouva l'ani- mal parfaitement bien. Vers la fin du jour anivant, où s'étaient montrés dea signes d'irritation iaQamniatoire et de suppuration, il comnieuça à souffrir de spasmes chroniques de l'angle gnuche de !a bouche et du bras gauche; ces spasmes revenaient fréquemment et prirent rapidement un caractère épilepti- forme, affectant la totalité du cûté gauche du corps. Le jour d'après, l'hémiplégie gauche était établie, le coin de la joue tiré à droite, l'abajoue gauche flasque, 1. Les mouvements de ces Animam étant les plus voisins do ceux de l'Homme, et leur Cerveau étant aussi le plus semblable, il vaudra mieux, dans le conrt espace que nous pouvons consacrer à ce sujet, limiter nos observations «ui résultats dea expériences qui oui porté sur eux, bien que le D' Ferrier ait, aussi fait des expériences sur beaucoup d'autres animaux. 188 VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. et distendue par la nourriture qui s^était accumulée en dehors de Tarcade den- taire ; il y avait paralysie presque complète du bras gauche et paralysie partielle de la jambe gauche. Le Jour suivant, la paralysie du mouvement était complète sur tout le côté gauche, et se maintint Jusqu'à la mort, qui survint neuf jours après. La sensibilité tactile était conservée, aussi bien que la vue, Touîe, Podorat et le goût. A Tautopsie, on trouva que les circonvolutions découvertes étaient complètement ramollies ; mais que, sauf cela, le reste de Thémisphère et les ganglions basilaires étaient exempts de tout& lésion organique Nous avons ici un cas évident, d*abord dMrritation vitale produisant précisément les mêmes effets que les courants électriques ; puisde destruction par ramollissement inflammatoire, aboutissant à la paralysie complète des mouvements volontaires , du c6tè opposé du corps, sans troubles sensitifs. » L'importante observation précédemment faite par Hughlins Jackson, qu'une irritation morbide de la région correspondante du Cerveau, ou d'une partie de cette région, se rencontre particulière- ment, sur l'Homme, chez les personnes sujettes aux convulsions uni- latérales, complètes ou partielles, du côté opposé du corps, fut ainsi aussi pleinement vérifiée que possible par ces observations expéri- mentales sur le Singe. Il y a lieu de croire également qu'une ma- ladie détruisant les Circonvolutions Cérébrales de cette région peut amener chez l'Homme, comme on l'a vu chez le Singe, un état d^Hémiplëgie complète. Ainsi, chez l'Homme comme chez le Singe, l'irritation de certaines régions de la surface de l'un des Hémi- sphères Cérébraux est suivie de tiraillements choréif ormes, ou de véritables Convulsions, du côté opposé du corps ; tandis que la des- truction des mêmes parties amène une Paralysie unilatérale du côté opposé. L'irritation et la destruction d'autres régions de la surface du cerveau, chez les Singes, ne furent point suivies de pareilles excitations ou abolitions de Mouvements. On ne peut donner ici de détails sur les effets produits par des irritations ou des destructions de parties limitées des Circonvolu- tions comprises dans cette aire excitable. Le lecteur. devra se repor- ter, pour cela, au chapitre viii de l'ouvrage de Ferrier. On peut reconnaître, toutefois, les conclusions principales auxquelles il est arrivé, en étudiant avec soin les figures 182 et 183, sur lesquelles sont indiquées les situations .des différents centres supposés des mou- vements spéciaux, d'après les résultats de ses recherches. Les voici : (1) Centres de mouvements de la jambe et du pied opposé, comme ceux de locomotion, — dans le lobule postérchpariétal. (2, 3, 4) Centres de divers mouvements complexes des bras et des jambes ; comme ceux qui servent dans les actes de grimper, de nager, etc., — dans les circonvolutions limitant Vextrémité supérieure du sillon de Rolando, (5) Centres pour Textension en avant du bras et de la main ; comme lorsqu'on EXPÉRIENCES DE FERRIER : CENTRES MOTEURS. 1S9 étend la main pour loucber quelque chose en sTant, — dans i'ixtrémité potté- rieure ife la circonvolution frontale itrpérieurt. (6) Ceatre des mouvements de la ni&[D et de l'avant-brns, dans lesqueli le biceps est particulièrement en Jeu (supination de la main et Qeiioa de l'arant- bras), — prèi du milieu de la circotivûlution aicendanU frontal», vii-à-vit de l'extrémité poilériture de la circonvolution frontale moyenne. (7 et S) Centres des éléial^inrs et des dépresseurs du coin de la boucbe, — dans Vextrémilé inférieure de la circonoolution frontale ascendante. (9 et 10] réunis en un seul, désirés comme ie centre des mouvementa des lèrrea et de la langue serrant dans l'articnlation, — dam l'extrémité poilérieore de la troisième circonvolution th>ntale (circonvolutiou de Broca). (11) Centre de rétraction du coIq buccal, — dont la circonvolution lupra- marginale.près dt l'extrémité inférieure de la pariétale atcendante. le taita, al auisi la figure ilî. (lï) Centre des mouTemeuts latéraui de la tête et des yeux, avec élévation des paupières et dilatation des pupilles (altituded'afCentionii — datwtga partie* poetériewea det circonvolutioni frontale» supérieure et moyenne. (a, b, c, d) Centres des mouTeoieats de la main et du poignet, — dant la circonvoluf ion ascendante pariétale. La position relative de ces eenCref motewt supposés, relativement à deux des centres sejtsitifs supposés les plus importants, est aussi montrée sur la figure 182, où les cercles 13 et 13' indiquent ce qui est regardé par Ferrier comme le Centre Visuel {dans le lobtile supra-marginal et la circonvolution angtilatre), tandis que les cercles 14, liindiqueut la situation du Centre Auditif (dans la circonvolution temporale supérieure). On croit que les centres du Toucher, de l'Odorat et du Goût sont, comme nous l'aTons précédemment mentionné [p. 1SQ-1Q3), placés dans les cii'convolutions de la face inlerne et du sommet du Lobe Temporal. Comme exemple du genre d'évidence sur lequel reposent les 190 VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. localisations sus-meationnées des Mouvements Spéciaux, oa peut citer l'une des expériences de Ferrier qui porte sur ce point. ■ L'hémisphère gauche d'an Singe (ut découvert daas la région de ta cir- conTolution frontiile sBcendante, suffisammeQt pour moalrer le centre bicipital (fig. 182, 6} ou centre de Bapination et de Qexion de l'avsnt-bnta. La place exacte étant détermioée par l'application des électrodes, elle fut eiactement caotérisée, Juste aasez pour détruire la substance grise corticale. Cette opé- ration se manifesta aussitât par la paralysie du pouvoir de flexion de l'avant- braa droit. Tous les autres mouvements des membres étaient conservés; mais. rieura d'un CeTTsan da Singe, montrant les poeîtion» ralativM do eipliCBtiaDi, voyei le tai(e, ainil qaa la figure IIS. lorsqu'on plaçait le bras droit dans l'extension, l'animal était tout à fait inca- pable de le fléchir; et le membre pendait, dans un état d'extension et de flacci- dité, lorsqu'on soulevait l'animal Il portait les objets à sa bouche avec la main gauche; les mouvements de la jambe étaient intacts; il n'y avait point de paralysie faciale, et la sensibilité cutanée était parfaite, de même que les autres modes de sensibilité. » Que les divers détails dont ou n'a donné ici que de brèves indi- cations soient ou non destinés à être confirmés par d'autres Investi- gations, il sembîe assez évident (malgré tout ce qu'on a dit en sens contraire) que les observations expérimentales sur les Singes, aussi bien que les données cllnico-pathologiques fournies par l'étude des EXPÉRIENCES DE FERRIER : CENTRES MOTEURS. 191 effets morbides chez THomme, viennent à l'appui de Topinion que certaines régions excitables de l'Écorce Cérébrale existent dans chaque Hémisphère : régions dont l'irritation produit des Mouve- ments Choréiques ou Convulsifs du côté opposé» et dont la des- truction entraîne une Paralysie des parties correspondantes du corps. Cette aire excitable (fig. 172, 182) comprend les circonvolu- tions qui limitent ou avoisinent le stï/on de Rolando; c'est-à-dire les circonvolutions ascendantes frontale et pariétale, le lobule postéro- pariétal et les parties postérieures des trois rangées de circonvolu- tions frontales. Il semble donc que l'on puisse supposer, en toute sécurité, que ces portions du Cerveau sont, de quelque manière, reliées à la pro- duction de Mouvements. La preuve de cette conclusion est, en réalité, de nature précisément semblable à celle qui amène à sup- poser que les Corps Striés sont intéressés dans la production des Mouvements. Il importe, en outre, de mentionner que Burdon, Sanderson* et autres ont montré que les mêmes Mouvements spéciaux qui suivent l'irritation de portions spéciales limitées de l'Écorce, peuvent aussi être évoqués après l'ablation de cette écorce, en stimulant les ré- gions correspondantes de la substance blanche sous-jacente, ou même en excitant des portions de la surface des Corps Striés eux- mêmes. Il peut donc être regardé comme suffisamment bien établi que la grande majorité des stimulî pour l'excitation des Mouvements des types Volontaires et Idéo-moteurs part des régions ci-dessus spécifiées de la Substance Grise pariéto-frontale ; que ces stimuli traversent la substance blanche intermédiaire, pour atteindre le Corps Strié du même côté; suivent, de là, le chemin déjà indiqué à tra- vers le Pédoncule Cérébral, la moitié de la Protubérance et du Bulbe, et passent dans la moitié opposée de la Moelle — des cornes antérieures (de Substance Grise) de laquelle les continuations de ces stimuli cérébraux se rendent, par les racines antérieures et les nerfs moteurs, aux groupes musculaires appropriés. De sorte que si, depuis le temps de David Hume, nous n'avons encore point appris, dans le sens complet du terme, « les moyens par lesquels les mouvements de nos corps suivent les commande- ments de notre Volonté », nous avons du moins appris quelque chose sur les parties qui y sont principalement intéressées, et, par conséquent, sur les chemins que traversent les Stimuli Volltionnels. £t ceci constitue un progrès important dans notre connaissance du mode d'action du Cerveau comme Organe de la Pensée. 1. Proceed, ofthe Royal Society y juin 1874. 192 VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. La question qui se présente ensuite est celle de TinterprétatioD la plus correcte des faits nouvellement découverts. Que sont les fonctions ou modes d'activité de ces portions de TÉcorce Cérébrale d'où émanent les stimuli qui doivent exciter des Mouvements Volon- taires spéciaux ? Des réponses diverses ont été faites à cette question. Nous avons (a) l'hypothèse de Ferrier, que les résultats dépendent de l'existence de centres moteurs pour les Mouvements Volitionnels, centres situés dans les circonvolutions cérébrales ; [h) l'hypothèse de Schiff, que les Mouvements des membres qui résultent de la sti- mulation des centres corticaux sont de nature réflexe; et que l'affec- tion de la Motilité, qui dépend de la destruction des mêmes parties, est essentiellement une ataxie résultant de la perte de la Sensibilité Tactile; enfin (c) l'hypothèse de Hitzig et Nothnagel, que les aires circonvolutionnelles en question sont, soit les centres du sevis mus- culairCj, soit des parties traversées par les impressions de ce sens musculaire, {a) L'hypothèse de Ferrier est si importante en elle-même, il a si habilement plaidé pour elle et elle compte déjà tant d'adhérents, qu'il est désirable que nous examinions d'assez près ces idées. Les passages suivants ont semblé à l'auteur renfermer les vues, et les énoncés les plus importants invoqués par Ferrier, dans son ouvrage sur € les Fonctions du Cerveau », pour étayer sa proposition, que des centres moteurs existent dans les Circonvolutions Céré- brales*. (1) « L'ablation totale des hémisphères (cérébraux) agit différemment dans, des classes différentes. Chez les Poissons, la Grenouille et le Pigeon, Tablation des hémisphères n'exerce que peu ou pas d'effet appréciable sur les facultés de station ou de locomotion. Sous l'influence d'une excitation extérieure, ces- animaux nagent, sautent ou volent^ avec autant de vigueur et de précisioni qu'auparavant. Chez le Lapin, l'ablation des hémisphères, bien qu'affectant décidément la motilité des membres antérieurs, ne détruit point tout à fait le- pouvoir de station ou de progression coordonnée en réponse aux excitations- extérieures... Chez le Chien toutefois, Tablation des hémisphères exerce une Influence beaucoup plus marquée sur ces facultés, en rendant la station et la locomotion absolument impossibles » (p. 207). (2) « A mesure toutefois que les mouvements qui exigent d'abord un& éducation volitionnelle tendent à s'organiser ou à devenir automatiques, ils sont moins affectés par les lésions des centres corticaux. De là vient que, che^: le Chien, qui acquiert rapidement le contrôle de ses membres, la destruction des centres corticaux produit un effet beaucoup moins marqué ; les mouvements- étant dans une grande mesure indépendants de ceux-ci, gr&ce à leur organisa- 1. Les passages n'ont été arrangés en paragraphes, et numérotés, que pour faciliter les renvois aux diverses propositions qui y sont contenues. THÉORIES DE FERRIER. 193 tion dans les centres subordonnés i» (p. 213). «Dans la couche optique et le corps strié, Tassociation entre certaines impressions et certaines actions devient si mécanique, ou si organisée, que si Ton enlevait au Chien tous les centres situés au-dessus des ganglions basilaires, ceux-ci seraient, par eux-mêmes, sous rinfluence d'excitations extérieures, capables de produire tous les mouvements coordonnés de la locomotion » (p. 214). (3) a Plus le contrôle des membres dépend d'abord, et continue à dépendre, de Tacquisition volontaire, plus la destruction des centres moteurs corticaux cause de paralysie du mouvement. De là vient que, chezrUomme et chez le Singe, où la volition prédomine et l'automatisme ne joue qu'un rôle subordonné dans les activités motrices, la destruction des centres moteurs de l'écorce cause une paralysie d'un caractère très marqué » (p. 213). Les faits cités dans le paragraphe (1) sont importants, indiscuta- blement vrais et en partie bien connus. Ils tendent simplement à montrer que, dans les formes supérieures de la vie, les Hémisphères Cérébraux et les Corps Striés prennent graduellement quelques-unes des fonctions qui, chez des animaux moins élevés, étaient accom- plies par des Centres Bulbaires et Spinaux. Les Hémisphères Céré- braux, chez les animaux supérieurs, arrivent donc à exercer une influence proportionnellement plus grande sur l'exécution même des mouvements communs exigés parla Locomotion. Les faits établis dans les paragraphes (2) et (3), bien quMIs puis- sent être parfaitement vrais, n'apportent aucun appui spécial à la théorie d'Hughlings Jackson et de Ferrier; ils sont également d'ac- cord, et même davantage, avec les vues exprimées dans ce cha- pitre. La lésion ou l'ablation de parties du Cerveau intéressées dans une large mesure à la direction Intellectuelle des Mouvements, de parties qui sont accoutumées, et de la manière la plus directe, à mettre en activité les Corps Striés (les grands ganglions moteurs des Hémi- sphères), contrarierait nécessairement l'accomplissement de chacun de ces Mouvements, précisément en proportion du degré de direc- tion intellectuelle nécessaire pour assurer son exécution. La des- truction de ces aires corticales met, en réalité, les Corps Striés eux- mêmes hors de jeu, pour l'exécution de tous les Mouvements, sauf ceux qui sont tout d'abord simples et automatiques. Il suit de là que les faits cités ci-dessus ne prêtent aucun appui exclusif à l'hy- pothèse que des centres moteurs existent dans les Circonvolutions Cérébrales. Dans les paragraphes suivants, Ferrier expose certains dévelop- pements ou corollaires de sa doctrine. (4) « Le Chien dont les centres moteurs corticaux ont seuls été détruits, est toutefois dans une position très différente. H conserve ses centres sensitifs, et demeure un animal sentant d'une façon consciente et capable d'idéation et d'émotion. Ce n'est pas simplement un mécanisme dont l'activité dépend pure- CHARLTO:«-BASTlAIf. — II. 13 1V4 VOLONTÉ ET MOUVEMENTS VOLONTAIRES. ment de l'excitation extérieure ; mais il a en lui-même les ressorts d'action, sous la forme médiate dMmpressions ravivées ou idéales, et est ainsi capable d'action spontanée. Comme toutefois les impressions ravivées occupent la même place, ou coïncident avec l'activité physiologique des mêmes parties qui prennent part à la conscience des impressions présentes, les impressions ravi- vées peuvent mettre en jeu l'appareil automatique de mouvement, aussi bien oue les impressions immédiates ou présentes» (p. 214). (5) — « Quel est votre nom? » — « Haute-Loire! » « Votre profession? » — « Haute-Loire? » « Mais votre nom est Marcou? » « Oui, monsieur. » « Êtes-vous sur que c'est bien Marcou? » « Oui. » « De quel département venez-vous? » — « Marcou. » « Non ; ça c'est votre nom. » Mais avec un geste impatient, il s'écria encore : « Cré nom d'un cœur ! * » 2. — ACTION DÉFECTUEUSE DES CENTRES VISUELS DES MOTS. On n'a pas rencontré d'exemple très-distinct de ce défaut; mais le D' Hughlings Jackson a rapporté un cas ^ qui est, sous quelques rapports, l'opposé de ceux qui ont été décrits par les D" Hertz et Hun. Dans cet exemple, la faculté d'Écrire et d'Épeler était très-fortement atteinte ; tandis que celle de Parler n'était affectée que d'une manière plus insignifiante. 4. Gazette des Hôpitaux, 16 mai i867. 2. D'autres malades montrent, en Écrivant, la même tendance à répéter la dernière impression faite sur le Centre Visuel (Voy. Cliniques de Trousseau). 3. Brit, Médical Journal, 1866. AMNÉSIE PARALYTIQUE. 231 L'homme avait « rempli les devoirs d*uDe charge importante du gouverne- ment, exigeant une bonne éducation et de l'intelligence »; et il avait été sujet à une série d^attaques épilepti formes, portant d'abord principalement sur le côté gauche du corps, puis, au bout d'un certain temps, affectant au contraire le côté droit. Les troubles dans la faculté d'expression intellectuelle du malade ne se montrèrent qu'après la seconde série d'accès. Le D' Jackson dit : « Après ces attaques, le malade pouvait parler, mais il faisait des erreurs en parlant. » Quelques semaines après, il rencontra ce malade dans la rue et dit : « Il était alors aussi bien que jamais, pour un observateur superficiel. J'observai qu*ilpar- lait tout à fait bien, et ceci pendant une conversation un peu longue. Le malade disait toutefois qu'il lui était souvent impossible de trouver un mot : et le père me dit que son fils faisait souvent des erreurs de noms. Le plus grand trouble qu'il éprouvait était en écrivant; il n'avait point de difficulté quant à l'écriture elle-même, celle-ci était excellente ; mais il ne pouvait point trouver de suite les mots convenables, et il orthographiait souvent d'une manière incorrecte ceux qu'il écrivait. Il pouvait copier fort bien un paragraphe d'un livre imprimé, en ne faisant qu'une ou deux erreurs insignifiantes; mais, en essayant d'écrire sous la dictée, il faisait des erreurs d'orthographe bien pires que celles qui se trouvent dans une lettre, corrigée, reproduite par le D' Jackson. Lorsqu'on lui demandait d'épeler des mots, il réussissait aussi fort mal; et bien qu'il pût répéter parfaitement même les phrases les plus difficiles, lorsqu'il essayait de lire à haute voix, il ne pouvait absolument pas y réussir, pro- nonçant de travers presque tous les mots de deux syllabes ou plus. Ici encore, comme dans le cas rapporté par le D' Hun (p. 228), la faculté de lire à haute voix était proportionnelle à celle d'écrire, plutôt qu'à celle de parler. Lire à haute voix, de même qu'écrire, exige nécessairement l'intégrité du Centre Visuel ; et, que celui-ci fût plus fortement atteint que le Centre Auditif, c'est ce qui semble clairement indiqué par le fait que le malade pouvait répéter cor- rectement même les phrases les plus difficiles, — opération dans laquelle les Centres Auditifs des Mots sont mis en jeu, mais non les Centres Visuels; — tandis qu'il ne pouvait lire à haute voix les pas- sages les plus simples, sans faire beaucoup d'erreurs. Il sera intéres- sant, plus tard, de comparer ces cas avec ceux qui seront donnés sous le titre d'Agraphie (p. 253) ; surtout l'autre cas rapporté par le D' Jackson, qui pourrait également bien être placé ici. 3. — LÉSION DU CENTRE VISUEL DES MOTS, ET DE FIBRES AFFÉRENTES DES CENTRES AUDITIFS; AINSI QUE CERTAINS AUTRES DÉFAUTS PRODUISANT l'aMNÉSIE INCOORDONNÉE *. Un cas d'un grand intérêt, appartenant à cette catégorie, a été 1. Il vaut mieux retarder, jusqu'à ce qu'on ait donné quelques exemples de cet état, l'examen de la nature des défauts qui l'amènent. 332 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. rapporté en détail par leD' Banks', mais nous n*en donnons ici qu'un abrégé. La faculté de comprendre ce qui était dit par d^antres était entièrement perdue; et celle de comprendre les caractères, écrits on imprimés. Tétait à peu près. Les facultés d^expression par la Parole et PÉcriture présentaient un défaut correspondant. Le malade semblait avoir perdu toute connaissance de Pusage appro- prié des Mots, et était incapable de s*exprîmer d'une manière intel- ligible. Un gentleman, ftgé d'environ soixante-qainze ans, après ayoir parconra à pied une distance considérable, le '28 mars 1864, s'assit pour dinar, et prit son repas comme à l'ordinaire. An bout d'un moment, on obsenra qu'on peu de Feau qu'il buyait s'échappait de sa bouche, n reposa son verre appelant en même temps, À voix haute et colère, sa femme et le domestique qui avait l'ha- bitude de le servir, bien qu'ils fussent tous deux là. Ce malade fut vu, très peu de temps après, par le D' Kidd, qui le trouva assis sur le sofa, paraissant stu- péfait, mais évidemment conscient; appelant par moments à voix haute le domestique et d'autres personnes, mais ne faisant évidemment pas la moindi^e attention À ce qu'on lui disait. L'excitation dont il souffrait se dissipa au bout d'un certain temps. II essaya de parler, mais d'une manière inintelligible. D monta les escaliers sans qu'on lui aidât, remonta sa montre, se mit au lit, et dormit bien. Le lendemain matin on reconnut qu'il était complètement sourd; les bruits les plus forts n'étaient point perçus. La vue semblait bonne : et il n'y avait de paralysie motrice d'aucune sorte. En parlant, il se servait de mots faux, au point d'être absolument inintelligible. Le D** Banks dit : « H me reconnut certainement, et fut content de me voir; mais il me nomma de travers : me disant quelque chose, mais se servant de mots sans signification. Nous essayâmes de communiquer avec lui par V écriture; mais il fut évident qu'il ne la comprenait pas. On écrivit : o Souffrez-vous? » n regarda et dit : « Bon, Bon Dieu », comme s'il lisait ce qui était écrit. Il essayait souvent d'écrire des lettres; et son adresse était écrite deux ou trois fois en tète de la feuille de papier, mais quelques-uns des mots étaient imparfaits. « Hy dear Sir » était écrit correctement. La feuille était remplie d'écriture, mais aucun mot sauf « wife » n'était lisible; le reste était absolument sans signification; quelques lettres étaient tra>cées correctement, mais aucun mot ne tétait; jusqu'au bas du papier où son nom était signé d'une main sûre, et de la manière ordi- naire. Son pouvoir d'écrire varia toutefois à divers moments. Parfois, lorsqu'il désirait signer son nom, il ne pouvait y arriver et « gribouillait seulement quelques mots inintelligibles »./J^totï impossible de rien lui faire comprendre; et l'on ne pouvait reconnaître ce qu'il désirait que par ses gestes et par le très petit nombre de mots qu'il avait encore à sa disposition, et qu'il appliquait presque toujours de travers. Au commencement d'avril, son agent devait lui faire une remise de fonds ; et tous les matins il se montrait fort excité, demandant fréquemment quelque chose. A la fin, il vint à l'idée de quelqu'un de sa famille de lui montrer la lettre de l'agent, ce qui parut lui faire plaisir; mais il ne fut tout à fait satisfait 1. Dublin Quart. Journal of Med, Science. Février 1865, p. 78. AMNÉSIE INCOORDONNÉE. 233 que lorsqu'on eut apporté et compté Targent devant lui. H restait quelques shillings, qu*on ne lui arait pas montrés tout d*abord ; mais, quand il les vit, il parut comprendre que tout était bien ; et quand on eut remis Targent aux mains de sa femme, il parut content. Ses sentiments d'affection pour sa femme semblaient exaltés : mais il y avait un certain degré de faiblesse émotionnelle. Parfois il faisait, pendant un certain temps, usage de quelques mots quMl appliquait de la façon la plus variée. Désirant informer le D' Kidd qu'un Uni- ment dont il avait fait usage était presque fini, il dit en lui montrant la bou- teille : « Apportez la corde ». Une autre fois, parlant de pilules qu'il avait prises, il dit qu'il avait pris des « pommes de terre ». Il y avait très fréquem- ment une certaine ressemblance entre le mot employé et le mot juste, ou bien on pouvait discerner quelque association avec Vidée à exprimer ; par exemple, donnant son gilet pour qu'on le mît de côté, pendant que sa montre était dans la poche, il dit : « Take care of the break fall. » Il semblait avoir conscience de sa surdité et en parlait quelquefois. Il dit un jour qu'il ne pouvait ni entendre ni lire. — « Seulement un peu, il pouvait lire les mots, mais ne pouvait pas comprendre leur signifUiation. » Toutefois, il passait tous les matins quelques moments à lire, d'une façon attentive en apparence, la Bible et les journaux. C'était sans doute uniquement par la force de Phabitude ; car, en réprouvant, on reconnaissait qu'il lisait d'une certaine manière; mais les mots étaient sans liaison ni sens, et ne présentaient méms pa^ le rapport le plus éloigné avec le texte. Ses facultés de parole et d'écriture étaient sujettes à varier. (Le D** Banks a donné les lithographies de deux lettres qui, bien que composées de mots convenablement écrits, sont presque inintelligibles). Parfois il était difficile de le gouverner; car, s'il désirait quelque chose et s'il était impossible de le comprendre, il s'excitait beaucoup. Il demeura à peu près dans le même état jusqu'au 7 octobre, où il eut une attaque apoplectique distincte, et devint complètement hémiplégique du côté droit. Il survécut une semaine seulement à cette attaque plus grave. Dans ce cas, les troubles mentaux graves n'étaient point associés à la paralysie. Le Centre Visuel était évidemment fortement lésé, puisque le malade ne pouvait comprendre les caractères écrits ou imprimés, et ne pouvait écrire que d'une manière inintelligible. Cette conclusion est encore appuyée par le fait qu'il lisait fort mal, — encore plus mal qu'il ne parlait. Son trouble amnésique de la parole, du type incoordonné, était probablement dû à quelque défaut d'harmonie entre les Centres Intellectuels supérieurs et les Centres Auditifs; mais nous étudierons bientôt ce sujet plus au long. La surdité absolue, jointe à la faculté d'articuler fort bien, paraissait incompatible avec l'existence d'une lésion grave du Centre Auditif lui-même. Le fait, toutefois, de cette surdité complète, est un trait exceptionnel, diflacile à expliquer par la supposition, probable d'ail- leurs, qu'il n'existait originairement qu'un point lésé dans l'Écorce Cérébrale. Si une surdité ordinaire avait existé à droite avant l'époque de cette maladie cérébrale subite, ses symptômes auraient pu s'expliquer par une lésion située près ou dans l'Écorce de l'Hé- 234 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. misphère gauche, intéressant sérieusement les fibres afférentes qui se rendent au Centre Auditif, et dérangeant sérieusement aussi Tacti- vlté fonctionnelle du Centre Visuel correspondant. Le D' Broadbent a rapporté* une observation clinique compa- rable sous bien des rapports à la précédente. Un peintre, âgé de quarante-deux ans, était sujet depuis plusieurs années à la goutte, ainsi qu'à des attaques épileptiformes. Pendant la nuit du 14 oc- tobre 1871, étant couché sur le côté droit, il sortit brusquement le bras gauche et commença à baragouiner, — son bras droit demeurant parfaitement inutile. Il n*y eut ni convulsions ni perte de conscience. Le D' Felce, qu'on appela auprès de lui, le trouva complètement hémiplégique, et avec la sensibilité gravement atteinte du côté droit, continuant un babil dépourvu de sens, dans lequel les sons m prédominaient, et montrant le bras paralysé. L'attaque fut suivie de beaucoup d'excitation cérébrale, de cris et de violence. Il recouvra bientôt l'usage des membres droits, mais la parole demeura aussi imparfaite que jamais, et il était incapable d'écrire et de copier. La santé générale était fort dérangée : et finalement il survint une gangrène du pied gauche. Ce fut un peu après cela, le 14 décembre, que le malade fut visité pour la première fois par le D' Broadbent, qui dit : « Il nous reçut avec une profusion de révérences et de sourires, avec des gestes exprimant la bienvenue... Sa parole n'était qu'un simple jabotage, dans lequel « Ma » et « Mum » dominaient, et étaient accom- pagnés d'un excès de gestes, de sourires et d'expressions faciales. Les gestes étaient frappants, et en apparence bien appropriés, lorsque nous avions la clef de leur signification... Il fut constaté qu'il disait parfois « Yes » ou « No » et « Oh my » ; mais il ne prononça pas, devant nous, même ces simples mots. Il était incapable d'écrire son propre nom, même en ayant sa signature sous les yeux. Lorsqu'on le pressait de le faire, il gribouillait rapidement quelque chose, dans lequel on pouvait distinguer d^abord quelques lettres, mais qui finissait par un griffonnage. » « // ne comprenait évidemment rien de ce qu^on lui disait , ne serrait pas ma main lorsque je le lui demandais à plusieurs reprises, mais continuait à la secouer et à sourire; il tirait plusieurs fois de suite la langue lorsqu'on lui disait de fermer les yeux, mais imitait cet acte immédiatement après le D' Felce. Il était douteux quil reconnût Vétat de sa parole; il continuait à caboter comme sHl pensait être compris, mais il faisait aussi des signes... II demeura à peu près dans le môme état jusqu'à sa mort, qui survint vers Noël ; surprenant un jour quelques amis qui causaient au pied de son lit en s'écriant : « Exactly » à un moment très opportun, mais ne recouvrant point autrement la parole. » Dans ce cas, tandis que la lésion du Centre Visuel gauche des Mots était probablement plus grave encore que dans celui rapporté par le D' Banks, le Centre Auditif gauche des Mots semble avoir également souffert, comme le montraient l'impuissance où se trou- vait le malade d'articuler des mots distincts, ainsi que son inaptitude 1. MedicO'Chirurg, Transactions, 1872, p. 170. AMNÉSIE INCOORDONNÊE. 233 apparente à comprendre le langage parlée Dans un autre cas, raj)- porté par le D' Broadbent, il y avait la même impuissance à com- prendre ce que Ton disait, bien que la malade eût coutume de parler, non en un simple baragouin inarticulé, mais en mots dis- tincts, bien que sans suite *. Ici, toutefois, on dit qu'après l'accès par lequel débuta la maladie de la dame, « son expression, naturel- lement joyeuse, fut changée en un aspect morne et stupide; et qu'elle ne faisait attention à rien. » Il y avait, évidemment, un état de démence partielle; mais, dans un cas rapporté très brièvement par Trousseau, et dans lequel il y avait aussi usage de mots sans suite, dont la signification n'était point réalisée par la malade, on dit que, sous d'autres rapports, les actions étaient rationnelles. Elle se levait avec un air débouté pour recevoir un visiteur; et, lui mon- trant un fauteuil, disait : « Cochon, animal, fichue bête ! » tandis que son gendre qui était là, et savait ce qu'elle voulait réellement dire, ajoutait : « Madame vous invite à vous asseoir. » La dame paraissait, pendant tout le temps, absolument inconsciente des expressions insultantes dont elle s'était servie. 6. — AMNÉSIE INCOORDONNÉE. Les cas détaillés dans le paragraphe précédent sont des exemples si nets des troubles incoordonnés de la Mémoire Verbale, que nous sommes naturellement conduits à examiner la manière dont on peut expliquer ces troubles. Un usage mal approprié des Mots, comme celui qui se voyait dans le cas du D' Banks, peut se rencon- trer à des degrés fort divers, et constitue, en réalité, un des trou- bles les plus communs delà Parole, à la suite de maladie cérébrale; trouble qui se montre parfois plus spécialement dans la Parole Arti- culée, et d'autres fois plus dans l'Écriture : ou bien encore, dans d'autres cas, le pouvoir d'Expression peut être presque également défectueux pour là Parole et l'Écriture. Les malades ont, la plupart du temps, conscience qu'ils se servent de mots faux, dans l'une ou l'autre de ces manières de s'exprimer ; bien que ce ne soit pas toujours le cas. 1. Comme l'Hémisphère droit était ouvert à la réception d'impressions audi- tives, il semble étrange que, dans ce cas, la parole n'ait pas été mieux comprise. Toutefois, des impressions auditives correctes et d'autre», incorrectes, arrivant simultanément aux deux côtés du Cerveau, pourraient produire une confusion mentale assez grande pour empêcher la perception de l'impression correcte. 2. Une inaptitude semblable à comprendre ce qu'il disait lui-même existait chez un malade dont l'observation est rapportée par Winslow (Obscure Diseases of the Brain, 3« édition, p. 328). ^36 RELATIONS DE LÀ PAROLE ET DE LA PENSÉE. Layg < fait allusion à un cas où le malade avait Thabitude d'employer un mot pour un autre, sans avoir conscience de ses méprises. Un jour il prononça le mot « jardin » en voulant dire « lit » ; le répéta plusieurs fois, et finit par se mettre dans une violente colère parce que ses ordres n'étaient pas compris. On lui fit alors écrire le mot qu'il désirait employer; et la vue des caractères, con- venablement écrits, le convainquit bientôt que le mot qu^l venait de prononcer n'était pas celui dont il avait eu l'intention de se servir. L'auteur a donné ailleurs * un très-bon spécimen d'une lettre écrite par un malade amnésique bien élevé ; lettre remplie de mé- prises, et même, en certains points, inintelligible; et cependant, à en juger par le manque de ratures, ces erreurs n'avaient sans doute pas été remarquées par le malade. L'étendue de ces troubles incoordonnés de la Mémoire Verbale est très variée, ainsi que leur fréquence. Il se peut qu'un mot faux ne soit employé que par hasard en Parlant ou en Écrivant; ou bien ces erreurs peuvent être beaucoup plus fréquentes et plus éten- dues. Elles peuvent l'être assez pour rendre la Parole ou l'Écriture du malade absolument sans suite, et même tout à fait incompré- hensibles, — grâce au placement absolument confus des mots. Winslow a rapporté un cas de cette forme extrême de Parole amnésique, chez un gentleman qui ne s'était remis que partiellement d'une attaque d'apoplexie. « Il pouvait parler : mais ce qu'il disait était tout à fait inintelligible, sans clef pour rinterpréter. Il pouvait prononcer des mots fort clairement, mais ils étaient étrangement mal placés et transposés. On écrivait ce qu^il disait; puis on remettait les mots à leur place. Par ce moyen, sa famille pouvait comprendre clairement ses désirs. Cet état du cerveau et ce trouble de la parole conti- nuèrent, avec de légères interruptions, pendant près de quinze jours. » Les lettres écrites par le malade du D' Banks donnent également un exemple d'un trouble extrême dans l'expression intellectuelle au moyen de l'Écriture. Bien que composées de mots convenablement écrits, le mode de placement des mots était tel qu'ils ne pouvaient exprimer de proposition intelligible. L'explication des troubles « paralytiques » de la Mémoire Ver- bale est un problème qui ne présente pas de difficultés particu- lières. Mais on ne saurait en dire autant des affections « incoor- données ». Il y a toutefois une raison évidente pour que les deux sortes de troubles se rencontrent plus fréquemment relativement à des noms de personnes, de lieux et de choses. Dans les cas plus légers, ce ne sont que ces « associations », tout à fait spéciales, dont on ne peut plus se souvenir, ou qui sont mal appliquées. Il est 1. Système Nerveux, 1865, p. 395. 2. Paralysis from Brain Diseasey 1875, p. 189. AMNÉSIE INGOORDONNÉE. 237 plus rare de voir ces troubles s'étendre aux substantifs en général et à d'autres parties du discours. Gomme Broadbent * l'observe avec vérité : « Les mots autres que les noms, comme adjectifs, verbes, etc., constituant la charpente d'une phrase ou proposition, sont sur un pied différent; ils ne sont point associés à des perceptions visuelles, tactiles et autres. Leur usage implique une notion pre* mière de mots comme les noms, et marque un pas au delà de l'acte de nommer Ge ne sont point des symboles intellectuels substantifs, mais des agents intellectuels, instruments et produits de l'action de l'intellect, et non des choses qui viennent faire impres- sion sur lui. G'est relativement à cette classe de mots que l'on peut strictement dire que « nous pensons en mots », car souvent nous pensons (en partie) en impressions visuelles ravivées et non réduites en mots. Les circonvolutions intéressées dans leur emploi seront celles qui sont le siège des opérations intellectuelles, les circonvo- lutions surajoutées. » Bien que nous ne soyons point tout à fait d'accord avec Broad- bent pour supposer que l'Action Intellectuelle et ses Gentres peu- vent être aussi distinctement séparés de l'Action Perceptive et de ses Gentres ^; bien que nous ne partagions point ses opinions rela- tivement aux divisions qu'il cherche à établir entre ces modes d'ac- tivité, ou quant à son explication du processus de Nommer, — toute- fois, ce qu'il dit ci-dessus donne beaucoup à penser, relativement aux différences possibles de siège dans les substrata organiques des 1. MedicchChirurgical Transactions, 1872, p. 192. 2. Herbert Spencer dit {Principles of Psychology, vol. P', p. 163). « Les composants immédiats de l'Esprit sont de deux sortes, qui contrastent forte- ment, — les Sentiments, et les Relations entre Sentiments. » Mais un examen attentif de ce qui est dit des « Relations » rend évident qu'elles correspondent à ce dont on a parlé généralement dans cet ouvrage comme du « côté cognitif du Sentiment. » Bien que H. Spencer nomme et décrive à part les deux com- poeants de l'Esprit, ceci n*est que pour la description ; car il ajoute lui-même : « Strictement parlant, ni un Sentiment ni une Relation n'est un élément indépendant de Conscience », — ce qui est exactement ce qu'ont dit en réalité, sinon dans les mêmes termes, Aristote et un grand nombre de philosophes après lui, relativement au Sentiment et à la Cognition (voy. vol. I", p. 141). La distinction d'un sentiment comme tel et tel, comprend nécessairement ses « rela- tions » de degré, de nature, de lieu et de temps. Et, comme le dit H. Spencer (loc, du, p. 187), — « ce qu'on nomme ordinairement Actions Mentales se poursuit presque toujours en termes de ces sentiments tactiles, auditifs et visuels, qui montrent de la cohésion, et par conséquent une aptitude à s'unir en un tout, d'une manière si évidente. Nos opérations intellectuelles sont, assu- rément, principalement confinées aux sentiments auditifs (intégrés en mots) et aux sentiments visuels (intégrés en impressions et idées d'objets, de leurs relations et de leurs mouvements). » 238 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. Mots, suivant qu'ils désignent ou non des objets extérieurs». Il est rationnel de supposer que ces derniers peuvent être en relations plus immédiates avec les Centres Perceptifs ; tandis que ceux des autres parties du discours seraient plus intimement associés à des régions où les Processus Perceptifs se confondent dans des Opéra- tions plus complexes et plus purement Intellectuelles. Ainsi donc, en général, l'inaptitude à se rappeler les noms, ou les erreurs de noms de personnes, de lieux, ou de choses, seraient des troubles accompagnant des lésions ou des altérations des Cen- tres Perceptifs, et pourraient exister avec un dérangement relati- vement léger de l'Activité Intellectuelle; tandis que, d'autre part, les formes extrêmes d'Amnésie, dans lesquelles le malade ne pro- nonce que des propositions sans suite ou un simple mélange confus de mots, doivent, plus probablement, être associées à un trouble marqué des Facultés Intellectuelles, — dépendre, en un mot, de lésions ou d'altérations de parties du Cerveau plus spécialement liées à ces modes d'activité. Le processus de Pensée semble être, dans une certaine mesure, indépendant des Mots par lesquels la Pensée est exprimée; de sorte que nous « pensons en mots » peut-être un peu moins qu'on ne le suppose généralement. Son indépendance partielle paraît indiquée par le fait que nous « choisissons » nos expressions. Ainsi, d'après les diverses nuances de signification que nous cherchons à faire passer dans nos propositions, nous pesons ou « choisissons » sou- vent, d'une manière délibérée, les substantifs, les adjectifs et les verbes que nous pouvons estimer les plus propres à communiquer complètement nos pensées à d'autres personnes. Ceci semble indi- quer quelque processus séparé, par lequel les Pensées, ou « Rela- tions», s'associent à des Mots, — processus qui est peut-être un peu moins automatique que celui par lequel les objets extérieurs, réels ou en « idées », s'associent à des Mots. Dans les « troubles incoordonnés » de différents degrés, ce sont ces relations ou associations verbales particulières qui sont trou- blées. Comment? nous ne le savons pas. L'erreur peut être dans le mode d'activité des Centres Perceptifs ou Centres de Pensée, ou peut-être dans les Centres de Mots qui leur sont associés ; l'effet étant, dans l'un et l'autre cas, qu'il s'établit des associations erro- nées; de sorte que le malade prononce des propositions incorrectes ou sans signification. Dans les formes tout à fait extrêmes de ce trouble de coordination, 1. Loc. cit., p. 181. Voyez aussi D' Brisiowe, Lectures on the Pathological Relationsof Voice and Speechifirit. Médical Journal, 10 mal 1879, p.691), pour un exposé succint de Topiuion de Broadhent. TROUBLES EXTRÊMES DE LA COORDINATION. 239 OÙ la Parole est réduite à un simple jabotage de sons sans aucune signification, nous avons probablement affaire à quelque grave lésion, soit dans les Centres Auditifs des Mots, soit dans les Centres Kinesthétiques des Mots. Il y a deux types de ces cas ; dans l'un, comme celui rapporté par Broadbent, la personne qui baragouine ne comprend pas non plus ce qu'on lui dit ; dans Tautre, comme celui du D' Osborne, que l'on va citer tout à l'heure, tandis qu'elle n'est capable elle-même que de jaboter, la personne atteinte com- prend évidemment tout ce qu'on lui dit. Ces deux types s'expliquent peut-être mieux par des lésions siégeant dans les régions respectives ci-dessus indiquées. Il existe de même des troubles extrêmes relativement à l'Écriture; et peut-être peut-on les expliquer aussi par quelque altération du Centre Visuel des Mots, dans les cas où la faculté d-écrire est réduite à un simple assemblage de lettres, dé- pourvu de signification, en même temps qu'il y a inaptitude à comprendre les mots écrits ou imprimés; au lieu que, lorsque cette dernière inaptitude n'existe pas, l'écriture incoordonnée peut être un simple défaut d'exécution, dû à quelque déran- gement du Centre Kinesthétique des Mots; — et ceci semble pouvoir expliquer, en partie du moins, le cas du matelot qui est raconté p. 255. Il existe aussi des troubles de ce type, assez légers pour être placés tout à fait à l'autre bout de l'échelle, et dans lesquels des erreurs étranges peuvent, habituellement ou non, se présenter dans l'articulation de quelques mots ou dans la manière de les écr|re. Le docteur Winslow a rapporté l'observation d'un homme qui, après une attaque de paralysie, transposait toujours, en prononçant, les lettres des mots; ainsi ent entendu prononcer; bien qu'elle pût fort bien épeler ces mêmes mots. Elle ne pouvait même pas écrire la première lettre de Pun de ces mots... Douze mois après, elle fut retrouvée à peu près dans le même état. Elle ne pouvait point lire, même les mots simples comme « and » et « for »; elle pouvait très follement montrer les lettres qu^on lui nommait, mais ne pouvait nommer elle-même celles qu'on lui montrait. Ses facultés loco- motrices s'étaient améliorées, et elle pouvait aussi parler un peu mieux. Elle pouvait lire une lettre en silence, comme pour la comprendre; bien qu'elle ne parût pas toujours comprendre ce qu'eUe lisait dans un journal ou un livre. 1. Paralysis from Brain Disease, 1875, p. 201. LÉSIONS ENTRE LES CENTRBSi AUDITIFS ET VISUELS. 241 Lorsqu*on la revit, quatre ans après, cette malade était encore à peu près dans le môme état. Il est digne de remarque que, pendant les premières phases de la maladie de cette femme, elle paraissait souffrir d*Aphasie ordi- naire, avec paralysie à droite; ce ne fut qu'après qu'elle eut recouvré la faculté de Parler, qu'il fut possible d'obtenir la preuve des trou- bles plus spéciaux qu'on vient d'exposer, et qui montraient, comme on peut le voir, une cessation de relations fonctionnelles entre les Centres gauches, Auditifs et Visuels des Mots. Ainsi elle ne pouvait lire fort, ni écrire sous la dictée, — ces deux actes nécessitant l'ac- tivité conjointe de ces deux sortes de centres*. Mais elle pouvait articuler librement les mots qu'elle entendait, et pouvait aisément, de sa main gauche, copier l'écriture ; car ce sont des actes dont l'un met en jeu le Centre Auditif et l'autre le Centre Visuel, indépendam- ment l'un de l'autre. L'acte de copier était, en ce cas, accompli de la main gauche, comme résultat d'une pratique récente ; de sorte que les stimuli qui opéraient sur les centres moteurs (dans le corps strié droit) devaient avoir émané immédiatement du Centre Visuel du côté droit. Voici, avec plus de détails, le second cas, qui est encore plus intéressant : Thos. A. — , ouvrier ferblantier, âgé de quarante-deux ans, fut admis le 12 mars 1878, à Univers ity Collège Hospital. Trois mois auparavant, il avait été subitement paralysé du côté droit du corps, sans convulsion ni perte de con- science; mais, après Tattaque, on reconnut que la parole était presque perdue. Lorsqu'on l'admit, il était devenu capable de mouvoir légèrement sa jambe et son bras droit, bien qu'il y eût encore une légère diminuti(yi de la sensiblité de ce côté du corps. Il y avait un léger degré de paralysie faciale droite et quelque déviation à droite de la langue. Il continua à s'améliorer lentement, et, le 2 avril, son état est décrit ainsi : — Il reconnaît les objets communs, mais ne peut les nommer; il répudie un faux nom, et reconnaît aussitôt le véritable lorsqu'il l'enteud dire. Il ne peut jamais se rappeler son propre nom jusqu'à ce qu'on le lui dise. Lorsqu'on lui demande de répéter ce nom (Andrews), après quelques efforts, qui varient à chaque fois, il prononce « Anstruthers » ou « Anstrews ». Son premier nom (Thomas) semble venir plus aisément, et il peut souvent essayer de le dire sans qu'on le lui souffle. Mais, soit après qu'on le lui a répété, soit qu'il le dise spontanément, il le prononce « Towvers » . La lettre L lui est difficile à prononcer ; quelquefois il la prononce comme un D, d'autres fois comme un V. Il a appris à compter, et peut prononcer convenable- ment les nombres de un à douze; après douze, il est incertain ; la prononciation 1. Surtout chez les personnes dont l'éducation n'est pas très développée, et qui ne sont, par conséquent, point complètement habituées à l'accomplisse- ment de ces processus. Il peut toutefois y avoir des eicaptions à cette règle (v. page 228). Charlton-Bastian. — II. 16 t42 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. et Tordre des nombres deviennent rapidement de plus en plus mauyais. Lorsqu'il fait une erreur, il en a conscience , mais ne peut se corriger, et finit en une inextricable confusion. Lorsqu'il lit dans un livre^ les mots quHl prononce n*ont aucune relation avec les mots imprimés, soit pour la longueur, soit pour le gon; — il ne semble pas non plus comprendre les caractères écrits; car il n'essaye point de répondre à une question écrite sur une ardoise, bien qu'il essaye immédiatement de répondre à cette même question si elle est orale. Tou- tefois, il reconnaît les nombres de un à neuf, lorsqu'ils sont écrits ; et lorsqu'ils ne sont pas placés dans leur ordre régulier, il en a conscience. Il ne peut nom- mer les pièces de monnaie, mais semble avoir quelque idée de leur valeur relative. Il indiqua sur ses doigts qu'une pièce de six pence valait six pièces de un penny, bien qu'il ne pût, en les voyant, prononcer leur nom. Le 16 avril, le malade eut deux légers accès qui, à en juger parles symptômes, étaient apparemment dus à quelque légère aggravation de lésion du côté droit du cerveau. Après aucun de ces deux accès la parole ne parut plus défec- tueuse. Le second fut toutefois suivi d'une aggravation de la paralysie droite, bien qu'il n'y eût pas d'autre trouble de la sensibilité. Trois jours après, cette aggravation de paralysie avait disparu, et le malade était de nouveau capable de se promener dans la salle. Deux semaines après, on remarqua que sa parole était aussi mauvaise que jamais; il pouvait nommer tout nombre écrit qu'on lui montrait, et additionner correctement de petites colonnes de trois ou quatre chiffres; mais il était abso- lument incapable de nommer les lettres de Ta/p/ia^ét, quelque simples et grosses qu'elles pussent être. Il pouvait reconnaître les objets communs, comme un chien, un poulet, ou un arbre, sur une gravure; et montrer un quelconque d'entre eux lorsqu'on le lui demandait. Mais il ne pouvait pas trouver le nom des objets qu'il montrait, même des plus familiers. 8 mai. — On lui demanda de nommer successivement, en les voyant, de grosses capitales séparées, imprimées, O, K et G, pour toutes trois, il dit P, et comme on lui montrait le D, il l'appela M, — bien qu'il répétât le nom de chacune de ces lettres, sans un moment d'hésitation, après l'avoir entendu prononcer. Bien qu'il y ait cette impuissance à nommer les lettres à vue, le malade semble aujourd'hui comprendre des phrases simples, écrites ou impri- mées ; ainsi lorsqu'on lui écrivait sur une ardoise la phrase : « Avez-vous une femme? » il paraissait parfaitement évident qu'il comprenait cet écrit. Son état semble toutefois varier de temps en temps, sous ce rapport. Dans les phrases dont il comprend la signification, il est toutefois absolument incapable de prononcer, à simple vue, les mots isolés; bien qu'après les avoir entendu pro- noncer, il puisse les articuler aussitôt, plus ou moins distinctement. Deux jours après, on observa qu'il lisait quelque chose dans le journal; et comme on lui demandait s'il le comprenait (c'était le récit d'un cas d'empoi- sonnement devant un tribunal de police), il dit aussitôt que oui, et indiqua indubitablement par ses gestes que cela était vrai. De la main gauche il pou- vait écrire son propre nom, d'après un modèle; mais pas facilement sans modèle, et quelquefois pas du tout, il n'essayait même pas d'écrire, d'après le son, un mot moins familier, m4me lorsqu'il l'avait distinctement entendu et compris. On remarquera que l'état de ce malade était, le 2 avril, nettement LÉSIONS ENTRE LES CENTRES AUDITIFS ET VISUELS. 243 différent de ce qu'il devint vers la fin du mois, après les deux accès. D'abord, il ne pouvait se rappeler les noms des objets communs, — les nommer en les voyant. Il ne pouvait pas non plus se rappeler de lui-même son propre nom ; et lorsque, après qu'on les lui avait soufflés, il essayait de répéter les mots, sa prononciation montrait des troubles distincts, du type incoordonné. Lorsqu'il essayait de lire à haute voix dans un livre, ces troubles incoordonnés étaient si marqués, qu'ils rendaient sa lecture absolument inintelligible; 11 ne semblait pas non plus comprendre les caractères écrits, excepté les nombres simples. Mais, vers la fin du mois, tandis que la pronon- ciation du malade était devenue plus distincte lorsqu'il répétait les mots qu'il avait entendus, il ne pouvait même plus émettre un jar- gon inintelligible en essayant de lire. A la même époque, il était devenu capable de comprendre ce qu'il lisait, bien qu'il ne pût encore pas nommer, en la voyant, une seule lettre, ni écrire un seul mot sous la dictée, — ces deux processus demandant, pour s'accom- plir, une relation normale (et par conséquent l'intégrité des com- missures) entre les Centres Visuels et Auditifs des Mots. La partie de la commissure qui transmet les stimuli des Centres Visuels aux Centres Auditifs des Mots (comme lorsqu'on lit à haute voix), paraît avoir été lésée d'une manière plus étendue après les deux accès, qu'auparavant. Toutefois, le fait qu'il pouvait lire et prononcer les noms des nombres suggère l'idée que, peut-être, ces unités plus familières peuvent avoir été articulées au moyen de stimuli passant directement du Centre Visuel des Mots à la moitié du Centre Kines- thétique des Mots qui est intéressée dans les Mouvements de la Parole (voyez p. 228). Le docteur Broadbent a rapporté un cas fort rare et fort intéres- sant, provenant de maladie cérébrale, et allié de près à ce que l'on trouve dans les deux observations ci-dessus. Toutefois, son malade n'avait point perdu la faculté de rappel « volontaire » ou c associa- tionnel » dans le Centre Auditif des Mots. Il parlait en effet cou- ramment, en hésitant seulement parfois ; bien qu'il fût incapable d'écrire quand il le désirait. Le malade, inspecteur du gaz, d'une énergie et d'une intelligence remar- quables, avait, à la suite d'une attaque cérébrale aiguë, entièrement perdu la faculté de nommer les objets en les voyant, ainsi que celle de lire. Il parlait couramment et avec inteUigence, et faisait à peine quelque erreur de mots; mais il lui était quelquefois impossible de trouver un nom, surtout de rue, de lieu, ou de personne. Il était toutefois absolument incapable de lire, ou môme de nommer une seule lettre; la seule exception était qu'il reconnaissait, son propre nom, soit écrit, soit imprimé ; mais, môme alors, il ne savait point si l'on donnait les noms de baptême, ou seulement les initiales. A l'occasion, il écrivait correctement sous la dictée, et prenait note de mes instructions, notes qy,Hl ne 244 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. pouvait plus lire le moment {Tapris^. Il expliquait quMl était sujet à oublier, et que sa femme les lirait. Si on lui montrait une main, ou un article de vête- ment, ou tout autre objet familier, il était tout à fait incapable de les nommer; tandii que, si le nom se présentait dans la conversationf il le prononçait sans hésitation. Si on lui demandait la couleur d'une carte, il ne pouvait la donner. « Estr-elle bleue? » « Non. » « Verte? » « Non. » « Rouge? » « Bien, cela y ressemble davantage. » a Grange? » « Oui, orange. » On traça un carré et un cercle, et on lui demanda de \eh nommer : il ne put le faire ; mais comme on appelait le cercle un carré, il dit : « Non, c*est celui-là » en montrant bien la figure. La lésion d'un seul groupe de fibres commissurales (les visuo-au- ditives), avec l'addition de quelque léger trouble dans le Centre Visuel des Mots, produirait une combinaison de symptômes comme celle qu'on vient de rapporter. Nous avons supposé que des impres- sions faites sur le Centre Visuel se rendent ordinairement de lui au Centre Auditif des Mots, et de là aux Centres Moteurs (en passant par les Kinesthétiques), si les impressions Visuelles doivent être tra- duites par la Parole articulée. Mais s'il n'y avait de lésé que ce groupe de fibres commissurales, l'individu aurait conservé sa Vue intacte, ainsi que ses facultés de Parole; — il aurait été simplement incapable de lire ou de nommer en voyant, à cause de l'obstacle inter- posé entre les Centres Visuels et Auditifs. Dans ce cas particulier, toutefois, l'obstacle semble n'avoir été que partiel, puisque l'homme pouvait encore écrire sous la dictée, — processus qui nécessite ordinairement le passage de stimuli allant des Centres Auditifs aux Centres Visuels des Mots, pour exciter des parties des Centres Kinesthétiques des Mots qui sont intéressées dans les Mouvements de l'Écriture, et d'où partent les stimuli centrifuges appropriés. Cependant il est possible que les deux groupes de fibres commis- surales aient été détruites, et que, dans le cas d'un homme ayant reçu une meilleure éducation, les Mouvements plus familiers de l'Écriture aient été évoqués par le passage de stimuli allant directe- ment des Centres Auditifs aux Centres Kinesthétiques des Mots, — au lieu de traverser les Centres Visuels (voyez p. 243). Le Docteur Broadbent interprète ce cas d'une manière tout à fait différente. Nous n'adoptons point toutefois, ici, son opinion sur 1. Dans le récit plus détaillé de ce cas, on dit quUl ne pouvait lire sa propre écriture a une heure après » . Il semble qu'il y avait plus que de l'impuissance à lire à voix haute. Il montrait une inaptitude à comprendre les mots (par lésion du Centre Visuel des Mots) telle qu'il n'en existait pas dans les cas pré- cédents ; bien qu'il n'y eût pas inaptitude à reconnaître la nature des objets communs, ou même des figures géométriques. — British Médical Journal, 8 avril 1876, p. 434 ; ou, pour plus de détails, Medico-Chirurgical Transactions, 1872. APHASIE. 245 l'existence séparée d'un « centre nommant » unique, complètement distinct des Centres Perceptifs. Nous avons supposé, au lieu de cela, qu'il existe trois «centres de mots» qui sont des parties importantes» et en corrélation intime, des Centres Auditifs, Visuels et Kinesthé- tiques, plus généraux*. Les trois principaux cas rapportés dans ce paragraphe sont par- ticulièrement importants au point de vue psychologique. Ils nous permettent de suivre la Volonté, ou Volition, jusqu'à ses sources, — quand nous trouvons des personnes incapables de Vouloir un acte en réponse à une Impression Visuelle, bien qu'elles puis- sent tout d'abord, et sans hésitation, Vouloir effectivement ce même acte en réponse à une Impression Auditive, — ou vice versa (voy. aussi p. 250, 251). B. — APHASIE 5. — LÉSIONS DES PREMIÈRES PORTIONS DES G0NDDCTEUR8 CENTRIFUGES QUI CONDUISENT DES CENTRES GERÉRRAUX DES MOTS AU CORPS STRIÉ GAUCHE. Jusqu'ici nous avons considéré les troubles résultant de conditions anormales des Centres Auditifs et Visuels des Mots, eux-mêmes, ou de lésions portant sur leurs fibres a afférentes» ou «commissurales» ; arrivons maintenant à montrer les résultats de lésions portant sur les fibres centrifuges qui partent de ces Centres, ainsi que des Centres Kinesthétiques des Mots, — fibres qui les mettent en relation avec les Centres Moteurs intéressés dans les Mouvements de la Parole ou de l'Écriture, et situés dans les Corps Striés. 1 . Il est difficile d'avoir une preuve de l'existence et de l'activité spéciale du dernier composant de cette triade ; mais, depuis que ceci a été écrit, l'auteur a vu dans la Cyclopœdia de Von Ziemssen (vol. XIV, p. 776) un court extrait d'un cas excessivement intéressant (rapporté par Westphal), ayant quelque rapport avec ceux donnés ci-dessus, et fournissant aussi quelques renseigne- ments sur le point en question. Il est dit de ce malade : — « Il pouvait fort bien écrire sous la dictée; mais, peu après, il était incapable de lire les mots qu'il avait écrits ; et il souffrait en général d'une alexie complète (c'est-à-dire d'une inaptitude à comprendre les caractères écrits). Toutefois, au moyen d'un stratagème^ comme il l'expliquait très clairement lui-même, il réussissait à lire le mot qu'il avait écrit sous la dictée. H passait son doigt sur chaque lettre du mot écrit, comme s'il l'écrivait de nouveau, et le lisait ainsi. Puis il faisait une sorte de calcul, et comptait la somme des lettres séparées. » Apparemment ici les Impressions Kinesthétiques, provenant des Mouvements de l'Écriture^ étaient capables d'exciter les parties associées du Centre Auditif des Mots, de manière à leur permettre d^agir par le moyen de l'autre portion du Centre Kinesthétique des Mots, et d'évoquer ainsi les Mouvements de la Parole. 315 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. La relation qui existe entre les Centres Auditifs et Visuels des Mots et les parties des Centres Kinesthétlques des Mots où se rendent les Impressions qui proviennent des Mouvements de la Parole ou de l'Écriture, respectivement, est, on en convient, incertaine. Il y a tou- tefois lieu de croire que les excitations qui évoquent la Parole par- tent originairement du Centre Auditif des Mots, et traversent ensuite le Centre Kinesthétique correspondant, de manière à déterminer chez lui une activité conjointe et pratiquement simultanée. II y a de môme lieu de croire que les excitations qui évoquent les Mou- vements de rÉcriture partent premièrement des Centres Visuels des Mots; et, de là, traversent les parties en relation des Centres Kines- thétlques des Mots. Il est donc évident que la destruction des Centres Auditifs et Vi- suels des Mots amènerait Timpossibilité de Parler et d'Écrire. Ces inaptitudes seraient toutefois associées à des troubles conmie ceux qu'on a considérés sous le titre d'^Amnésie,^ c'çst-à-dire inaptitude à comprendre la Parole et TÉcriture. jointe à celle de rappeler les idées Auditives et Visuelles des Mots. Ce dont nous avons spécialement à nous occuper dans le présent paragraphe, c'est ce qui résulte des lésions des fibres centrifuges qui vont des Centres Auditifs et Visuels des Mots, en passant par les Centres Kinesthétiques,au gros Ganglion Moteur situé au-dessous,— c'est-à-dire le Corps Strié. Il semblerait que ces deux groupes de conducteurs centrifuges soient, au moins dans quelque partie de leur course, situés assez près Tun de l'autre pour qu'ils puissent être simultanément dé- traits par quelque petite lésion ; et cela, sans Impliquer les fibres centrifuges destinées aux mouvements des membres, et par consé- quent sans association d'une paralysie droite. L'un des deux cas ori- ginairement dêorîts par Broca, en 1861 * — celui de Lelong — se conformait évidemment à ce type ; mais, comme il ne fut observé que quelque temps après le début de sa maladie, neus choisissons an cas tout à fait typique, rapporté par le docteur Bateman *. Vn bttelier« à^ de cînquuite et ob ans, et pr^eédemnieiit en bonne santé, ^y»Bt «idè à d^haur^^i^r un T&îsseAa à YnnnoQtli. leSdêcMnbre ISei^s'en alla à une ta\vnK> avw l'înteiitioo de demaDdin- un peu de bière; maiSy à son gr^ éltMuaeoM^I^ il $• trvmta incapaible de parler. Seulement quelques heures anpa- inv«nt. il ikjùt adtë au bureuu d\in Barchand. et $*êtnîi arrangé pour une non- xelW Cttnc:u$oiQ; de sorte qum ee noiBeftl4à se» aptitude aux affuiea éuit eftcore int^cce. Lji perte de la paroW n'êtnît accompaxiice d'aacun état paraly- tique wdÙMàre; car.bteft qtte pri\é de la parafera emneM, le MÊme aoir, •» 1. B^iiftim *lf la .^i^jcîefdr A^te, d'après ce qoe dit sa sœur. Klle ne peut encore écrire un seul mot, pas même former une seule lettre ; bien qu'elle ait souvent essayé avec ardeur. Elle ne connaît point les lettres de l'alphabet; et, lorsqu'on lui montre a et o et qu'on lui dit de montrer Va, elle ne peut le faire. Elle a toujours une grande difficulté à com- prendre ce qu'on lui dit verbalementf bien qu'elle ne soit pa^ du tout dure d'oreilles; mais elle comprend immédiatement les gestes. Sa pantomime, à elle, manque encore de clarté. Elle ne lit jamais, mais aime à regarder des pein- tures. I» L'autre cas d'Aphasie que l'on va citer appartient à une malade à qui l'auteur a donné des soins. Il y avait, ici aussi, association APHASIE AVEC HÉMIPLÉGIE. 251 avec de Phémiplégie droite; mais, de même que le trouble mental, cette hémiplégie était beaucoup plus marquée que dans le dernier cas. Il y avait la même perte de la faculté de Lire, et quelque diffi- culté à comprendre la Parole ; mais, en outre, les signes n'étaient quMm parfaitement compris, et il y avait impuissance à vouloir, et à exécuter, même les actes moteurs les plus simples. M™* G., vingt-quatre ans, avait été grandement affligée de la perte récente d'an de ses enfants. Le 3 octobre, elle eut un accès, pour la première fois, pen- dant qu'elle était dans la rue ; mais elle fut capable de rentrer chez elle et, pendant les deux jours qui s'écoulèrent jusqu'à son admission à University Collège Hospital, elle eut douze autres attaques épileptiformes. , Peu après son admission, elle eut une autre série de convulsions affectant les deux côtés du corps, quoique principalement le droit. Dans les intervalles qui séparaient ces attaques, on observa que la figure était en partie paralysée du côté droit; que le bras droit était complètement paralysé, et la jambe aussi, & un degré moindre. Elle eut six séries de ces attaques convulsives pendant les trois jours qui suivirent son admission, et demeura, pendant ce temps, dans un état morne et léthargique. Le 13 octobre, elle commença graduellement à recouvrer un certain degré d'intelligence dans le regard et dans Thabitus. Le 19, on pouvait arrêter immédiatement son attention ; elle faisait des efforts distincts pour parler après qu'on l'avait questionnée, et pouvait dire indistinctement yes et no, bien que non à propos. Lorsqu'on lui disait de mon- trer sa langue, elle ne faisait qu'ouvrir la bouche sans tenter de faire sortir l'organe. Elle pouvait avaler sans difficulté, et prenait de la nourriture avec empressement. Le 26, elle paraissait encore plus intelligente. Elle ne tirait point sa langue lorsqu'on le lui disait, mais elle ouvrait la bouche, et saisissait l'extré- mité de l'organe avec les doigts pour l'attirer au dehors. Bien qu*elle fût incor pable de la mouvoir par une simple excitation volitionnelle, si Von mettait un bonbon sur ses lèvres, elle tirait immédiatement la langue avec grande facilité et, en mangeant^ elle riait et paraissait fort contente. Le 28, elle paraissait bien mieux, et remarquait ce qui se passait autour d'elle. Elle faisait des signes lorsqu'elle désirait attirer l'attention de l'infirmière. Lorsqu'on lui demandait si elle souffrait de la tête, elle inclinait la tête en signe d'assentiment, mais ne bougeait pas sa main lorsqu'on lui disait de la mettre sur l'endroit douloureux, ou bien elle la portait dans une direction toute différente. La paralysie des membres et de la face demeurait à peu près la môme. Environ dix jours après, je l'examinai de nouveau avec soin. Elle avait con- tinué à s'améliorer, et pouvait maintenant dire Nurse distinctement, en outre de yes et no. Elle ne pouvait point répéter même les voyelles les plus simples,, ni lire, soit fort, soit pour elle, de manière à les comprendre, des mots isolés imprimés en gros caractères» Elle ne pouvait pas montrer des capitales isolées, d*un caractère très gros. Lorsqu'on lui demanda de désigner le M, après longtemps et s'être fait beaucoup presser, elle plaça son doigt sur le W, eUe plaça encore plus longtemps après son doigt sur l'S. EUe paraissait reconnaître les objets familiers, et savoir lorsqu'on leur donnait leur vrai nom. On ne pouvait la faire compter en tapant avec Vindex, bien qu'on lui fiût montré avec le plus grand soin ce qu'il y avait à faire. On ne put même pas arriver à la faire 252 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. tapw une seule fois; elle paraissait seulement affligée. Elle semblait se souvenir de son propre nom ; et, bien qu'elle ne donnât aucun signe de reconnaissance lorsqu'on prononçait le nom de la rue où elle habitait, elle remuait la tète affirmativement lorsqu'on ajoutait le reste de son adresse « Fitzroy Square ». Elle riait rarement, mais avait souvent des crises de larmes. Elle ne poussait pas d'autre exclamation lorsqu'elle était très excitée^ et son vocabulaire était limité aux trois mots mentionnés ci-dessus. C'est un bon exemple d'une des formes plus graves de la maladie, dans laquelle, outre l'Aphasie avec activité défectueuse des Centres Auditifs, et spécialement des Centres Visuels des Mots, il y avait un trouble général des facultés mentales, dû, suivant toute probabilité, à l'étendue de la lésion de l'Hémisphère Cérébral gauche. Comme intermédiaire entre les cas moins graves de cette caté- gorie et ceux de la suivante — Agraphie — on peut citer un bon exemple, d'après Trousseau. C'est un cas dans lequel il y avait lésion plus forte des fibres centrifuges partant des Centres Visuels que de celles partant des Centres Auditifs, — puisque l'individu avait recou- vré en partie la faculté, d'abord perdue, de la Parole; tandis qu'il demeurait incapable d'exprimer ses pensées par l'Écriture. « Un jeune laboureur, âgé de vingt-huit ans, avait, d'après ce que disent ses amis, été subitement atteint de mutisme complet, sans aucune cause appré- ciable. L'affection pour laquelle il vint à l'hôpital consistait uniquement dans une impossibilité absolue de parler, bien que son intelligence parût intacte et qu'il pût parfaitement bien comprendre toutes les questions qu'on lui posait. Mais, à ces questions, il répondait invariablement nOy même lorsqu'il inclinait affir- mativement la tète. Un des étudiants m'informa cependant que, resté seul avec lui, il avait réussi k lui faire dire le mot cloak après des efforts répétés. Je ne trouvai qu'une déviation marquée de la pointe de la langue vers la droite, mais aucun autre signe de paralysie ; la face, le tronc et les membres pou- vaient se mouvoir avec une liberté et une force parfaites Lorsque je lui demandai d'écrire son nom, il le fit correctement; mais lorsque je lui dis d'é- crire ce qui lui était arrivé, il n'écrivit que « was, wa^, voas ». n savait par- faitement bien que ce n'était pas là ce qu'il fallait écrire ; et, ennuyé de ne pouvoir exprimer ses pensées, il posa la plume. Deux jours après, comme je lui demandais d'écrire le lieu de sa naissance, il écrivit' a^one, aUme, alone; et encore le même mot lorsque je lui demandai d'écrire good moming. Les gestes impatients qu'il faisait tout le temps montraient qu'il avait parfaite- ment conscience qu'il n'écrivait pas ce qu'il avait dans l'esprit. Le jour suivant^ il écrivit encore des mots dépourvus de sens, comme game pour soup, mais il pouvait dire good morning, sir; en parlant, il est vrai, comme un enfant qui apprend à parler. Quelques jours après, il dit très-distinctement / am pretty well, puis good moming, sir, J am getting on well, d'une voix hésitante, et comme une personne bègue qui s'efforce de ne pas balbutier. Lorsqu'on AGRAPHIE. 253 essaya de nouveau de le faire écrire, il ne fit que gribouiller sur le papier une série de syllabes sans signification ; mais il réussit à écrire sous la dictée Ihave eaten. » C. —AGRAPHIE 6. — LÉSION DES GONDUGTBUBS ÉMISSIFS QUI VONT DES CENTRES VISUELS GAUCHES DES MOTS AUX CENTRES MOTEURS SITUÉS DANS LE CORPS STRIÉ CORRESPONDANT. Dans la forme typique de cette affection il y aurait une rupture des connexions entre le Centre Visuel des Mots et les Centres Mo- teurs supérieurs mis en jeu dans Tacte d'Écrire, — de sorte que cet acte seul deviendrait impossible, tandis que les facultés mentales, ainsi que celles de Lire et de Parler, demeureraient intactes. C'est là une condition parfaitement possible, et qui peut même être causée par une petite lésion, située en divers points. La lésion peut . impliquer les fibres qui conduisent le stimulus du Centre Visuel des Mots au Centre Kinesthétique des Mots ; ou bien elle peut intéresser ce dernier Centre lui-même; ou, enfin, elle peut détruire, en quelque point de leur trajet, les fibres qui se rendent du Centre Kinesthétique des Mots aux Centres Moteurs qui sont en relation avec lui dans le Corps Strié. De l'une ou l'autre de ces manières, on peut concevoir qu'une personne puisse perdre uniquement la faculté d'écrire, sans présenter d'autre désordre. Si toutefois l'individu était paralysé du côté droit du corps, tout défaut de ce genre serait caché par la perte plus générale de pou- voir occasionnée par la paralysie du bras droit. Mais si une personne ainsi atteinte essayait d'apprendre à écrire de la main gauche, il n'y a pas de raison pour qu'elle ne pût y réussir ; pourvu que le Centre Visuel gauche des Mots fût lui-même intact, et en libre communi- cation, au moyen des fibres du corps calleux, avec son homologue de l'Hémisphère opposé. Une personne affectée d'Hémiplégie droite serait, toutefois, pro- bablement incapable de réacquérir de la main gauche la faculté d'Écrire, si le Centre Visuel gauche des Mots était lui-même lésé. Mais, avec l'existence d'une pareille lésion, le malade serait proba- blement aussi incapable de comprendre le langage écrit ou imprimé. Ceci semble avoir été le cas, par exemple, pour le malade de Trous- seau — M. X. ■— qui, malgré toute son intelligence, ne pouvait pas, au bout de trois ans, écrire de la main gauche (voy. p. 248). Le défaut Agraphique ne se rencontre presque jamais seul. Il est la plupart du temps associé à quelques troubles mentaux, ou à des troubles de la Parole Articulée. De plus, le même terme Agraphie pourrait, avec assez de raison. 354 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. comprendre les défauts « incoordonnés », aussi bien que les troubles « paralytiques », du pouvoir d'expression mentale par TÉcriture. Même avec cette extension toutefois, les cas à ranger sous ce titre sont relativement peu nombreux. Le premier à citer est un du type « incoordonné. » C'est un des nombreux cas relatifs aux défauts de la parole, dont nous sommes redevables au D"" Hughllngs Jackson ^. Une femme d*un certain âge, ayant Tair en bonne santé^ devint subitement malade, cinq semaines a?ant son admission. Lorsqu*on la vit, il n'y avait pas d'hémiplégie apparente, mais elle se plaignait de faiblesse dans le côté droit. EUe pouvait alors parler, mais faisait des méprises. Par exemple, comme j'é- prouvais son sens de l'odorat, qui était fort défectueux depuis la paralysie, elle dit en réponse à une question a I can't say it so much », voulant dire « sm^l so well ». Elle faisait fréquemment des erreurs en parlant, et appelait ses enfants par d'autres noms. Ceci n'était pas très évident lorsqu'elle vint à Vhô- pital, et aurait pu passer aisément inaperçu, si ses amies ne s'en étaient beau- coup plaintes. Elle paraissait fort inteUigente. Sa faculté de s'exprimer par récriture était très imparfaite; bien que son écriture fût assez bonne, surtout en considérant qu'elle écrivait avec la main droite, qui était affaiblie. Elle écrivit ce qui suit à l'hôpital. Je lui demandai d'abord d'écrire son nom, — je ne veux pas, pour des raisons faciles à comprendre, le donner ici par compa- raison : on peut dire toutefois qu'il n'avait pas la plus légère ressemblance ni dans le son ni dans la manière d'épeler, avec « Sdnnil Siclaa Satreni. » Lorsque je lui demandai d'écrire son adresse, elle écrivit : « SUNESR NUT TS MER TINN — LAIN. » Pensant qu'elle avait pu être nerveuse en écrivant à l'hôpital, le docteur Jackson lui demanda d'apporter quelque chose qu'elle eût écrit chez elle. Elle le fit : mais le spécimen (dont il donne un fac-similé) n'était en rien meilleur que ce qu'elle avait écrit auparavant. C'est un assemblage de lettres, parfaitement dépourvu de sens, remarquable seulement par la fréquente répétition de petits groupes de lettres, d'une manière que nous retrouverons aussi dans le cas suivant. On ne dit malheureusement pas si cette femme était capable de comprendre complètement les caractères écrits ou imprimés; et, sans connaître son état sous ce rapport, on ne saurait faire un dia- gnostic sûr. il y avait, chez elle, faculté de former des lettres, mais impuissance à les grouper en mots, — et par conséquent inaptitude absolue à exprimer ses pensées par l'Écriture, bien que les erreurs de la Parole Articulée fussent relativement peu nombreuses. Le cas suivant a été observé par l'auteur lui-même. Il n'est aucu- 1. Lond. Hosp» Reports, vol. V', p. 432. AGRAPHIE. 255 nement typique, mais fort curieux sous beaucoup de rapports. Uhomine était un fou criminel, qui avait été, quelques années au- paravant, absous de la peine ordinaire d'un meurtre, par la raison qu'il était irresponsable ^ Lie malade, autrefois marin, est âgé aujourd'hui d'environ quarante-cinq ans, et atteint de démence partielle ; il était autrefois violent et dangereux, mais avec des hallucinations manifestes ; et on le déclara insensé en 1855. Ce ne fut que vers Tannée 1857, ou même plus tard, qu'il commença à écrire d'une manière extraordinaire. Ayant cette date, on constate que les lettres écrites à ses amis sont d'un style intelligible. Cette particularité se manifesta d'abord ainsi : il commençait à écrire chaque mot correctement ; puis, au lieu de quelques-unes des dernières lettres, il écrivait ffg. Plus tard tout le mot fut altéré, et un redoublement de beaucoup de consonnes jointes à la terminaison presque invariable par les lettres ndendd, ou du moins endd, devinrent les traits les plus remarquables de ses manuscrits qui, bien que volumineux, étaient presque absolument inintelligibles *. Lorsque j'avais l'habitude de le voir, il y a environ trois ans, il me donna un grand nombre de pages de son écri- ture, à divers moments; et de ce que j'ai en ma possession, j'ai choisi seize spécimens que j'ai fait lithographier. Ils montrent clairement qu'il écrivait, soit avec une répétition particulière et continuelle de certains groupes de lettres, récriture étant en partie intelligible, soit avec une succession de lettres et de coups de plume auxquels on ne pouvait attacher aucune signification. L'une des particularités principales de ce cas, c'est que, tandis que rhomme écrit ainsi, il parle de façon ordinaire. A ma requête, le docteur Orange soumit très obligeamment le malade à un nouvel examen attentif; et les réponses qu'il m'a données semblent prouver que l'homme était devenu beaucoup plus dément, bien que son trouble spécial soit beaucoup moins marqué qu'il ne l'était. Les principales particularités observées sont les suivantes : i^ 11 peut parler fort bien pendant un moment ; mais son attention s'égare, et la voix devient traînante et monotone; taudis que souvent il prononce mal un mot (généralement en altérant sa terminaison) ; ou qu'il lui substitue un autre mot, ou un simple son dépourvu de sens. 2° Il peut lire un journal, soit pour lui, soit à voix haute ; mais ne semble pas comprendre toute la signification sans effort ; et sa faculté d'effort continu est limitée. Lorsqu'il lit à haute voix, il bronche sur les mots difficiles, et lit d'un ton traînard; mais les mots qu'il prononce, s'ils ne sont point ceux qui 1. Les détails donnés ici sont à peu près tels qu'ils ont été rapportés dans la Med.'Chir, Reviewy janvier 1869. 2. Trousseau parle d'un cas d'Aphasie dans lequel la personne, pendant son rétablissement, et lorsqu'elle devint capable d'émettre quelques monosyl- labes, les finissait toujours par tif» Si elle voulait dire un mot de plusieurs syllabes, elle prononçait seulement la première, et ajoutait tif; disant par exemple montif pour monsieur, bontif pour bonjour, etc. Nous avons ainsi une preuve de plus de la similitude qui existe entre les divers troubles de la Parole et ceux de l'Écriture. 256 RELATIONS l)B LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. sont réellement devant ses yeux, ont un son un peu semblable, et ne parais- sent pas présenter de relations évidentes avec sa manière particulière d*écrire. 3® Il épelle un mot, lorsqu'on le lui demande, de la manière dont il l'écri- rait, puis le prononce correctement, immédiatement après. 11 est intéressant de trouver la manière de Lire de cet homme d'accord avec sa manière de Parler, plutôt qu'avec sa manière d'Écrire*. Nous basons en partie là-dessus notre opinion sur la na- ture de son affectipn particulière, qui était due, d'après nous, moins à une action désordonnée du Centre Visuel des Mots, qu'à quelque dérangement des conducteurs émissifs situés au delà, — peut être dans la partie du Centre Kinesthétique qui régit les Mouvements de l'Écriture. Cela est aussi en harmonie avec Topinion, précédemment énoncée, qu'ordinairement lorsqu'on lit à haute voix, les Impressions Visuelles ravivent des Impressions Auditives correspondantes de Mots; et que les stimuli, qui occasionnent l'une ou l'autre forme de Langage Articulé, se rendent principalement des Centres Auditifs aux Centres Kinesthétiques des Mots, et de là aux Centres Moteurs. Il est cependant digne de remarque que, dans ce cas comme dans d'autres où il y a eu action défectueuse du Centre Visuel des Mots, la manière d'épeler était presque entièrement en harmonie avec la manière d'écrire du malade, plutôt qu'avec sa manière de parler. Il était toutefois fort étrange d'entendre un homme à qui l'on disait d'épeler cat^ dire d'une manière délibérée candd; puis prononcer immédiatement le mot comme s'il l'avait épelé caL Dans un cas d'Agraphie rapporté par le D' William Ogle ', il y avait un état Amnésique grave, relativement à la Parole ; bien qu'il fût associé avec une inaptitude à Écrire plus marquée que celle qui existait dans aucun des autres cas. « James Simmonds, âgé de cinquante-quatre ans, fut obligé, il y a sept ans, d'abandonner son ouvrage, à la suite d'un coup violent reçu sur le côté gau- che de la tête. Il parlait sans difficulté ni hésitation, mais nommait les choses d'une manière étrange. Il eut ensuite, un matin, en s'habillant, un accès qui le laissa sans parole, et hémiplégique du côté droit. Pendant une quinzaine, il ne put absolument pas parler, bien qu'ayant tout son sentiment. Il ne pouvait môme'dire yes et no. Il se rétablit graduellement de cette attaque, mais tou- jours, comme avant, il se trompait de noms.... Il y a un mois, il eut une seconde attaque, qui le laissa plus faible encore du côté droit, mais ne changea que peu ou point sa manière de parler. Il y a maintenant paralysie partielle du côté droit, qui ne l'empôche pas de 1. Bien que l'inverse existât dans le cas de l'employé du gouvernement, cite par le docteur Jackson (p. 231). 2. Saint-George' s Hosp, Reports, 1867, p. 103. Le mot agraphie fut employé pour la première fois, dans cet article, par le docteur Ogle. AGRAPHIE AVEC AMNÉSIE. 257 Marcher. Les muscles faciaux de ce côté sont légèrement affectés, ainsi que ceux des membres. Sa parole est fort hésitante et imparfaite. 11 s^arrète sou- vent brusquement, ne trouvant pas son mot; et alors il en emploie un faux. Par exemple, il emploie barber pour doctor, two shillings pièce pour spec* tacles, winkles pour watercresses, etc. // peut toutefois prononcer parfaite^ ment n'importe quel mot, quand on le lui souf/le. Il dit qu'il sait généralement, mais pas toujours, lorsqu'il s'est servi d'un mauvais mot. Avant sa maladie, il écrivait bien et était, par son éducation, au-dessus de sa condition. Maintenant, il ne saurait former une seule lettre. Même avec une copie devant les yeux, il ne trace que des jambages incertains. Je lui donnai quelques lettres imprimées, et lui demandai de choisir celles qui for- u>aient son nom. Après longtemps il finit par arranger Jicmnos, Evidemment il avait quelque légère notion des lettres qui composaient son nom. D'après sa femme, il épelait bien avant sa maladie, et tenait beaucoup à l'orthographe de son nom, qui peut admettre beaucoup de variations. Lorsqu'on plaça un modèle devant lui, il choisit rapidement, et arrangea son nom correctement. Il peut lire; mais il dit que lire l'étourdit beaucoup et lui fait grand mal à la tète. Son entendement général semble bon, et au-dessus de la moyenne des hommes de sa classe ». Les conditions rapportées ici représentent les restes d'une attaque Aphasique. L'impuissance à épeler,-- c'est-à-dire impuissance à rappeler simultanément les lettres qui forment un mot, — dépend sans doute principalement de quelque lésion du Centre Visuel des Mots; mais la faculté qu'avait le malade de placer ensemble les lettres de son nom, lorsqu'on lui donnait un modèle, montre que ce Centre pouvait agir dans de certaines limites. Cela est également prouvé par le fait qu'il pouvait lire un peu, — bien que ses facultés en ce sens fussent probablement peu de chose. Nous pouvons conclure que, dans ce cas, les lésions les plus graves ou les plus durables furent, par conséquent, sur le trajet des fibres émissives qui partent du Centre Visuel gauche des Mots, — et peut-être dans le Centre Kinesthétique des Mots lui-même. Marcé parle d'un homme qui, à ce que l'on remarqua, pouvait écrire chiflres avec une précision et une facilité bien plus grandes que les les lettres ordinaires, — état qui n'est point aussi singulier qu'il le pensait. Il arrive ordinairement, en effet, que les malades Amné- siques trouvent bien moins de difficultés k se rappeler les noms de nombre simples que les noms de lettres (voy. p. 2hi) : ce dont il ne faut pas s'étonner, si l'on se rappelle qu'il n'y en a que neuf dans les nombres, au lieu de vingt-six, et que l'observation des chiffres isolés doit, nécessairement, avoir toujours été plus attentive que celle des lettres isolées. Le degré de familiarité avec un groupe d'objets ou un groupe d'action est une chose fort importante dans ces cas d'altérations des facultés cérébrales. Les actes plus complexes, ou plus récemment acquis, sont les premiers qui deviennent impos- CUABLTOM-rASTIAN. — II» X7 258 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. «îbles; tandis que ceux qui sont les plus familiers, ou les plus pro- fondément gravés, sont les derniers à disparaître. Le D' Lasègue connaissait un musicien complètement Aphasique qui, incapable de lire ou d'écrire à la manière ordinaire, pouvait facilement écrire un passage de musique, après Tavoir entendu. D. — APHÉMIE 7. — LÉSION DES CONDUCTEURS ÉMISSIFS, ENTRE I«BS CENTRES AUDITIFS ET LES CENTRES MOTEURS DES MOTS. Les conditions dont nous allons parler sont dues à des commu- nications défectueuses entre les Centres Auditifs et Moteurs des Mots ; à peu près de la même manière que celles du dernier para- graphe sont dues à des communications défectueuses entre les centres Yisuels et Moteurs des Mots. Avec les changements nécessaires, ce que Ton a dit là des diverses situations où peuvent se trouver les Jésîons du Cerveau qui causent l'Aphémie, est aussi vrai ici; en outre, -ce défaut parti culier peut aussi être produit par une petite lésion, intéressant les centres inférieurs ou bulbaires de l'Articulation. Ces cas, en tant qu'isolés, sont, de même que ceux d'Agraphîe •simple, extrêmement rares; toutefois. Trousseau en a rapporté un d'un caractère typique (voy. p. 261). Ils peuvent, de même, être ou fu'être pas associés à de la paralysie des membres; et ils sont aussi, ^presque invariablement, produits par des lésions de l'Hémisphère •Cérébral gauche, plutôt que de l'Hémisphère droit, si le siège de la lésion est au-dessus du pont de Varole. Mais lorsque la lésion est •située là, ou dans le Bulbe, la question du côté affecté devient indif- trente. Plus la lésion est située près du Centre Auditif des Mots (et a)ar conséquent de la Substance Grise Corticale), plus il y a de pro- babilités pour l'existence de complications, sous formes de troubles jnentaux associés. Tandis que, d'autre part, dans les cas où l'action défectueuse qui produit l'Aphémie doit être rapportée à une lésion du Corps Strié, ou des centres articulatoires inférieurs du Bulbe, nous pouvons nous attendre à avoir affaire à desimpies troubles mo- teurs, qui rendront indistincte ou aboliront complètement la Parole vocale. G n va donner maintenant quelques exemples de ces défauts, en -commençant par ceux qui sont le plus complexes, et passant ensuite à d'autres, d'une simplicité relativement plus grande. Le premier 'd'entre eux est un exemple de troubles extrêmes de la coordination, combinés avec d'autres conditions anormales. Bien que compliqué -et obscur, il est trop intéressant pour être omis. APHÉMIE. 359 Ce cas a été rapporté, il y a longtemps, par Bouillaud^. L'homme ne prononçait point, dans la règle, un simple jargon inintelligible ; il se servait la plupart du temps de véritables mots, bien qu'ils fussent de telle nature et tellement placés, qu'ils n'avaient aucune ressem- blance avec ce qu'il aurait dû dire. Toutefois, lorsqu'il lisait à haute voix, il n'émettait souvent qu'un simple jargon. Lefèvre, âgé de cinquante-quatre ans, après une grande anxiété mentale, devint incapable de lire, ou de trouver des mots pour exprimer ses pensées. Sa sensibilité et ses facultés motrices étaient intactes, et sa santé générale assez bonne. Lorsqu'il désirait répondre aux questions qu'on lui adressait, il faisait usage d'expressions, soit tout à fait inintelligibles, soit ayant une signification tout à fait différente de ce qu'elles devaient exprimer. Lorsqu'on le questionnait sur sa santé, il répondait deux ou trois mots de droit; puis, pour dire qu'il ne souffrait pas du tout de la tête, il disait : Les douleurs ordonnent un avantage ; tandis qu'en écrivant, il répondait à la môme ques- tion : Je ne souffre pas de la tête. Lorsqu'on prononçait un mot comme tam- bour par exemple, et qu'on lui disait de le répéter, il disait fromage; bien qu'il récrivit, au contraire, tout à fait correctement, lorsqu'on le lui deman- dait. On le pria de copier les mots feuille médicale : il les écrivit parfaite- ment, mais ne put jamais lire exactement les mots qu'il venait d'écrire; il proaoDçait féquicale, fénicale et /ëeloca^. Puis, comme on lui faisait lire le mot féquicaley écrit par lui-môme, il le prononça jarcfaiY. Il écrivait souvent sur du papier des phrases inintelligibles, soit par la nature des mots employés, soit par leur manque de relation entre eux. Lorsqu*on lui montrait divers objets, il les nommait en général correctement; mais il se trompait parfois et, dans la même séance, il appela une plume, un drap; un crachoir, une plume; une main, une tasse ; une corde, une main; une bague, un crachoir. Ce cas est compliqué, et il y avait plusieurs troubles mentaux fort distincts. Le Centre Visuel semble avoir été presque intact : de là vient que le malade était capable de copier correctement. Le fait toutefois de dire fromage quand on le priait de répéter le mot tow- bour, bien qu'il écrivît le mot très correctement, et le fait qu'après avoir convenablement copié un mot écrit il ne pouvait le prononcer de droit, peuvent faire supposer que les impressions reçues dans le Centre Auditif des Mots pouvaient se rendre correctement au Centre Visuel des Mots, de manière à permettre à leur équivalent d'être convenablement reproduit par l'écriture ; mais que les impressions, arrivant tout d'abord aux Centres Auditifs, ou leur arrivant par les Centres Visuels des Mots ne pouvaient être correctement rendues par la parole articulée. On doit donc conclure qu'il y avait, dans ce cas, moins un défaut du Centre Auditif des Mots, que quelque chose de défectueux dans une portion des conducteurs émissifs se rendant, 1. Traité de VEncéphalite, 1826, p. 290. 260 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. de là, en passant par les Centres Kinesthétiques, aux centres moteurs de TArticulation — ce qui amenait une association (incoordonnéel des activités du Centre Auditif des Mots, avec de faux Mouvements d'Articulation. Ce défaut était donc, par ses relations avec la Parole, fort compa- rable à ceux qui existent, relativement à TÉcriture, dans les cas d'A- graphie rapportés par le docteur Jackson et Fauteur, et donnés dans le dernier paragraphe. Le cas était, toutefois, compliqué par des troubles Amnésiques considérables, du type incoordonné, se montrant à la fois dans la Parole et TÉcriture, bien que plus fréquemment dans la première. Dans un autre cas fort remarquable, soigneusement étudié et rap- porté par le D' Osborn*, le malade n'était capable de parler qu'un jargon inintelligible; et, en essayant de lire à haute voix, il émettait aussi une série de sons articulés n'ayant aucune signifi- cation intelligible ni aucune ressemblance avec ce qu'il aurait dû dire. Voici quelques-unes des principales particularités de ce cas : Un étudiant de Trinity-College» à Dublin, &gé de vingt-six ans, ayant des Connaissances littéraires fort étendues, et très versé dans l'étude du français, de ritalien et de TaUemand, fut brusquement frappé d'une attaque d'apo- plexie, pendant qu'il déjeunait après avoir pris un bain dans un lac du voisi- nage. On dit qu'il reprit ses sens en une quinzaine de jours environ ; mais, bien qu'il eût recouvré l'usage de son intellect, il eut la douleur de se trouver privé de la parole. Il pariait : mais ce qu'il disait était absolument inintelli- gible, bien qu'il ne souffrit d'aucune sorte de paralysie; et il émettait une grande variété de syllabes avec la facilité la plus grande en apparence* Lorsqu'il vint à Dublin, son jargon extraordinaire le fit regarder comme un étranger, à l'hôtel où il était descendu; et, lorsqu'il alla à Trinity-College pour voir un ami, il fut incapable de dire au portier ce qu'il désirait, et n'y réassit qu'en montrant les appartements que son ami avait occupés. Le D' Osbom, après l'avoir fréquemment examiné avec soin, s'assura des particularités suivantes : 1** Le malade comprenait parfaitement tout ce qu'on lui disait. 2*^ Il comprenait parfaitement le langage imprimé. Il continuait à lire un journal chaque jour; et, lorsqu'on l'examinait, on voyait qu'il se souvenait parfaitement de tout ce qu'il avait lu. S'étant procuré un exemplaire français de la « Pathologie » d'Andral, il le lut avec beaucoup d'entrain; ayant récemment eu l'intention d'embrasser la profession médicale. 3® Il exprimait ses idées, par l'écriture, avec beaucoup de facilité; et, lors- qu'il n'y réussissait pas, cela semblait provenir simplement d'une confusion, et non d'une inaptitude ; car les mots étaient orthographiquement corrects, bien que parfois mal placés* 4° Ses facultés mentales, en général, paraissaient intactes. Il écrivait cor- If Dublin Journal of Médical and Chemical Science, vol. IV^ p. 157. APHÉMIE SIMPLE. 261 rectement des réponses à des questions historiques; il traduisait exactement des phrases latines, additionnait ou soustrayait des nombres de désinences différentes, avec une facilité peu commune; et jouait bien au Jeu de dames. 5® Sa faculté de répéter les mots après une autre personne, était presque confinée à certains monosyllabes; et, en répétant les lettres de l'alphabet, il ne pouvait jamais prononcer k, q, u, Vy w, x et 2, bien qu'il émit souvent ces sons en essayant de prononcer d'autres lettres. Il ne pouvait aussi, que fort rarement, prononcer la lettre t. 6® Pour s'assurer de l'imperfection particulière de langage présentée par ce malade, et pouvoir la décrire, le D' Osborn choisit, et mit devant ses yeux la phrase suivante du règlement du Collège of Physicians. « It shall be in the poiver of the Collège to examine ■ or not examine any Licenciate previous to tiis admission to a Fellowship, as they shall think fU m, La lui ayant donné à lire, le malade lut ainsi : An the be what in the temother of the trothotodoo to majorum or that emidrate eni enikrastrai meS'» treit to ketra totombreidei to ra fromtreido as that kekritest. Le môme pas- sage lui fut présenté quelques jours après ; et il le lut ainsi : Be mather be in the kondreit of the compestret to samtreis amtreit emtreido and temtreido mestreiterso to his eftreido tum bried rederiso of deid daf drit des trest. Il savait généralement qu'il parlait d'une manière incorrecte; bien qu^il fût tout à fait incapable de remédier à ce défaut. Au bout de huit mois, toutefois, son état s'était assez amélioré pour qu'il pût répéter la même phrase, après le D' Osborn, de la manière suivante. It may be in the power of the Collège to evhavine or not ariatin any licentieUe seviously to his omis- sion to a spolowship as they shall think fit. Peu de temps après, dit le D' Osborn , il répéta après moi cette même phrase parfaitement bien ; à l'exception du mot power, qu'il prononçait constamment prier. Il était aussi capable de prononcer toutes les lettres de l'alphabet, excepté d, fc et c. Il pro- gressa de cette manière, sous la direction du D' Osborn, qui lui conseilla de recommencer à apprendre à parler, comme un enfant, en répétant d'abord les lettres de l'alphabet, puis les mots, après une autre personne; car il avait « perdu, non point la faculté, mais l'art de se servir de ses organes vocaux t. Dans ce cas étrange, mais fort intéressant, il semble qu'il n'y ait eu aucun trouble mental appréciable. Il semble concevable qu'un désordre de la relation entre les Centres Auditifs et Kinesthétiques des Mots, ou bien un désordre de l'activité de ces derniers Centres eux-mêmes, puisse avoir suffi à amener un défaut de ce genre. Trousseau rapporte un autre cas intéressant, où il y avait absence de trouble mental, et simplement impuissance à parler. Il dit : « Je reçus un jour dans mon cabinet un voiturier des Halles de Paris, fort jeune, et ayant l'apparence d'un homme jouissant d'une parfaite santé. Il fit signe qu'il ne pouvait pas parler; et me remit une note où était détaillée l'histoire de sa maladie. /{ avait écrit luirméme cette note, d*une main très ferme, et Vavait bien rédigée. Quelques jours auparavant, il avait brusquement perdu ses sens, et était demeuré inconscient pendant près d'une heure. 202 RELATIONS DE LA PAROLE ET DE LA PENSÉE. Lorsqu'il revint à lui, il ne présentait aucun symptôme de paralysie, mais U ni pouvait articuler un seul mot. Il remuait facilement sa langue; avalait aisément; mais, quelques efforts qu'il fit, il ne pouvait prononcer un mot. Il fut éiectrisé, sans résultat, pendant une quinzaine de jours; mais, sans aucun trai- tement spécial, il recouvra complètement la parole, cinq ou six semaines après rinvasion de la maladie. Il est fort remarquable, toutefois, que, pendant toute la durée de cette singulière affection, il put faire toutes ses affaires, en substituant, récriture à la parole. » Ici rhomme, étant absolument incapable d'articuler, était aussi incapable de lire à haute voix; bien que nous puissions parfai- tement supposer qu'il comprenait aisément ce qu'il lisait en silence. Et si, comme le pense l'auteur, le malade ne souffrait que d'un trouble de la motricité, il n'est point aussi étrange que le suppose Trousseau qu'il ait pu être parfaitement capable de diriger toutes ses affaires. Ce dernier cas peut être ainsi interprété avec assez de confiance, h la lumière que jette sur lui une autre observation plus récemment rapportée par le D' Bristowe^ Un steward de paquebot, âgé de trente-six ans, aj'ant toujours joui d'une bonne santé, se trouvait, le 7 mars 1869, dans les détroits de Malacca, lorsqu'il se plaignit de mal de tête et d'un état fébrile. A cet état succéda, au bout de quelques heures, une série d'attaques épileptiformes très graves, et se succédant rapidement. Quatre heures après leur commencement, il commença à reprendre connaissance. En revenant à lui, il se trouva couché sur le plancher de la cabine, et reconnut bientôt que, quoiqu'il pût voir et comprendre ce qui se pas- sait, il était absolument incapable de remuer uti membre, avait entièrement perdu la faculté de parler, et se trouvait absolument sourd. Il ne pouvait entendre un coup de pistolet tiré tout près de son oreille. U demeura en cet état, A peu près exactement, jusqu'à son arrivée à Singapore, le 20 mars. A cette époque, sa jamJbe et son bras droit étaient encore faibles; sa jambe et son bras gauche étaient engourdis, et absolument sans forces. Il avait beau- coup de difficulté à mâcher sa nourriture, et se trouvait encore absolument sourd et muet. Son état s'améliora graduellement à l'hôpital de Singapore. Dans la première semaine, il recouvra l'usage complet de son côté droit, et l'ouïe lui revint assez pour qu'il pût entendre quand on lui parlait fort. L'ouïe fut complètement rétablie le 22 avril. U recouvra aussi, en grande partie, l'usage de son bras gauche, et sa santé générale s'améliora d'une façon remarquable. Il quitta l'hôpital au milieu du mois de juin et fut embarqué à bord d'un voilier qui revenait en Angleterre. Le 1*' novembre, il fut admis à Saint-Tho- mas Hospital, encore muet, et traînant beaucoup la jambe gauche en marchant. Le D' Bristowe dit : « Trois Jours après son admission, je vis le malade pour la première fois, et je l'examinai avec assez de soin. Je reconnus qu'il était en parfaite intelligence, quMl comprenait tout ce qu'on lui disait, pouvait bien lire et comprendre tout ce qu'il lisait; et qu'il pouvait soutenir une con- 1. Transactions ofthe CUnical Society, 1870, p. 92. APHÊMIE AVEC PARALYSIE. 20$ versât ion, aussi longue que ce fût, lui écrivant sur une ardoise, et son interl> cnteur parlant. II écrivait, en effet, avec une facilité remarquable, d*une écri- ture excellente et fort lisible, s'exprimant avec une parfaite exactitude, sauf parfois une erreur d'orthographe ou de construction, évidemment due au dé- faut dMnstruction première. Mais il ne pouvait parler ni émettre un seul son articulé. Je m'assurai toutefois qu'il pouvait exécuter avec ses lèvres, sa langue et ses joues, toutes les formes possibles de mouvements volontaires, et qu*il était aussi capable d'intonations vocales ; en d'autres termes, qu'il pou* vait produire des sons laryngiens musicaux. » On enseigna ensuite à ce malade, avec beaucoup de soins et un succès complet, à parler de nouveau ; « bien qu'il eût été neuf mois absolument sans parler, et se crût lui-même condamné à un mutisme sans espoir. » La paralysie bilatérale qui existait d'abord, ainsi que la surdité complète et d'autres symptômes, rendent presque certain que, dans ce cas, le malade souffrait d'une lésion située quelque part entre la partie supérieure du Bulbe et la Protubérance. Une lésion, en ce point, pourrait causer la surdité complète, la paralysie double, et arrêter pour un temps les fonctions des centres articulatoires infé- rieurs. Il n'y avait évidemment qu'un simple trouble moteur de la Parole; et une lésion beaucoup plus légère, sise à peu près dans la même région, ou un peu plus haut, pourrait avoir donné naissance à des symptômes moindres, comme ceux que l'on rencontre dans le cas de Trousseau. Il est possible, toutefois, que ce dernier groupe de symptômes puisse avoir été occasionné par une légère lésion, située un peu plus haut dans le trajet des fibres motrices gauches, — peut- être dans le Corps Strié, ou même plus haut, dans la substance blanche interposée entre ces corps et les Centres Kinestlrétiques des Mots. On sait depuis longtemps que des lésions en ces points, surtout dans le pont de Varole, peuvent rendre la parole fort difficile et indistincte, sinon absolument impossible. Un cas de ce genre, briè- vement rapporté, et dans lequel une lésion considérable fut réel- lement trouvée en ce point par le docteur Wilks, peut sufiire à finir d'élucider ce paragraphe. «Une dame fut prise, en dînant, d'une af^agfu^. Elle fut relevée sans voix et mise au lit. Elle gisait la bouche ouverte, et la salive s'en écoulant sans qu'elle fui capable de Vavaler, ou de parler. Il ne semblait pas y avoir de paralysie des membres; et, d'après ses gestes et Texpression de sa figure, il y avait tout lieu de croire qu'elle avait sa parfaite connaissance. Elle fut bientôt capable de quitter le lit, mais ne se remit jamais de la paralysie de la langue et du palais. Elle écrivait sur une ardoise tout ce dont elle avait besoin . Elle ava- lait difficilement, et la salive s'écoulait continuellement de sa bouche; mais elle était capable de faire à pied trois ou quatre milles dans sa journée, et avait coutume de se joindre à un jeu de cartes. Environ deux ans après la 264 RELATIONS DELA PAROLE ET DE LA PENSÉE. première attaque, elle en eut une autre dans laquelle elle mourut. A Tau- topsie, on trouva les vaisseaux cérébraux fort malades ; beaucoup de sang, qui 8*était échappé do la protubérance, était répandu à la base. Dans la protu^ bérance se trouvait un ancien kyste brunâtre» Les ganglions centraux étaient sains. Si rinterprétation précédente de TAphémie était reconnue véri- table, elle donnerait une explication simple d'une série de cas que beaucoup de personnes ont estimés surprenants, comme le faisait Trousseau. Ce que Ton a dit sur le sujet aura suffi à montrer leur parenté avec les cas dans lesquels il n'y a indiscutablement qu'une simple difficulté d'articulation, soit compliquant une attaque ordi- naire d'Hémiplégie, soit dépendant d'une dégénérescence du Bulbe, connue sous le nom de paralysie glosso4aryngée. Ce terme d'Aphé- mie (la maladie pouvant être « complète » ou « incomplète ») est assez large pour embrasser toutes ces variétés de perte simple de la Parole, ou de difficulté d'Articulation. CHAPITRE XXX AUTRES PROBLÈMES RELATIFS A LA LOCALISATION DES FONCTIONS CÉRÉBRALES SUPÉRIEURES. L'étude des divers troubles de la Parole et de TExpression Intel- lectuelle en général, produits par une Maladie Cérébrale, est, sous beaucoup de rapports, d'une grande importance. Une accumulatiou de faits, observés avec plus ou moins de soin, doit presque nécessai- rement précéder toute tentative d'analyser et de classer ces divers troubles. Les observateurs qui viendront plus tard travailleront mieux, et avec plus de chances de succès, dans deux directions. Ils auront mieux appris comment il faut observer ces cas : c'est-à-dire ce que Ton doit spécialement rechercher, comme aptitude ou im- puissance, chez la personne atteinte; et ils pourront, toutes les fois que des troubles mentaux précis auront été reconnus et notés durant la vie, remarquer, avec plus d'espoir d'arriver à un résultat scienti- fique, la région exacte du Cerveau qui a été le siège de la lésion. L'erreur qui consiste à réunir ensemble, sous un seul nom comme ce Aphasie», toutes les variétés de «pertes de la parole », puis de re- jeter absolument les doctrines de la Localisation Cérébrale, sous pré- texte que, dans ces cas dissemblables, les lésions n'ont pas toujours été trouvées dans le même point du Cerveau , cette erreur est mani- feste et absurde ; et cependant, elle a été répétée trop souvent dans ces dernières années. Même un médecin aussi accompli que Trous- seau parla d'un cas démonstratif d'Amnésie comme d'un exemple typique d'Aphasie, et basa en grande partie son explication de l'état Aphasique sur les phénomènes qui le caractérisaient. Ce groupement, sous un seul nom, de troubles absolument dissemblables, et la con- fusion qu'il créait, devaient assurément, aussi longtemps qu'ils ont duré, entraver toute tentative de Localisation Cérébrale, Il est donc absolument nécessaire, pour faire de nouveaux pro- grès relativement à la « Localisation» des Fonctions Cérébrales supé- rieures, d'apprendre d'abord avec soin à discerner l'un de l'autre, pendant la vie, les différents troubles de la Parole; et ensuite, lorsque 260 LOCALISATION DES FONCTIONS CÉRÉBRALES. les occasions se présentent, d'observer et de noter la situation des lésions, surtout dans les cas typiques et non compliqués. Nous allons donner maintenant quelques courts détails addition- nels (outre ceux que Ton a jugé à propos de mentionner dans le dernier chapitre) sur retendue des connaissances déjà acquises dans cette seconde sphère d'observation et d'induction, — qui, bien qu'elle ne soit pas pour le moment aussi étendue que Tautre, com- prend néanmoins quelques faits d'un genre assez étonnant. En 1825, Bouillaud' affirma que les Lobes Frontaux du Cerveau étaient les parties principalement en rapport avec la Parole; parce que, dit-il, ce sont les organes « de la formation et du souvenir des mots, ou signes principaux qui représentent nos idées ». Il avait recueilli 114 observations de maladie des Lobes Frontaux accom- pagnée de perte ou de trouble de la Parole; et c'est sur ces obser- vations qu'il établissait ses vues. Toutefois, en 1833, Andral rapporta 14 cas où la Parole était abolie, sans quMl y eût aucune altération des Lobes Frontaux, mais avec lésion dans les Lobes Pariétaux ou Occipitaux. En 1836, le docteur Marc Dax appela l'attention sur la grande fréquence des pertes de la Parole associées à de la Paralysie droite, plutôt que gauche. Le titre de son essai était : Lésions of ihe left half of the Brain, coinciding with Ihe loss of memory of tke Signs of Thought^. Pour étayer son opinion, que la perte de la Parole dépen- dait principalement de lésions de la moitié gauche du Cerveau, le docteur Dax apportait 140 observations. Mais, en 1861, Broca ' alla encore plus loin. Tandis qu'il affirmait, avec ie docteur Marc Dax, que l'Hémisphère gauche était celui qui était le plus en rapport avec la Parole articulée, il fixa, d'une manière précise, le siège de la lésion produisant l'état que nous appelons aujourd'hui Aphasie, dans la partie postérieure de la troi- sième circonvolution frontale de l'hémisphère gauche. Cette opinion, originairement basée sur un fort petit nombre de cas, fut reçue d'abord avec la plus grande surprise et le plus grand scepticisme. Beaucoup jugèrent fort improbable qu'une faculté comme la Parole dût dépendre d'une petite portion de Tun seu- lement des deux Hémisphères Cérébraux. Cependant, les observations qui se sont accumulées depuis dix-huit ans, ont amené la plupart de ceux qui ont le plus de titres à juger la question, à regarder la loca- lisation indiquée par Broca comme correcte en un certain sens ; et ■ 1. Traité de V Encéphalite, p. 284. 2. Republié dans la Gazette hebdomadaire du 28 avril 1865. 3. Bulletin de la Société Anatomique, août et novembre 1861. LOCALISATION DE LA FACULTÉ DE PARLER. 267 à penser que daas V Aphasie réel lement'tf pique, on trouve que, dans la grande migorité des cas, la lésion comprend ta partie postérieure de ]a troisième circonrolution fronlalegauclie, ou bien ia substance blanche immédiatement aous-jacente, et interposée entre cette cir- convolution et le Corps Strié. La raison poqr laquelle des lésions sié- geant ea d'autres points peuvent, d'après leur sitoation, amener, parfois ou toujours, nn état de mutisme plus ou moins semblable, est une question sur laquelle noua espérons jeter un peu plus de lumière dans lé présent chapitre. On rapporte bcancoup de cas dans lesquels une lésion de la partie postérieure de la troisième circonvolution frontale de l'Ué- misphère droit a existé, sans produire aucune perte de la Parole. -Cer dans ta p«rU9 porté A'oiurf, lem n rroulalg (Prévutll. - De sorte que nous avons à la fois une preuve positive et négative en faveur de l'association, indiquée par Broca, entre la faculté de Parler et l'intégrité de la troisièmecirconvolution frontale jaueAe,- surtout si nous étendons en profondeur la région désignée par lui, de manière à lui faire comprendre les fibres efférentes qui partent de cette portion de la troisième circonvolution frontale. , Toutefois, il eat vrai aussi que, dans un petit nombre de cas où li existait un état semblable d'impossibilité de Parler, on trouve une lésion dans les parties correspondantes de l'Hémisphère droit. Dans quelques-uns de ces cas exceptionnels, les malades avaient été gau- chers; bien que, chez d'autres, on ne pût même trouver cette raison pour le changement de côté. L'auteur a lui-même rencontré un cas tout à fait typique de ce genre, mais il est important de remarquer que, mémo dans ces cas fort exceptionnels, bien que le cOté affecté fût différent, la Parole fui égalememt perdue par suite d'une lésion 208 LOCALISATION DES FONCTIONS CÉRÉBRALES. unilatérale de la même région définie, et extrêmement limitée, de THémisphère. Il suivrait de là que les incitations motrices, suffisantes pour mettre en jeu les centres articulatoires pendant la Parole, partent, dans la grande majorité des cas, de la troisième circonvolution frontale du côté gauche; bien que, chez une faible minorité de personnes, il puisse arriver que les stimuli moteurs effectifs partent, au contraire, de la troisième circonvolution frontale droite Les moitiés des Centres Articulatoires bilatéraux situés dans Ja Protubérance, le Bulbe, et la partie supérieure de la Moelle, sont tellement unies ensemble par des commissures, que chacune d'elles constitue pratiquement un Centre double. Et elles peuvent être (à la manière de Centres bilaté- raux de ce genre) mises en jeu par des stimuli venant, à travers le Corps Strié, soit de l'Hémisphère gauche, soit de THémisphère droit ; — bien qu'en fait, comme on Ta établi ci-dessus, ces stimuli semblent y arriver, chez la grande majorité des personnes, du côté gauche du Cerveau. Mais, si les muscles agissant bilatéralement sont toujours associés à des Centres bilatéraux étroitement unis, et si ces Centres peuvent généralement être mis en jeu par des stimuli y arrivant de l'un ou l'autre côté du Cerveau, ou des deux à la fois ; alors, le mode habituel d'excitation des Centres de la Parole et des muscles en relation avec eux, par des stimuli venant du côté gauche, doit être regardé comme une particularité remarquable. Il y a toutefois quelque raison de croire que, si les conducteurs efférents du côté gauche ont été lésés (de sorte que la Parole soit perdue), la route pour des stimuli venant de la troisième circonvo- lution frontale droite aux Corps Striés peut, dans certaines circon- stances, être ouverte d'une manière plus effective; de sorte que le malade puisse, au bout d'un certain temps, recouvrer la faculté de Parler. En pareil cas, les stimuli se rendraient sans doute plutôt au côté droit qu'au côté gauche des Centres Articulatoires inférieurs bilatéraux. Broadbent maintient en effet que, dans la règle, la perte de la Parole n'est que temporaire avec des lésions du Corps Strié gauche, ou des parties des fibres efférentes venant de la troisième circonvo- lution frontale qui sont contiguês à ce corps. Et il essaye ingénieu- sement d'expliquer sa restauration supposée rapide dans les cas de ce genre. Si la troisième circonvolution frontale gauche est elle- même intacte, et si les fibres du Corps Calleux qui s'étendent entre elle et la troisième circonvolution frontale droite sont également intactes, les stimuli centrifuges, ne pouvant plus suivre leur route ordinaire, pourront, à ce qu'il pense, trouver un chemin détourné de la troisième circonvolution frontale gauche à son homologue de IDÉES DE BROADBENT. 269 droite, et descendre de là au Corps Strié du côté droit ^. Dans ces cas, la perte de la Parole pourrait n'exister que quelques semaines, jusqu^àceque la nouvelle route fût tout à fait ouverte, et le nouveau mode d'action absolument établi *. Il est toutefois difficile de com^ prendre comment l'éducation antérieure et l'organisation de ce Corps Strié droit peuvent avoir été amenés au point nécessaire pour lui permettre d'assumer rapidement ces fonctions ; si, pour prendre la supposition la plus favorable, il n'a reçu précédemment que des stimuli faibles et non suivis d'eflfet. Il y a aussi des difficultés à l'acceptation d'une partie du raison- nement sur lequel la théorie est basée. Broadbent dit : « Dans ses premiers efforts pour parler, l'enfant est influencé par l'imitation et guidé par l'oreille; c'est-à-dire, de même que le groupement des cellules motrices de la moelle s'eflFectue par les cellules sensitives, par des prolongements cellulaires se ren- dant des noyaux postérieurs aux noyaux antérieurs des nerfs; de même, les groupements de cellules dans le corps strié s'eflFectueront par les cellules du centre perceptif auditif, au moyen de fibres réunissant ensemble les deux centres... Et, de même que les noyaux moteurs de la moelle peuvent encore être employés dans les actions réflexes par les noyaux sensitifs, aussi bien qu'ils le sont dans le mou- vement volontaire par les fibres qui descendent du corps strié ; de même, les groupes des mots, situés dans le corps strié, peuvent être mis en jeu imitativement par le centre perceptif auditif, aussi bien que par la troisième circonvolution frontale. » Il suppose, en consé- quence, qu'il y a une double action, d'un caractère consensuel, de la part des deux Centres Auditifs et que, dans les premiers processus imitatifs de la Parole, ces parties réagiraient toutes deux sur leurs Corps Striés respectifs.il y a aussi, pense-t-il, une action supérieure ou volitionnelle, unilatérale, commandée par la troisième circonvo- lution frontale gauche, — action qui est unilatérale, parce que, dit- il, « l'Hémisphère gauche reçoit seul l'éducation pour l'expression -intellectuelle ». Mais les actes Sensori-Moteurs et Idéo-Moteurs de la Parole !• L'impuissance où se trouve une personne Aphasique d*apprei)dre à Parler dtt côté droit du Cerveau, se trouverait ainsi dépendre de conditions précisément analogues à celles qui amènent, dans une Hémiplégie droite, une impuissance d'apprendre à Écrire de la main gauche (c'est-à-dire du côté droit du Cerveau). La Parole serait impossible si le Centre Auditif, et l'Écriture si le Centre Visuel de rHémfsphère gauche étaient détruits ; ou des impuissances semblables existeraient, si les fibres du Corps Calleux, réunissant respectivement l'un ou Pautre de ces Centres gauches au Centre correspondant de l'Hémisphère opposé^ étaient rompues par la mal adie. 2. British Médical Journal, 8 avril 1876, p. 43o« 270 LOCALISATION DES FONCTIONS CÉRÉBRALES. dépendent de processus qui ont lieu (d'une manière légèrement différente) identiquement dans les mêmes régions cérébrales, — et ceux-ci correspondraient avec ce que Broadbent appelle les modes imilatifs de la Parole. Cependant, comme Fauteur s'est déjà efforcé de le montrer (p. 170-176), on ne saurait établir de démarcation valable entre les actes Idéo-moteurs et les actes Volontaires de la Parole ; et la distinction que Ton attribue à ceux-ci, par l'addition d'une « émotion de désir », ne rend pas moins nécessaire que le stimulus efférent parte originairement du Centre Auditif; il n'y a non plus aucune preuve distincte que, dans la Parole imitative, les incitations ne trouvent pas, comme dans la Parole Volontaire, leur chemin de sortie par la troisième circonvolution frontale. En réalité, nous avons tout lieu de croire que la route du Centre Perceptif Auditif au Corps Strié est unique, et toujours la même pour tous les genres de Parole, que le mode d'incitation puisse être strictement imtatifj Idéo-moteur, ou nettement Volitionnel. Cette dernière conclusion se trouve d'accord avec les preuves que nous fournissent les maladies. Aucun fait n'a été établi d'une manière plus certaine, relativement aux malades Aphasiques, que celui qu'il existe une perte, non seulement de la Parole Volontaire, mais aussi de la Parole Idéo-motrice et, exactement au même degré, de la Parole imitalive. Un malade réellement Aphasique ne saurait imiter le plus simple mot ou le son de la voyelle la plus simple, qu'il vient d'entendre à l'instant même; il ne le fait même pas sans qu'on le lui demande, et comme un simple écho, de la manière réflexe la plus purement imitative. D'autres encore ont supposé qu'il existe une route séparée, par où des stimuli Émotionnels peuvent être transmis aux centres infé- rieurs du Langage Articulé, situés dans la Protubérance et le Bulbe, sans passer par le Corps Strié ; et cela, simplement parce que les malades Aphasiques prononcent parfois de nouvelles interjections, comme des jurements, ou des phrases comme « Oh dear ! » « Thanks I d et autres exclamations simples, sous l'influence d'un stimulus Émo- tionnel puissant. Toutefois, même pour ce genre de connexion, il n'existe pas de preuve indépendante (voy. p. 19/i); et peut-être que les faits peuvent aussi bien s'expliquer en supposant que des stimuli Émotionnels d'une énergie plus grande, ou qui émanent d'une aire plus vaste, peuvent occasionnellement se frayer une route à travers des conducteurs en mauvais état, dont la résistance ne saurait être vaincue par de simples stimuli Volitionnels. Quant aux causes qui ont déterminé l'influence plus grande ou presque exclusive de l'Hémisphère gauche dans l'excitation des mouvements de la Parole, on ne peut offrir que des conjectures. On a pensé qu'un certain état de développement plus avancé de LOCALISATION DE LA PAROLE, A GAUCHE. 27i rHéinisphère gauche, — comme résultat d'un usage héréditaire de la main droite, se succédant de génération en génération, — pourrait graduellement devenir suffisant pour amener THémisphère gauche à prendre la direction des mouvements de la Parole. 11 existe quelques preuves — bien que très peu nombreuses encore — que ce sont les gauchers, plus spécialement, qui deviennent Aphasiques à la suite de lésions de la troisième circonvolution frontale droite. Il est pra- tiquement certain, assurément, que la grande prépondérance des mouvements de la main droite, chez les individus ordinaires, doit tendre à produire une organisation plus complexe de THémisphère gauche que du droit ; et ceci à la fois dans ses régions sensitives et dans ses régions motrices. Nous pouvons, en sécurité, supposer en lui Texistence de la base organique d'une expérience tactile beau- coup plus grande et plus complexe; et, comme les mouvements du bras et de la main droite sont plus fréquents, à la fois comme fac- teurs associés de cette expérience, et d'autres façons aussi, nous avons également le droit de nous attendre à ce que les Centres Kinesthétiques soient, de même, développés à un degré notablement plus grand dans l'Hémisphère gauche. Et, naturellement aussi, les mécanismes nerveux pour les mouvements auxquels sont associées ces impressions sensitives, seraient beaucoup plus complexes dans le Ganglion Moteur de l'Hémisphère gauche que dans celui de l'Hémisphère droit. En outre^ il y a nombre d'années que l'auteur s'est assuré d'un fait, qui paraissait à l'époque fort difficile à comprendre, — c'est que le poids spécifique de la Substance Grise corticale du Cerveau, dans les régions frontale pariétale et occipitale gauches, est souvent net- tement, bien que légèrement, plus élevé que celui de la substance grise des régions correspondantes de l'Hémisphère droit ^, Mais cet accroissement de poids spécifique pourrait être produit par l'exis- tence d'un plus grand nombre de cellules et de fibres commissu- rales, que les fonctions extra-sensitives et dérivatives, dont on a parlé ci-dessus, entraîneraient probablement*. Après avoir considéré quelques-unes des questions de a localisation cérébrale » relatives à la production de l'Aphémie, de l'Agraphie et de l'Aphasie, il faut dire maintenant quelque chose du siège des lésions qui produisent les états fort variés compris sous le nom d'AMwÉsiE. Nos connaissances sur ce point sont, jusqu'ici, assez vagues et indéfinies; puisque ce n'est que tout récemment que l'on a généra- 1. Voyez un travail On the Spécifie Gravity ofthe Human Bram,in Journal of Mental Science, 1866, p. 28-32. 2. Voyez aussi p. 55-58. 272 LOCALISATION DES FONCTIONS CÉRÉBRALES. lemeat reconnu la nécessité de ne point confondre ces cas avec ceux d'Aphasie. En outre, on n*a pas fait jusqu'ici de tentative distincte pour analyser et classer les divers états compris sous ce seul terme d'Amnésie. Les travailleurs futurs en sauront bientôt, sans doute, beaucoup plus sur ce sujet : surtout lorsque Texamen des cas sera plus approfondi, et entrepris plus systématiquement ^. Toutefois, ce que nous savons des états Amnésiques, ainsi que de la distribution des fibres « centripètes » dans leur passage de la base du Cerveau aux Circonvolutions, nous permet déjà de désigner, à peu près, l'endroit où des lésions ou des blessures amèneraient probable- ment des troubles de ce type dans la Parole et TÉcriture. Des lésions des circonvolutions, vers Vextrémité postérieure de la Scissure de Sylvius de VHémisphère gauche, seraient probable- ment aussi efficaces, pour produire une quelconque des variétés d'Amnésie, que des lésions situées vers la troisième circonvolution frontale pour déterminer l'Aphasie. Dans le cas de Broadbent (p. 243), on trouva la lésion en ce point; et, dans un exemple inédit, mais bien typique, d'Amnésie, l'auteur a aussi, récemment, trouvé une lésion placée de même. Les raisons qu'il y a d'examiner cette région deviendront évidentes, si le lecteur veut se rappeler que le tiers postérieur des fibres pédon- culaires (c'est-à-dire de ce qu'on nomme la capsule interne) s'étalent en dehors, de dessous la partie postérieure de la Couche Optique; et que, s' étendant en arrière et en dehors à travers le plancher du ventricule latéral, à partir du voisinage du commencement de la corne descendante, elles se distribuent, pour la plupart, aux Cir- convolutions Occipitales et Temporales. Et, si les conclusions de Ferrier, relativement aux importantes relations du lobule supra- marginal et de la circonvolution angulaire avec le Centre Visuel, et 4e la partie postérieure de la circonvolution temporale supérieure avec le Centre Auditif, étaient prouvées correctes ; ce seraient encore des raisons plus précises pour s'attendre à trouver avec quelque fréquence, dans la situation indiquée, ou près d'elle, les lésions productrices de l'Amnésie. On peut donc admettre provisoirement une localisation de ce genre ; et il semble que les meilleurs moyens de s'assurer définitivement, avec un certain degré de certitude, de 1. Dans tous les cas d'Amnésie, ou d*Aphasle et Amnésie mélangées» il fau- drait, entre autres choses, donner toujours des détails sur les points sui- vants : — (1) La faculté qu'a le malade de comprendre les mots prononcés (s'il n'est pas sourd); (2) de répéter les sons ou les mots lorsqu'on le lui demande; (3) d'écrire sous la dictée; (4) de comprendre, et par conséquent de désigner^ les lettres et les mots imprimés (s'U n'est pas aveugle) ; {b) de copier par l'écriture les mots écrits ou imprimés ; et (6) de nommer les lettres impri- mées ou les objets, et de lire à haute voixé SIÈGE DES LÉSIONS PRODUISANT L*AMNÉSIE. 273 la situation des parties les plus importantes des Centres Perceptifs Visuels et Auditifs chez l'Homme, seraient précisément Tétude clinico-pathologique attentive des cas typiques d'Amnésie, toutes les fois que Toccasion s'en présente. Il surgit maintenant une autre question d^un grand intérêt; c'est de savoir si l'on trouvera que les lésions productrices de l'Am- nésie sont, aussi, principalement limitées à l'Hémisphère gauche. Quelques observateurs éminents, comme Brown-Sequard et Hugh- lings Jackson, croient qu'il existe une limitation de ce genre. Mais, bien que l'auteur admette volontiers que les lésions de l'Hémi- sphère gauche doivent avoir probablement plus de puissance que celles de l'Hémisphère droit pour produire des états de ce genre, il lui semble que les faits et la théorie tendent, à la fois, à faire repous- ser l'idée que des défauts de cette nature ne sauraient être produits par des lésions situées dans certaines parties de l'Hémisphère droit. On trouvera que beaucoup de cas de ce genre ont été déjà rap- portés, — et l'un des plus typiques est celui de Marcou, tel qu'il est donné par Trousseau (voy. p. 226). Et si nous avons présent à l'esprit que les Centres Perceptifs correspondants des deux Hémi- sphères sont ordinairement mis en jeu d'une manière simultanée, et sont en continuité de structure au moyen du Corps Calleux, on peut s'attendre à ce que toutes les lésions irritatives ou destruc- trices des Centres Auditifs ou Visuels des Mots, du côté droit, puissent & peine se produire sans causer un dérangement marqué, du moins pour un certain temps, dans l'activité fonctionnelle des centres semblables de l'Hémisphère gauche, — qui, comme on doit radmettre, semble jouer le premier rôle dans l'expression de la Pensée par la Parole et l'Écriture. II reste encore beaucoup à ap- prendre sur ce sujet fort intéressant ; et nous avons déjà eu (p. 128) à signaler le doute qui existe sur l'étendue dans laquelle un Hémi- sphère peut suffire seul à l'activité mentale ordinaire. On peut bien s'attendre, peut-3tre, à ce que l'Amnésie, produite par une lésion du côté droit, ait une tendance à être plus temporaire que l'Amnésie causée par des lésions similaires de l'Hémisphère gauche. Enfin, il se présente à nous une autre genre de considérations de quelque importance, relativement au3^« localisations cérébrales». L'état d'Amnésie peut passer, par des gradations insensibles, à celui d'Aphasie ; de manière que ce dernier état, avec certaines autres particularités, peut parfois résulter d'une lésion tout à fait éloignée de la troisième circonvolution frontale gauche, si, comme nous le supposons à présent, les régions dans lesquelles les lésions ont la plus grande tendance à produire l'une ou l'autre des formes de l'Amnésie, sont situées autour de l'extrémité postérieure de la Scis- sure de Sylvius gauche. Charlton-Bastian. — n. 18 274 LOCALISATION DES FONCTIONS CÉRÉBRALES. Ceci peut être aisément compris. Supposons une personne souffrant d'un trouble dans Tactivité du Centre Auditif des Mots- de sorte que les Noms ne puissent être rappelés « volontairement », ni par « association ». Il y aurait déjà de grandes hésitations et de grandes difficultés dans l'expression des pensées, soit par la Parole, soit par TÈcriture. Mais supposons que ce simple trouble de l'acti- vité soit remplacé par une véritable destruction du Centre Auditif gauche des Mots, de sorte que son activité fonctionnelle soit entiè- rement perdue ; les Mots ne sauraient assurément alors être rappelés ni « volontairement », ni par « association »; bien plus, ils ne pourraient pas être perçus, et par conséquent pas être imités. Un individu ainsi atteint ne serait capable ni de Parler ni d'Écrire, c'est-à-dire qu'il serait complètement Aphasique, — avec, en plus, la particularité qu'il ne pourrait aisément comprendre le Langage parlé ni peut-être même l'Écriture. Cette dernière faculté pourrait per- sister, à un certain degré, car l'équibre moléculaire du Centre Audi- tif des Mots et du Centre Visuel qui est en relation avec lui dans l'Hémisphère opposé, pourrait n'être pas suffisamment troublé pour empêcher toute compréhension des symboles parlés ou écrits. Nous pourrions, en fait, avoir, en pareil cas, production d'un état Apha- sique complexe, presque absolument semblable à celui que présentait la jeune fille dont Bazire a rapporté l'observation (p. 2^9); ou même un état semblable à celui rapporté par l'auteur, p. 251 : et cependant, cet état Aphasique pourrait avoir été causé par une lésion située loin de la troisième circonvolution frontale gauche. Kt, s'il en était ainsi, ces cas auraient pu être cités avec beaucoup de force, en apparence, contre les doctrines existantes relativement à la localisation céré- brale. De même, il est possible que I'Agraphie, accompagnée de « cécité pour les mots », résulte d'une lésion du Centre Visuel gauche ; et que le siège de cette lésion soit contigu à l'extrémité postérieure de la Scissure de Sylvius gauche. L'Aphémie (c'est-à-dire la simple perte de la Parole) ne sau- rait être produite par une lésion de cette région du Cerveau : car la destruction du Centre Auditif des Mots détruirait la mémoire des Mots, pour l'Écriture spontanée aussi bien que pour la Parole. De sorte que l'état double d'ApHASiE (ou un état voisin dans lequel l'Écriture « imitative » est seule possible) se produirait nécessaire- ment, au lieu de l'état plus spécial d'Aphémie. Il est également clair que si des espaces importants des Centres Auditifs et Visuels des Mots sont, en réalité, situés quelque part vers l'extrémité des Scissures de Sylvius, et si les Centres Kinesthétiques des Mots, pour la Parole et l'Écriture, sont situés dans la troisième circonvolution frontale, ou quelque partdansson voisinage, l'A p h a- LÉSIONS DE L*AGRÂPHIE,DEL*APHÉMI£ ET DE L'APHASIE. 275 siE pourrait aussi être causée par des lésions rompant les fibres commissurales, en un point quelconque de leur trajet entre ces paires de centres. Évidemment, si les stimuli causése par la résurrection mentale des mots ne partent pas (a) des Centres Auditifs et Visuels des Mots, s'ils sont arrêtés (6) sur la route qu'ils parcourent pour se rendre de là aux Centres Kinesthétiques des Mots ; ou si (c) ils sont arrêtés dans, ces Centres-là, ou de l'autre côté d'eux, c'est-à-dire sur le chemin qu'ils suivent pour se rendre au Corps Strié gauche, le résultat serait dans tous les cas la production d'un état d'ApHAsiE, bien que les sièges des lésions fussent absolument différents dans ces divers cas. Aussi, dans le premier cas, aurions-nous l'Aphasie avec beaucoup de désordre mental ; dans le second cas, TAphasie avec désordre mental insignifiant ; tandis que, dans le troisième, nous aurions l'Aphasie typique, dans laquelle on ne peut découvrir que peu ou pas d'affai- blissement de l'esprit. Ceci étant vrai, on peut formuler provisoirement en loi géné- rale, comme hypothèse pour de nouveaux travaux, que la tendance au désordre mental coïncidant avec V Aphasie, et le degré de ce dé- sordre, augmenteront, toutes choses égales d'ailleurs, à mesure que les lésions de l'Hémisphère gauche s'éloigneront de la « troisième circon- volulion frontale it pour s'approcher du Lobe Occipital. La doctrine générale de Marc Dax semble être justifiée; tandis que la localisation plus spéciale de Broca ne peut être tenue pour bonne que dans un cas particulier, bien que fort commun, de Perte de la Parole ; ou, , pour se servir d'une phraséologie plus large et plus exacte, — de perte de la faculté d'Expression Intellectuelle. On voit que les conclusions auxquelles on vient d'arriver appor- tent une confirmation nouvelle, et inattendue de l'opinion, déjà an- noncée, relativement à la fréquence spéciale avec laquelle les lésion s des Régions Occipitales de l'Hémisphère peuvent s'associer avec une dégradation mentale bien marquée. Elles tendront aussi à nous faire apprécier plus complètement la valeur réelle des objections élevées par quelques personnes contre la doctrine. que la partie postérieure de la « troisième circonvolution frontale n gauche est la région tou- , jours lésée dans les cas d'Aphasie. Elles peuvent aussi frayer la route pour des observations différentielles, nouvelles et plus exactes, au moyen desquelles seules, nous pouvons nous attendre à faire des pro- grès réels dans une tâche extrêmement difficile, que nous ne faisons guère qu'indiquer, — c'est-à-dire, la tentative de déterminer quels . genres de fonctions sont principalement accomplis dans les diffé- rentes régions de l'Écorce Cérébrale. . Si nous n'avons rien dit relativement à la «localisation» de cer- 276 LOCALISATION DES FONCTIONS CÉRÉBRALES. taînes Facultés supérieures, Intellectuelles et Morales, la raison en sera évidente pour tous les lecteurs qui réfléchissent. On ne saurait, avec quelque chance de succès, faire un seul pas dans cette direction, jusqu'à ce que les recherches préliminaires, auxquelles nous avons consacré notre attention, aient donné des résultats mieux établis. Il faut évidemment poser les fondations du sujet avant de pouvoir commencer à élever l'édifice. L'auteur est toutefois fermement convaincu que tout Processus supérieur. Intellectuel ou Moral, — aussi bien que tout Processus inférieur Sensoriel ou Perceptif, —entraîne l'activité de certains ré- seaux de fibres et de cellules, en relations réciproques dans l'Écorce Cérébrale, et dépend absolument de l'activité fonctionnelle de ces réseaux. Il rejette cependant, d'une manière aussi nette, la notion avec laquelle quelques personnes voudraient associer cette doctrine : c'est-à-dire la supposition que les Hommes ne sont que des « Auto- mates Conscients. » Il faut accorder que si les États Conscients, ou Sentiments, n'ont en réalité aucun lien de parenté avec les mouvements moléculaires qui ont lieu dans certains Centres Nerveux; si ce sont des phénomènes apparaissant mystérieusement, différant absolument du oc circuit fermé de mouvements » avec lequel ils coexistent, et situés complète- ment en dehors de lui ; on ne voit pas comment on pourrait concevoir que ces États Conscients puissent affecter ou altérer le cours de ces Mouvements. La logique de cette proposition paraît irrésistible. On ne peut, en réalité, éviter la conclusion qu'en rejetant les pré- misses : et c*est là ce que fait l'auteur. Il rejette absolument la doc- trine qu'il n'existe pas de parenté entre les États de Conscience et les Actions Nerveuses ; et, par conséquent, repousserait l'opinion que • les «causes» des États Conscients sont situées tout à fait en dehors des circuits de Mouvements Nerveux. La Conscience, ou Sentiment, doit être un phénomène ayant une origine naturelle; ou autrement ce serait une entité non natu- relle, non matérielle. Pour les raisons qui ont été exposées dans diverses parties du présent ouvrage, l'auteur adopte la première de ces opinions. On croit communément que la a substance vivante » a actuel- lement, ou a eu dans les temps passés, une origine naturelle ; les Tissus Nerveux aussi ont une origine naturelle dans des formes élé- mentaires de la ce substance vivante » ; et, si l'on admet que les États Conscients, ou Sentiments, sont l'apanage seulement d'actions Ner- veuses, alors aussi (autant que nous pouvons nous en assurer) leur mode d'apparition, leur accroissement d'intensité, le fait qu'ils sont modifiables par les agents qui modifient les tissus nerveux, et la limi- tation qui fait qu'ils ne se présentent qu'associés avec certaines ORIGINE DES ÉTATS CONSCIENTS. 277 actions nerveuses qui ont Heu dans les Centres Nerveux les plus élevés et les plus complexes d'un animal, s'harmonisent avec la notion qu'ils sont, en quelque manière, un véritable résultat de ces Actions Nerveuses, — aussi peu capables d'être séparés des conditions physiques dont ils dépendent, que la Chaleur peut l'être des siennes ( voy . vol . I", p. 113). Dire que la Chaleur est un « mode de mouvement » , suppose accordé le fait, sous-entendu, que nous ne pouvons avoir de mouvement que s'il y a quelque chose qui se meut. La Chaleur n'a point une existence abstraite et isolée comme entité. La Conscience aussi est un résultat de quelque chose qui se meut. Mais, exactement de même que ce sont les mouvements matériels eux-mêmes, dont dé- pend la Chaleur, qui font le travail attribué à celle-ci ; de même, ce sont les mouvements matériels eux-mêmes, dont dépend la Con- science, ou Sentiment, qui font le travail que nous attribuons au Sen- timent. Ces mouvements particuliers, qu'on le remarque, entrent comme composants dans le « circuit de mouvements n constituant les Actions Nerveuses ; et peuvent, par conséquent, aisément coopé- rer comme moteurs réels. De là vient que les États de Sentiment peuvent, en vérité, et d'accord avec la croyance populaire, réagir sur les Tissus Nerveux de manière à altérer les mouvements molé- culaires qui s'y passent. Les Sentiments, qu'ils soient purement per- sonnels ou de l'ordre moral , ont ainsi, comme ils semblent Tavoir, un effet indubitable, en modifiant nos Opérations Intellectuelles, nos Volitions ou nos Mouvements. Montrer comment se produisent ces mouvements particuliers du Tissu Nerveux qui forment le substratum des États Conscients, et comment ils repassent aux actions nerveuses plus ordinaires, c'est ce qui, d'après la nature même du problème, demeurera toujours impossible. Mais nous ne devons certainement pas pour cela nous> laisser paralyser mentalement, par la croyance en l'existence d'un abîme métaphysique entre ce qu'on appelle le Subjectif et l'Objec- tif, — le « Moi » et le « Non-Moi ». Cependant, quelques-uns même de ceux qui croient à la philosophie de l'évolution, ont été amenés ainsi à nier l'origine naturelle des États Conscients ; et se sont, par conséquent, vus forcés d'adhérer à une doctrine d' « Automatisme » absolu, — doctrine dans laquelle toutes les notions de Libre Arbitre, de Devoir et d'Obligation Morale sembleraient, d'après cette base théorique, également condamnées à une tombe commune, ainsi que les facultés d'auto-éducation et d'empire sur soi-même qui en for- ment la base. APPENDICE OPINIONS RELATIVES A l'eXISTENGE ET A LA NATURE d'un sens MUSCULAIRE^. D'après sir William Hamilton, ce furent deux médecins italiens qui recon- nurent les premiers, il y a trois siècles environ, le Sens Musculaire comme moyen de conception. Il fut reconnu, par Julius César Scaliger, en 1557, et plus tard, ^'une manière indépendante, par Gœsalpinus d'Arezzo, en 1569, que Texercice de notre faculté de mouvement est le moyen par lequel nous sommes mis à même d'estimer les degrés de « résistance »} et cela, par une faculté de « compréhension active », qu'ils opposaient au toucher comme « capacité de sensation, ou simple conscience de passion ». Après un ti'ès long intervalle, de Tracy (l'un des disciples les plus distin- gués de Condillac) développa plus explicitement cette conception, vers le commencement de notre siècle et «établit la distinction entre le toucher actif «jt passif ». Toutefois, des physiologistes, et des psychologistes allemands avaient déjà, à la fin du siècle dernier et au commencement de celui-ci, fait cette même analyse; « et c'est là que le toucher actif reçut d'abord l'appellation distincte de Sens Musculaire (Muskelsinn). » Ces opinions furent, bientôt après, introduites en Ecosse par le docteur Thomas Brown. Les variations subséquentes d*opinions relativement au Sens Musculaire sont, dans une certaine mesure, représentées par les citations suivantes : J. Mû lier {Physiologie, 1835) dit : — «Nous avons une notion fort exacte delà quantité de force nerveuse partant du cerveau, qui est nécessaire pour produire un certain mouvement... Il serait fort possible que l'appréciation du poids et de la pression, dans le cas où nous soulevons ou résistons, soit, en partie du -moins, non une sensation dans le muscle, mais une notion de la quantité dé force nerveuse que le cerveau est excité à mettre en jeu. » Bientôt après cette date, nous trouvons sir William Hamilton (1846), dans ses « Notes et Disser- tations » sur Reid, soutenant que la notion de « résistance » ou de « poids » 1. Voy. p. 164. SENS MUSCULAIRE : HISTORIQUE. 279 est conçue « à l'aide de la faculté locotnatrice, et non du sens musculaire. » Spn opinion était presque absolument semblable à celle de MQller ; car, tandis qu'il soutenait que la résistance et le poids sont mesurés principalement par ce qu'il appelle la « faculté locomotrice», il admettait que Tapprécialion, par cette faculté, de la force plus ou moins grande de notre « énergie motrice mentale », est toujours accompagnée et aidée « par des sensations dont les causes sont, d'une part le nisus ou le repos musculaire, et d'autre part le corps résistant ou pressant ». n ajoute : « De ces sensations, les premières, c'est-à-dire les sentiments liés au2 états de tension et de relâchement, ont leur siège entièrement dans les muscles, et appartiennent à ce que Ton a quelquefois distingué sous le nom de sens musculaire. Les dernières, c'est-à-dire les sensations déterminées par la pression externe, ont leur siège en pallie dans la peau, et appartiennent alors au sens du toucher proprement dit, ou à la sensation cutanée; et. en partie, dans la chair, et appartiennent en ce cas au sens musculaire. Ces atfec- tionsy parfois agréables, parfois douloureuses, sont, dans l'un et l'autre cas, de simples modifications des nerfs sensitifs qui se distribuent aux muscles et à la peau. » Cette idée que nous apprécions le « poids », ou la a résistance », principa- lement à l'aide de ce qu'on appelle la a faculté locomotrice », fut, un peu plus tard, admise également avec faveur par Ludwig, qui dit (Lehrbuch der Physio- logie y 1852) : « Il est concevable, et point invraisemblable, que toutes les connaissances et distinctions auxquelles on arrive par le jeu des muscles sou- mis à la volonté, sont obtenues directement par l'acte d'excitation volontaire; de sorte que l'effort de la volonté sert immédiatement de moyen de jugement. » Le professeur Bain, dans la première édition de son ouvrage « The Sensés and the Intellect » (1855), semblait incliner vers la même idée, bien que son opi- nion ne fût point exprimée d'une manière tout à fait explicite. Il objecte à ce qu'il appelle la supposition d'Hamilton, que u nous avons un sentiment de l'état de tension d'un muscle, indépendamment de notre sentiment du pou- voir moteur mis en jeu. » « Il peut être tout à fait vrai, ajoute-t-il, que des filaments nerveux sensitifs soient fournis aux muscles, aussi bien que des filaments moteurs, et que, au moyen de ceux-ci, nous soyons affectés par la condition organique du tissu, comme dans la première classe de sentiments ci- dessus décrits; mais il ne s'ensuit pas que nous acquérions, par ces mêmes filaments, un sentiment distinct du degré de la contraction du muscle ». Lorsque, quelques lignes plus loin. Bain parle d' a un sens d'énergie déployée », comme de « la grande caractéristique de la conscience musculaire, » son opinion précise devient indistincte et quelque peu confuse. Un peu plus tard, Landry ( Traité des Paralysies, 1859), s'appuyant sur des données pathologiques aussi bien que psychologiques, réaffirme le même genre d'opinion que celle d'Hamilton (mise en doute par Bain), relativement à l'exis- tence d'impressions donnant des sentiments de tension, et venant des muscles par les nerfs sensitifs. Seulement, au lieu de regarder (avec Hamilton) ces im- pressions comme subsidiaires, il pense qu'elles ont une importance majeure, et nie que nos notions de résistance, de poids, etc., puissent provenir d'un simple processus cérébral, ou, en réalité, de n'importe quelle autre source que les parties même en mouvement. Il dit : « Le Moi a une conscience directe des phénomènes de volition : il sait immédiatement qu'il y a eu un stimulus 280 . OPINIONS RELATIVES A L'EXISTENCE volontaire, et à quelle partie du corps il est dirigé ; quant aux effets produits,- il n*en est informé que d'une manière médiate, et peut les négliger L'ac« tion nerveuse qui excite le mouvement ne peut donc fournir à la conscience qu'une idée de la volition, et non do son exécution.... Il est nécessaire que l'effet de cette excitation centrale (la contraction) soit produit, pour que le Cerveau puisse percevoir ; et il perçoit, en même temps, à la fois le siège et le degré de la contraction. Le mouvement lui-même est donc la source d'où nous viennent les notions de ce genre, n Ce dernier point de l'opinion de Landry, opposé aux notions de MQller, Hamilton, Ludwig et autres, relativement à la « faculté locomotrice »,fut, à peu près à la même époque, affirmé d'une manière indépendante par G.-H. Lewes (Physiology of Common Life, vol. II, 1860), bien que, relativement à la manière dont nous recevons les impressions des membres en mouvement, Lewes iatro« duise en partie une opinion nouvelle, basée toutefois sur des idées très discu- tables. Il considérait comme une erreur, qu'on pût regarder les nerfs des racines antérieures et ceux des racines postérieures comme essentiellement distincts par leurs fonctions : il soutenait que les fibres de chacune des deux racines sont à la fois sensitives et motrices, c'est-à-dire capables de transmettre des impressions centripètes aussi bien que de stimuli centrifuges; bien qu'elles puissent remplir ces fonctions dans des proportions diverses. Le genre de sensibilité auquel contribuent directement les nerfs moteurs (en rapportant des impressions du muscle au centre moteur) doit, à ce que pense Lewes, « être celui de ce que nous appelons le Sens Musculaire, qui nous permet d'a- juster les mille modifications de contractions exigées dans nos mouveinents. » « Le corps est mis en équilibre, ajoute-t-il, par des changements incessants des muscles, dont un groupe sert d'antagoniste à un autre. Mais ceci serait impossible, si chaque muscle n'était accordé et coordonné par la sensation. » Lewes admet, toutefois, que ces sensations n'atteignent guère « ce degré d'im- portance qui fait que l'esprit y prête attention » ; et il cite Schiff comme sou- tenant l'opinion que « tous les phénomènes (c'est-à-dire les impressions conscientes) attribués au sens mueculaire, sont dus aux reploiements et à l'extension de la peau, lorsque les muscles se contractent^. L'opinion de Trous- seau 2 était fort semblable à celle de Schiff. Wundt {Menschen und Thier-Seele, 7, p. 222, 1863) estime comme le plus probable que « les sensations accompagnant la contraction des muscles nais- sent dans les fibres nerveuses qui transmettent l'impulsion motrice du cerveau aux muscles » ; si elle était due aux nerfs sensitifs des muscles, dit-il, « la sensation musculaire croîtrait et décroîtrait constamment avec le degré de travail interne et externe accompli par le muscle. Mais ce n'est point là le cas : car la force de la sensation dépend seulement de la force de l'influence mo- trice, partant du centre, qui excite l'innervation des nerfs moteurs. » Un exposé semblable à celui-ci a été fait par Hamilton, bien qu'il soit aujourd'hui démontré complètement faux. Les cas de Demeaux et Spaeth (p. 284-286) montrent en effet très bien le contraire. Les exposés de Bain, dans la seconde édition de son ouvrage (1864), 1. Voyez son ouvrage Mmkel und Nervcnphysiologie, p. 156 < 2. Cliniques; article Ataxie locomotrice. ET A LA NATURE D'UN SENS MUSCULAIRE. 281 deviennent plusexplicites qu'ils ne Tétaient d'abord. Il dit en effet : « la suppo- sition la plus vraisemblable est que la sensibilité qui accompagne les mouve- ments musculaires coïncide avec le courant centrifuge d'énergie nerveuse, et ne résulte pas, comme dans le cas de sensation pure, d'une fnfluence centri- pète passant par les nerfs afférents ou sensitifs. « Cette opinion est répétée et accentuée dans la troisième édition (1868), dans laquelle il ajoute (p. 76), rela- tivement au sentiment caractéristique de la force déployée : « nous devons pré- sumer qu'il est concomitant avec le courant centrifuge par lequel les muscles sont excités à agir ». Il considère comme d*une importance immense, au point de vue philosophique, que ces impressions soient associées aux courants cen- trifuges, et ne dépendent point de nerfs sensitifs ordinaires <. Bastian {On the Muscular SmsBy Brit, Med. Journal, avril 1869) dit ; « Toutes les preuves que nous pouvons tirer des maladies, et aussi, à ce que je pense, toutes celles que nous pouvons obtenir du plus attentif examen do nos propres sensations, tendent plutôt, Jusqu'ici, à appuyer l'opinion de Landry, que ces impressions ne dépendent pas de nos notions de la quantité de force nerveuse mise en liberté durant un effort volitionnel ; ou, en d'autres termes, de la conscience qu'a l'esprit de sa propre énergie centrifuge. » Le sentiment d' «énergie déployée » par lequel nous recevons nos idées de résistance et d'un monde extérieur, n'est point contenu dans l'acte volitionnel, et n'en est pas un apanage, « mais dérive d'impressions émanant des organes mômes en mouve- ment. » Nos perceptions de a résistance » et de a poids » sont en réalité « com- posées en partie d'impressions tactiles, en partie de sensations passives éma- nant de nos muscles et de nos articulations, et des déductions basées là-dessus Nous éprouvons certains sentiments de pression, combinés avec certaines sensations dans les muscles et les articulations; et nous arrivons gra- duellement à associer certaines combinaisons de ces sensations avec les sensa- tions produites en saisissant certains poids types. » Si le terme « sens muscu- laire » ne doit point être appliqué aux sensibilités passives du muscle, il doit alors être restreint à de simples impressions a inconscientes )>, qui peuvent peut-être monter des centres moteurs spinaux au cerveau par up groupe spécial de libres (voy. p. 285, note). Une pareille faculté devrait en ce cas être regardée comme « un guide organique inconscient dans Taccomplissement des mouvements volontaires » ; et l'on ne manque pas tout à fait de preuves de l'existence de quelque guide de ce genre. Elle fournirait aussi, suivant toute probabilité, les sensations nécessaires pour guider durant la continuation des mouvements automatiques. Si nous essayons de classer les opinions qui ont été émises ci-dessus, ou dont on a parlé simplement par ordre de date, relatives aux modes par les- quels nous apprécions les divers degrés de résistance et de poids, elles peu- vent être rangées comme suit ; 1. Oa estimait autrefois que l'existence même de fibres seDsitiyes dans les muscles était tout à fait incertaine. Toutefois ce doute n'existe plus. Les investigations de Sachs (Centralbtalt fur die Med. Wissensch., 1873, et Archiv fur Anatomie, 1874) ont montré, d'une manière concluante, que les fibres sensitives sont abondantes dans le muscle lui- même ; et que, ayant un trajet et un mode de distribution entièrement distinct de celui des filaments moteurs , elles entrent dans la moelle par les racines postérieures, ou sensi- tives, des nerfs spinaux. 282 PAR DES CENTRES MOTEURS CLASSIFICATION DES OPINIONS RELATIVES 1. Estimation de la Force de Volonté (au moyen d'une « faculté locomotrice)», antérieure aux sensations venant des membres, et indépendante d'eWes. Scaliger et Wundt. 2. Par un « sens d'énergie déployée » qui est « con- comitant avec le courant centrifuge », — c'est-à-dire par une révélation sensitive résultant de l'activité des centres moteurs, des nerfs et des muscles. (Cette opinion, qui tient de la précédente, en diffère par la supposition, ajoutée, que l'appréciation de poids ou de résistance demande plus que l'activité du centre volitionnel, et ne peut avoir lieu qu'à la condition que l'incitation motrice n'est point arrêtée par des lésions paralytiques ou autres, mais va évoquer l'activité des nerfs moteurs et des muscles avec lesquels le centre volitionnel est en relation). Bain. 3. Par des courants centripètes, ou impressions venant des muscles et rapportées aux centres volitionnels par les nerfs moteurs eux-mêmes. (D'après cette opinion, les centres et les nerfs moteurs auraient, d'une manière simultanée ou dans des temps immédiatement succes- ' sifs, affaire avec des courants centrifuges et des cou- 1 rants centripètes). Lewes, 4i, Principalement de la manière spécifiée par Scaliger (c'est-à-dire par une « faculté locomotrice ») ; bien que cette appréciation soit aidée par des impressions sensi- tives ordinaires, traversant des nerfs sensitifs, et venant des membres en mouvement; par exemple, par des sen- timents de tension ou de pression venant des muscles (sens musculaire), et des sentiments de pression émanant de la peau. J. Muller et Hamilton. I 5. Par des impressions de tension et de pression trans- mises par des nerfs sensitifs ordinaires venant des mem- bres en mouvement, par exemple des muscles, des arti- culations et de la peau ; et peut-être, en outre, par certaines impressions inconscientes venant par des nerfs afférents spéciaux des centres moteurs spinaux. Bastian, 6. Par des impressions de tension et de pression émanant des muscles qui se contractent, et transmises par des nerfs sensitifs ordinaires allant des muscles aux centres sensitifs. Landry. 7. Par des impressions cutanées et articulaires seule- ment. Schiff et Trousseau, PAR DES CENTRES MOTEURS ET DES CENTRES SENSITIFS. PAR DES CENTRES SENSITIFS D'autre part, relativement à l'existence et à la nature d'une sorte de « aens musculaire » distinct, nous rencontrons les diverses opinions que voici : 1. Il existe une faculté de ce genre : bien que l'on ait des notions opposées relativement à la source de ses impressions et à son siège. a. Ses impressions (devenant des symboles de « poids » ou de « ré^ A L'EXISTENCE D'UN SENS MUSCULAIRE. 2S3 sistance ») dérivent des muscles par les nerfs sensitifs, et son siège est du côté sensitif. Hamilton, Landry, etc* b. Ses impressions dérivent des muscles par les nerfs moteurs, et son siège est du côté moteur. I^wes. (Les opinions de Wundt et de Bain sont alliées à celle-ci, bien qu*en différant légèrement toutes deux). 2. Il n'existe pas de faculté de ce genre. a. Les impression^ donnant les notions de « poids » et de « résistance » et la connaissance de la position et des mouvements d'un membre, ne dérivent pas des muscles. Schiffet Trousseau, b. Les impressions en question ne dérivent qu'en partie des muscles ; et, comme celles qui ont cette origine sont pour la plupart du type « inconscient », il n'y a pas de faculté digne du nom de « sens musculaire, v Bastian. Depuis 1869, les principales contributions au sujet ont été apportées par Bernhardt(i4rcAfV fUr Psychiatrie, vol. III, 1872), Weir Mitchell (Injuries of NerveSf 1872), Ferrier (Functions of the Brain, 1876) ; et G.-H. Lewes (Brain, n«L Avril 1878). Bernhardt soutient l'opinion intermédiaire, que nos notions de « résistance » et de « poids » dérivent principalement d'une appréciation du degré d'énergie centrifuge partant du centre volitionnel, bien qu'en partie aussi d'impressions centripètes ordinaires. Weir Mitchell soutient aussi une doctrine intermédiaire ; il admet l'efficacité d'impressions centripètes ordinaires, venant de la peau, des articulations et des muscles ; bien qu'il s'appuie, en outre, sur une estimation d'un autre genre, plus distinctement reliée à l'acte volitionnel, soit de la façon suggérée par Scaliger et Wundt, soit d'après la manière soutenue par nous- mème en 1869. Voici ses propres paroles (lac, cit,, p. 358) : « Probablement alors, une partie des idées que nous sommes supposés acquérir par le sens musculaire coïncident réellement avec l'acte volitionnel originel, et sont néces- sitées par lui; ou, autrement dit, souides messages envoyés au sensorium, des ganglions spinaux qiCexcite chaque acte de volition motrice, » Weir Mitchell produit un grand nombre de faits, extrêmement intéressants, relativement aux sensations en question et à la faculté de rappeler des sentiments de mouvements attribués aux membres amputés ; faits qui portent sur ce sujet d'une manière fort intéressante. Il pense, et les faits sur lesquels il s'appuie semblent prouver, qu'il faut supposer quelque chose de plus que desimpies impressions sensitives ordinaires ; mais il admet que ces faits peuvent être tout aussi bien expliqués par des impressions venant au sensorium, des centres moteurs spinaux ainsi que des centres moteurs cérébraux. Ainsi donc, jusque-là, les opinions de Weir Mitchell sont étroitement d'accord avec celles précédemment exprimées par l'auteur, en 1869, bien que ceci fût apparemment inconnu à Mitchell à l'époque de la publication de son ouvrage. Les raisons, citées par l'auteur en 1869, semblaient tout à fait suffisantes pour l'autoriser à rejeter absolument la notion que des degrés de « résistance » et de «c poids » étaient appréciés par les centres moteurs cérébraux, plutôt qu'à l'aide d'impressions centripètes. Les motifs de ce rejet ont toutefois été fortifiés d'une manière très-marquée par Ferrier. Des expériences faites par 284 OPINIONS RELATIVES AU SENS MUSCULAIRE. lui-même et Lauder Brunton, montrent que Tappréciation musculaire de poids est indépendante deTactevolitionnel, puisqu'elle peut s'exercer lorsqu'on fait contracter artificiellement les muscles en les excitant par Télectricité (loc» cit., p. 228). Les faits fournis par certaines personnes souffrant ô^Hémianés- thésie complètef semblent aussi absolument opposés à la notion de Wundt^Bain, et LeweSy ainsi qu'aux opinions de ceux qui peuvent soutenir qu'une partie quelconque de nos notions sur les degrés de « résistance » dérive des centres volitionnels ou moteurs. Un cas de ce genre a été rapporté, il y a longtemps déjà, par Demeaux^. Quelques-uns de ses détails sont bien dignes d'être cités. Il y avait perte complète de la sensibilité (à la fois superficielle et profonde) dans le membre en mouvement, et Demeaux dit : « Elle mettait ses muscles en jeu sous l'influence de sa volonté, mais elle n'avait pas conscience des mou- vements qu'elle exécutait. Elle ne savait pas quelle était la position de son bras, — il lui était impossible de dire s'il était étendu ou fléchi. Si l'on disait à la malade de porter sa main à son oreille, elle exécutait immédiatement le mouvement ; mais, lorsque ma main était interposée entre la sienne et son oreille, elle n'en avait pas conscience; si j'arrêtais son bras au milieu du mouvement, elle ne s'en apercevait pas. Si je fixais, sans qu'elle pût s'en aper- cevoir, son bras sur le lit, et lui disais ensuite de porter sa main à sa tête, il y avait un moment d'effort; puis elle restait tranquille, croyant avoir exécuté le mouvement. Si je lui disais d'essayer encore, elle essayait avec plus de force de le faire ; et, aussitôt qu'elle était obligée de mettre en jeu les muscles du côté opposé (du corps), elle reconnaissait qu'on s'opposait au mouvement. » Dans le récent travail de G.-H. Lewes sur ce sujet, il n'apporte pas de nou- veaux arguments contre l'idée que des sensibilités passives peuvent suffire exclusivement ; et il les admet maintenant largement comme composants du groupe complexe d'impressions réstUtant de mouvements, et contribuant à former ce qu'on connaît sous le nom de a sens musculaire ». Et, sauf qu'il tient pour la doctrine que quelques sensibilités actives entrent dans ce même groupe complexe, ses vues actuelles sont presque entièrement d'accord avec celles exprimées par l'auteur dans le mémoire indiqué plus haut. La preuve que Lewes regarde comme favorable à l'existence d'un élément « actif » dans le sens musculaire peut, dans l'opinion de l'auteur, être mieux expliquée par la supposition, faite précédemment et à laquelle il est encore favorable, qu'il existe un groupe d'impressions « non senties » relatives aux états de tension des muscles, — et dont les composants sont plus ou moins distincts de ceux qui se révèlent dans la conscience. L'auteur a signalé par exemple, en 1869, que, dans 1' « ataxie locomotrice », l'ensemble des symptômes indiquant une diminution de ce qu'on appelle le « sens musculaire » était généralement proportionnel à l'altération des diffé- rents modes de sensibilité ordinaire du membre. Cependant, quelques cas plus exceptionnels de cette maladie, rapportés par Bazire, Trousseau, et autres ainsi que quelques cas remarquables cités par Landry, et dans lesquels, sans qu'il y eût anesthésiCf ces malades étaient réduits à un état fort semblable, pour ce qui regarde la motilité et les sensations résultant du mouvement, à celui de 1. Den Hernies Crurales. Thèse de Paris, 1843, p. 100, cité par Ferrier dans son oayrage Function* of the Brain, p. 181. IL K'EXISTE PAS DE FACULTÉ DE CE GENRE. 285 la malade de Demeaux, semblent montrer, d*une manière assez concluante, « que le cerveau est assisté dans Texécution des mouvements volontaires, par des impressions directrices de quelque nature, qui, différant déjà par leur mode d'origine des impressions provenant de la sensibilité ordinaire» cutanée et pro- fonde, peuvent différer encore davantage de celles-ci en ce qu'elles ne sont pas révélées à la conscience *..... Il y a clairement, dans ces cas-là, perte de quelque chose; d'un quelque chose qui sert de guide dans Texécution des mouvements volontaires, /nais dont l'absence peut être compensée par la sur- veillance du sens visuel ; et ceci est en grande partie la fonction que quelques physiologistes assignent au sens musculaire » Mon opinion est que ces impressions du sens musculaire, dont nous sommes ainsi obligés de supposer Pexistence, sont des impressions inconscientes; et que les impressions conscientes que Ton range ordinairement dans cette catégorie dérivent en réalité des modes de sensibilité ordinaire, cutanée ou profonde. » Les conclusions ainsi déduites, en 1869, sont pleinement confirmées par ce que nous savons aujourd'hui sur l'Hémianesthésie d'origine cérébrale. Le cas rapporté par Demeaux est tout à fait exceptionnel, puisque, dans beaucoup de cas de ce genre, il peut exister une anesthésie superficielle complète, et dans quelques-uns même une anesthésie profonde et superficielle, sans qu^il y ait aucuhe perturbation dans la coordination des mouvements du môme côté du corps, — phénomène vu plusieurs fois par l'auteur, et qui lui fut aussi récem- ment signalé par le professeur Charcot, à l'occasion de l'examen de quelques- unes de ses remarquables hémianesthésiques de la Salpétrière. Dans le cas de Demeaux (outre la sensibilité cutanée et profonde), ces impressions « incon- scientes » spéciales qui, ayant seules disparu chez les malades de Landry, produisaient une incoordination des mouvements en l'absence d'impressions visuelles, peuvent avoir été également empêchées. Son cas est donc surtout instructif en ce qu'il porte sur la question générale. Il y avait, chez cette femme, une disparition totale de cette sorte de connaissance que l'on a assignée au « sens musculaire », ou que l'on a supposée en dériver. Cette femme ignorait la position de ses membres et était inconsciente des mouvements quelconques qu'elle pouvait exécuter. Les centres volitionnels, les centres moteurs spi- naux, les nerrs moteurs et les muscles pouvaient être mis en jeu comme 1. Le trajet de ces impressions afférentes, au commencement et vers Li fin de leur course, était alors entièrement inconnu. Bt, en face des difficultés qne présentait le fait invoqué par Arnold, l'auteur hasarda la conjecture suivante : c Ainsi, Je suppose possible que, lorsque des changements moléculaires sont excités dans certaines cellules motrices spinales, comme résultat d'une impulsion volitionnellc, des impressions récurrentes pro- portionnelles peuvent être rapportées le long de certaines fibres, tirant leur origine des cellules motrices, et montant dans les colonnes postérieures de la moelle. • De cette manière, le cerveau pourrait recevoir des impressions pouvant se rapporter au degré d'ac- tivité des divers muscles, ou groupes de muscles, d'un membre. Mais le progrès de nos connaissances sur l'existence de nerfs « sensitifs » dans les muscles ne rend plus néces- saire une hypothèse de cette nature ; surtout l'auteur penchant à s'accorder avec Perrier pour l'interprétation qu'il donne (Functions ofthe Brairit p. 220) des expériences d'Arnold. Il n'éprouve plus aucune difficulté à croire que quelques-unes des fibres sensitives des muscles, qui entrent dans la moelle par les racines postérieures des nerfs spinaux, puissent transmettre au cerveau ces impressions c inconscientes », presque toujours présentes, qui nous guident d'une façon si matérielle dans l'exécution de tous nos mouvements. 286 OPINIONS RELATIVES AU SENS MUSCULAIRE. auparavant, — toutefois^ toutes les notions que l*on suppose ordinairement dériver du « sens musculaire » avaient disparu. Un état précisément semblable existait aussi dans un cas célèbre de ma- ladie de la moelle, associée à une anesthésie extrême, et qui fut observé par Spaeth et Schueppel (voy. Ziemssen*s Cyclopœdxa^ vol. XIII, p. 88). On peut citer la note suivante sur Tétat de ce malade : « Le sentiment de la pression et le sens de la force sont entièrement éteints dans l'extrémité supérieure. Le sens de la position de cette extrémité et de ses mouvements passifs est aussi complètement éteint. Les mouvements des extrémités supérieures sont puissants et parfaitement corrects; le malade mange sans aide, s*habille lui-même, etc., tant qu*il peut diriger ses actes par la vue. » On ne saurait trouver de meilleures preuves que cela et que ce que Ton a mentionné plus haut, pour montrer que la connaissance de la position de nos membres, de leurs mouvements et des états et degrés de contraction de nos muscles en général, ne dépend pas, comme le supposent Wundt, Bain et autres, d'impressions qui soient « concomitantes avec le courant centrifuge d'énergie nerveuse », ou qui coïncident avec lui. TABLE DES MATIÈRES DU SECOND VOLUME LIVRE IV LE CERVEAU ET L'INTE LLIGE NG E DE L'HOMME Pages. CHAPITRE XIX Développement dd Cerveau humain pendant la vie utérine i CHAPITRE XX Volume et poids du Cerveau humain 14 CHAPITRE XXI Configuration externe du Cerveau humain 3G CHAPITRE XXII De l'intelligence animale a l^intelligence humaine 64 CHAPITRE XXIII Structure interne du Cerveau humain 77 CHAPITRE XXIV Relations fonctionnelles des principales parties du Cerveau 110 CHAPITRE XXV La Phrénologie ancienne et nouvelle 141 CHAPITRE XXVI Volonté et mouvements volontaires . , 169 288 TABLE DES MATIÈRES. a Pages. CHAPITRE XXVII SUBSTRATA CÉRÉBRAUX DE LA PENSÉE 201 CHAPITRE XXVIII La Parole, la Lectorb et l'Écriture, comme processus me.ntaux et phy- siologiques 211 CHAPITRE XXIX Relations cérébrales de la Parole et de la Pensée 220 CHAPITRE XXX. Autres problèmes relatifs a la localisation des fonctions cérébrales supérieures 265 APPENDICE Opinions relatives a l'existence et a la nature d*un sens musculaire. . 278 FIN DE LA TABLE DES MATIERES. PAUIS.— Iiupr. J. CLAYE. — A. <)L'a::tià' «t G*, ruo Si>Ccnolu Le cçrvea penae i v. ^^ ^^ M^ A^ ^ 1 organe de la 2l* QL933- B32 DIQLQgY LIBRARY -^ ■* ' — V 302228 f. 2. UNIVERSITY OF CALIFORNIA UBRARY •• •••».- ** . ■ ^^ « « ^ *